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24/05/2022 | FRANCE | N°20BX02483

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 24 mai 2022, 20BX02483


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Distrivit a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de prononcer la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période de janvier 2013 à juin 2016 en droits et pénalités.

Par un jugement n° 1900329 du 11 juin 2020, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 3 août 2020, 19 février 2021 et 21 mars 2022, la société Distrivit re

présentée par Mes Lydia Medjebar et Arnaud Moraine, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Distrivit a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de prononcer la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période de janvier 2013 à juin 2016 en droits et pénalités.

Par un jugement n° 1900329 du 11 juin 2020, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 3 août 2020, 19 février 2021 et 21 mars 2022, la société Distrivit représentée par Mes Lydia Medjebar et Arnaud Moraine, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 11 juin 2020 ;

2°) à titre principal de prononcer la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période de janvier 2013 à juin 2016 en droits et pénalités ;

3°) à titre subsidiaire de transmettre à la Cour de justice de l'Union européenne la question préjudicielle suivante " Un Etat membre est-il autorisé à mettre en place un régime spécifique de TVA sur la marge, qui déroge de facto aux règles générales de détermination de la base d'imposition, sans définir les termes qui permettent d'opérer la soustraction nécessaire à la détermination de ladite marge " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'article 298 sexdecies du code général des impôts ne définit ni le fait générateur ni l'assiette, notamment la marge commerciale à retenir afin de permettre une collecte de la TVA ; en omettant volontairement de préciser les modalités de détermination de ce qui constituerait la " marge commerciale ", le législateur rend impossible le calcul de la base d'imposition d'une quelconque TVA ; si le législateur avait laissé le soin à l'administration fiscale de déterminer arbitrairement un prix de revient auquel la taxe devrait être appliquée, le législateur méconnaitrait la compétence qui lui est dévolue par l'article 34 de la Constitution et porterait ainsi atteinte à plusieurs droits et libertés que la Constitution et la déclaration des droits l'Homme et du Citoyen de 1789 protègent tels que le principe d'égalité devant les charges publiques et la loi fiscale ; l'absence de dispositions spécifiques tendant à la détermination de la base d'imposition minorée de la " marge commerciale ", laquelle reste à définir, suffit à justifier l'absence de collecte de TVA par la société Distrivit sur les ventes subséquentes ;

- il ressort clairement des débats parlementaires relatifs à la loi n° 76-448 du 24 mai 1976, portant aménagement du monopole des tabacs manufacturés, et plus particulièrement de la deuxième séance du 29 avril 1976, que les objectifs de ladite loi sont notamment la volonté d'une réforme à coûts constants n'impactant pas le prix de vente au détail et de préserver les finances des collectivités locales de sorte que la soumission de la revente des tabacs importés dans le DOM-TOM irait à l'encontre de ces objectifs puisqu'elle aurait pour finalité principale de générer un coût supplémentaire supporté par les négociants et/ou les consommateurs ;

- en sa qualité de négociant grossiste, lorsqu'elle revend le tabac importé sur le marché local, elle n'a pas à collecter la TVA sur ces ventes conformément à la doctrine administrative 3G-261 du 1er septembre 1998 qui prévoit que les négociants grossistes n'ont pas à être recherchés en paiement de la taxe ; lors de la création de sa nouvelle base doctrinale BOFIP en septembre 2012, l'administration a fait le choix de conserver la doctrine 3G-261 du 1er septembre 1998 sous le numéro BOI-TVA-GEO-20-50-20120912 n° 10 ce qui témoigne de sa valeur interprétative de la loi ;

- subsidiairement, sur les modalités de détermination de l'imposition, l'administration se fonde implicitement sur l'article 298 quaterdecies II du code général des impôts qui n'est applicable qu'aux ventes de tabacs au détail réalisées en France métropolitaine ; la base d'imposition aurait dû être égale au prix convenu entre les parties diminué de la TVA exigible sur l'opération ; le calcul retenu par le service vérificateur conduit à déterminer un prix de revient au stade de l'importation, alors même que des coûts supplémentaires peuvent être mis à la charge de l'opérateur avant la mise à la consommation des tabacs ; au cas présent, l'assiette de la TVA est fondée sur une valeur CIF + DC qui ne constitue pas un prix de revient au sens commercial et comptable mais n'en est qu'un composant, dans un cadre non strictement prévu par la loi et sur la base de formules fantaisistes ;

