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10/05/2022 | FRANCE | N°20BX00651

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 10 mai 2022, 20BX00651


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCCV Estival a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 2010 au 30 septembre 2011.

Par un jugement n° 1802365 du 10 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a réduit la base d'imposition supplémentaire à la taxe sur la valeur ajoutée assignée à la SCCV Estival au titre de la période du 1er janvier 2010 au 30 septembre 2011 à hauteur d'une somme d

e 26 645 euros et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCCV Estival a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 2010 au 30 septembre 2011.

Par un jugement n° 1802365 du 10 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a réduit la base d'imposition supplémentaire à la taxe sur la valeur ajoutée assignée à la SCCV Estival au titre de la période du 1er janvier 2010 au 30 septembre 2011 à hauteur d'une somme de 26 645 euros et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 février 2020, et un mémoire enregistré le 29 mars 2022, la SCCV Estival, représentée par Me Lacombe, demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 10 décembre 2019 en tant qu'il n'a pas entièrement donné satisfaction à sa demande ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 2010 au 30 septembre 2011 qui restent à sa charge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité en ce qu'elle n'a pas pu saisir le supérieur hiérarchique en violation des dispositions combinées de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales et du paragraphe 5 du chapitre III de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; cette saisine pouvait intervenir à tout moment, la charte ne fixant aucun moment ou délai particulier pour la saisine pendant la vérification ;

- la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité en ce que le service a insuffisamment répondu aux observations des acquéreurs concernant la prise en compte de termes de comparaison au regard d'un prix au m² habitable, méconnaissant de la sorte les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

- la théorie de l'acte anormal de gestion ne s'applique pas en matière de taxe sur la valeur ajoutée dès lors que la prestation a été effectivement rendue ; de fait la base d'imposition à la TVA est régulièrement constituée par le prix de cession contractuellement fixé entre les deux personnes (morale et physique) mentionnées dans l'acte authentique (qui fait foi jusqu'à inscription de faux) et réellement encaissé par le truchement de la comptabilité du notaire instrumentaire ; l'existence d'un (éventuel) acte anormal de gestion est sans incidence sur la TVA si la livraison a été effectuée ou si la prestation a été effectivement rendue ; l'article 27-1 de la sixième directive du 17 mars 1977 n'autorise pas l'administration sur le fondement de l'article 266-2-b à substituer la valeur vénale d'un immeuble au prix déclaré pour l'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée en dehors des cas avérés de fraude ou d'évasion fiscale ; cette preuve de la fraude ou de l'évasion fiscale n'est pas rapportée par l'administration ; il est en outre permis de s'interroger sur la compatibilité in abstracto de l'article 266-2-b du code général des impôts avec la sixième directive ;

- à titre subsidiaire, la preuve de l'acte anormal de gestion n'est pas apportée par l'administration ; la SCCV Estival a effectué la vente des lots immobiliers concernés dans des conditions de délai et de prix qui non seulement n'ont en rien préjudicié à ses intérêts mais au contraire lui ont permis de trouver rapidement un acquéreur et ce moyennant un prix supérieur au prix de revient total des éléments de construction en cause ; à ce titre, le prix de revient au m² global annexé en pièce jointe fait clairement état du fait qu'une marge significative (comprise dans la plupart des cessions entre 31 % et 34 %) a été réalisée par la société ; les cessions immobilières effectuées par la SCCV Estival font partie d'un lot non éligible aux dispositifs fiscaux incitatifs et ont permis à la société de dégager des marges confortables ; le seul fait que ces cessions aient été réalisées au bénéfice de personnes en liens directs ou indirects, familiaux ou professionnels, avec la SCCV, ne constitue pas une preuve d'anormalité ; les cessions incriminées concernaient des lots bruts de finition justifiant une réduction du prix ; le jugement attaqué n'a que très partiellement pris en compte l'absence totale de frais de commercialisation des ventes immobilières en cause ; l'absence de commission à verser sur les ventes à l'associé-gérant de la SCCV Estival et à certains de ses proches, relations d'affaires ou salariés, légitime parfaitement et à lui seul, la réduction de prix apparente qui leur aurait été consentie compte tenu des taux de commissions pratiqués dans ce domaine (qui sont de l'ordre de 20 %) ; le service vérificateur a cru devoir calculer la valeur vénale des biens immobiliers ainsi cédés en retenant un prix au m² pondéré, alors que la SCCV applique une méthode de vente affichant un prix au m² habitable et ne tenant pas compte de l'éventuelle pondération de la surface des balcons et des terrasses de sorte que le comparatif doit impérativement s'effectuer au regard d'un prix au m² habitable ; le service prend en considération des m² de terrasse et balcons qui ne sont pas des surfaces privatives pour survaloriser les lots aliénés ; la méthodologie du service consistant à valoriser ces surfaces à hauteur de 50 % du prix du m² habitable, procède d'une inexacte appréciation des faits ; le raisonnement tenu dans le cadre de la cession aux époux E... devrait s'appliquer également aux cessions consenties à MM H... B..., C... B..., J... D... et A... I... ; le lot A04 acquis par les époux B... est obligatoirement mis à la disposition du concierge, ce dont le jugement attaqué n'a pas tenu compte ;

