Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par une requête enregistrée sous le n° 1701325, M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de surseoir à statuer dans l'attente des suites données à la plainte pénale qu'il a déposée auprès du procureur de la République et d'annuler la décision du 2 mars 2017 par laquelle le vice-président en charge de l'Administration générale et des Ressources humaines de Bordeaux métropole a refusé de le titulariser et prononcé son licenciement.
Par une requête enregistrée sous le n° 1701327, M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de surseoir à statuer dans l'attente des suites données à la plainte pénale qu'il a déposée auprès du procureur de la République et d'annuler la décision du 8 mars 2017 par laquelle le président de Bordeaux métropole a prononcé sa radiation des effectifs de cet établissement à compter du 1er avril 2017.
Par un jugement n° 1701325, 1701327 du 7 novembre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 janvier 2019, M. B... A..., représenté par Me Sutre, demande à la cour :
1°) de surseoir à statuer dans l'attente des suites données à la plainte pénale qu'il a déposée auprès du procureur de la République du tribunal de grand instance de Bordeaux ;
2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 novembre 2018 ;
3°) d'annuler la décision du 2 mars 2017 par laquelle le vice-président en charge de l'Administration générale et des Ressources humaines de Bordeaux métropole a refusé de le titulariser et prononcé son licenciement et la décision du 8 mars 2017 par laquelle la même autorité a prononcé sa radiation des effectifs de cet établissement à compter du 1er avril 2017 ;
4°) d'enjoindre à l'administration de le titulariser ;
5°) de mettre à la charge de Bordeaux métropole la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le principe du contradictoire et des droits de la défense ont été violés dès lors que le refus de titularisation sanctionnant un prétendu manquement à ses obligations, il devait se voir communiquer son dossier afin de prendre connaissance des griefs formulés contre lui ; le refus de titularisation revêt en réalité le caractère d'une mesure disciplinaire ; ses compétences professionnelles dans l'exécution de ses fonctions n'ont pas été mises en cause ;
- les pièces produites par l'administration ne permettent pas d'établir la matérialité des faits qui lui sont reprochés, qu'il s'agisse de la note de son supérieur hiérarchique direct du 30 mai 2016 rédigée pour les besoins de la cause, et la lettre d'observations du 27 juin 2016 ; il établit que c'est lui qui a fait l'objet d'une agression de la part d'une commerçante le 24 juin 2016 alors qu'il était en service sur le cours de l'Intendance, et en le dénonçant à sa hiérarchie ; cette agression, dont il n'est pas responsable, a justifié qu'il dépose une plainte en dénonciation calomnieuse auprès du procureur de la République le 28 août 2017 ;
- dès lors que de nombreuses attestations viennent contredire le rapport défavorable établi par sa hiérarchie, le refus de titularisation est entaché d'une erreur matérielle ; ses prétendues difficultés relationnelles et son impulsivité ne sont pas démontrées ;
- la décision de l'autorité territoriale de ne pas le titulariser, en dépit de ses grandes qualités professionnelles, relève d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- à supposer même qu'il ait perdu son sang-froid face au comportement insultant d'un usager, il s'agit d'un fait isolé qui ne saurait à lui seul justifier son éviction du service ; la commission administrative paritaire a émis un avis défavorable au refus de titularisation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 mars 2021, Bordeaux métropole, représentée par Me Noël, conclut au rejet de la requête de M. A... et à ce qu'il soit mis à la charge de ce dernier la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;
- le décret n° 92-1194 du 4 novembre 1992 modifié ;
- le décret n° 2006-1691 du 22 décembre 2006 modifié ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Agnès Bourjol,
- les conclusions de Mme Isabelle Le Bris, rapporteure publique,
- et les observations de Me Delaisement, représentant Bordeaux métropole.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A... a été recruté par la commune de Bordeaux comme " collaborateur technique " du 4 août au 3 novembre 2015, puis en qualité de stagiaire au grade d'adjoint technique territorial de 2ème classe à compter du 1er décembre 2015. A la suite de la création de services communs avec Bordeaux métropole, il a été transféré le 1er janvier 2016 au sein des effectifs de cet établissement public de coopération intercommunale, où il a été affecté à la direction de la gestion de l'espace public du pôle territorial de Bordeaux en tant qu'agent chargé du nettoyage des voies publiques et du ramassage des déchets ménagers et des encombrants. Par une décision du 2 mars 2017, le vice-président en charge de l'Administration générale et des Ressources humaines de Bordeaux métropole a notifié à l'intéressé son refus de le titulariser à l'issue de son stage et son licenciement. Par une décision du 8 mars 2017 la même autorité a prononcé sa radiation des effectifs de Bordeaux métropole à compter du 1er avril 2017. Saisi par M. A... le 31 mai 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande présentée sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative tendant à la suspension de l'exécution de la décision du 2 mars 2017. Par jugement du 7 novembre 2018, ce même tribunal a rejeté la demande de M. A... tendant à l'annulation de ces deux décisions. M. A... relève appel de ce jugement.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes des dispositions de l'article 5 du décret du 4 novembre 1992 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires stagiaires : " Le fonctionnaire territorial stagiaire peut être licencié pour insuffisance professionnelle lorsqu'il est en stage depuis un temps au moins égal à la moitié de la durée normale du stage. Le licenciement est prononcé après avis de la commission administrative paritaire compétente pour le cadre d'emplois dans lequel l'intéressé a vocation à être titularisé (...) ". L'article 8 du décret du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux dispose : " Les candidats recrutés en qualité d'adjoint technique territorial de 2e classe sur un emploi d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public d'une collectivité territoriale (...) sont nommés stagiaires par l'autorité territoriale investie du pouvoir de nomination pour une durée d'un an ". Son article 10 dispose : " A l'issue du stage, les stagiaires dont les services ont donné satisfaction sont titularisés par décision de l'autorité territoriale investie du pouvoir de nomination (...). / Les autres stagiaires peuvent, sur décision de l'autorité territoriale, être autorisés à effectuer un stage complémentaire d'une durée maximale d'un an. Si le stage complémentaire a été jugé satisfaisant, les intéressés sont titularisés. / Les adjoints techniques territoriaux de 2e classe stagiaires (...) qui n'ont pas été autorisés à effectuer un stage complémentaire, ou dont le stage complémentaire n'a pas été jugé satisfaisant, sont soit licenciés s'ils n'avaient pas auparavant la qualité de fonctionnaire, soit réintégrés dans leur grade d'origine ".