- l'administration opte arbitrairement pour des règles de détermination d'une assiette non prévues par le législateur et selon un choix discrétionnaire ; l'administration a en effet retenu des bases d'imposition différentes dans le cadre des contrôles diligentés à l'encontre des sociétés en Guadeloupe et de certaines sociétés en Martinique alors que la loi fiscale ne fait aucune distinction entre ces deux départements ; ainsi, s'agissant des sociétés en Guadeloupe, l'administration a retenu une base d'imposition " valeur CIF + DC " figurant sur les déclarations COA des marchandises dédouanées, en raisonnant à stock constant alors que s'agissant de certaines sociétés en Martinique, l'administration a retenu une base d'imposition composée du droit de consommation en soustrayant la TVA acquittée à l'importation, soit " DC - TVA d'importation " figurant sur les déclarations COA des marchandises dédouanées, en raisonnant à stock constant si bien qu'une base plus faible est appliquée pour certaines sociétés en Martinique ce qui crée une discrimination majeure avec les sociétés en Guadeloupe ;

- l'administration ne s'attache pas à la réalité économique puisqu'elle se borne à procéder aux rappels de TVA avec pour seule base les déclarations à l'importation de la période vérifiée sans tenir compte que des tabacs ont pu faire l'objet de vols ou de destruction avant leur revente.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 22 janvier 2021 et le 11 mars 2022, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... B...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique,

- et les observations de Me Ardanz, représentant la SARL Distrivit.

Considérant ce qui suit :

1. La société Distrivit exploite une activité de commerce de gros de produits à base de tabac et, à ce titre, importe en Guadeloupe des tabacs manufacturés, pour les revendre à des distributeurs locaux. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2016, étendue ensuite du 1er septembre 2012 au 31 décembre 2012, à l'issue de laquelle elle a été informée de l'intention du service de rappeler la taxe sur la valeur qui aurait dû être collectée sur les ventes de tabacs réalisées au cours de la période vérifiée pour un montant total de 4 379 488 euros. Par décision du 30 janvier 2019, l'administration fiscale a admis partiellement la réclamation de la société à hauteur de 267 226 euros et a maintenu un rappel de 4 112 262 euros en droits et pénalités. La société Distrivit relève appel du jugement du 11 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande tendant à la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période de janvier 2013 à juin 2016.

Sur le bien fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

2. Aux termes, d'une part, de l'article 298 quaterdecies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : " I. Les opérations portant sur les tabacs manufacturés sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée dans les conditions de droit commun, sous réserve des dispositions ci-après. / II. Le fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée applicable aux ventes dans les départements de France continentale de tabacs manufacturés est celui qui est prévu à l'article 575 C (relatif à la mise à la consommation). / La taxe est assise sur le prix de vente au détail, à l'exclusion de la taxe sur la valeur ajoutée elle-même. / Elle est acquittée par le fournisseur dans le même délai que le droit de consommation ". Aux termes de l'article 298 sexdecies du même code : " Dans les départements de la Réunion, de la Martinique et de la Guadeloupe, les marges commerciales postérieures à la fabrication ou à l'importation demeurent exclues de la taxe sur la valeur ajoutée ". En vertu de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de l'article 15 de la loi du 24 mai 1976 dont elles sont issues, en Corse et dans les départements d'outre-mer, les opérations portant sur les tabacs manufacturés sont, à chacun des stades du circuit de commercialisation, soumises à la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle sont soumises les ventes de tabacs manufacturés réalisées dans les conditions du droit commun. Demeurent toutefois exclues de l'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle sont soumises les ventes de tabacs manufacturés réalisées dans les départements d'outre-mer, les marges commerciales prises postérieurement à la fabrication ou à l'importation de ces tabacs, comme elles l'avaient été avant l'entrée en vigueur de la loi du 24 mai 1976.

3. Aux termes d'autre part, de l'article 292 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " La base d'imposition est constituée par la valeur définie par la législation douanière conformément aux règlements communautaires en vigueur. Toutefois, sont à comprendre dans la base d'imposition : 1° Les impôts, droits, prélèvements et autres taxes qui sont dus en raison de l'importation, à l'exception de la taxe sur la valeur ajoutée elle-même ; 2° Les frais accessoires, tels que les frais de commission, d'emballage, de transport et d'assurance intervenant jusqu'au premier lieu de destination des biens à l'intérieur du pays ; par premier lieu de destination, il faut entendre le lieu mentionné sur la lettre de voiture ou tout autre document de transport sous le couvert duquel les biens sont importés ; à défaut de cette mention, le premier lieu de destination est celui de la première rupture de charge. [...] ; ".

