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23/06/2022 | FRANCE | N°21BX00262

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 23 juin 2022, 21BX00262


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 28 mars 2019 par laquelle le maire de Civrac-de-Blaye a rejeté son recours gracieux sollicitant le raccordement au réseau électrique de son terrain situé au lieudit "La Gaucherie Ouest".

Par un jugement n° 1902575 du 23 novembre 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 janvier 2021 et le 26 juillet

2021, M. C..., représenté par Me Bousquet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 28 mars 2019 par laquelle le maire de Civrac-de-Blaye a rejeté son recours gracieux sollicitant le raccordement au réseau électrique de son terrain situé au lieudit "La Gaucherie Ouest".

Par un jugement n° 1902575 du 23 novembre 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 janvier 2021 et le 26 juillet 2021, M. C..., représenté par Me Bousquet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 23 novembre 2020 ;

2°) d'annuler la décision du 28 mars 2019 du maire de Civrac-de-Blaye ;

3°) d'enjoindre à la commune de Civrac-de-Blaye de faire droit à sa demande de raccordement et de faire procéder à l'installation du compteur aux frais de la commune dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Civrac-de-Blaye la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le maire a commis une erreur de droit puisque l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme ne vise que les raccordements définitifs de constructions illégalement construites et non l'alimentation d'un terrain comme en l'espèce ; seule la loi du 5 juillet 2000 régit sa situation ;

- les bâtiments ont été édifiés en 1970, donc il n'est pas responsable de leur construction illégale d'autant qu'ils figurent au cadastre de 1981 et 1982 et il n'envisage ni construction ni rénovation des bâtiments anciens ; il souhaite seulement entreposer sa caravane ;

- la décision attaquée est entachée de détournement de pouvoir et porte atteinte à son droit de propriété protégé par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 30 juin 2021 et le 4 janvier 2022, la commune de Civrac-de-Blaye, représentée par Me Gauci, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la requête est irrecevable à défaut de moyen d'appel et qu'aucun des moyens n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... E...,

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me Bousquet, représentant M. C..., et de Mme A..., élève avocate, sous la responsabilité de Me Navarro, représentant la commune de Civrac-de-Blaye.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a acquis en décembre 2017 un terrain cadastré ZR n°12, d'une superficie de 9 480 m2, situé au lieudit "La Gaucherie Ouest" sur la commune de Civrac-de-Blaye. Il a fait procéder à l'installation, par la société Enedis, d'un compteur électrique définitif au mois d'août 2018, mais celui-ci a été ensuite retiré à la demande du maire de la commune. M. C... a formé un recours gracieux mais, par une décision du 28 mars 2019, le maire de Civrac-de-Blaye a rejeté sa demande de raccordement au réseau électrique. M. C... a saisi le tribunal administratif de Bordeaux d'une demande d'annulation de cette décision du 28 mars 2019 et il relève appel du jugement de ce tribunal du 23 novembre 2020 rejetant sa demande.

2. Aux termes de l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme : " Les bâtiments, locaux ou installations soumis aux dispositions des articles L. 421-1 à L. 421-4 ou L. 510-1, ne peuvent, nonobstant toutes clauses contractuelles contraires, être raccordés définitivement aux réseaux d'électricité, d'eau, de gaz ou de téléphone si leur construction ou leur transformation n'a pas été, selon le cas, autorisée ou agréée en vertu de ces dispositions ".

3. Il résulte des dispositions précitées que le maire peut s'opposer, dans le cadre de ses pouvoirs de police spéciale, et alors même que l'infraction pénale constituée par la construction sans autorisation serait prescrite, à un raccordement définitif aux réseaux publics des bâtiments, locaux ou installations dont la construction ou la transformation n'a pas été régulièrement autorisée ou agréée selon la législation en vigueur à la date de leur édification ou de leur transformation, ni régularisée depuis lors. Il incombe au juge de l'excès de pouvoir d'apprécier, au regard des éléments apportés par le pétitionnaire, et le cas échéant des éléments que lui soumet l'administration, si la construction dont le raccordement aux réseaux est demandé peut être regardée, compte tenu de la date de son édification et des exigences applicables à cette date en matière d'autorisation de construire, comme ayant été régulièrement édifiée.

