Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner la commune de Montpon-Ménéstérol à lui verser la somme totale de 105 540 euros, en réparation des préjudices qu'il a subis, consécutivement à son accident de service du 23 février 2011.
Par un jugement n°1703067 du 3 avril 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné la commune de Montpon-Ménéstérol à verser à M. B... la somme de 25 725 euros, a mis à sa charge une somme de 1 200 euros au titre des frais que celui-ci a exposés pour l'instance et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 mai 2019 et un mémoire enregistré le 16 avril 2021, la commune de Montpon-Ménéstérol, représentée par Me Tierney-Hancock, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 3 avril 2019 ;
2°) de rejeter les demandes indemnitaires de M. B... ;
3°) de mettre à la charge de M. B... une somme de 3 500 euros au titre des frais exposés pour l'instance.
Elle soutient que :
- elle n'a commis aucun manquement à ses obligations de sécurité ;
- M. B... commis une faute grave exonératrice de sa responsabilité sans faute.
Par des mémoires enregistrés le 29 janvier, 9 février et 26 avril 2021, M. B..., représenté par Me Aljoubahi, conclut au rejet de la requête, à ce que le jugement attaqué soit réformé en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à sa demande indemnitaire et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la commune de Montpon-Ménestérol au titre des frais exposés pour l'instance.
Il soutient que la requête est irrecevable dès lors que la commune n'a pas exécuté le jugement attaqué et que, faute de critiquer le jugement attaqué, elle a méconnu les dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, qu'il n'a commis aucune faute ; que la commune a commis une faute en le contraignant à travailler sans échafaudage ; qu'il justifie de la réalité et du montant de ses préjudices.
Par un mémoire enregistré le 7 mars 2022, la caisse primaire d'assurance maladie de Périgueux déclare ne pas avoir de créance à faire valoir.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le décret n° 2001-99 du 31 janvier 2001 portant modification du décret n° 68-756 du 13 août 1968 pris pour l'application de l'article L. 28 (3ème alinéa) du code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- le décret n° 2005-442 du 2 mai 2005 ;
- le code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique,
- et les observations de Me Aljoubahi, représentant M B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., adjoint technique de deuxième classe exerçait les fonctions d'agent polyvalent au sein des services de la commune de Montpon-Ménéstérol (Dordogne) et était chargé notamment de l'entretien des bâtiments. Il a été victime le 23 février 2011 d'un accident qui a été reconnu imputable au service le 7 mars suivant. A la suite de cet accident, M. B... a été reconnu définitivement inapte à l'exercice de ses fonctions. Il a, par conséquent, été mis à la retraite pour invalidité et radié des cadres le 1er juillet 2016. La commune de Montpon-Ménéstérol relève appel du jugement du 3 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamnée à verser à M. B... la somme de 25 725 euros en réparation des préjudices que lui a causés cet accident. Ce dernier sollicite également, par la voie de l'appel incident, la réformation de ce jugement en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à ses demandes indemnitaires.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, la circonstance que la commune de Montpon-Ménéstérol n'ait pas exécuté le jugement attaqué, à la supposer établie, demeure sans incidence sur la recevabilité de la requête d'appel présentée par cette commune.
3. En second lieu, en vertu des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, applicable à l'instance d'appel en vertu de l'article R. 811-13 du même code, la requête doit, à peine d'irrecevabilité, contenir l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. Une requête d'appel qui se borne à reproduire intégralement et exclusivement le texte du mémoire de première instance ne satisfait pas aux prescriptions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative.
4. Il ressort des pièces du dossier que la commune de Montpon-Ménéstérol a présenté, dans le délai d'appel, une requête qui ne constitue pas la seule reproduction intégrale et exclusive de son mémoire de première instance et contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de ce que la requête serait entachée d'un défaut de motivation doit être écartée.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la responsabilité de la commune :
5. les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et, pour les fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, le II de l'article 119 de la loi du 26 janvier 1984 et les articles 30 et 31 du décret du 9 septembre 1965 qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité, doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions instituant ces prestations déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité.
6. Le 23 février 2011, M. B... a été victime d'une chute alors qu'il était monté sur un escabeau, lui-même posé sur deux tables, et avait entrepris de procéder au remplacement des éclairages du réfectoire de l'école primaire communale. Il soutient qu'il avait reçu ordre de procéder à ces travaux avant la rentrée des classes le lundi 28 février 2011, qu'ils nécessitaient l'emploi d'un échafaudage pour accéder sans risque au plafond mais que celui-ci " ne pouvait être mis à sa disposition ".
7. Toutefois et ainsi que l'ont dit les premiers juges, il résulte de l'instruction que M. B... ne justifie pas avoir eu pour consigne de procéder au changement de ces luminaires " en urgence " avant le 28 février 2011 et avoir dès lors été contraint de prendre les risques qui ont entraîné sa chute en se bornant à produire la lettre qu'il a lui-même adressée au maire de la commune le 14 mars 2011 et dont il ressort seulement que l'échafaudage concerné était disponible à compter du 25 février 2011 au matin ainsi que trois attestations, établies les 18 mars 2011 et 21 février 2021 par deux de ses collègues, dont les deux premières indiquent, au contraire, que l'échafaudage en cause avait mystérieusement disparu depuis une année et que son retour dans les locaux des services techniques de la commune n'a été constaté que le 17 mars 2011, et dont la dernière, établie pour les besoins de la cause dix ans après les faits, présente un caractère la fois insuffisamment précis et insuffisamment probant. En outre, M. B... n'établit ni même n'allègue que le délai de réalisation de ces travaux excédait une journée de sorte qu'il ne pouvait en repousser la réalisation au 25 février 201l, date à laquelle il aurait pu utiliser l'échafaudage de la commune, ni qu'il aurait exprimé des réserves ou alerté en vain sa hiérarchie sur l'absence de disponibilité de cet échafaudage et sur le danger auquel il était par conséquent exposé mais que ce travail lui aurait été malgré tout imposé.
