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28/10/2021 | FRANCE | N°19BX03366

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 28 octobre 2021, 19BX03366


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société CDA Publimédia a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler le titre exécutoire du 13 décembre 2017 par lequel le département de la Gironde a mis à sa charge, au titre de la redevance d'occupation du domaine public, un montant de 35 454 euros et de lui accorder la décharge de cette somme.

Par un jugement n° 1800789 du 20 juin 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 août 2

019, la société Philippe Vediaud Publicité venant aux droits de la société CDA Publimedia, repr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société CDA Publimédia a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler le titre exécutoire du 13 décembre 2017 par lequel le département de la Gironde a mis à sa charge, au titre de la redevance d'occupation du domaine public, un montant de 35 454 euros et de lui accorder la décharge de cette somme.

Par un jugement n° 1800789 du 20 juin 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 août 2019, la société Philippe Vediaud Publicité venant aux droits de la société CDA Publimedia, représentée par Me Palmier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 20 juin 2019 ;

2°) d'annuler le titre de recette en litige avec toutes conséquences de droit ;

3°) de mettre à la charge du département de la Gironde une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier à défaut d'avoir relevé d'office le moyen d'ordre public tiré de ce que le titre exécutoire ne comporte pas la signature de son auteur en méconnaissance des articles L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration et L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ;

- le titre est irrégulier en l'absence de signature et de la transmission en même temps que le titre du volet signé ;

- le jugement est irrégulier dès lors que le département ne justifie pas de circonstances nouvelles postérieures à la délivrance de l'autorisation pour justifier l'augmentation ; le niveau de la redevance d'occupation du domaine public a été fixé à un montant disproportionné par rapport à l'avantage retiré et l'administration ne justifie pas de la méthode d'évaluation des avantages économiques et des critères permettant de fixer la redevance ; enfin, la délibération du 21 décembre 2015 sur laquelle se fonde l'autorisation d'occupation temporaire est insuffisamment motivée et la rubrique 15 de cette délibération ne concerne que les délégations de service public ;

- le tribunal a inversé la charge de la preuve en considérant qu'il lui appartenait d'établir le caractère disproportionné de la redevance.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2021, le département de la Gironde, représenté par Me Chambord, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la société en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le requérant ne produit pas les éléments justifiant de l'habilitation du représentant agissant en son nom et de sa qualité à agir dans la présente instance ;

- les moyens soulevés par la société Philippe Vediaud Publicité ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christelle Brouard-Lucas,

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me Chambord, représentant le département de la Gironde.

1. La société CDA Publimédia bénéficiait de la part du président du conseil général de la Gironde d'autorisations d'occupation temporaire du domaine public pour installer du mobilier urbain support de publicité sur les communes de Blaye et Biganos, accordées le 22 février 2013 pour une durée de 5 ans sur la base de redevances annuelles de 193 euros et 623 euros. Par un arrêté du 21 octobre 2016, le président du conseil départemental a abrogé ces arrêtés et accordé à la société une autorisation d'occupation du domaine public pour l'implantation de mobilier urbain support de publicité dans 26 communes de la Gironde, correspondant à 182 panneaux au tarif de 194,80 euros par panneau. Sur la base de cet arrêté, le département a émis, le 13 décembre 2017, un titre exécutoire d'un montant de 35 454 euros correspondant à la redevance due au titre de l'année 2017. La société CDA Publimédia a demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation de ce titre exécutoire et la décharge des sommes correspondantes. La société Philippe Vediaud Publicité, venant aux droits de la société CDA Publimédia, relève appel du jugement n° 1800789 du 20 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, le moyen tiré du non-respect des dispositions des articles L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration et L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales en raison de l'absence de signature figurant sur le titre de perception, qui a trait à la régularité formelle du titre exécutoire et non à la compétence de son auteur, n'est pas d'ordre public. Par suite, la société n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité faute pour les premiers juges d'avoir examiné d'office ce moyen.

3. En second lieu, si la société requérante soutient que les premiers juges ont commis des erreurs d'appréciation dans le cadre du contrôle qu'ils ont porté sur la méthode utilisée pour évaluer les avantages économiques retirés et sur les critères permettant de fixer la redevance, ces moyens, qui se rattachent au bien-fondé du raisonnement suivi par les premiers juges, sont sans incidence sur la régularité du jugement attaqué.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la régularité du titre de perception :

4. Aux termes de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ". Aux termes de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : " (...) / 4° Une ampliation du titre de recettes individuel ou de l'extrait du titre de recettes collectif est adressée au redevable sous pli simple. / (...) / Seul le bordereau de titres de recettes est signé pour être produit en cas de contestation ". Il résulte de ces dispositions, d'une part, que le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif adressé au redevable doit mentionner les nom, prénom et qualité de la personne qui l'a émis, et d'autre part, qu'il appartient à l'autorité administrative de justifier, en cas de contestation, que le bordereau de titre de recettes comporte la signature de l'émetteur.

5. En l'espèce, le département de la Gironde produit le bordereau de titre de recettes qui a été signé pour le président du conseil départemental par Mme B... A..., membre du service de l'exécution du budget. Par suite, dès lors que ce bordereau mentionne les nom, prénom et qualité du signataire, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le titre en litige méconnaîtrait les dispositions du code général des collectivités territoriales citées au point 4.

