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17/12/2021 | FRANCE | N°19BX04461

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 17 décembre 2021, 19BX04461


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Euro Constructions Industries Outre-Mer (ECIOM) a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de prononcer la décharge des impositions supplémentaires mises en recouvrement les 31 janvier 2018 et 16 décembre 2016 pour des montants respectifs de 64 970 euros et de 252 206 euros.

Par un jugement n° 1800367 du 26 septembre 2019, le tribunal administratif de la Guadeloupe a prononcé la décharge du rappel de taxe sur les véhicules de société réclamé à la société ECIOM, pour un m

ontant de 8 985 euros, et rejeté le surplus des conclusions de sa requête.

Procédure...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Euro Constructions Industries Outre-Mer (ECIOM) a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de prononcer la décharge des impositions supplémentaires mises en recouvrement les 31 janvier 2018 et 16 décembre 2016 pour des montants respectifs de 64 970 euros et de 252 206 euros.

Par un jugement n° 1800367 du 26 septembre 2019, le tribunal administratif de la Guadeloupe a prononcé la décharge du rappel de taxe sur les véhicules de société réclamé à la société ECIOM, pour un montant de 8 985 euros, et rejeté le surplus des conclusions de sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 novembre 2019, et un mémoire enregistré le 29 septembre 2020, la société ECIOM, représentée par Me Dewolf, demande à la cour :

1°) de prononcer la décharge totale des impositions supplémentaires mises à sa charge par avis de mise en recouvrement du 31 janvier 2018 et du 16 décembre 2016 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- le tribunal a omis de statuer sur le moyen selon lequel la procédure d'imposition ayant conduit aux rappels de cotisations de participation des employeurs à la formation professionnelle continue méconnait les dispositions de l'article L. 47 du Livre des procédures fiscales (LPF) ;

En ce qui concerne la procédure :

- les dispositions du 1er alinéa de l'article L. 47 LPF ont été méconnues en l'absence d'information en temps utile de la nouvelle date de première intervention, communiquée par téléphone par le vérificateur la veille pour le lendemain ;

- les dispositions combinées des articles L. 59 A du LPF et 348 annexe III du code général des impôts (CGI) n'ont pas été respectées, de sorte qu'elle n'a pas bénéficié d'un recours effectif devant la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires dès lors qu'elle n'a pas été informé du maintien de la séance dont elle avait demandé le report afin que soit convoqué un représentant de l'organisation professionnelle de son choix ;

- la procédure de contrôle de la participation des employeurs à la formation professionnelle continue est viciée au regard des dispositions des articles L. 10, L. 47, L. 66 et L. 67 du LPF en ce que l'administration l'a taxée sans lui avoir adressé au préalable une mise en demeure de déposer les déclarations correspondantes. De plus, la participation sur la formation professionnelle continue ne pouvait faire l'objet d'un redressement eu égard au champ des impositions visées par l'avis de vérification ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

- la preuve de la rétention de la TV A n'est pas apportée à défaut de rapprochement avec ses comptes bancaires ;

- le redressement au titre du passif injustifié pour 57 111 euros n'est pas fondé à hauteur de 51 966 euros pour les dettes fiscales suivantes : effort de construction comptabilisée en 2005 qui correspond à une dette inscrite plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit, d'un montant de 2 336 euros, pour laquelle elle demande le droit à l'oubli, et la CVAE 2012 et les taxes professionnelles 2008 et 2009 qui n'étaient pas atteintes par la prescription de recouvrement et qui ont été réintégrées à tort, par le service, dans les résultats de l'exercice 2013.

Par mémoires en défense enregistrés le 3 juin 2020 et le 12 juillet 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 3 juin 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 septembre 2021 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dominique Ferrari,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique,

- et les observations de Me Dewolf, représentant la société ECIOM.

Une note en délibéré présentée pour la société ECIOM a été enregistrée le 23 novembre 2021.