- les pénalités sont infondées ; l'existence d'une sous-évaluation ne suffit pas à établir, par elle-même, la mauvaise foi ; l'administration ne fait la démonstration ni d'une sous-évaluation manifeste ni de l'implication personnelle du bénéficiaire de la transaction.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 septembre 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. F... G...,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société civile de construction vente (SCCV) Estival est une société de construction vente, détenue à hauteur de 99,90 % par la société JD Promotion, et à hauteur de 0,10 % par M. C... B.... Ces deux sociétés sont gérées par M. C... B.... La SCCV Estival a été créée en vue de la réalisation d'une opération de construction-vente portant sur 121 logements à la suite de l'acquisition d'un terrain situé 5-7 rue Paul Estival à Toulouse. La société Estival a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les années 2009 et 2010 en matière d'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et en matière de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 2009 au 30 septembre 2011 à l'issue de laquelle l'administration fiscale a, par une proposition de rectification du 31 mai 2012, notifié à la société Estival des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 2009 au 30 septembre 2011 qui ont été mis en recouvrement par un avis du 30 septembre 2015. Par un jugement du 10 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a réduit la base d'imposition supplémentaire à la taxe sur la valeur ajoutée assignée à la SCCV Estival au titre la période du 1er janvier 2010 au 30 septembre 2011 à hauteur d'une somme de 26 645 euros et rejeté le surplus de sa demande. La SCCV Estival relève appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 10 décembre 2019 en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ".

3. Le moyen tiré de ce que la procédure serait entachée d'irrégularité en ce que le service a insuffisamment répondu aux observations des acquéreurs relatives à la nécessité de retenir des termes de comparaison au regard d'un prix au m² habitable, ne peut être utilement soulevé par la société Estival dès lors que celle-ci n'a pas acquis d'appartements dans l'ensemble immobilier en cause.

4. En second lieu, au soutien du moyen tiré de ce que la procédure d'imposition serait entachée d'irrégularité en ce qu'elle n'a pas pu saisir le supérieur hiérarchique en violation des dispositions combinées de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales et du paragraphe 5 du chapitre III de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, la requérante ne se prévaut devant la cour d'aucun élément nouveau par rapport à son argumentation soulevée devant le tribunal. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par le tribunal.

