Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme F... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler le certificat d'urbanisme négatif du 3 avril 2018 que lui a délivré le maire de Les Peintures, portant sur la construction d'une maison individuelle de 150 mètres carrés sur un terrain situé au n° 28 lieu-dit Grandes Vignes Beaulieu.
Par un jugement n° 1804209 du 1er octobre 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 30 novembre 2020, Mme C..., représentée par la SELAS Cazamajour et UrbanLaw, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 1er octobre 2020 ;
2°) d'annuler le certificat d'urbanisme négatif du 3 avril 2018 du maire de Les Peintures ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Les Peintures la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- il n'est pas justifié de la publication ou de la transmission au contrôle de légalité de l'arrêté du 8 février 2017 donnant délégation de signature au signataire de l'arrêté litigieux ;
- les règles de distance de l'arrêté du 8 décembre 2016 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées pour la protection de l'environnement soumises à déclaration sous la rubrique n° 2120 n'étaient pas applicables aux installations déclarées avant son entrée en vigueur, alors que le chenil proche de son projet a été déclaré en préfecture en 1988 ;
- il n'est pas justifié de l'édification régulière des bâtiments d'élevage canin proches de son projet ;
- d'autres constructions ont été autorisées à moins de 100 mètres de ce chenil, et une dérogation aux règles d'implantation existe entre les propriétaires des fonds voisins.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 décembre 2021, la commune de Les Peintures, représentée par Me Ruffié, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de Mme C... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens de Mme C... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de l'urbanisme ;
- l'arrêté du 08 décembre 2006 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées soumises à déclaration sous la rubrique n° 2120 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E... B...,
- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,
- et les observations de Me Maginot, représentant Mme C..., et de Me Hardouin, représentant la commune de Les Peintures.
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision du 3 avril 2018, le maire de Les Peintures a délivré à Mme C... un certificat d'urbanisme négatif pour la construction d'une maison d'habitation de 150 mètres carrés sur une parcelle cadastrée section ZM n° 102, d'une superficie de 1 853 mètres carrés, située lieu-dit " Grandes Vignes Beaulieu ". Mme C... relève appel du jugement du 1er octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce certificat d'urbanisme négatif.
Sur la régularité du jugement :
2. Si Mme C... soutient que le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé, en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative, elle n'apporte aucune précision sur ce défaut de motivation, alors qu'il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Bordeaux a expressément répondu aux moyens contenus dans le mémoire produit par la requérante. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de ce jugement doit être écarté.
Sur la légalité du certificat d'urbanisme négatif du 3 avril 2018 :
3. Le maire de la commune de Les Peintures a refusé de délivrer le certificat d'urbanisme opérationnel demandé par Mme C... au motif que la maison individuelle envisagée se situant à environ 30 mètres d'un chenil de plus de 10 chiens soumis à la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, le projet méconnaissait le principe de réciprocité de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime, ainsi que l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'État dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement (...) "
5. Il ressort du certificat d'affichage en mairie de l'arrêté du 8 février 2017 portant délégation de signature à M. A... D..., premier adjoint au maire de Les Peintures, que ledit arrêté a été affiché à compter du 10 février 2017 pour une durée de deux mois en mairie. Par ailleurs, cet arrêté comporte la mention, qui fait foi jusqu'à preuve du contraire, " Réception par le préfet : 10/02/2017 ", attestant de sa transmission au représentant de l'État. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que l'auteur du certificat d'urbanisme négatif en litige n'était pas compétent.
6. En second lieu, aux termes de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime, dans sa version alors applicable : " Lorsque des dispositions législatives ou réglementaires soumettent à des conditions de distance l'implantation ou l'extension de bâtiments agricoles vis-à-vis des habitations et immeubles habituellement occupés par des tiers, la même exigence d'éloignement doit être imposée à ces derniers à toute nouvelle construction et à tout changement de destination précités à usage non agricole nécessitant un permis de construire, à l'exception des extensions de constructions existantes (...) ". Aux termes l'article 1er de l'arrêté du 8 décembre 2006 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées pour la protection de l'environnement soumises à déclaration sous la rubrique n° 2120 : " Les installations classées soumises à déclaration sous la rubrique n° 2120 (établissements d'élevage, vente, transit,... de chiens) sont soumises aux dispositions de l'annexe I (...) ". Aux termes de l'article 2 du même arrêté : " Les dispositions de l'annexe I sont applicables aux installations déclarées postérieurement à la date de publication du présent arrêté au Journal officiel, augmentée de quatre mois. Les dispositions de cette annexe sont applicables aux installations existantes, déclarées avant la date de publication du présent arrêté au Journal officiel augmentée de quatre mois, dans les conditions précisées en annexe II (...) ". Aux termes de l'article 2.1 de l'annexe I de cet arrêté, relatif aux règles d'implantation : " Les bâtiments d'élevage, les annexes et les parcs d'élevage sont implantés : à au moins 100 mètres des habitations des tiers (à l'exception des logements occupés par des personnels de l'installation) ou des locaux habituellement occupés par des tiers, des stades ou des terrains de camping agréés, ainsi que des zones destinées à l'habitation par des documents d'urbanisme opposables aux tiers (...) ". Aux termes de l'article 2.1 bis : " Les dispositions du 2.1. ne s'appliquent, dans le cas des extensions des installations en fonctionnement régulier, qu'aux nouveaux bâtiments d'élevage ou parcs d'élevage, ou à leurs annexes nouvelles. (...) ". Enfin, aux termes de l'annexe II de ce même arrêté : " Les dispositions sont applicables aux installations existantes selon le calendrier suivant : (...) au 1er octobre 2007 : 2. Implantation - aménagement (sauf 2.1 et 2.3) (...) Les dispositions ne figurant pas dans le tableau ci-dessus ne sont pas applicables aux installations existantes ".