Considérant ce qui suit :

1. La société Euro Constructions Industries Outre-Mer (ECIOM), qui exerce une activité de construction de bâtiments, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014. À l'issue des opérations de contrôle, la société a été informée des rectifications envisagées au titre des deux exercices vérifiés en matière de taxe sur la valeur ajoutée, d'impôt sur les sociétés, de taxe d'apprentissage, de participation des employeurs à la formation professionnelle continue et de taxe sur les véhicules des sociétés par proposition de rectification n° 3924 du 7 juin 2016. Les impositions résultant de cette vérification ont été partiellement mises en recouvrement le 16 décembre 2016 pour un montant de 252 206 euros concernant la TVA collectée, la taxe d'apprentissage et la taxe sur les véhicules des sociétés, puis, après notification de l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qui, réunie le 17 octobre 2017, s'est déclarée incompétente, le 31 janvier 2018 pour un montant de 64 970 euros, concernant la TVA déductible, l'impôt sur les sociétés et la formation professionnelle continue. L'ensemble de ces impositions ont été contestées et par jugement du 26 septembre 2019, le tribunal administratif de la Guadeloupe a prononcé la décharge du rappel de taxe sur les véhicules de société réclamé à la société ECIOM au titre de la période du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2013, pour un montant de 8 985 euros, et rejeté le surplus des conclusions en décharge. La société ECIOM relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit intégralement à sa demande de décharge.

Sur la régularité du jugement :

2. La société ECIOM soutient que les premiers juges auraient omis de se prononcer sur le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de contrôle de la participation des employeurs à la formation professionnelle continue au regard des dispositions de l'article L.47 du livre des procédures fiscales du fait que la vérification de comptabilité ne pouvait excéder le champ des impositions et années mentionnées sur l'avis de vérification. Toutefois, d'une part, le jugement critiqué, indique avec suffisamment de précision les motifs pour lesquels les moyens tendant à contester la régularité de la procédure de contrôle de la participation des employeurs à la formation professionnelle continue devaient être écartés (points 8 et 9 du jugement). D'autre part, il résulte de la lettre même de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, que les seules mentions devant obligatoirement figurer sur l'avis de vérification sont, sous peine de nullité de la procédure, les années soumises à vérification et la faculté pour le contribuable de se faire assister par un conseil de son choix. Par suite, la circonstance selon laquelle l'avis qui a été adressé à la société requérante, lequel comportait les mentions susrappelées et indiquait que " la vérification porterait sur les déclarations fiscales ou opérations susceptibles d'être examinées ", ne visait pas la participation des employeurs à la formation professionnelle continue au titre de laquelle aucune déclaration n'a été déposée, n'est pas de nature à vicier la procédure d'imposition. Dès lors, en s'abstenant de répondre à ce moyen inopérant, le tribunal administratif n'a pas entaché son jugement d'un vice de nature à en entraîner l'annulation.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la procédure :

2. En premier lieu, la société ECIOM soutient qu'au regard des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, la procédure de vérification serait irrégulière. A cet égard, elle fait valoir que la première intervention sur place du vérificateur a eu lieu le 19 février 2016, alors que l'avis de vérification mentionnait le 15 février 2016 comme date de début de la vérification, et qu'elle n'a été informée de ce changement de date, par téléphone, que la veille du début de la vérification, soit le 18 février 2016, l'empêchant ainsi de pouvoir être assistée du conseil de son choix.

3. Aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. (...) ". Il résulte de ces dispositions que la première intervention de l'administration sur place aux fins de vérification de la comptabilité du contribuable ne peut avoir lieu qu'après que ce dernier a été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de notification, dans un délai raisonnable qui ne peut être inférieur à deux jours ouvrés, de l'engagement du contrôle, cette garantie étant de nature à permettre au contribuable d'être présent ou représenté lors des interventions sur place du vérificateur.

4. Toutefois, lorsqu'un contribuable a été régulièrement informé de l'engagement d'une procédure de vérification par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification, dans les conditions prévues à l'article L. 47 du livre des procédures fiscales citées au point 3 ci-dessus, aucune disposition législative ou réglementaire ne prescrit à l'administration, lorsqu'elle décide de reporter, de sa propre initiative ou à la demande du contribuable, la date qui avait été initialement prévue pour la première intervention sur place du vérificateur, d'envoyer ou de remettre un avis de vérification rectificatif au contribuable. L'administration est en revanche tenue d'informer le contribuable en temps utile, par tous moyens, de la date à laquelle est reporté le début des opérations de vérification.