Sur le bien-fondé des impositions :

5. En premier lieu, aux termes de l'article 257 du code général des impôts : " Sont (...) soumises à la taxe sur la valeur ajoutée : (...) 7º Les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles (...) ". Aux termes du 2 de l'article 266 de ce code, pris pour l'adaptation de la législation nationale aux objectifs poursuivis par l'article 73 de la directive 2006/112/CE du Conseil des Communautés européennes du 28 novembre 2006 : " En ce qui concerne les opérations entrant dans le champ d'application du 7º de l'article 257, la taxe sur la valeur ajoutée est assise : (...) b. Pour les mutations à titre onéreux ou les apports en société sur : le prix de la cession, le montant de l'indemnité ou la valeur des droits sociaux rémunérant l'apport, augmenté des charges qui s'y ajoutent ; la valeur vénale réelle des biens, établie dans les conditions prévues à l'article L.17 du livre des procédures fiscales, si cette valeur vénale est supérieure au prix, au montant de l'indemnité ou à la valeur des droits sociaux, augmenté des charges ". Aux termes du II de l'article 267 du même code : " Ne sont pas à comprendre dans la base d'imposition : 1° Les escomptes de caisse, remises, rabais, ristournes et autres réductions de prix consenties directement aux clients (...) ". Aux termes de l'article L. 17 du livre des procédures fiscales : " En ce qui concerne les droits d'enregistrement et la taxe de publicité foncière ou la TVA lorsqu'elle est due au lieu et place de ces droits ou taxe, l'administration des impôts peut rectifier le prix ou l'évaluation d'un bien ayant servi de base à la perception d'une imposition lorsque ce prix ou cette évaluation paraît inférieur à la valeur vénale réelle des biens transmis ou désignés dans les actes ou déclarations. La rectification correspondante est effectuée suivant la procédure de redressement contradictoire prévue à l'article L. 55, l'administration étant tenue d'apporter la preuve de l'insuffisance des prix exprimés et des évaluations fournies dans les actes ou déclarations ".

6. En application de ces dispositions, l'administration est en droit de substituer, pour la détermination de l'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée, la valeur vénale réelle du bien cédé au prix de cession stipulé dans l'acte lorsque, à la date de la vente, cette valeur vénale est supérieure au prix de cession augmenté des charges. Conformément toutefois aux dispositions de l'article 80 de la directive 2006/112/CE du Conseil des communautés européennes du 28 novembre 2006, il ne peut être recouru à ce mécanisme de substitution que dans le cas de livraisons d'immeubles et dans le but de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale. Dès lors que l'administration relève, d'une part, que les prix de locaux faisant l'objet de mutations ont été minorés et, d'autre part, que le vendeur et l'acheteur sont étroitement liés, elle peut, en application de l'article 80 de la directive 2006/112 CE et du 2 § b de l'article 266 du code général des impôts, substituer la valeur vénale des immeubles aux prix déclarés pour l'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée à condition de rapporter la preuve que l'insuffisance du prix de vente des locaux résulte d'une volonté d'évasion fiscale au sens de l'article 80 de la directive 2006/112/CE, l'importance de l'insuffisance de prix n'étant pas, à elle seule, de nature à établir une telle volonté d'évasion fiscale. Celle-ci, toutefois, se présume du seul fait de l'insuffisance significative du prix, lorsque les parties sont en relation d'intérêt, sauf preuve contraire apportée par le contribuable.

7. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a estimé que les appartements de type T3 vendus à M. et Mme D... en 2010 et 2011 pour des prix respectifs de 136 355 euros et 148 570 euros avaient été cédés à un prix inférieur au prix de vente moyen constaté pour l'ensemble des biens cédés dans l'ensemble immobilier construit par la SCCV Estival, M. D... étant, au jour des cessions litigieuses, salarié de la SAS JD Promotion, dirigée par M. C... B.... Le service a réévalué le prix de ces appartements à respectivement 199 168 euros et 236 092 euros, ce qui représente un écart entre le prix d'achat et la valeur vénale du bien de respectivement 46 et 59 %. L'administration fiscale a également estimé que l'appartement de type T4 vendu en 2011 à M. I..., pour un prix de 183 943 euros avait été cédé à un prix inférieur au prix de vente moyen constaté pour l'ensemble des biens cédés dans l'ensemble immobilier construit par la SCCV Estival, M. I... étant salarié de la SARL DCM, dirigée par M. C... B.... Le service a réévalué le prix de cet appartement à 303 790 euros ce qui représente un écart de prix de 65 %. L'administration fiscale a encore estimé que l'appartement de type T2 vendu en 2010 à la société J.F.D Immo, dont M. H... B... était associé, pour un prix de 110 368 euros avait été cédé à un prix inférieur au prix de vente moyen constaté pour l'ensemble des biens cédés dans l'ensemble immobilier construit par la SCCV Estival. Le service a réévalué le prix de cet appartement à 139 948 euros ce qui représente un écart de prix de 30 %. L'administration fiscale a enfin estimé que l'appartement de type T2 vendu en 2010 à la société J.F.D Immo, dont M. C... B... était associé, pour un prix de 110 368 euros, et les appartements de type T4 vendus en 2010 et 2011 à la société Abadu, dont M. et Mme C... B... étaient associés à parts égales, pour des prix respectifs de 170 568 euros et de 284 281 euros avaient été cédés à un prix inférieur au prix de vente moyen constaté pour l'ensemble des biens cédés dans l'ensemble immobilier construit par la SCCV Estival. Le service a réévalué le prix de ces appartements à respectivement 139 948 euros, 222 982 euros et 369 396 euros ce qui représente un écart de prix de respectivement 27 %, 31 % et 30 %. L'administration, constatant que ces cessions avaient été réalisées au profit de personnes ou de sociétés en lien de parenté ou d'affaires avec le gérant de la société Estival ou avec cette société, à un prix largement inférieur à leur valeur vénale, a sur le fondement des dispositions précitées des articles 266 § 2 b du code général des impôts et L. 17 du livre des procédures fiscales, substitué la valeur vénale des immeubles aux prix déclarés pour l'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée.

8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que l'administration n'a pas, contrairement à ce qu'affirme la société requérante, fait application de la théorie de l'acte anormal de gestion en matière de taxe sur la valeur ajoutée.

9. En deuxième lieu, pour contester la minoration significative du prix des cessions litigieuses, la requérante fait valoir que le produit de ces cessions a dégagé une marge. Toutefois, elle n'établit pas que cette marge serait suffisante au regard du prix de vente des autres biens qu'elle a cédés dans l'ensemble immobilier. De même, si elle fait valoir que M. et Mme E... ont bénéficié, pour l'acquisition d'un appartement dans ce même ensemble immobilier, d'une décharge des impositions supplémentaires mises à leur charge, le tribunal administratif de Toulouse a néanmoins relevé dans un jugement n° 1802816 du 10 décembre 2019 devenu définitif que l'écart entre le prix de vente convenu et la valeur vénale du bien cédé à M. et Mme E... retenue par l'administration était de moins de 20 %.

10. En troisième lieu, la requérante conteste la méthode à laquelle a eu recours l'administration pour établir la minoration du prix de vente des cessions litigieuses, consistant à comparer le prix au m² des appartements en litige déterminé à partir de leur surface pondérée avec le prix au m² des autres appartements vendus dans l'ensemble immobilier en cause également déterminé à partir de leur surface pondérée déduction faite, toutefois, d'une commission de 10 % correspondant à des frais de commercialisation non supportés par les acquéreurs. La requérante se borne toutefois à affirmer de façon très générale que le prix de vente HT au m² habitable serait excessif alors que les termes de comparaison retenus par le service, dans le même ensemble immobilier pour des biens équivalents, portent s'agissant de M. et Mme D... sur la moyenne de plusieurs ventes (Delpech du 20/05/10, Mahieu du 06/07/10, Partida du 14/12/10 et Erbetta du 29/11/10), s'agissant de M. I... et de la SCI Abadu, sur la valeur la plus faible des termes de comparaison retenus, soit 2 191 euros, prix constaté lors de la cession à la SCI Verdich, et s'agissant de la société J.F.D Immo, sur la moyenne de plusieurs ventes (Miot du 9/10/10, Schmitt du 15/12/10 et Lescure du 13/12/10). Elle affirme aussi que les ventes faites à des tiers subissent un commissionnement de 20 % qu'elle n'a pas fait supporter aux acquéreurs mais n'apporte aucun élément de nature à établir que la commission de 10 % admise par le service au regard des usages de la profession de vendeur de bien en l'état futur d'achèvement serait insuffisante. Elle critique encore le recours à la méthode en ce qu'elle évalue le prix au m² des biens vendus à partir de leur surface pondérée. Toutefois, la prise en compte, pour un coefficient de 0,5, des surfaces de terrasses, balcons et jardins privatifs, est conforme aux usages de la profession en ce que ces éléments valorisent les biens vendus. Elle affirme enfin que les cessions en cause concernaient des lots bruts de finition justifiant une réduction du prix mais n'apporte aucun élément probant de nature à établir que les acquéreurs ont supporté personnellement les frais d'aménagement des appartements acquis.

