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17/12/2021 | FRANCE | N°19BX02152

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 17 décembre 2021, 19BX02152


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) Jaureguy et M. B... A..., en sa qualité de gérant de ladite EARL, ont demandé au tribunal administratif de Pau :

1°) par une requête enregistrée sous le n° 1700046, d'annuler la décision du 8 juillet 2016 par laquelle le préfet des Pyrénées-Atlantiques et le président du conseil régional Aquitaine ont accordé à l'EARL Jauréguy une autorisation de financement par un prêt à moyen terme spécial " Jeune agriculteur " en vue de la const

ruction d'un hangar de stockage en tant qu'elles fixent le plafond maximal de subvention à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) Jaureguy et M. B... A..., en sa qualité de gérant de ladite EARL, ont demandé au tribunal administratif de Pau :

1°) par une requête enregistrée sous le n° 1700046, d'annuler la décision du 8 juillet 2016 par laquelle le préfet des Pyrénées-Atlantiques et le président du conseil régional Aquitaine ont accordé à l'EARL Jauréguy une autorisation de financement par un prêt à moyen terme spécial " Jeune agriculteur " en vue de la construction d'un hangar de stockage en tant qu'elles fixent le plafond maximal de subvention à 22 000 euros, ensemble la décision du 22 décembre 2016 de rejet du recours gracieux dirigé contre cette première décision et d'annuler la décision du 11 juillet 2016 par laquelle ces mêmes autorités ont accordé à l'EARL Jauréguy une autorisation de financement par un prêt à moyen terme spécial " Jeune agriculteur " en vue de l'aménagement d'une bergerie, ensemble la décision du 22 décembre 2016 de rejet du recours gracieux dirigé contre cette première décision ;

2°) par une requête enregistrée sous le numéro 1700416, d'annuler la convention du 23 décembre 2016 par laquelle le président du conseil régional Aquitaine et le préfet des Pyrénées-Atlantiques leur ont accordé une aide au titre du dispositif PCAE-AREA de 26 944,99 euros en tant qu'elle limite l'assiette de dépenses éligibles et retenues à un montant de 60 000 euros.

Par un jugement n° 1700046-1700416 du 28 mars 2019, le tribunal administratif de Pau a prononcé l'annulation de la convention du 23 décembre 2016 par laquelle le président du conseil régional Aquitaine et le préfet des Pyrénées-Atlantiques a accordé à l'EARL Jauréguy une aide au titre du dispositif PCAE-AREA de 26 944,99 euros sur la base d'une assiette de dépenses éligibles et retenues au titre de l'AREA PCAE en tant qu'elle la limite à un montant de 60 000 euros, mis à la charge de la région Nouvelle-Aquitaine et de l'Etat une somme de 600 euros à verser, chacun, à l'EARL Jauréguy en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 mai 2019, et un mémoire enregistré le 9 juillet 2020, la région Nouvelle-Aquitaine, représentée par la société d'avocats Ernst et Young, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Pau du 28 mars 2019 ;

2°) à titre subsidiaire, de déclarer irrecevable pour tardiveté la requête de première instance de l'EARL Jauréguy enregistrée sous le n° 1700416 ;

3°) à titre infiniment subsidiaire de rejeter les conclusions à fin d'annulation de la convention du 23 décembre 2016 telles que présentées par l'EARL Jauréguy en première instance ;

4°) en tout état de cause, de rejeter l'appel incident et condamner l'EARL Jauréguy à verser la somme de 4 000 euros à la région Nouvelle-Aquitaine au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'une irrégularité car il s'est fondé sur le 6° de l'article L. 211-2 du code des relations du public et de l'administration (CREPA) pour décider l'annulation de la subvention PCAE-AREA. Or ce moyen n'a pas été expressément invoqué par l'une des parties. Dès lors, cette substitution de motif initiée par le tribunal constitue une erreur de droit. En tout état de cause, les parties n'ont pas été mises à même de discuter sur le fondement de cet article que le tribunal a relevé d'office ;

- l'EARL Jauréguy n'avait pas intérêt à agir contre une décision qui lui était favorable en conséquence, le jugement faisant droit aux conclusions de la requête n° 1700416 doit être annulé ;

- le jugement se fonde sur l'article L. 211-2.6° du CREPA pour annuler la décision d'attribution de la subvention limitée à un montant de 60 000 euros pour insuffisance de motivation. Or, cette obligation de motivation ne s'applique pas à une décision partiellement favorable ;

- au regard de l'article L. 211-2.3° du CREPA soulevé par l'EARL Jauréguy, la Cour constatera le caractère infondé d'un tel moyen dans mesure où il ne s'agit toujours pas d'une décision défavorable ;

- la requête n° 1700416 est irrecevable pour forclusion ;

- la notation allouée à l'EARL Jauréguy est conforme aux critères prédéfinis et ces derniers ne portent pas atteinte au principe d'égalité ;

- concernant l'appel incident de l'EARL Jauréguy, cette dernière ainsi que M. A..., ne justifient pas d'un intérêt à agir en vue d'obtenir l'annulation des décisions contestées par lesquelles ils ont obtenu le maximum d'aide qui pouvait leur être accordé au titre du plafond applicable dans les zones agricoles défavorisées.