5. En l'espèce, la société ECIOM a reçu le 1er février 2016 un avis de vérification l'informant que la première intervention sur place était prévue le lundi 15 février 2016 à 10 heures. L'avis indiquait la possibilité pour le contribuable de se faire assister par un conseil de son choix lors des opérations de contrôle. Il résulte également de l'instruction que si le vérificateur n'est pas intervenu pour la première fois le lundi 15 février 2016 comme le mentionnait l'avis de vérification, mais le vendredi 19 février 2016, il en a informé préalablement le gérant de la société par appel téléphonique, celui-ci l'ayant reconnu dans ses écritures. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'avis de vérification que la société requérante a reçu le 1er février 2016, soit plus de quinze jours francs avant le début des opérations de contrôle, mentionnait la possibilité pour le contribuable de se faire assister par un conseil de son choix. Or, il est constant que le gérant de la société accompagné d'une représentante du cabinet comptable de la société, qui l'a d'ailleurs assisté tout au long des opérations de contrôle, était présent pour recevoir le vérificateur le vendredi 19 février 2016 à 10 heures. Dans ces conditions, alors même que la société soutient que son gérant aurait été seulement informé par un appel téléphonique la veille de la première intervention du vérificateur, il doit être tenu pour établi que le contribuable a bien été averti en temps utile de la date à laquelle était reportée le début des opérations de vérification, et a ainsi disposé d 'un délai suffisant pour se faire assister d 'un conseil de son choix. Le moyen tenant au non-respect des dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales sera donc écarté.

6. En deuxième lieu, la société requérante soutient qu'elle n'a pas bénéficié d'un recours effectif devant la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires dès lors qu'elle n'a pas été informé du maintien de la séance dont elle avait demandé le report afin que soit convoqué un représentant de l'organisation professionnelle de son choix, en méconnaissance des dispositions combinées des articles L. 59 A du livre des procédures fiscales et 348 annexe III du code général des impôts.

7. Toutefois, aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. (...) ". Il résulte ainsi de ces dispositions que les vices de forme ou de procédure dont serait entaché l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'affectent pas la régularité de la procédure d'imposition et ne sont, par suite, pas de nature à entraîner la décharge de l'imposition établie à la suite des rectifications ou redressements soumis à l'examen de la commission.

8. En l'espèce, il résulte de l'instruction que par courrier du 21 octobre 2016, la société ECIOM a sollicité la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires pour les points suivants : impôt sur les sociétés pour le passif injustifié et les avantages en nature, TVA déductible et formation professionnelle continue. Par lettre du 12 septembre 2017, le secrétariat de la commission l'a invité à désigner un représentant de l'organisation professionnelle de son choix. La société fait valoir que par télécopie en réponse du 13 octobre 2017, soit dans le délai ouvert par le 1 du II de l'article 348 de l'annexe III au code général des impôts, elle a indiqué souhaiter la nomination d'un représentant de son centre de gestion agrée et qu'à cette fin elle sollicitait un report de séance. Or, ce report ne lui a pas été accordé par le président de la commission et dans sa séance du 17 octobre 2017, la commission s'est déclarée incompétente pour connaitre du litige. La société soutient qu'elle n'a pas été informée du refus de sa demande de report et qu'ainsi elle n'a pu présenter sa défense devant la commission et que dès lors la procédure d'imposition concernant les chefs de redressement soumis à l'appréciation de la commission a été viciée. Cependant, la circonstance que le représentant des contribuables, dont la société ECIOM a demandé la désignation, n'a pas siégé à la séance de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires du 17 octobre 2017 est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition. Par suite, le moyen tiré de ce que ladite procédure serait irrégulière, au motif qu'elle n'a pas été informée du maintien de la séance dont elle avait demandé le report afin que soit convoqué un représentant de l'organisation professionnelle de son choix, doit être écarté.

9. En troisième lieu, la société requérante soutient que la procédure de contrôle de la participation des employeurs au financement de la formation professionnelle continue serait viciée au regard des dispositions des articles L. 10, L. 47, L. 66 et L. 68 du livre des procédures fiscales puisque l'administration l'aurait taxée sans lui avoir adressé au préalable une mise en demeure de déposer les déclarations correspondantes. Elle ajoute que de plus, la participation sur la formation professionnelle continue ne pouvait faire l'objet d'un redressement eu égard au champ des impositions visées par l'avis de vérification.