11. En quatrième lieu, la requérante soutient que le prix d'achat des appartements était déprécié en ce que l'intervention de la loi de finances pour 2010 a subordonné l'avantage fiscal de la loi Scellier à un paramètre écologique en maintenant la réduction d'impôts de 25 % pour les seuls logements labellisés " BBC 2005 ". Toutefois, sur les 121 lots proposés à la vente, 81 ont fait l'objet d'un acte authentique de vente entre le 10 juin et le 31 décembre 2010 et 11 biens ont été vendus du 1er janvier au 30 septembre 2011 sans pour autant bénéficier de la remise de prix dont ont bénéficié les requérants. Il suit de là que l'intervention de la loi précitée n'a pas eu pour effet de diminuer la valeur vénale des biens vendus.

12. En dernier lieu, il résulte de l'instruction que la requérante était effectivement en liens direct ou indirects, familiaux ou professionnels, avec les acquéreurs des appartements en litige. Au jour des cessions litigieuses, M. C... B... dirigeait la société Estival et la société JD Promotion, il était associé de la société Abadu et il était également associé avec son frère, M. H... B..., de la société J.F.D Immo. M. D... était, pour sa part, salarié de la SAS JD Promotion, et M. I... était au jour de la cession litigieuse, salarié de la SARL DCM, dirigée par M. C... B..., qui faisait partie du groupe informel des sociétés dirigées par M. C... B... et qui a participé à la commercialisation du programme immobilier réalisé par la société Estival. Une relation d'intérêt et d'affaires s'est donc nouée entre tous ces protagonistes.

13. Il résulte de ce qui précède que compte tenu de l'insuffisance significative de prix des appartements vendus dans l'ensemble immobilier en cause et de la relation d'intérêts et d'affaires nouée entre la requérante et les acquéreurs, la SCCV Estival est présumée avoir livré les biens en litige pour une valeur inférieure à leur valeur vénale. Or, elle n'apporte pas la preuve que la valeur de cession des appartements correspondrait bien, en réalité, à leur valeur vénale. L'administration fiscale a donc pu, à bon droit, faire application des dispositions de l'article L. 17 du livre des procédures fiscales et de l'article 266 du code général des impôts pour rehausser l'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée due à raison des mutations litigieuses.

Sur les pénalités :

14. La requérante reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, le moyen tiré de ce que l'application de la majoration pour manquement délibéré ne serait pas justifié. Il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

15. Il résulte de tout ce qui précède, que la SCCV Estival n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté le surplus de sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce que l'Etat soit condamné au versement d'une somme d'argent au titre des frais de justice ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SCCV Estival est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCCV Estival et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 5 avril 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. Nicolas Normand premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 mai 2022.

Le rapporteur,

Nicolas G... La présidente,

Evelyne Balzamo Le greffier,

Fabrice Phalippon

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°20BX00651


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX00651
Date de la décision : 10/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-04 Contributions et taxes. - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. - Taxe sur la valeur ajoutée. - Liquidation de la taxe. - Fraude.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Nicolas NORMAND
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : LACOMBE

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-05-10;20bx00651 ?
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