Par mémoire en défense enregistré le 24 avril 2020, l'EARL Jaureguy et M. A..., en sa qualité de gérant de ladite EARL, représentés par Me Merll, concluent :

1°) au rejet de la requête et à la confirmation du jugement du 28 mars 2019 du tribunal administratif de Pau en ce qu'il a prononcé l'annulation de la décision du 23 décembre 2016, par laquelle la région Nouvelle Aquitaine et le ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt ont accordé une aide à l'EARL Jauréguy au titre du dispositif PCAE -AREA de 26 944,99 euros sur la base d'une assiette de dépense éligibles et retenues au titre de l'AREA PCAE d'un montant de 60 000 euros ;

2°) à l'infirmation du jugement du 28 mars 2019 du tribunal administratif de Pau en ce qu'il a jugé l'irrecevabilité des conclusions à fin d'annulation des décisions d'autorisation de financement par un prêt moyen terme spécial " Jeune agriculteur " des 8 juillet 2016, 11 juillet 2016 et 22 décembre 2016 ;

3°) et statuant à nouveau, d'annuler lesdites décisions des 8 juillet 2016, 11 juillet 2016 et 22 décembre 2016 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir :

- par appel incident, qu'ils ont intérêt à agir contre les décisions d'autorisation de financement par un prêt moyen terme spécial " Jeune agriculteur " des 8 juillet 2016, 11 juillet 2016 et 22 décembre 2016, alors même que l'EARL Jauréguy s'est vu accorder une subvention, celle-ci ayant été éligible à un plafond moindre par rapport à une exploitation située dans la même zone géographique qui élève des brebis de races rustiques et adhérente à l'AOP " Ossau-Iraty " ;

- les décisions attaquées sont insuffisamment motivées au regard des exigences de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration en ce qu'elles n'explicitent pas le montant du plafond de subvention qui lui a été appliqué ;

- les décisions attaquées contreviennent au principe d'égalité ; le règlement d'appel à projet aquitain emporte une différence de traitement entre les éleveurs de Lacaune selon la zone géographique où est située l'exploitation alors que l'article 34 du règlement (UE) 1303/2013 et l'article 49 du règlement 1305/2013 garantissent une égalité de traitement entre les demandeurs.

Par mémoire enregistré le 16 février 2021, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation s'associe aux écritures de la région Nouvelle-Aquitaine.

Par une ordonnance du 17 février 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 mars 2021 à 12h00.

Par un courrier en date du 16 novembre 2021, les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité de l'appel incident qui se rapporte à un litige distinct de l'appel principal.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n°1303/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, portant dispositions générales applicables au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, et abrogeant le règlement ;

- le règlement (UE) n° 1305/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relatif au soutien au développement rural par le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) ;

- le décret 2015-445 relatif à la mise en œuvre des programmes de développement rural pour la période 2014-2020 ;

- le décret 2016-279 du 8 mars 2016 fixant les règles nationales d'éligibilité des dépenses dans le cadre des programmes soutenus par les fonds structurels et d'investissement européens pour la période 2014-2020 ;