En ce qui concerne les conclusions principales :

Sur le terrain de la loi fiscale :

4. En premier lieu, il résulte des dispositions précitées des articles 298 quaterdecies et 298 sexdecies du code général des impôts, ainsi que des travaux parlementaires, que la SARL Distrivit est légalement redevable de la taxe sur la valeur ajoutée à raison de ses opérations de vente à des détaillants des tabacs manufacturés qu'elle a importés. En l'absence de facturation et de collecte de la taxe sur la valeur ajoutée sur son prix de vente diminué des marges commerciales réalisées à la revente, l'administration a pu sans excéder la base d'imposition prévue par les dispositions précitées, établir la taxe litigieuse sur le seul prix de revient des tabacs revendus, dès lors d'une part que les dispositions de l'article 292 précité du code général des impôts permettent de déterminer l'assiette de la taxe des biens importés à partir de sa valeur douanière et que ce prix de revient ainsi calculé n'a pas, par construction, inclus la marge commerciale qui doit être exclue de la base taxable selon les dispositions précitées. C'est à cet égard, sans portée utile que la requérante soutient que l'article 298 sexdecies du code général des impôts ne précise pas les modalités de détermination de ce qui constituerait la " marge commerciale " à exclure de la base imposable. En outre, compte tenu de la teneur légale du dispositif précité, c'est à tort que la société requérante soutient que le législateur a méconnu l'étendue de sa compétence au regard de l'article 34 de la Constitution et de la déclaration des droits l'homme et du citoyen de 1789 en ne précisant pas explicitement le prix de revient à prendre en compte dans l'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée à collecter. Le principe de neutralité du régime de la taxe sur la valeur ajoutée est préservé puisque l'administration, en opérant le rappel de la taxe non collectée, n'a nullement remis en cause le droit de déduction de la taxe ayant grevé les importations des tabacs, ensuite revendus, dont la société était fondée à se prévaloir sur le fondement de l'article 271 du code général des impôts dès lors que ces opérations étaient soumises à la TVA.

5. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que le vérificateur avait, en l'absence de toute TVA collectée par la société requérante, le droit de reconstituer celle-ci à partir du coût de revient du tabac importé lequel d'ailleurs ne comporte, à ce stade du circuit de commercialisation, aucune marge pour l'importateur. Il suit de là qu'alors même que l'article 298 quaterdecies II du code général des impôts n'est applicable qu'aux ventes de tabacs au détail réalisées en France métropolitaine, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le rejet de sa demande est dépourvu de base légale.

6. En troisième lieu, si la requérante soutient que les rehaussements ont été établis dans des conditions contraires au principe d'égalité devant l'impôt au motif que des entreprises concurrentes exerçant une activité identique en Guadeloupe n'auraient pas fait l'objet de rappels de taxe sur la valeur ajoutée sur les ventes de tabacs selon les mêmes modalités qu'elle, cette circonstance, à la supposer établie, est sans influence sur la régularité ou le bien-fondé de ces rappels dès lors qu'ils ont été établis conformément à la loi.

7. Il résulte de ce qui précède, qu'au regard de la loi fiscale, la société requérante n'est pas fondée à contester le rejet d'une partie de sa demande de remboursement de taxe sur la valeur ajoutée qui procède d'une exacte application de la loi fiscale précitée.

Sur le terrain de la doctrine administrative :

8. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " (...) Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. (...) ". Si ces dispositions instituent une garantie contre les changements de doctrine de l'administration, qui permet aux contribuables de se prévaloir des énonciations contenues dans les notes ou instructions publiées, qui ajoutent à la loi ou la contredisent, c'est à la condition que les intéressés entrent dans les prévisions de la doctrine, appliquée littéralement, résultant de ces énonciations. Les contribuables ne peuvent se prévaloir utilement, sur le fondement de l'article L. 80 A précité, d'une partie seulement d'une telle doctrine dont les éléments, bien qu'énoncés successivement, sont indissociables.