3. Un agent public ayant, à la suite de son recrutement ou dans le cadre de la formation qui lui est dispensée, la qualité de stagiaire se trouve dans une situation probatoire et provisoire. La décision de ne pas le titulariser en fin de stage est fondée sur l'appréciation portée par l'autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne.
4. L'autorité compétente ne peut donc prendre légalement une décision de refus de titularisation, qui n'est soumise qu'aux formes et procédures expressément prévues par les lois et règlements, que si les faits qu'elle retient caractérisent des insuffisances dans l'exercice des fonctions et la manière de servir de l'intéressé. Cependant, la circonstance que tout ou partie de tels faits seraient également susceptibles de caractériser des fautes disciplinaires ne fait pas obstacle à ce que l'autorité compétente prenne légalement une décision de refus de titularisation, pourvu que l'intéressé ait alors été mis à même de faire valoir ses observations.
5. Il résulte de ce qui précède que, pour apprécier la légalité d'une décision de refus de titularisation, il incombe au juge de vérifier qu'elle ne repose pas sur des faits matériellement inexacts, qu'elle n'est entachée ni d'erreur de droit ni d'erreur manifeste dans l'appréciation de l'insuffisance professionnelle de l'intéressé, qu'elle ne revêt pas le caractère d'une sanction disciplinaire et n'est entachée d'aucun détournement de pouvoir et que, si elle est fondée sur des motifs qui caractérisent une insuffisance professionnelle mais aussi des fautes disciplinaires, l'intéressé a été mis à même de faire valoir ses observations.
En ce qui concerne la légalité externe :
6. Pour refuser de titulariser M. A... à l'issu de son stage, prononcer son licenciement et sa radiation des effectifs, le président de Bordeaux métropole a entendu se fonder sur sa manière de servir, en particulier son tempérament impulsif et ses difficultés relationnelles avec sa hiérarchie et les usagers. L'intéressé soutient que les décisions contestées ne sont en réalité pas motivées par son insuffisance professionnelle mais par un fait isolé à caractère fautif, résultant de l'altercation ayant eu lieu le 24 juin 2016 avec une commerçante de Bordeaux, pour lequel il aurait dû bénéficier de la possibilité d'obtenir la communication de son dossier individuel et d'émettre des observations. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il a été mis à même de faire valoir ses observations le 23 décembre 2016 à l'occasion d'un entretien préalable à l'issue de son stage avec le directeur de la gestion de l'espace public et de consulter son dossier administratif le 2 février 2017, préalablement à la réunion de la commission administrative paritaire qui a examiné sa situation le 13 février 2017. Ainsi, l'intéressé a été mis à même de connaître précisément la nature des griefs qui lui étaient reprochés. Dans ces conditions, la circonstance alléguée que son dossier individuel comportait une déclaration de main courante dont l'auteur n'était pas identifiable n'a pas été, en l'espèce, de nature à avoir privé l'intéressé d'une garantie. Par suite, et alors même que son comportement lors de l'incident du 24 juin 2016 peut être regardé comme caractérisant une faute disciplinaire, le moyen tiré de ce qu'il aurait été porté atteinte au principe du contradictoire ou aux droits de la défense doit être écarté comme manquant en fait.