8. Enfin, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la reconnaissance de l'imputabilité de l'accident au service impliquerait, en elle-même, que la commune aurait commis une faute.
9. Dans ces conditions, la commune est fondée à soutenir, d'une part, qu'elle n'a commis aucune faute en lien direct et certain avec cet accident et, en particulier, qu'elle n'a pas manqué à son obligation d'assurer la sécurité de ses agents, d'autre part, que celui-ci a participé, par son imprudence, à son propre dommage.
10. En revanche, l'accident subi par M. B... étant directement liée à l'exercice de ses fonctions, la commune appelante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont considéré que cette imprudence était seulement de nature à atténuer sa responsabilité sans faute à proportion de 50 %.
En ce qui concerne le préjudice :
11. En premier lieu et contrairement à ce que soutient la commune de Montpon-Ménéstérol, il résulte de ce qui a été dit au point 5 du présent arrêt que M. B... peut prétendre, même en l'absence de faute démontrée de la commune, à la réparation de l'ensemble des préjudices personnels et patrimoniaux qui ont résulté de cet accident, exception faite des préjudices couverts par une rente viagère ou une allocation temporaire d'invalidité dont il bénéficie à raison de cet accident.
12. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise privée réalisée le 19 avril 2016 à l'initiative de M. B... et dont les conclusions ne sont pas contestées par la commune, que celui-ci a subi un déficit fonctionnel temporaire total du 23 février au 25 février 2011 et le 7 janvier 2013, un déficit fonctionnel temporaire partiel de 75 % du 26 novembre au 26 décembre 2011 et du 8 janvier au 8 février 2013 et un déficit fonctionnel temporaire partiel de 20 % jusqu'au 5 février 2016. Au vu de ces éléments, l'évaluation de ses préjudices à la somme globale de 4 450 euros résulte d'une juste appréciation des premiers juges qu'il y a lieu de confirmer.
13. En troisième lieu, il résulte également de l'instruction que M. B... reste atteint, depuis la consolidation de son état de santé, acquise le 5 février 2016 alors qu'il était âgé de 45 ans, d'une incapacité permanente partielle de 25 % du fait d'une limitation des mouvements de l'épaule droite et du fait de douleurs importantes irradiant dans la main droite accompagnées d'une perte de force de préhension en lien avec la neuropathie cubitale. Dans ces conditions, ni la commune ni M. B... ne sont fondés à soutenir que les premiers juges n'auraient pas fait une juste appréciation du préjudice en résultant en l'évaluant à la somme de 40 000 euros.
14. En quatrième lieu, il n'est pas contesté que les souffrances physiques et psychiques endurées par M. B... peuvent être estimées à 3,5 sur 7. Par suite, l'évaluation de ce poste de préjudice à la somme globale de 5 000 euros résulte d'une juste appréciation des premiers juges qu'il y a lieu de confirmer sans que la commune puisse utilement faire valoir que M. B... n'avait sollicité à ce titre qu'une somme de 4 500 euros dans sa demande indemnitaire préalable dès lors que le montant total de l'indemnité que la collectivité est condamnée à lui verser demeure inférieur au montant global de cette demande.
15. En cinquième lieu, le préjudice esthétique de M B... devant être évalué à 2 sur 7, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges n'auraient pas fait une juste appréciation du préjudice en résultant en l'évaluant à la somme de 2 000 euros.
16. En sixième lieu, M. B... produit pour la première fois en appel deux attestations dont il ressort qu'il pratiquait régulièrement le vélo tout terrain avant son accident. Il sera fait une juste évaluation de ce chef de préjudice en le fixant à la somme de 2 000 euros.
17. En septième et dernier lieu, M. B... n'établissant aucunement qu'il serait contraint de réaliser lui-même et régulièrement des travaux pénibles ou en hauteur et des gros travaux, il ne peut pas utilement demander à bénéficier d'une aide à la personne à raison de quatre heures par semaine pour la réalisation de tels travaux.
18. Il résulte de ce tout qui précède que la commune n'est pas fondée à demander l'annulation ou la réformation du jugement attaqué. Par ailleurs, M. B... est seulement fondé a demandé la réformation de ce jugement en tant qu'il n'a pas fixé à la somme de 26 725 euros le montant de son préjudice indemnisable après prise en compte de son préjudice d'agrément et du caractère partiellement exonératoire de la faute qu'il a lui-même commise.
Sur les frais exposés pour l'instance :
19. En application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la commune une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés pour l'instance par M. B.... En revanche ces mêmes dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Montpon-Ménéstérol demande au titre des frais qu'elle a exposés pour l'instance.
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DÉCIDE :
Article 1er : La commune de Montpon-Ménéstérol est condamnée à verser à M. B... la somme de 26 725 euros.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 3 avril 2019 est réformé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.
Article 3 : La commune de Montpon-Ménéstérol versera à M. B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La requête de la commune de Montpon-Ménéstérol et le surplus des conclusions de M. B... sont rejetés.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à sera notifié à M. A... B..., à la caisse primaire d'assurance maladie de Périgueux et à la commune de Montpon-Ménestérol.
Délibéré après l'audience du 14 mars 2022 à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
Mme Frédéric Faïck, président-assesseur,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 avril 2022.
Le rapporteur,
Manuel C...
Le président,
Didier ArtusLa greffière,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne au préfet de la Dordogne en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N°21BX02233 2