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02/11/2021 | FRANCE | N°19BX03312

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 02 novembre 2021, 19BX03312


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision du 28 novembre 2017 par laquelle la présidente du conseil départemental de La Réunion a refusé de reconnaître comme imputable au service l'accident survenu le 26 septembre 2016, ainsi que la décision du 28 février 2018 rejetant le recours gracieux formé contre cette décision.

Par un jugement n° 1800404 du 24 juin 2019, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cou

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Par une requête enregistrée le 9 août 2019 et un mémoire enregistré le 10 août 2020, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision du 28 novembre 2017 par laquelle la présidente du conseil départemental de La Réunion a refusé de reconnaître comme imputable au service l'accident survenu le 26 septembre 2016, ainsi que la décision du 28 février 2018 rejetant le recours gracieux formé contre cette décision.

Par un jugement n° 1800404 du 24 juin 2019, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 août 2019 et un mémoire enregistré le 10 août 2020, M. B..., représenté par Me Chane Meng Hime, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 24 juin 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2017 par lequel la présidente du conseil départemental de La Réunion a refusé de reconnaître comme imputable au service l'accident survenu le 26 septembre 2016 ainsi que la décision expresse de rejet du 28 février 2018 de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au département de La Réunion de reconnaître l'imputabilité au service de l'incident survenu le 26 septembre 2016, avec toutes conséquences de droit ;

4°) de mettre à la charge du département de La Réunion la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que le tribunal ne s'est pas prononcé sur le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté du 28 novembre 2017 ;

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé car il ne justifie pas la décision de ne pas suivre l'avis favorable de la commission de réforme et énonce sur une tautologie ; la seule précision factuelle mentionnant que l'incident survenu constituait une simple mesure d'organisation du travail ne permet pas d'établir la motivation du refus de reconnaissance d'imputabilité au service de l'accident ;

- le tribunal administratif de La Réunion a commis une erreur de droit en exigeant qu'il démontre un lien exclusif entre les faits survenus le 26 septembre 2016 et sa pathologie pour bénéficier du régime des accidents de service ;

- l'accident survenu le 26 septembre 2016 s'est produit dans le temps du service, sur le lieu du service, à l'occasion de ses fonctions et a entrainé la dégradation ultérieure de son état de santé, comme relevé par l'expert médical désigné par l'administration et par la commission de réforme ; il est donc imputable au service ;

- conformément à l'article 21 bis II du statut général des fonctionnaires tel qu'il résulte de l'ordonnance du 19 janvier 2017, il bénéficie de la présomption d'imputabilité au service et la cause des faits survenus ne saurait être prise en compte pour exclure cette imputabilité ; à ce titre, l'existence d'une " faille psychique préexistante " ne fait pas partie des circonstances particulières permettant de regarder l'évènement comme détachable du service ;

- la " faille psychique préexistante " relevée par l'expert en est tout état de cause liée à ses fonctions, et notamment à l'accident de service survenu le 3 avril 2013 durant son travail et ayant entrainé un syndrome post-traumatique s'accompagnant de troubles dépressifs et anxieux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2020, le département de La Réunion, représenté par Me de Faÿ, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Frédéric Faïck, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Isabelle Le Bris, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., agent de la fonction publique hospitalière, travaille depuis le 17 septembre 2002 comme cadre socio-éducatif au foyer départemental de l'enfance de Terre-Rouge à Saint-Pierre. Après une réunion de service du 26 septembre 2016, M. B... a été placé en congé pour maladie et maintenu dans cette position jusqu'au 20 décembre 2016. Par un arrêté du 28 novembre 2017, la présidente du conseil départemental de La Réunion a refusé de reconnaître 1'imputabilité au service de la maladie de M. B... et de lui accorder en conséquence le bénéfice du régime des accidents de service pour ses arrêts de travail. M. B... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision du 28 novembre 2017 ainsi que la décision du 28 février 2018 rejetant son recours gracieux. Il relève appel du jugement rendu le 24 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision (...) contient (...) l'analyse des conclusions et mémoires (...) ".

3. Il résulte des motifs du jugement attaqué que le tribunal administratif n'a pas omis de répondre au moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté du 28 novembre 2017. Par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité pour omission de répondre à un moyen.