En ce qui concerne la légalité interne :
7. En premier lieu, il ressort de la lettre du 2 mars 2017 du vice-président en charge de l'Administration générale et des Ressources humaines de Bordeaux métropole, informant l'intéressé du refus de sa titularisation et fixant son licenciement à la date du 31 mars 2017, qu'elle se réfère à l'arrêté portant refus de titularisation, notifié par pli séparé, lequel expose qu'" au regard du comportement professionnel de l'agent, véhiculant une image très négative de l'établissement et au titre duquel il a été à plusieurs reprises mis en garde, le président de Bordeaux Métropole a décidé de passer outre l'avis de la commission administrative paritaire ". Il ressort en effet des pièces du dossier que M. A... a éprouvé, durant toute la durée de son stage, des difficultés relationnelles importantes avec ses collègues, sa hiérarchie, et les usagers, caractérisées notamment par une attitude impulsive et arrogante, voire agressive, à l'origine de tensions et d'altercations fréquentes, caractérisant un manquement au devoir de réserve et de respect hiérarchique. En dépit des remarques et des rappels à l'ordre qui lui ont été adressés, M. A... n'a pas modifié son comportement. Ainsi, le supérieur hiérarchique direct de M. A... s'est plaint de son comportement désinvolte et irrespectueux à son égard à l'occasion d'une conversation téléphonique le 27 mai 2016, où l'intéressé signalait qu'il serait absent pour cause de maladie et qu'il lui était alors réclamé de produire un arrêt de travail. Si M. A... conteste la valeur probante de la note de service du 30 mai 2016 où son supérieur hiérarchique relate cette conversation, il n'établit pas qu'elle aurait été rédigée pour les seuls besoins de la cause au motif qu'elle comporte une date de réception par la DRH immédiatement postérieure à l'altercation du 24 juin 2016 susmentionnée et que la conversation en cause faisait référence à un arrêt de travail justifié médicalement. S'il conteste également la valeur probante du formulaire de saisine de la direction de la vie administrative et de la qualité de vie au travail du 16 juin 2016, émanant du chef du service dont il dépendait, au motif qu'elle ne comporte aucun grief précis, il ressort toutefois de ce formulaire que le comportement de M. A... fait " clairement présager des difficultés à le manager et une intégration très difficile dans une équipe " tant au regard des faits signalés le 27 mai 2016 que d'antécédents attestant de " comportements impulsifs et arrogants à plusieurs reprises depuis sa prise de fonction tant à l'égard de ses collègues, des riverains que de ses responsables ". Enfin, M. A..., le 24 juin 2016, a eu un comportement déplacé et des propos agressifs et violents envers un usager alors qu'il accomplissait son service sur la voie publique. Si M. A... ne conteste pas la réalité de cette altercation, mais fait valoir qu'il a au contraire subi cette agression, il ne l'établit pas par l'unique attestation qu'il produit. En outre, les attestations produites en sa faveur émanant d'anciens collègues, peu circonstanciées et par suite de faible valeur probante, ne sont pas de nature à contredire les rapports circonstanciés et étayés de l'administration. Par ailleurs, il ne peut utilement se prévaloir des appréciations positives figurant dans sa fiche d'évaluation établie le 30 novembre 2015, à une date où il n'était pas encore en stage. Ainsi que l'ont relevé à juste titre les premiers juges, M. A..., qui a déclaré lors de son entretien d'évaluation du 5 décembre 2016 que son comportement avait changé depuis cinq mois, reconnaît ses difficultés relationnelles au cours de l'année de stage. Enfin, en se bornant à soutenir, ainsi qu'il l'a fait devant les premiers juges, que ses qualités professionnelles sont " indéniables " comme le démontrerait la prolongation de son stage, M. A... ne remet pas sérieusement en cause la matérialité des manquements ainsi relevés.
8. En deuxième lieu, M. A... soutient qu'à supposer avéré le fait qu'il ait perdu son sang-froid le 24 juin 2016, ce fait isolé ne pouvait légalement justifier un licenciement, dès lors qu'il avait toujours donné satisfaction et que la commission administrative paritaire a émis un avis défavorable à la mesure envisagée. Il ressort cependant des pièces du dossier que les problèmes de comportement de l'intéressé sont apparus dès le début de son stage et que son comportement défaillant sur le plan relationnel a eu pour effet de perturber la bonne marche du service en dépit de plusieurs rappels à l'ordre. Par suite, M. A... n'établit pas qu'en refusant de le titulariser pour ces motifs au terme de son année de stage, le président de Bordeaux métropole, qui n'était pas lié par l'avis défavorable émis par la commission administrative paritaire, aurait entaché son appréciation d'une erreur manifeste.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation des décisions contestées, n'appelle aucune mesure d'exécution. Dès lors, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. A... tendant à être titularisé ne peuvent qu'être rejetées.
10. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la demande tendant à ce qu'il soit sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir par le procureur de la République sur la plainte pénale qu'il a déposé du chef de dénonciation calomnieuse, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 mars 2017 par laquelle le vice-président en charge de l'Administration générale et des Ressources humaines de Bordeaux métropole a refusé de le titulariser et prononcé son licenciement et de la décision du 8 mars 2017 par laquelle la même autorité a prononcé sa radiation des effectifs de cet établissement à compter du 1er avril 2017.
Sur les frais d'instance :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de Bordeaux métropole, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme que demande Bordeaux métropole sur ce même fondement.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à Bordeaux métropole.
Délibéré après l'audience du 2 novembre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
Mme Agnès Bourjol, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 décembre 2021.
La rapporteure,
Agnès BOURJOLLe président,
Didier ARTUS
Le greffier,
Anthony FERNANDEZ
La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX00069