Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile immobilière (SCI) Le Bord de l'Eau a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 6 avril 2018 par lequel le maire de Gauriac a refusé de lui délivrer un permis de construire pour la réalisation d'une pergola sur une parcelle cadastrée section AB n° 316 située 8 rue du Port, au lieu-dit " Roque de Thau ", ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux.
Par un jugement n° 1804047 du 9 juillet 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 9 septembre 2020, le 17 février 2022 et le 16 mai 2022, la SCI Le Bord de l'Eau, représentée par la SCP Cazcarra et Jeanneau, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 9 juillet 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de Gauriac du 6 avril 2018 ;
3°) d'enjoindre au maire de Gauriac de lui délivrer le permis de construire sollicité dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Gauriac la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que les premiers juges n'ont pas relevé le moyen d'ordre public tiré de l'incompétence négative du maire de Gauriac, qui s'est cru lié par l'avis de l'architecte des Bâtiments de France ;
- le maire de Gauriac s'est cru lié par l'avis de l'architecte des Bâtiments de France ;
- l'arrêté litigieux est entaché d'une erreur d'appréciation au regard de l'article UA 11 du plan local d'urbanisme et de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme dès lors que le projet ne dénature pas l'espace dans lequel il s'inscrit et ne porte pas atteinte au caractère des lieux avoisinants, et qu'une construction similaire est située à environ dix mètres.
Par des mémoires en défense enregistrés le 23 juillet 2021 et le 14 avril 2022, la commune de Gauriac, représentée par Me Tissot, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la SCI Le Bord de l'Eau la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la requête de la SCI Le Bord de l'Eau est irrecevable dès lors qu'elle n'a pas respecté l'obligation de recours préalable devant le préfet de région contre l'avis de l'architecte des Bâtiments de France ;
- les moyens de l'appelante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B... A...,
- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,
- et les observations de Me Safar, représentant la SCI Le Bord de l'Eau.
Une note en délibéré présentée pour la SCI Le Bord de l'Eau par la SCP Cazcarra et Jeannot Avocats a été enregistrée le 27 mai 2022.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 6 avril 2018, le maire de Gauriac a refusé de délivrer à la SCI Le Bord de l'Eau un permis de construire pour la réalisation d'une pergola sur une parcelle cadastrée section AB n° 316 située 8 rue du Port au lieu-dit " La Roque de Thau ". La SCI Le Bord de l'Eau relève appel du jugement du 9 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Si la SCI Le Bord de l'Eau soutient que les premiers juges ont omis de soulever d'office le moyen tiré de ce que le maire de Gauriac se serait cru en situation compétence liée, l'omission qu'aurait ainsi commise le tribunal administratif a trait au bien-fondé du jugement attaqué et demeure, par suite, sans incidence sur sa régularité. Dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué sur ce point doit être écarté.
Sur la légalité de l'arrêté du 6 avril 2018 :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-1 du code de l'urbanisme : " Lorsque les constructions ou travaux mentionnés aux articles L. 421-1 à L. 421-4 sont soumis, en raison de leur emplacement, de leur utilisation ou de leur nature, à un régime d'autorisation ou à des prescriptions prévus par d'autres législations ou réglementations que le code de l'urbanisme, le permis de construire, le permis d'aménager, le permis de démolir ou la décision prise sur la déclaration préalable tient lieu d'autorisation au titre de ces législations ou réglementations, dans les cas prévus par décret en Conseil d'Etat, dès lors que la décision a fait l'objet d'un accord de l'autorité compétente ". Et aux termes de l'article R. 425-30 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est situé dans un site inscrit, la demande de permis ou la déclaration préalable tient lieu de la déclaration exigée par l'article L. 341-1 du code de l'environnement. (...)/La décision prise sur la demande de permis ou sur la déclaration préalable intervient après consultation de l'architecte des Bâtiments de France ".
4. En vertu de l'article R. 425-30 du code de l'urbanisme cité ci-dessus, pris pour l'application de l'article L. 425-1 du même code, l'architecte des Bâtiments de France émet, lorsque le terrain d'assiette d'un projet de construction est situé dans un site inscrit, un avis qui ne lie pas l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire. En l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire de Gauriac, qui a opposé plusieurs motifs à la SCI Le Bord de l'Eau pour refuser de lui délivrer le permis de construire demandé, se serait estimé lié par l'avis défavorable émis le 9 mars 2018 par l'architecte des Bâtiments de France, dont il s'est seulement approprié les termes. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le maire doit être écarté.
5. En second lieu, selon l'article UA 11 du plan local d'urbanisme de Gauriac : " Aspect extérieur des constructions et aménagement de leurs abords - 1. Dispositions générales : (...) Les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions, ou l'aspect extérieur des bâtiments à édifier ou à modifier, ne devront pas être de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains, ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ". Et aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ". Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel ou urbain au sens de cet article, qui est repris par l'article UA 11 du plan local d'urbanisme, il appartient à l'autorité administrative d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.
6. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet de la SCI Le Bord de l'Eau se situe dans le site inscrit de la corniche de Gironde et donne directement vue sur ce fleuve. Ce terrain est séparé par la rue du Port d'un nombre limité de maisons d'habitation en pierre, de type traditionnel, qui font face à ce fleuve. D'autre part, le projet de la société consiste en l'édification d'une pergola présentant une structure métallique afin d'abriter une aire de stationnement. Il ressort des pièces du dossier que cette construction sera particulièrement visible, alors même qu'elle a vocation à être recouverte d'éléments végétaux, dès lors que, située en bout de parcelle, elle ne s'adosse à aucun bâtiment. L'architecte des Bâtiments de France a d'ailleurs estimé, dans son avis du 9 mars 2018, que ce projet, " très visible " ne s'intègre pas dans l'environnement des bords de Gironde et vient " en rupture avec le paysage naturel sensible ". Si la SCI le Bord de l'Eau verse au dossier des éléments afin de démontrer que la construction en cause ne serait pas visible depuis le fleuve, il n'en demeure pas moins que cette structure sera apparente depuis les abords de la Gironde et ne peut ainsi être regardée comme étant située en " seconde ligne ", comme le soutient la société requérante. Ainsi, eu égard à sa situation et son aspect extérieur, cet ouvrage porte atteinte au paysage inscrit dans lequel il s'insère. Par suite, le maire de Gauriac n'a pas commis d'erreur d'appréciation en refusant, pour ce motif, de délivrer un permis de construire à la SCI Le Bord de l'Eau. A cet égard, la circonstance que d'autres structures destinées à accueillir des aires de stationnement ont été construites un peu plus loin aux abords de la route départementale 669 est sans incidence sur la légalité de l'arrêté en litige.
7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune de Gauriac, que la SCI Le Bord de l'Eau n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Sur l'injonction :
8. Eu égard à ses motifs, le présent arrêt n'implique aucune mesure particulière d'exécution. Les conclusions de la SCI Le Bord de l'Eau à fin d'injonction doivent, par suite, être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
9. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Gauriac, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la SCI le Bord de l'Eau au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D'autre part, il n'y pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI Le Bord de l'Eau une somme à verser à la commune de Gauriac à ce titre.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SCI le Bord de l'Eau est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Gauriac présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Le Bord de l'Eau et à la commune de Gauriac.
Délibéré après l'audience du 25 mai 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, présidente,
Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,
Mme Charlotte Isoard, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2022.
La rapporteure,
Charlotte A...La présidente,
Marianne Hardy
La greffière,
Marion Azam Marche
La République mande et ordonne à la préfète de la Gironde en ce qui la concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 20BX03027 2