4. En premier lieu, d'une part, il ressort des pièces du dossier que l'acte de vente par lequel M. C... a acquis la parcelle cadastrée ZR n°12, classée en zone N du plan local d'urbanisme de la commune, désigne une parcelle de terre sans mentionner de construction. Si M. C... fait valoir que les bâtiments édifiés sur la parcelle sont anciens et pourraient avoir été édifiés régulièrement, il ressort des pièces du dossier, et notamment des attestations produites par le requérant, qu'ils ont été construits au plus tôt en 1976, après l'entrée en vigueur de la loi relative à l'urbanisme du 15 juin 1943, et étaient ainsi soumis à la formalité du permis de construire alors même que les règles d'urbanisme alors en vigueur n'auraient pas interdit l'édification de bâtiments dans ce secteur. A défaut de détenir une telle autorisation, les bâtiments édifiés sur la parcelle de M. C... l'ont été illégalement. La circonstance que M. C... ne soit pas l'auteur de ces constructions et qu'il n'ait pas sollicité d'autorisation d'urbanisme pour la construction, la rénovation ou l'agrandissement de constructions n'est pas de nature à lui conférer un droit au raccordement électrique.

5. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, et notamment des photographies produites en défense ainsi que du procès-verbal d'infraction dressé le 20 juin 2019 à l'encontre de M. C..., que celui-ci a procédé à d'importants travaux de tranchées sur toute la surface du terrain en cause, démontrant l'intention, qu'il a d'ailleurs manifestée devant l'officier de police judiciaire, d'alimenter les bâtiments en réseaux divers. Aussi, s'il persiste à soutenir qu'il n'entendait alimenter en électricité qu'une caravane et des portails coulissants, et qu'ainsi la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage l'y autorisait, les éléments du dossier établissent qu'il envisageait d'édifier ou de rénover des constructions. Par suite, c'est à bon droit que le maire, après avoir estimé que la demande de raccordement formulée par M. C... visait les bâtiments édifiés illégalement sur la parcelle en cause, a rejeté cette demande par application de l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales tel qu'amendé par le protocole n° 11 : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes. ".

7. La décision attaquée, qui relève de la police de l'urbanisme, tend seulement à interdire le raccordement définitif à un réseau d'alimentation électrique de constructions non autorisées. Elle répond en outre à des motifs d'intérêt général tenant à la protection de l'environnement, à assurer le respect des règles d'utilisation des sols en faisant obstacle à ce que le raccordement de propriétés aux réseaux aboutisse à conforter des situations irrégulières et à la sécurité. Dans ces conditions, elle ne porte aucune atteinte illégale au droit de propriété du requérant.

8. Enfin, en dernier lieu, si M. C... fait valoir que la décision attaquée a pour seul but de l'empêcher d'installer une caravane sur son terrain en raison de son appartenance à la communauté des gens du voyage et des forains, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi par les pièces du dossier.

9. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 28 mars 2019. Par suite, ses conclusions tendant à l'annulation de ce jugement doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction et celles tendant au bénéfice de frais liés à l'instance.

10. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. C... la somme de 1 500 euros qu'il versera à la commune de Civrac-de-Blaye au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : M. C... versera la somme de 1 500 euros à la commune de Civrac-de-Blaye au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et à la commune de Civrac-de-Blaye.

Délibéré après l'audience du 25 mai 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2022.

La rapporteure,

Fabienne E... La présidente,

Marianne HardyLa greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne à la préfète de la Gironde en ce qui la concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX00262


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX00262
Date de la décision : 23/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Fabienne ZUCCARELLO
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : BOUSQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-06-23;21bx00262 ?
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