Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler la décision du 15 juin 2016 par laquelle le recteur de La Réunion a refusé le versement d'une fraction de l'indemnité d'éloignement et lui a réclamé le reversement d'un trop-perçu de rémunération d'un montant total de 30 958,27 euros.
Par un jugement n° 1600588 du 13 novembre 2018, le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 13 février 2019, M. B... A..., représenté par Me Ekeu, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision du 15 juin 2016 par laquelle le recteur de La Réunion a refusé le versement des deux premières fractions de l'indemnité d'éloignement et lui a réclamé le reversement d'un trop-perçu de rémunération d'un montant total 30 958,27 euros ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité représentative de l'indemnité d'éloignement qui lui est due ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision contestée par laquelle le recteur de La Réunion a refusé le versement de deux fractions de l'indemnité d'éloignement est dépourvue de base légale, dès lors que son droit au bénéfice de l'indemnité d'éloignement est fondée sur le jugement n°1400058 du 11 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Mayotte a annulé la précédente décision du recteur du 5 novembre 2013 retirant l'octroi de cette indemnité par décision du 12 septembre 2013, cette dernière devant être regardée comme irrévocable ;
- l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 est inapplicable à Mayotte, compte tenu du principe de spécialité législative et faute d'une extension spécifique sur ce territoire.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2021, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports conclut au rejet de la requête M. A....
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la constitution ;
- le code civil ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée ;
- la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 ;
- le décret n° 96-1028 du 27 novembre 1996 modifié ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Agnès Bourjol,
- et les conclusions de Mme Isabelle Le Bris, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., professeur certifié, affecté à compter de la rentrée 2013 dans l'académie de Mayotte pour un séjour réglementé de deux ans, a sollicité le versement de l'indemnité d'éloignement prévue par le décret n° 96-1028 du 27 novembre 1996. Par un arrêté du 9 avril 2013 le vice-recteur de Mayotte lui a indiqué, dans son article 2, qu'il pouvait " prétendre au bénéfice de l'indemnité d'éloignement ". Saisie de la demande de l'intéressé de versement de la 2ème fraction, nouvelle fraction de l'indemnité, faisant suite à son second séjour réglementé de deux ans dans l'académie de Mayotte à compter de la rentrée 2015, le recteur de La Réunion, par une décision du 15 juin 2016 lui a indiqué qu'il ne pouvait prétendre à l'indemnité d'éloignement, l'a invité à présenter ses observations, l'a informé de la nécessité de régulariser sa situation et lui a rappelé qu'un titre de perception avait été émis le 17 juin 2014 correspondant au montant de la première fraction de l'indemnité indûment perçue. M. A... relève appel du jugement du 13 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 13 juin 2016, et demande, en outre, la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité représentative de l'indemnité d'éloignement qui lui est due.
2. Aux termes de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 susvisée dans sa rédaction issue de l'article 94 de la loi du 28 décembre 2011 portant loi de finances rectificative pour 2011 : " Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux ans à compter du premier jour du mois suivant celui de la mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive. / Toutefois, la répétition des sommes versées n'est pas soumise à ce délai dans le cas de paiements indus résultant soit de l'absence d'information de l'administration par un agent de modifications de sa situation personnelle ou familiale susceptibles d'avoir une incidence sur le montant de sa rémunération, soit de la transmission par un agent d'informations inexactes sur sa situation personnelle ou familiale (...) ".
3. L'article 41 de la loi du 12 avril 2000, qui rend certaines dispositions de la loi du 12 avril 2000 applicables à Mayotte, ne comporte aucune mention sur l'applicabilité de l'article 37-1 dans ce territoire.
4. Aux termes du premier aliéna de l'article 73 de la Constitution : " Dans les départements et les régions d'outre-mer, les lois et règlements sont applicables de plein droit. Ils peuvent faire l'objet d'adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités ".
5. Le requérant conteste en appel l'applicabilité de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, en soutenant qu'il n'est pas établi que cette disposition pouvait recevoir application dans le département de Mayotte qui était soumis au régime de la spécialité législative et faute d'une extension spécifique à ce territoire. Toutefois, l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 a été introduit par l'article 94 de la loi n°2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011. A cette date, le territoire de Mayotte était alors soumis au régime de l'identité législative, tel que posé par l'article 73 précité de la Constitution. Dans ces conditions, l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 était applicable de plein droit à Mayotte, indépendamment de l'absence de toute mention à cet égard dans l'article 41 de cette loi. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'exception de prescription biennale telle que prévue par ces dispositions, à l'égard de la somme qui lui est réclamée par la décision contestée, relative à un indu d'indemnité d'éloignement perçue à titre d'avance lors de son affectation à Mayotte à compter du 1er septembre 2015, était inapplicable.