6. Par ailleurs, dès lors qu'il résulte de ces dispositions que le bordereau signé ne doit être produit qu'en cas de contestation, le moyen tiré de ce que le titre serait irrégulier en l'absence de transmission de ce bordereau en annexe du titre exécutoire doit être écarté.

En ce qui concerne le bien-fondé du titre de perception :

7. En premier lieu, si l'autorité gestionnaire du domaine public peut à tout moment modifier les conditions pécuniaires auxquelles elle subordonne la délivrance des autorisations d'occupation et éventuellement abroger unilatéralement ces décisions, elle ne peut, toutefois, légalement exercer ces prérogatives qu'en raison de faits survenus ou portés à sa connaissance postérieurement à la délivrance de ces autorisations.

8. En l'espèce, la décision du président du conseil départemental d'abroger les d'autorisations d'occupation temporaire du domaine public accordées le 22 février 2013 résulte de l'intervention d'une délibération du conseil départemental du 18 décembre 2014, qui a créé une redevance pour mobilier urbain support publicitaire dans un but de préservation de l'intérêt général et se fonde sur un recensement réalisé entre 2014 et 2016 des implantations de ce type de mobiliers réalisés par la société requérante sur le domaine public du département de la Gironde. Par suite, cette décision est fondée sur des faits survenus ou portés à sa connaissance postérieurement à la délivrance des autorisations initiales.

9. En deuxième lieu, selon l'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Toute occupation ou utilisation du domaine public d'une personne publique (...) donne lieu au paiement d'une redevance (...) ". Aux termes de l'article L. 2125-3 du même code : " La redevance due pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation ". En l'absence de dispositions contraires, il appartient à l'autorité chargée de la gestion du domaine public en cause, qu'elle en soit ou non le propriétaire, d'octroyer les permissions d'occupation et de fixer, tant dans l'intérêt du domaine que dans l'intérêt général, les conditions auxquelles elle entend subordonner leur délivrance et, à ce titre, de déterminer le tarif des redevances en tenant compte des avantages de toute nature que le permissionnaire est susceptible de retirer de l'occupation du domaine public.

10. La délibération n° 2015.119.CD du 21 décembre 2015, qui ne constitue pas un acte individuel devant être motivé en application des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, constitue une actualisation des tarifs fixées par la délibération n° 2014.118.CG du 18 décembre 2014 qui décide de la création d'une redevance pour occupation du domaine public pour le mobilier urbain support de publicité et fixe son tarif. Si la société requérante soutient que sa situation ne peut être rattachée à la rubrique 15 de la délibération du 21 décembre 2015, rubrique qui ne concerne que les délégations de service public, la redevance qui lui a été appliqué est prévue à la rubrique 19 de cette même délibération, relative au mobilier urbain support de publicité. Le moyen tiré de ce que le titre exécutoire serait dépourvu de base légale doit donc être écarté.

11. En troisième lieu, alors qu'il résulte de la délibération du 18 décembre 2014 que la redevance en litige a été créée dans un objectif de maîtrise des implantations en raison de la pollution visuelle portant atteinte au paysage qu'engendrent les panneaux publicitaires et des risques que constituent ces obstacles en cas d'accident, le département de la Gironde n'a pas commis d'erreur de droit en se basant sur le nombre d'emplacements occupés comme base d'évaluation de l'avantage économique procuré aux titulaires de l'autorisation.

12. Enfin en dernier lieu, d'une part, il résulte de l'instruction que les autorisations d'occupation temporaire du domaine public accordées le 22 février 2013 ne reposaient pas sur une base forfaitaire mais étaient calculées en fonction de l'emprise au sol des supports publicitaires et d'un tarif mensuel au mètre carré. D'autre part, les montants de 193 et 623 euros précédemment acquittés ne concernaient, respectivement, que 8 et 15 emplacements alors que la nouvelle autorisation concerne 182 panneaux. Enfin, la société n'apporte aucun élément sur les recettes que lui procure la location de ces emplacements. Dans ces conditions, comme l'ont considéré les premiers juges, qui n'ont pas inversé la charge de la preuve à son détriment mais se sont prononcés au vu des éléments fournis par l'une et l'autre partie en tenant compte des informations que seule une partie était en possibilité de fournir, le tarif annuel de 194,80 euros par mobilier urbain n'apparaît pas, malgré la forte augmentation qui en résulte, manifestement disproportionné au regard de l'avantage qu'en retire la société requérante.

13. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête, que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses conclusions à fin d'annulation et de décharge.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Gironde, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Philippe Vediaud Publicité demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Philippe Vediaud Publicité le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le département de la Gironde et non compris dans les dépens sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Philippe Vediaud Publicité est rejetée.

Article 2 : La société Philippe Vediaud Publicité versera au département de la Gironde une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3: Le présent jugement sera notifié à la société Philippe Vediaud Publicité et au département de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 30 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme Christelle Brouard-Lucas, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 octobre 2021.

La rapporteure,

Christelle Brouard-LucasLa présidente,

Marianne Hardy

La greffière,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 19BX03366 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19BX03366
Date de la décision : 28/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

24-01-02-01-01-04 Domaine. - Domaine public. - Régime. - Occupation. - Utilisations privatives du domaine. - Redevances.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Christelle BROUARD-LUCAS
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : CABINET PALMIER et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 09/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-10-28;19bx03366 ?
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