- l'arrêté du 7 mars 2008 relatif aux prêts à moyen terme spéciaux d'installation ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dominique Ferrari,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Le 23 juin 2016, l'EARL Jauréguy et M. A..., gérant de cette exploitation, ont déposé des demandes d'autorisation de financement pour des prêts à moyen terme spécial " Jeune agriculteur " en vue respectivement de l'aménagement d'une bergerie et de l'édification d'un hangar de stockage. Par décisions du préfet des Pyrénées-Atlantiques et du président du conseil régional d'Aquitaine du 8 juillet 2016 et du 11 juillet 2016, ces autorisations ont été délivrées avec un plafond de subvention maximal défini à hauteur de 22 000 euros. Estimant que ces plafonds étaient insuffisants, M. A... et l'EARL Jauréguy ont formé un recours gracieux le 12 septembre 2016, qui a été rejeté par décision du 22 décembre 2016. Par requête, enregistrée sous le n° 1700046, M. A... et l'EARL Jauréguy ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler les décisions du 8 juillet 2016, du 11 juillet 2016 et du 22 décembre 2016 en tant qu'elles fixent le plafond maximal de subvention à 22 000 euros. Parallèlement, dans le cadre de ces mêmes projets, l'EARL Jauréguy a déposé, le 25 avril 2016, une demande de subvention de la région Aquitaine et de l'Etat au titre du plan de compétitivité et d'adaptation en agriculture-agriculture respectueuse de l'environnement en Aquitaine (PCAE-AREA) instaurée dans le cadre du fonds européen de développement agricole et le 23 décembre 2016, cette subvention lui a été accordée, par convention conclue avec le président du conseil régional Nouvelle-Aquitaine et le préfet des Pyrénées-Atlantiques, pour un montant total de 26 944,96 euros, sur la base d'une assiette de dépenses éligibles et retenues à hauteur de 60 000 euros. Toutefois, s'estimant également lésés par l'application de ce plafond, M. A... et l'EARL Jauréguy ont demandé au tribunal administratif de Pau, par une seconde requête enregistrée sous le n° 1700416, d'annuler cette convention en tant qu'elle limite ladite assiette à un montant de 60 000 euros. Par jugement du 28 mars 2019, le tribunal, après avoir joint les deux requêtes, a estimé irrecevables les demandes d'annulations des autorisations de financements des deux prêts bonifiés (requête n° 170046) et a en revanche prononcé l'annulation de la convention du 23 décembre 2016 accordant une subvention de 26 944 euros à l'EARL Jauréguy. La Région Nouvelle-Aquitaine relève appel de ce jugement en ce qu'il a admis la requête n° 1700416 comme recevable et en ce qu'il a prononcé l'annulation de la convention du 23 décembre 2016. Par appel incident, l'EARL Jauréguy et M. A... demandent à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a jugé irrecevables les conclusions à fin d'annulation des décisions d'autorisation de financement par un prêt moyen terme spécial " Jeune agriculteur " des 8 juillet 2016, 11 juillet 2016 et 22 décembre 2016.

Sur l'appel principal :

2. La région Nouvelle Aquitaine soutient que la requête de première instance de l'EARL Jauréguy dirigée contre la convention du 23 décembre 2016, portant attribution de subvention, est tardive.

3. La décision d'attribution d'une subvention par une personne publique, quelle que soit la forme qu'elle revêt, constitue un acte unilatéral et relève donc du recours pour excès de pouvoir.

4. Il ressort des pièces du dossier que l'EARL Jauréguy a pris connaissance de l'attribution de la subvention qui lui été accordée, lorsqu'elle a signé la convention portant attribution de cette subvention, par l'intermédiaire de son gérant, M. A..., le 23 décembre 2016 et que conformément aux dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative, les voies et délais de recours étaient mentionnés à l'article 11 de ladite convention. Dès lors, la région Nouvelle Aquitaine est fondée à soutenir que la requête n° 1700416, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Pau le 1er mars 2017, soit après l'expiration du délai de recours contentieux, était tardive et par suite irrecevable.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement, que la région Nouvelle Aquitaine est fondée à demander l'annulation de l'article 1er du jugement du 28 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a prononcé l'annulation de la convention du 23 décembre 2016.

Sur l'appel incident :

6. L'EARL Jauréguy et M. A..., contestent, par la voie de l'appel incident, le jugement du 28 mars 2019 du tribunal administratif de Pau en ce qu'il a rejeté leurs conclusions à fin d'annulation des décisions d'autorisation de financement par un prêt à moyen terme spécial " Jeune agriculteur " des 8 juillet 2016, 11 juillet 2016 et 22 décembre 2016 pour irrecevabilité en raison d'un défaut d'intérêt à agir à l'encontre de décisions qui leur sont favorables. Cependant leur contestation porte sur des actes distincts de l'acte contesté par l'appel principal. Dès lors, l'appel incident qui soulève un litige distinct n'est pas recevable.

7. Il résulte de ce qui précède que l'EARL Jauréguy et M. A... ne sont pas recevables à solliciter, par la voie de l'appel incident, l'annulation des décisions sus-rappelées du 8 juillet 2016, du 11 juillet 2016 et du 22 décembre 2016.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Les articles 1 et 2 du jugement du tribunal administratif de Pau du 28 mars 2019 sont annulés.

Article 2 : La demande de l'EARL Jauréguy et de M. A... et le surplus des conclusions des parties sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Région Nouvelle-Aquitaine, à l'EARL Jauréguy, à M. B... A... et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Atlantiques.

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. Nicolas Normand, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2021.

Le rapporteur,

Dominique Ferrari La présidente,

Evelyne Balzamo Le greffier,

Christophe Pelletier La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 19BX02152


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX02152
Date de la décision : 17/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Dominique FERRARI
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : ERNST et YOUNG SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-12-17;19bx02152 ?
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