10. Il n'est pas contesté que la société ECIOM n'a pas acquitté, auprès d'organismes collecteurs agréés ou habilités, le paiement des cotisations afférentes à la participation à la formation professionnelle continue à laquelle elle était tenue au titre des années 2013 et 2014 et n'a pas déposé les déclarations modèle 2483 prévue par l'article 235 ter J du code général des impôts retraçant le montant des participations ou des dépenses effectuées à ce titre. Dans cette situation, l'administration était fondée à recourir à une procédure d'imposition d'office conformément aux dispositions du 5° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales. Cependant, il ressort de l'instruction que les rappels de cotisation à cette taxe qui ont été réclamés à la société requérante au titre des années 2013 et 2014 ont été établis par l'administration selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales. Ainsi le moyen tiré de ce que les impositions en cause n'étaient pas conformes aux dispositions précitées du livre des procédures fiscales, faute pour l'administration d'avoir adressé au contribuable une mise en demeure de souscrire ses déclarations est en l'espèce, inopérant. Par ailleurs, la circonstance que l'administration était en droit de procéder à une taxation d'office ne faisait pas obstacle à ce qu'elle décide de suivre une procédure contradictoire.

11. En outre, il résulte des dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, que les seules mentions devant obligatoirement figurer sur l'avis de vérification sont, sous peine de nullité de la procédure, les années soumises à vérification et la faculté pour le contribuable de se faire assister par un conseil de son choix. Par suite, la circonstance selon laquelle l'avis qui a été adressé à la société requérante, lequel comportait les mentions susrappelées et indiquait que " la vérification porterait sur les déclarations fiscales ou opérations susceptibles d'être examinées ", ne visait pas expressément la participation des employeurs à la formation professionnelle continue au titre de laquelle aucune déclaration n'a été déposée, n'est pas de nature à vicier la procédure d'imposition. Le moyen sera écarté.

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

S'agissant des rappels de TVA collectée au titre des exercices clos en 2013 et 2014 :

12. Aux termes des dispositions de l'article 256 du code général des impôts dans sa version alors applicable : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. / (...) IV. 1° Les opérations autres que celles qui sont définies au II notamment (...) les travaux immobiliers, (...) sont considérées comme des prestations de services ". Par ailleurs, aux termes du a du 1 de l'article 269 du même code pour les travaux immobiliers, le fait générateur de la TVA se produit au moment où la prestation de service est effectuée et aux termes du c du 2 du même article, la taxe sur les prestations de service est exigible lors de l'encaissement du prix ou d'un acompte. Il en résulte que le chiffre d'affaires déclaré en TVA au titre d'un exercice doit correspondre au chiffre d'affaires réalisé au cours de la même période.

13. En l'espèce, il résulte de l'instruction que le vérificateur a constaté des discordances au titre des années 2013 et 2014 entre les encaissements de taxe à la valeur ajoutée réalisés par la société et les chiffres qu'elle a déclarés au titre des mêmes périodes. Il en est résulté des rappels de TVA au titre des années 2013 et 2014 pour des montants respectifs de 130 550 euros et de 65 393 euros. Pour contester ces rappels la société se borne à reprendre en appel le moyen selon lequel à défaut de rapprochement des encaissements retenus par le service avec les crédits bancaires de la société, la preuve du bien-fondé des rappels de TVA ne serait pas apportée. Cependant, il résulte de l'instruction que les insuffisances de chiffres déclarés en taxe à la valeur ajoutée tels que relevées par le vérificateur résultent justement de rapprochement entre les déclarations du contribuable et les encaissements comptabilisés tels qu'ils ressortent de sa comptabilité, appuyées par des pièces justificatives. Dès lors, il y a lieu d'adopter les motifs ainsi retenus à bon droit par les premiers juges et d'écarter le moyen.

S'agissant du redressement résultant de l'existence d'un passif injustifié comptabilisé au titre de l'exercice clos en 2013 :

14. Aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ". Aux termes du 4 bis du même article 38 : " Pour l'application des dispositions du 2, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci./ Les dispositions du premier alinéa ne s'appliquent pas lorsque l'entreprise apporte la preuve que ces omissions ou erreurs sont intervenues plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit ".

15. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour (...) l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. (...) ". Aux termes de l'article L. 176 du même livre : " Pour les taxes sur le chiffre d'affaires, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année suivant celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible conformément aux dispositions du 2 de l'article 269 du code général des impôts. (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 189 dudit livre : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification, par la déclaration ou la notification d'un procès-verbal, de même que par tout acte comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous les autres actes interruptifs de droit commun. " Enfin, aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : " Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable ".