7. Il résulte de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime que les règles de distance imposées, par rapport notamment aux habitations existantes, à l'implantation d'un bâtiment agricole en vertu en particulier de la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement sont également applicables, par effet de réciprocité, à la délivrance du permis de construire une habitation située à proximité d'un tel bâtiment agricole, au nombre desquels figurent les chenils. Il appartient ainsi à l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire un bâtiment à usage d'habitation de vérifier le respect des dispositions législatives ou réglementaires fixant de telles règles de distance, quelle qu'en soit la nature.
8. Par ailleurs, eu égard à l'objet des dispositions de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime, notamment du parallélisme qu'elles établissent entre les exigences pesant sur l'implantation ou l'extension des bâtiments agricoles et sur les nouvelles constructions à usage non agricole, la circonstance que les dispositions de l'arrêté du 8 décembre 2006 ne prévoient, pour les bâtiments d'élevage existants, l'application des règles de distance qu'aux nouveaux bâtiments d'élevage en cas d'extensions des installations en fonctionnement régulier, ou à leurs annexes nouvelles, est sans incidence sur les conditions d'application des règles de distance aux nouvelles constructions à usage non agricole. Ainsi, dès lors que les règles fixées par l'arrêté du 8 décembre 2006 étaient en vigueur à la date de la demande de certificat d'urbanisme de Mme C..., la règle fixée par l'article 2.1 de l'annexe I de l'arrêté du 8 décembre 2006 prévoyant une distance minimale de 100 mètres entre les bâtiments d'élevage et les habitations des tiers était applicable au certificat d'urbanisme sollicité, alors même que les bâtiments destinés à l'élevage de chiens à proximité desquels se situent le projet en cause ont été édifiés en 1988. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le projet de la requérante, qui consiste en la construction d'une maison d'habitation, est situé à environ 30 mètres d'un élevage de plus de 10 chiens, qui a le caractère d'une installation classée pour la protection de l'environnement. Si Mme C... soutient qu'il n'est pas justifié de l'édification régulière de ces bâtiments d'élevage canin, il ressort au contraire tant de la décision en litige que des pièces versées au dossier par l'intéressée elle-même que cette activité a fait l'objet, le 1er septembre 1988, d'une déclaration régulière pour un élevage de chiens de plus de 10 et moins de 50 animaux au titre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement. Par suite, le maire de Les Peintures n'a pas commis d'erreur de droit en opposant à Mme C..., par effet de réciprocité, les règles issues de l'arrêté du 8 décembre 2006 en application de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime. A cet égard, les circonstances que d'autres maisons d'habitation auraient été édifiées à moins de 100 mètres du chenil en cause, et que l'exploitant du chenil aurait édifié son bâtiment en 1988 avec l'accord d'un propriétaire d'une habitation située à moins de 100 mètres, sont sans incidence sur la légalité du certificat d'urbanisme négatif délivré à Mme C.... Au demeurant, les dérogations aux règles de distance pour l'implantation des bâtiments agricoles sont limitativement énumérées aux autres alinéas de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime et ne peuvent résulter de conventions entre particuliers.
9. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Les Peintures, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... une somme 1 500 euros à verser à la commune de Les Peintures, en application de ces mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Mme C... versera à la commune de Les Peintures une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... C... et à la commune de Les Peintures.
Délibéré après l'audience du 9 juin 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Fabienne Zuccarello, présidente,
Mme Christelle Brouard-Lucas, première conseillère,
Mme Charlotte Isoard, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022.
La rapporteure,
Charlotte B...La présidente,
Fabienne Zuccarello
La greffière,
Marion Azam Marche
La République mande et ordonne à la préfète de la Gironde en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 20BX03888 2