6. Il résulte des dispositions précitées de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 qu'une somme indûment versée par une personne publique à l'un de ses agents au titre de sa rémunération peut, en principe, être répétée dans un délai de deux ans à compter du premier jour du mois suivant celui de sa date de mise en paiement sans que puisse y faire obstacle la circonstance que la décision créatrice de droits qui en constitue le fondement ne peut plus être retirée.
7. Aux termes des dispositions de l'article 2 de la loi du 30 juin 1950 fixant les conditions d'attribution des soldes et indemnités des fonctionnaires civils et militaires relevant du ministère de la France d'outre-mer : " Pour faire face aux sujétions particulières inhérentes à l'exercice de la fonction publique dans les territoires d'outre-mer, les fonctionnaires civils visés à l'article 1er recevront : ( ... ) 2° Une indemnité destinée à couvrir les sujétions résultant de l'éloignement pendant le séjour et les charges afférentes au retour, accordée au personnel appelé à servir en dehors soit de la métropole, soit du pays ou territoire où il réside habituellement, qui sera déterminée pour chaque catégorie de cadres à un taux uniforme s'appliquant au traitement et majorée d'un supplément familial. Elle sera fonction de la durée du séjour et de l'éloignement et versée pour chaque séjour administratif, moitié avant le départ et moitié à l'issue du séjour. Les compléments spéciaux et l'indemnité d'éloignement seront fixés (...) par décret ". En vertu de l'article 2 du décret du 27 novembre 1996, pris en application de la loi du 30 juin 1950, relatif à l'attribution de l'indemnité d'éloignement aux magistrats et aux fonctionnaires titulaires et stagiaires de l'Etat en service notamment à Mayotte : " Le droit à l'indemnité est ouvert lors de l'affectation ( ... ) dans la collectivité territoriale de Mayotte à la condition que cette affectation entraîne, pour l'agent concerné, un déplacement effectif pour aller servir en dehors du territoire dans lequel est situé le centre de ses intérêts matériels et moraux. ".
8. Ainsi qu'il vient d'être dit précédemment, la prescription applicable était celle instituée par l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000. L'administration disposait en conséquence d'un délai de deux ans à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné intervenu pour obtenir le remboursement du trop-versé. Il n'est pas contesté que la première fraction de l'indemnité d'éloignement a été mise en paiement en 2013. L'administration ayant fait connaître à M. A... qu'un montant net de 30 958,27 euros lui avait été versé à tort au titre de la première fraction de l'indemnité d'éloignement, et alors qu'un titre de perception y afférent a été émis le 17 juin 2014, la décision du 15 juin 2016 confirmant la démarche de reprise du trop-perçu, tant au titre de la première que de la deuxième fraction de cette indemnité, portait ainsi sur un montant qui n'était pas prescrit.
9. M. A... se prévaut de l'annulation contentieuse, par le tribunal administratif de Mayotte, par son jugement n°1400058 du 11 juin 2015, de l'arrêté du 5 novembre 2013 procédant au retrait de la décision du 12 septembre 2013 octroyant à l'intéressé le bénéfice de l'indemnité d'éloignement, obtenue en raison de vices de forme et de procédure. Si, à la suite de cette annulation contentieuse, l'administration était tenue de réexaminer la situation de l'intéressé, elle pouvait reprendre une décision purgée de tout vice, ce qu'elle a fait par la décision contestée du 15 juin 2016 citée au point 8 ayant pour objet la reprise du trop-perçu. Par suite le requérant ne peut utilement faire valoir qu'il bénéficie d'une décision créatrice de droits en l'arrêté du 12 septembre 2013 et que la décision litigieuse serait illégale au motif qu'elle retirerait une décision créatrice de droits hors du délai de retrait.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande. Ses conclusions indemnitaires, doivent, par voie de conséquence, et sans qu'il soit besoin d'examiner leur recevabilité, être rejetées.
Sur les frais d'instance :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une quelconque somme à verser à Mme A... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'éducation nationale.
Délibéré après l'audience du 27 septembre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
Mme Agnès Bourjol, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 novembre 2021.
La rapporteure,
Agnès BOURJOLLe président,
Didier ARTUSLa greffière,
Sylvie HAYET
La République mande et ordonne au ministre de l'Outre-mer en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX00513