Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision du maire de Saint-Joseph rejetant implicitement sa demande du 19 décembre 2013 tendant à son intégration directe dans le cadre d'emploi des conservateurs territoriaux de bibliothèques et à la reconstitution de sa carrière en cette qualité.
Par un jugement n° 1400330 du 13 avril 2017, le tribunal administratif de la Réunion a annulé cette décision implicite et enjoint à la commune de Saint-Joseph de procéder, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, à l'intégration de Mme A... dans le cadre d'emploi des conservateurs territoriaux de bibliothèques et à la reconstitution de sa carrière à compter du 25 juillet 2001.
Par un arrêt n° 18BX00919 du 1er avril 2019, la cour administrative d'appel de Bordeaux, saisie par Mme A... sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, a enjoint à la commune de Saint-Joseph de régulariser la situation de l'intéressée au regard de sa rémunération et de ses droits à pension dans un délai de quatre mois à compter de la notification de l'arrêt.
Procédure devant la cour :
Mme A... a présenté, le 7 août 2019, une demande en vue d'obtenir l'exécution de l'arrêt n° 18BX00919 du 1er avril 2019.
Par une ordonnance du 1er février 2021, la présidente de la cour administrative d'appel de Bordeaux a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juin 2021, la commune de Saint-Joseph, représentée par le cabinet Colin-Stoclet, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme A... une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la fixation du montant de l'indemnité correspondant au rappel indiciaire de traitement à la suite de la reconstitution de carrière est un litige distinct ; d'une part, Mme A... est seulement fondée, en l'absence de service fait, à obtenir la réparation du préjudice qu'elle a réellement subi et non un rappel de traitement ; Mme A... n'a pas occupé de poste de conservateur territorial de bibliothèque depuis le 25 juillet 2001 ; ce litige indemnitaire est nécessairement distinct du litige d'exécution de l'arrêt qui statue sur un litige d'excès de pouvoir ; d'autre part, la contestation des arrêtés des 28 mai 2018 et 5 juillet 2019 procédant à sa reconstitution de carrière relève d'un litige distinct et a d'ailleurs été rejetée par jugement du 31 mars 2021 ;
- à titre subsidiaire, Mme A... n'établit pas que le montant qui lui a été versé serait erroné ;
- c'est à juste titre que la majoration du traitement brut de base des fonctionnaires affectés à La Réunion n'a pas été incluse dans le montant de l'indemnité dès lors qu'il s'agit d'une indemnité attachée à l'exercice des fonctions.
Par un mémoire en réplique enregistré le 6 juillet 2021, Mme A..., représentée par la selarl Horus avocats, demande à la cour :
1°) d'enjoindre au maire de la commune de Saint-Joseph de procéder à l'exécution de l'arrêt n° 18BX00919 dans un délai de huit jours sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Joseph la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que le montant de l'indemnité versée ne comprend pas l'indemnité de " vie chère " qui doit être versée à l'ensemble des fonctionnaires titulaires des départements d'outre-mer et à laquelle elle a droit depuis le 25 juillet 2001.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
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Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D... B...,
- les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public,
- et les observations de Me Przybyszewski, substituant le cabinet Horus avocats, représentant Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., recrutée par la commune de Saint-Joseph en 1989 en qualité d'agent non titulaire pour exercer les fonctions d'employée administrative, a été affectée à la bibliothèque municipale à compter de l'année 1992, y exerçant les fonctions de responsable depuis l'année 1994. A la suite de plusieurs démarches demeurées infructueuses, elle a demandé, le 19 décembre 2013, au maire de Saint-Joseph, son intégration directe dans le cadre d'emploi des conservateurs territoriaux de bibliothèques et la reconstitution de sa carrière en cette qualité. Le silence de l'administration a fait naître le 19 février 2014 une décision implicite de rejet que, par un jugement n° 1400330 du 13 avril 2017, le tribunal administratif de la Réunion a annulée avant d'enjoindre à la commune de Saint-Joseph de procéder à l'intégration de Mme A... dans le cadre d'emploi des conservateurs territoriaux de bibliothèques et à la reconstitution de sa carrière à compter du 25 juillet 2001. L'appel formé contre ce jugement a été rejeté par un arrêt n° 17BX01970, 17BX01871 rendu par la cour administrative d'appel de Bordeaux le 1er avril 2019. Par un arrêt n° 18BX00919 du même jour, la même cour, saisie par Mme A... sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, a enjoint à la commune de Saint-Joseph de régulariser la situation de l'intéressée au regard de sa rémunération et de ses droits à pension. Mme A... demande à la cour d'enjoindre au maire de la commune de Saint-Joseph de procéder à l'exécution de ce dernier arrêt devenu définitif à la suite de la décision n° 431992 du 19 décembre 2019 par laquelle le Conseil d'Etat n'a pas admis le pourvoi en cassation dont il était saisi.
2. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. / Toutefois, en cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte. ".
3. Par l'article 2 de son jugement n° 1400330 du 13 avril 2017, le tribunal administratif de La Réunion a enjoint à la commune de Saint-Joseph de procéder, dans un délai de deux mois à compter de la notification, à l'intégration de Mme A... dans le cadre d'emploi des conservateurs territoriaux de bibliothèques et à la reconstitution de sa carrière à compter du 25 juillet 2001. Par un arrêt n° 18BX00919 du 1er avril 2019, la cour administrative d'appel de Bordeaux a constaté l'absence d'exécution intégrale de ce jugement et enjoint par conséquent à la commune de Saint-Joseph de régulariser la situation de Mme A... au regard de sa rémunération et de ses droits à pension dans un délai de quatre mois.
4. En vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre. Sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité.
5. Pour l'évaluation du montant de l'indemnité due, doit être prise en compte la perte du traitement ainsi que celle des primes et indemnités dont l'intéressé avait, pour la période en cause, une chance sérieuse de bénéficier, à l'exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser les frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions. Enfin, il y a lieu de déduire, le cas échéant, le montant des rémunérations que l'agent a pu se procurer par son travail au cours de la période d'éviction.
6. Il résulte de l'instruction que la commune de Saint-Joseph a versé à Mme A..., le 9 octobre 2019, la somme de 130 035,29 euros au titre de sa rémunération, et à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) la somme de 176 820,93 euros au titre de ses droits à pension. Si Mme A... soutient que l'indemnité versée ne comprend pas la majoration du traitement brut de base pour les fonctionnaires affectés à La Réunion, cette majoration prévue par la loi du 3 avril 1950 concernant les conditions de rémunération et les avantages divers accordés aux fonctionnaires en service dans les départements de la Martinique de la Guadeloupe, de la Guyane et de la Réunion, ne peut être prise en compte, dès lors qu'elle est seulement destinée à compenser des charges liées à l'exercice effectif des fonctions. Or, Mme A... n'a pas effectivement exercé les fonctions au titre desquelles elle estime être en droit de percevoir la majoration du traitement brut de base. Par suite, la commune de Saint-Joseph doit être regardée comme ayant pleinement exécuté l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 1er avril 2019.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la demande de Mme A... tendant à ce qu'il soit enjoint sous astreinte au maire de la commune de Saint-Joseph d'exécuter l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 1er avril 2019 doit être rejetée.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Joseph, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme A... la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Saint-Joseph au même titre.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Mme A... versera à la commune de Saint-Joseph la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et à la commune de Saint-Joseph.
Délibéré après l'audience du 20 juin 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Karine Butéri, présidente,
M. Olivier Cotte, premier conseiller,
Mme Caroline Gaillard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 juillet 2022.
Le rapporteur,
Olivier B...
La présidente,
Karine Butéri
La greffière,
Catherine Jussy
La République mande et ordonne au préfet de La Réunion en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21BX00349