16. Il résulte de l'instruction que lors des opérations de contrôle, le service vérificateur a relevé un compte de passif " État - Charges à payer " présentant un solde créditeur à l'ouverture du premier exercice vérifié, le 1er janvier 2013, de 126 169 euros, qui a donc été réintégré au résultat imposable du premier exercice non prescrit. Puis, afin de tenir compte des observations de la société en matière de délai de reprise et d'action en recouvrement de l'administration quant aux dettes fiscales maintenues au passif, la rectification proposée a été ramenée à 57 111 euros. L'administration fiscale a remis en cause cette somme au motif que la société aurait dû constater l'extinction de la dette à la fin de l'exercice 2013 en l'absence de possibilité pour elle d'en obtenir le recouvrement du fait de l'acquisition de la prescription de l'action en recouvrement du comptable public prévue par l'article L. 274 du livre des procédures fiscales.

17. La société conteste ce redressement en faisant valoir tout d'abord, pour la première fois en appel, que la CVAE 2012, d'un montant de 1 061 euros, n'était pas prescrite. Cependant, l'administration fait valoir, sans être sérieusement contredite, que dans sa réponse aux observations de la société du 15 septembre 2016, elle a indiqué à la société ECIOM que la cotisation de l'année 2012 avait été payée le 1er mai 2013 et que la dette correspondante à 1'égard du trésor avait été maintenue à tort par la société au passif du bilan de 1'exercice clos en 2013. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a annulé l'inscription de cette somme au passif du bilan de la société et l'a réintégré à son bénéfice imposable pour l'exercice 2013.

18. La société fait ensuite valoir que s'agissant de ses dettes de taxe professionnelle de 2006 à 2009, l'administration n'établit pas qu'elles étaient prescrites à l'ouverture du premier exercice vérifié. Elle ajoute que pour les taxes professionnelles 2008 et 2009, ces dettes n'étaient pas atteintes par la prescription quadriennale du recouvrement en 2013, puisque la taxe professionnelle 2008 se déclarait en mai 2009 et la taxe professionnelle 2009 en mai 2010. Cependant, d'une part, aux termes de l'article 1477 du code général des impôts, " Les contribuables doivent déclarer les bases de taxe professionnelle avant le 1er mai de l'année précédant celle de l'imposition (...) " et la cotisation est mise en recouvrement en décembre de l'année d'imposition. D'autre part, il résulte des dispositions de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales précité que la société ECIOM, à défaut d'avoir été poursuivie par le comptable public pendant quatre années consécutives, ne pouvait plus, à la clôture de l'exercice 2013, être recherchée en paiement de la taxe professionnelle émise au titre des années 2006, 2007, 2008 et 2009. A cet égard, la requérante, qui se prévaut de la non-prescription des impositions de taxe professionnelle, ne produit aucun acte d'exécution forcé que lui aurait adressé le comptable public pour le recouvrement de ces créances qui aurait été susceptible d'interrompre la prescription du recouvrement. Dès lors, l'administration était fondée à annuler l'inscription de la somme correspondant aux cotisations de taxe professionnelle des années 2006 à 2009 inscrite au passif de son bilan et de la réintégrer à son bénéfice imposable pour l'exercice 2013.

19. Enfin, la société ECIOM soutient que la contribution à l'effort de construction provisionnée en 2005 pour un montant de 2 336 euros, est une écriture comptabilisée en 2005 qui correspond ainsi à une dette inscrite plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit, pour laquelle elle demande le droit à l'oubli résultant des dispositions précitées du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts. A l'appui de cette affirmation, la société produit pour la première fois en appel, une attestation de son expert-comptable, datée du 8 décembre 2020. Cependant, l'inscription non justifiée d'une provision pendant plusieurs exercices successifs constitue la répétition d'une même erreur qui ne peut pas être corrigée dans le bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit, alors même qu'elle a été commise pour la première fois il y a plus de sept ans. Dès lors, l'administration était fondée à annuler l'inscription de cette somme inscrite au passif de son bilan et à la réintégrer à son bénéfice imposable pour l'exercice 2013.

20. Il résulte de tout ce qui précède, que la société ECIOM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge des impositions restants en litige.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par la société ECIOM soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Euro Constructions Industries Outre-Mer (ECIOM) est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Euro Constructions Industries Outre-Mer (ECIOM) et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2021.

Le rapporteur,

Dominique Ferrari La présidente,

Evelyne Balzamo Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

9

N° 19BX04461


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX04461
Date de la décision : 17/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Recouvrement.

Contributions et taxes - Généralités - Recouvrement - Action en recouvrement.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Dominique FERRARI
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : CABINET IN FINE;CABINET IN FINE;CABINET IN FINE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-12-17;19bx04461 ?
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