Sur la légalité de la décision du 28 septembre 2017 :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent.

A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ".

5. L'arrêté contesté du 28 novembre 2017 vise notamment le code général des collectivités territoriales, la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière et ses décrets d'application. Il précise que les évènements survenus ne sont pas constitutifs d'un accident de travail et se rapportent à une simple mesure d'organisation du travail. Cette mention était suffisante pour permettre à M. B... de comprendre les raisons pour lesquelles sa maladie n'a pas été reconnue comme imputable au service. La décision en litige énonce ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et ne peut être regardée comme étant dépourvue de motivation du seul fait qu'elle n'indique pas explicitement les raisons qui ont conduit l'administration à ne pas suivre l'avis de la commission de réforme, lequel était favorable à la demande de M B.... Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions (...) / Toutefois, si la maladie provient (...) d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. ".

7. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet accident du service, le caractère d'un accident de service. Constitue un accident de service un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. Sauf à ce qu'il soit établi qu'il aurait donné lieu à un comportement ou à des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, un entretien entre un agent et son supérieur hiérarchique, ne saurait être regardé comme un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, quels que soient les effets qu'il a pu produire sur l'agent.

8. Il ressort des pièces du dossier qu'en 2014, M. B... s'est vu confier la responsabilité d'encadrer une unité d'accueil d'urgence des adolescents au sein du foyer et qu'il a proposé, dans ce cadre, de mettre en place une section " placement à domicile " afin d'améliorer l'accompagnement personnalisé des adolescents. En janvier 2016, M. B... a été inscrit par sa direction en vue de suivre une formation intitulée " installation d'un service de placement à domicile au sein d'un établissement social ". La nouvelle direction du foyer mise en place en juin 2016 du foyer a décidé, dans le cadre de son projet d'établissement, de créer une section " placement à domicile " dont les modalités d'établissement ont été exposées lors de la réunion de service du 26 septembre 2016 à laquelle assistait M. B.... Il a ainsi été décidé d'instituer une section d'aide à domicile en partenariat avec un autre foyer et de créer un comité de pilotage. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., informé lors de la réunion du 26 septembre 2016 qu'il ne ferait pas partie du comité de pilotage, a fait part de sa " stupéfaction " et de son " incompréhension ", selon les termes employés par la directrice du foyer dans sa note du 29 septembre 2016 détaillant les conditions dans lesquelles s'est déroulée la réunion en cause. Si M. B... a quitté son travail peu de temps après la réunion pour consulter un médecin qui lui a délivré un arrêt de travail, il n'est pas établi au dossier que les conditions dans lesquelles s'est déroulée la réunion du 26 septembre 2016 seraient révélatrices pour lui d'un accident de travail. A cet égard ni la note précitée de la directrice du foyer du 29 septembre 2016 ni le compte-rendu de la réunion du 26 septembre 2016 ni enfin le rapport de la directrice du 4 juillet 2018, lequel précisait que les échanges au cours de la réunion ont été " sobres ", " respectueux ", " sans haussement de ton ", ne permettent d'établir que M. B... aurait été victime d'attitudes, de propos ou de tout autre évènement de nature à révéler l'existence d'un accident de service. De son côté, M. B... ne produit aucun élément permettant d'estimer qu'en réalité, de tels évènements se seraient produits au cours de la réunion du 26 septembre 2016.

9. Dans ces circonstances, les troubles anxio-dépressifs subis par M. B... ne sauraient être regardés comme imputables à un accident de service.

10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation n'implique aucune mesure particulière d'exécution. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. B... doivent être rejetées.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du département de La Réunion, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme demandée par le département de La Réunion au titre de ces mêmes frais.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le département de La Réunion au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au département de La Réunion.

Délibéré après l'audience du 27 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

M. Frédéric Faïck, président assesseur,

Mme Agnès Bourjol, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 novembre 2021.

Le rapporteur,

Frédéric FaïckLe président,

Didier Artus

La greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au préfet de La Réunion en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

3

N° 19BX03312


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX03312
Date de la décision : 02/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Congés. - Congés de maladie. - Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : AVOCATS ET CONSEILS REUNION

Origine de la décision
Date de l'import : 09/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-11-02;19bx03312 ?
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