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19/10/2021 | FRANCE | N°21BX02106

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 19 octobre 2021, 21BX02106


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 1er octobre 2019 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1907175 du 20 avril 2021, le tribunal administratif de Toulouse a constaté qu'il n'y avait plus lieu à statuer sur les conclusions de M. A... dirigées contre les décisions portant obligation de quit

ter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 1er octobre 2019 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1907175 du 20 avril 2021, le tribunal administratif de Toulouse a constaté qu'il n'y avait plus lieu à statuer sur les conclusions de M. A... dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi, a annulé l'arrêté du 1er octobre 2019 en tant qu'il refuse la délivrance à M. A... un titre de séjour, et a enjoint à la préfète du Tarn de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai d'un mois et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 mai 2021, la préfète du Tarn demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 20 avril 2021.

Elle soutient que :

- M. A... ne justifie pas du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation ;

- il n'a pas commis d'erreur de droit, dès lors que l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile implique un examen global et que la seule circonstance que l'arrêté du 1er octobre 2019 ne mentionne pas l'avis de la structure d'accueil de M. A... ne peut lui être reprochée ;

- l'arrêté litigieux ne comporte pas d'erreurs de fait substantielles ;

- il n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a procédé à un examen réel et sérieux de la situation personnelle de M. A... ;

- l'arrêté litigieux ne méconnait pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 6 septembre 2021, M. A..., représenté par Me Bouix, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de la préfète du Tarn ;

2°) d'annuler le jugement du 20 avril 2021 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint à la préfète de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Tarn de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il fait valoir que :

- les conclusions de la préfète tendant à l'annulation du jugement ayant annulé les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi sont irrecevables ; en effet, ces décisions ont été annulées par un jugement du 26 décembre 2019 qui n'a pas été frappé d'appel ;

- le préfet a commis une erreur de droit et n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation personnelle ;

- il a également commis une erreur de droit dans l'application de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis des erreurs de fait substantielles, dès lors qu'il n'a plus aucun lien avec sa famille au Bangladesh ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il justifie de son intégration, tant professionnelle que personnelle sur le territoire français ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 1er juillet 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme C... B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant bangladais né le 14 juillet 2001, entré sur le territoire français au mois d'octobre 2017 alors qu'il était encore mineur, a sollicité un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur. Par un arrêté du 1er octobre 2019, le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer le titre de séjour demandé, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. La préfète du Tarn relève appel du jugement du 20 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 1er octobre 2019 et a enjoint à la préfète du Tarn de procéder de réexamen de la situation de M. A... dans un délai d'un mois et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.

Sur la recevabilité des conclusions dirigées contre le jugement annulant les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi :

2. Les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi prises à l'encontre de M. A... ont été annulées par un jugement n° 1907175, 1907255 du 26 décembre 2019, qui n'a pas été contesté dans le délai de deux mois prévu par l'article R. 811-2 du code de justice administrative. Par suite, les conclusions de la préfète du Tarn tendant à l'annulation du jugement annulant ces décisions sont irrecevables et doivent être rejetées.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Pour refuser à M. A... son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Tarn s'est fondé sur le défaut de caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, eu égard en particulier à ses nombreuses absences, et de son apprentissage et sur la présence, dans son pays d'origine, de ses parents et de ses sœurs avec qui il n'établissait pas être insusceptible de renouer des liens.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui est inscrit au lycée hôtelier de Mazamet en certificat d'aptitude professionnelle (CAP) Cuisine, a été absent 18 demi-journées au deuxième semestre de l'année 2018-2019 et présente une moyenne générale de 8,42/20. Toutefois, ces absences sont justifiées par les problèmes médicaux rencontrés par M. A..., qui a subi une greffe au poignet à la suite d'une fracture du scaphoïde pour laquelle il a été hospitalisé entre le 19 et le 21 mai 2019. Contrairement à ce que soutient le préfet, les rendez-vous médicaux et arrêts de travail de M. A... justifient au moins dix de ses demi-journées d'absence. Par ailleurs, l'attestation du proviseur du lycée hôtelier de Mazamet versée au dossier fait état de la motivation et de la persévérance de l'intéressé dans son apprentissage durant l'année scolaire 2018/2019 malgré plusieurs absences liées à des problèmes de santé. En outre, si, afin d'établir le manque de sérieux de M. A..., le préfet se prévaut d'un courriel qui lui aurait été adressé par le gérant de la société Chicken Time's, avec laquelle M. A... a conclu un contrat d'apprentissage qui a débuté le 22 décembre 2018, qui formule une appréciation particulièrement négative sur ce dernier qui présenterait une attitude désinvolte et négligente, ce courriel ne comporte pas d'autre signature que celle de la préfecture du Tarn, ce qui ne permet pas de s'assurer de l'identité de son expéditeur. Il est en outre contredit par les autres attestations versées au dossier, qui décrivent M. A... comme motivé, avide d'apprentissage et souhaitant s'intégrer dans la société française, et en particulier par le courrier du 15 octobre 2019 signé par le gérant de la société Chicken Time's qui certifie que M. A... est un apprenti ponctuel, sérieux et motivé. Au regard de ces éléments, les premiers juges ont pu considérer à bon droit que le préfet du Tarn n'avait pas procédé à un examen sérieux de la situation personnelle de M. A... quant au critère du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation.

5. Il résulte de ce qui précède que la préfète n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse, a annulé la décision du 1er octobre 2019 de refus de titre de séjour.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique seulement que la préfète du Tarn procède au réexamen de la situation de M. A.... Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié ".

Sur les frais liés au litige :

7. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'État le versement à Me Bouix de la somme de 1 200 euros.

.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la préfète du Tarn est rejetée.

Article 2 : L'État versera à Me Bouix une somme de 1 200 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par M. A... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète du Tarn.

Délibéré après l'audience du 16 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 octobre 2021.

La rapporteure,

Charlotte B...La présidente,

Marianne Hardy

La greffière,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02106
Date de la décision : 19/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Charlotte ISOARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : BOUIX

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-10-19;21bx02106 ?
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