Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le syndicat des eaux et assainissement de la région du Mas Agenais (SEARMA) a demandé au tribunal administratif de Bordeaux " de clarifier le différend " l'opposant à Voies navigables de France quant aux modalités de calcul de la taxe hydraulique fixées par le projet de convention d'occupation du domaine public fluvial au titre de la période courant du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022.
Par un jugement n° 1800363 du 24 octobre 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 20 décembre 2019 et le 9 juin 2021, le syndicat des eaux et assainissement de la région du Mas Agenais, représenté par Me Achou-Lepage, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 24 octobre 2019 ;
2°) d'annuler la décision du 5 janvier 2018 par laquelle Voies navigables de France a refusé de modifier les modalités de calcul de la taxe hydraulique fixées dans le projet de convention d'occupation du domaine public ;
3°) de mettre à la charge de Voies navigables de France la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors qu'il ne comporte pas les signatures obligatoires prévues par l'article R. 741-1 du code de justice administrative ;
- le " volume prélevable " d'eau ne peut être fixé à 31 536 000 mètres cubes annuels ;
- l'arrêté inter-préfectoral n° 47-2017-06-09 du 9 juin 2017 établit un volume prélevable maximal autorisé de 1 961 241 mètres cubes ; ce plafond aurait dû être retenu pour calculer le " volume maximum annuel prélevable de l'ouvrage " prévu par l'article L. 4316-3 du code des transports.
Par des mémoires en défense enregistrés le 20 avril 2020 et le 7 juillet 2021, Voies navigables de France, représentée par Me Salles, demande à la cour :
1°) de constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la requête du syndicat des eaux et assainissement de la région du Mas Agenais ;
2°) à titre subsidiaire, de rejeter la requête du SEARMA ;
3°) de mettre à la charge du SEARMA la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- il n'y a pas lieu de statuer sur la requête du SEARMA, dès lors que ce dernier a signé le 9 juillet 2019 une convention d'occupation du domaine public pour la période courant du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022, qui mentionnait un montant annuel de taxe hydraulique de 11 115,94 euros ;
- la requête est irrecevable, dès lors que les modalités de calcul de la taxe qui figurent dans la convention signée le 9 juillet 2019 sont une modalité d'exécution de la convention, indivisible de ce contrat, qui ne peuvent être regardées comme un acte susceptible de recours pour excès de pouvoir ;
- les moyens du SEARMA ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des transports ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B... A...,
- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,
- et les observations de Me Marque, représentant le syndicat des eaux et assainissement de la région du Mas Agenais, et de Me Cheramy, représentant Voies navigables de France.
Considérant ce qui suit :
1. Une convention d'occupation du domaine public fluvial a été conclue entre le syndicat des eaux et assainissement de la région du Mas Agenais (SEARMA) et l'établissement public Voies navigables de France pour la période courant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2017 portant sur la prise d'eau en Garonne à des fins agricoles sur la commune de Lagruère (Lot-et-Garonne). A la fin de l'année 2017, Voies navigables de France a adressé au SEARMA un projet de convention d'occupation du domaine public pour la période courant du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022, fixant un montant de taxe hydraulique annuel de 11 115,94 euros. Par un courrier du 15 décembre 2017, le président du SEARMA a demandé la révision des modalités de calcul de cette taxe figurant dans le projet de convention. Le tribunal administratif de Bordeaux a considéré que le SEARMA demandait l'annulation du courrier du 5 janvier 2018, qu'il a regardé comme constituant une décision susceptible de recours pour excès de pouvoir, par lequel Voies navigables de France a précisé les modalités de calcul de la taxe hydraulique et maintenu un montant annuel de 11 115,94 euros. Aucune des parties ne conteste cette interprétation des conclusions de la demande initiale et le SEARMA relève appel du jugement du 24 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la " décision " du 5 janvier 2018.
Sur l'exception de non-lieu à statuer opposée par Voies navigables de France :
2. Il ressort des pièces du dossier que, le 9 juillet 2019, le président du SEARMA a signé une convention d'occupation du domaine public portant sur la période courant du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022, et fixant le montant annuel de la taxe hydraulique à 11 115,94 euros. Toutefois, la signature de cette convention étant antérieure à l'introduction de la requête du SEARMA telle qu'elle se présente devant la cour, le litige n'a pas perdu son objet en cours d'instance. Par suite, l'exception de non-lieu opposée par Voies navigables de France doit être écartée.
Sur la régularité du jugement :
3. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".
4. Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué a été signée par le rapporteur, le président et le greffier d'audience, conformément aux prescriptions citées ci-dessus. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifiée au SEARMA ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
5. Aux termes de l'article L. 4316-3 du code des transports, dans sa version applicable au litige, qui a été abrogée le 1er janvier 2020 : " Dans les conditions prévues par la présente section, Voies navigables de France (...) perçoit une taxe sur les titulaires d'ouvrages de prise d'eau, rejet d'eau ou autres ouvrages hydrauliques destinés à prélever ou à évacuer des volumes d'eau sur le domaine public fluvial qui lui est confié. (...) ". Aux termes de l'article L. 4316-4 de ce code, dans sa version alors applicable : " La taxe mentionnée à l'article L. 4316-3 a un taux unique par catégorie d'usagers et comprend, lorsque ces ouvrages sont implantés sur le domaine public fluvial de l'Etat dont la gestion est confiée à Voies navigables de France, deux éléments : / 1° Un élément égal au produit de la superficie de l'emprise au sol des ouvrages correspondants par un taux de base fixé dans la limite des plafonds suivants : / a) 1,52 € par mètre carré pour une emprise située dans une commune de moins de 2 000 habitants ; / (...) Pour les ouvrages destinés à un usage agricole, le plafond est celui fixé au a quelle que soit la population de la commune où est situé l'ouvrage. / 2° Un élément égal au produit du volume prélevable ou rejetable par l'ouvrage par un taux de base compris entre 1,5 € et 7 € par millier de mètres cubes prélevables ou rejetables, et identique pour tous les usagers. A ce deuxième élément est appliqué un coefficient d'abattement compris entre 90 % et 97 % pour les usages agricoles et entre 10 % et 30 % pour les usages industriels. Ce coefficient d'abattement est fixé à 97 % pour l'alimentation en eau d'un canal de navigation. ". Et aux termes de l'article R. 4316-3 du code des transports, dans sa version alors en vigueur : " Pour les ouvrages autres que les ouvrages hydroélectriques autorisés par le code de l'énergie, le taux de base mentionné au 2° de l'article L. 4316-4 est fixé à 5,7 € par millier de mètre cube prélevable ou rejetable. / Le volume prélevable est le volume maximal annuel prélevable de l'ouvrage, tel qu'il résulte de la capacité physique de celui-ci. Le volume rejetable est le volume maximal annuel rejetable par l'ouvrage, tel qu'il résulte de la capacité physique de rejet de l'ouvrage et des quantités susceptibles de transiter par celui-ci. / Les coefficients d'abattement appliqués à cet élément de la taxe prévus au 2° de l'article L. 4316-4 sont de 94 % pour les usages agricoles et de 10 % pour les usages industriels. (...) ".
6. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que la taxe prévue par l'article L. 4316-3 du code des transports, versée par le titulaire d'un ouvrage de prise d'eau à Voies navigables de France, est calculée en tenant compte d'un élément lié à l'emprise au sol de l'ouvrage et d'un élément lié au volume d'eau prélevable ou rejetable.
7. En premier lieu, le " volume prélevable " pour le calcul de cette taxe est, selon les dispositions de l'article R. 4316-3 du code des transports citées ci-dessus, le volume maximal annuel prélevable tel qu'il résulte de la capacité physique de l'ouvrage hydraulique, et non le volume maximal annuel prélevable autorisé. Ainsi, le SEARMA ne peut se prévaloir, pour contester le volume d'eau qui doit être pris en compte pour le calcul de " l'élément hydraulique " de la taxe hydraulique, de l'arrêté inter-préfectoral du 9 juin 2017, qui fixerait le volume d'eau prélevable sur la commune de Lagruere à 1 961 341 mètres cubes, et qui ne concerne, au demeurant, que la période courant du 1er juin au 31 octobre 2017. Par suite, le moyen tiré de ce que Voies navigables de France a commis une erreur dans le calcul de " l'élément hydraulique " afin de fixer le montant de la taxe en litige doit être écarté.
8. En second lieu, il ressort des pièces du dossier, et il n'est d'ailleurs pas contesté, qu'en l'espèce l'ouvrage exploité par le SEARMA est équipé de quatre pompes présentant une capacité horaire de 900 mètres cubes chacune, soit un volume quotidien de 86 400 mètres cubes et annuel de 31 536 000 mètres cubes. La seule circonstance que Voies navigables de France a commis une erreur matérielle dans le courrier du 5 janvier 2018 en mentionnant l'existence de trois pompes au lieu de quatre n'est pas de nature à remettre en cause la détermination du volume prélevable pour le calcul de la taxe hydraulique, dont les modalités sont fixées par le code des transports. Au demeurant, il ressort des termes de ce même courrier qu'il y était indiqué un volume annuel prélevable de 31 536 000 mètres cubes, permettant ainsi au SEARMA de comprendre les bases du calcul du montant de la taxe hydraulique annuelle. Par suite, ce moyen doit être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête, que le SEARMA n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Voies navigables de France, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le SEARMA demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du SEARMA une somme 1 500 euros à verser à Voies navigables de France, en application de ces mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête du syndicat des eaux et assainissement de la région du Mas Agenais est rejetée.
Article 2 : Le syndicat des eaux et assainissement de la région du Mas Agenais versera à Voies navigables de France une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat des eaux et assainissement de la région du Mas Agenais et à Voies navigables de France.
Délibéré après l'audience du 14 octobre 2021 à laquelle siégeaient :
Mme B... A..., présidente-rapporteure,
Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,
Mme Christelle Brouard-Lucas, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 novembre 2021.
La présidente-rapporteure,
Marianne A...La présidente-assesseure,
Fabienne Zuccarello
La greffière,
Sophie Lecarpentier
La République mande et ordonne au préfet du Lot-et-Garonne en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 19BX04969 2