9. Sur le fondement de ces dispositions, la SARL Distrivit se prévaut de l'instruction 3G-261 du 1er septembre 1998 publiée au paragraphe 3-G-26 du bulletin officiel de la direction générale des impôts - et reprise sous le numéro BOI-TVA-GEO-20-50-20120912 n° 10 - selon laquelle : " 1. Dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion où la législation sur les taxes sur le chiffre d'affaires a été introduite, les tabacs manufacturés sont soumis à la TVA dans les conditions ci-après. 10. Dans ces départements, les marges commerciales postérieures à la fabrication ou à l'importation sont, aux termes de l'article 298 sexdecies du CGI, exclues de la TVA. Il en résulte que les négociants grossistes, dépositaires, détaillants ou débitants qui opèrent la distribution des tabacs ne doivent pas être recherchés en paiement de la taxe. 20. La TVA est exigible soit à l'importation, soit à l'issue de la fabrication, c'est-à-dire à la sortie des tabacs manufacturés des établissements de production.30. Le taux applicable aux tabacs est le taux normal applicable dans les DOM.40Les fabricants exercent leurs droits à déduction par imputation sur la taxe due à l'issue des opérations de fabrication des tabacs et, le cas échéant, la fraction non imputable de ces droits peut faire l'objet d'un remboursement dans les conditions fixées aux articles 242 OA et suivants de l'annexe II au CGI. Dans la mesure où ils sont dispensés du paiement de la TVA, les négociants qui opèrent la distribution des tabacs dans les départements d'outre-mer ne peuvent prétendre à aucun droit à déduction ".

10. Si cette instruction retient une interprétation différente de la loi fiscale, en ce qu'elle exclut les ventes de tabacs importés du champ d'application de la TVA, les contribuables ne peuvent se prévaloir utilement, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, d'une partie seulement d'une telle doctrine dont les éléments, bien qu'énoncés successivement, sont indissociables. La doctrine précitée permet aux négociants grossistes, dépositaires, détaillants ou débitants de ne pas être recherchés en paiement de la taxe collectée en contrepartie de la renonciation à leur droit de déduction de la taxe acquittée. La société requérante qui se prévaut à la fois de sa qualité d'importateur pour déduire la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a supportée en douane et de sa qualité de négociant grossiste pour ne pas placer ses ventes dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ne satisfait pas aux conditions posées par cette doctrine.

En ce qui concerne les conclusions subsidiaires :

11. La société requérante soutient que les modalités de détermination de l'assiette de la TVA retenues par l'administration sont dépourvues de toute réalité économique et sont sans lien avec le prix de revient supporté comptablement. Elle fait valoir que le service se borne à procéder aux rappels de TVA avec pour seule base les déclarations à l'importation de la période vérifiée alors même que des coûts supplémentaires peuvent être mis à la charge de l'opérateur avant la mise à la consommation des tabacs et que des tabacs ont pu faire l'objet de vols ou de destruction avant leur revente. Elle en déduit que la base d'imposition aurait dû être égale au prix convenu entre les parties, diminué de la TVA exigible sur l'opération.

12. Il est toutefois constant que la taxe sur la valeur ajoutée dont est redevable un vendeur est un élément qui grève le prix convenu avec le client et non un accessoire de ce prix. De ce fait, l'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée est égale au prix convenu entre les parties, diminué notamment de la taxe exigible sur cette opération. Par suite, lorsqu'un assujetti réalise une opération moyennant un prix convenu qui ne mentionne aucune TVA dans des conditions qui ne font pas apparaître que les parties seraient convenues d'ajouter, au prix stipulé, un supplément de prix égal à la TVA applicable à l'opération, la taxe due au titre de cette opération doit être assise sur une somme égale à ce prix diminué notamment du montant de cette même taxe.

13. En l'espèce, il résulte de l'instruction que le vérificateur avait, en l'absence de toute TVA collectée par la société requérante, le droit de reconstituer celle-ci à partir du coût de revient du tabac importé déterminé à partir du prix CIF (Coût, assurance, fret) et des droits à la consommation, diminué de la TVA payée en douanes et de la valeur CIF. Ce coût de revient ne comporte d'ailleurs, à ce stade du circuit de commercialisation, aucune marge pour l'importateur. Enfin comme le relève à juste titre le service, les importations dédouanées mais endommagées et donc invendues, sont extournées par l'administration fiscale sur présentation par la société des justificatifs corrélatifs. Il suit de là que la requérante n'est pas fondée à soutenir que la base d'imposition à la TVA serait excessive.

14. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de transmettre une question préjudicielle à la cour de justice de l'Union Européenne, que la SARL Distrivit n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la SARL Distrivit la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Distrivit est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Distrivit et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 19 avril 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzalmo, présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. Nicolas Normand premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 mai 2022.

Le rapporteur,

Nicolas B... La présidente,

Evelyne Balzamo Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX02483


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX02483
Date de la décision : 24/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02 Contributions et taxes. - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Nicolas NORMAND
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : CABINET KPMG

Origine de la décision
Date de l'import : 31/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-05-24;20bx02483 ?
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