Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... D..., a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté municipal du 11 août 2015 en tant qu'il a ouvert l'enquête publique relative au déclassement dudit chemin rural et d'annuler la délibération du 26 octobre 2015 en tant qu'elle modifie l'assiette dudit chemin rural de Técou à Cocart en procédant à l'achat de trois parcelles et la vente d'une parcelle communale.
Par un jugement n° 1601779 du 8 mars 2019, le tribunal administratif de Toulouse a seulement annulé la délibération du 26 octobre 2015 en tant qu'elle modifie l'assiette du chemin rural de Técou à Cocart en procédant à la vente d'une parcelle communale de 252 m2 au prix de 1,60 euros le mètre carré.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 mai 2019 et le 28 décembre 2020, la commune de Técou, représentée par Me Malbert, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 8 mars 2019 ;
2°) de mettre à la charge de Mme D... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier pour être insuffisamment motivé ;
- la parcelle en cause était désaffectée et ne correspondait plus au chemin rural tel qu'il est utilisé aujourd'hui.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 novembre 2020, Mme D..., représentée par Me Vialaret conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Fabienne Zuccarello,
- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,
- et les observations de Me Malbert, représentant la commune de Técou.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D... est propriétaire d'une parcelle cadastrée C 1115 située dans la commune de Técou (Tarn) et bordant le chemin rural " de Técou à Cocart ". Par une délibération n° 2015-44 du 26 octobre 2015, la commune de Técou a décidé de la modification de l'assiette de ce chemin rural en procédant, d'une part, à l'achat d'une parcelle de 202 m2 au prix de 1,60 euros le mètre carré aux consorts A..., une parcelle de 262 m2 au même prix à MM. Delmotte et Maugeais ainsi qu'une parcelle de 605 m2 au prix de 0,60 euros le mètre carré à M. B... et, d'autre part, à la vente d'une parcelle communale de 252 m2 au prix de 1,60 euros le mètre carré. Mme D... a saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande tendant notamment à l'annulation de cette délibération et le tribunal a fait droit à sa demande en tant qu'elle modifiait l'assiette du chemin rural de Técou à Cocart en procédant à la vente d'une parcelle communale de 252 m2 au prix de 1,60 euros le mètre carré. La commune de Técou relève appel de ce jugement du 8 mars 2019.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements doivent être motivés. ". Contrairement à ce que soutient la commune de Técou, les premiers juges, en estimant que la désaffectation d'un chemin rural résultait d'une situation de fait et que le chemin en cause était toujours utilisé comme voie de passage, ont suffisamment motivé leur réponse au moyen tiré de l'absence de désaffectation du chemin en cause.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. L'article L. 161-1 du code rural et de la pêche maritime dispose : " Les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune ". L'article L. 161-2 du même code dispose : " L'affectation à l'usage du public est présumée, notamment par l'utilisation du chemin rural comme voie de passage ou par des actes réitérés de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale ". L'article L. 161-10 du même code dispose : " Lorsqu'un chemin rural cesse d'être affecté à l'usage du public, la vente peut être décidée après enquête par le conseil municipal (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'un seul des éléments indicatifs figurant à l'article L. 161-2 permet de retenir la présomption d'affectation à l'usage du public.
4. Il ressort des pièces du dossier, que la commune de Técou se borne à affirmer que l'emprise et le tracé du chemin rural se sont déplacés dans le temps et que la portion de chemin rural objet de la vente à M. B... est recouverte par la végétation, impraticable et donc désaffectée. Toutefois, au soutien de ses allégations, la commune produit l'avis du commissaire enquêteur qui ne se prononce pas sur la matérialité de la désaffectation de la partie du chemin en cause alors que des observations ont été faites sur ce point, des photographies non datées et difficilement exploitables car éloignées, ainsi que des attestations imprécises émanant pour la plupart de personnes qui sont liés à la commune et qui ne permettent pas de démontrer que la portion du chemin désormais cadastrée C 1431 ne serait plus affectée à l'usage du public. En revanche, les intimés persistent à soutenir que la partie du chemin en cause est toujours utilisée par les randonneurs. Dès lors, c'est à bon droit que les juges de première instance ont estimé que compte tenu de la présomption d'affectation non utilement combattue par la commune, les dispositions de l'article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime faisaient obstacle à la cession par la commune du Técou de cette partie de chemin rural.
5. Il résulte de ce qui précède, que la commune de Técou n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a annulé sa délibération du 26 octobre 2015 en tant qu'elle modifie l'assiette du chemin rural de Técou à Cocart en procédant à la vente d'une parcelle communale de 252 m2 au prix de 1,60 euros le mètre carré.
Sur les frais liés à l'instance :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme D..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la commune de Técou au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune, la somme de 1 500 euros qu'elle versera à Mme D... sur le fondement des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Técou est rejetée.
Article 2 : La commune de Técou versera à Mme D..., la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Técou et à Mme C... D....
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, présidente,
Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,
Mme Charlotte Isoard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 février 2022.
La rapporteure,
Fabienne Zuccarello La présidente,
Marianne Hardy
La greffière,
Sophie Lecarpentier
La République mande et ordonne au préfet du Tarn en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX02001