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14/10/2021 | FRANCE | N°21BX01808

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 14 octobre 2021, 21BX01808


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme J... E... H... a demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler l'arrêté du 14 janvier 2021 par lequel le préfet de la Martinique lui a fait obligation de quitter le territoire français et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et la décision du même jour fixant le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2100023 du 26 mars 2021, le tribunal administratif de la Martinique a annulé l'arrêté du 14 janvier 2021 fixant le pays de renvoi, a mi

s à la charge de l'Etat le versement à Mme E... H... A... la somme de 500 euros e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme J... E... H... a demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler l'arrêté du 14 janvier 2021 par lequel le préfet de la Martinique lui a fait obligation de quitter le territoire français et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et la décision du même jour fixant le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2100023 du 26 mars 2021, le tribunal administratif de la Martinique a annulé l'arrêté du 14 janvier 2021 fixant le pays de renvoi, a mis à la charge de l'Etat le versement à Mme E... H... A... la somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 23 avril 2021 sous le n° 21BX01808, le préfet de la Martinique demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Martinique du 26 mars 2021 en tant qu'il annule la décision fixant le pays de renvoi et met à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que c'est à tort que le premier juge a considéré que les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration avaient été méconnues, alors que l'obligation faite à l'administration de mettre l'étranger à même de présenter ses observations ne s'applique pas aux décisions fixant le pays de renvoi, l'étranger disposant de la possibilité de former un recours suspensif contre la mesure d'éloignement ; au demeurant, l'intéressée a été mise à même de présenter ses observations sur la décision fixant le pays de renvoi à l'occasion de son audition et de la notification de la mesure d'éloignement.

Par ordonnance du 7 juillet 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 1er septembre 2021 à 12 heures.

II. Par une requête enregistrée le 1er mai 2021 sous le n° 21BX01864, Mme E... H..., représentée par Me Romer, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Martinique du 26 mars 2021 en tant qu'il rejette ses conclusions à fin d'annulation des décisions lui faisant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et ses conclusions à fin d'injonction ;

2°) d'annuler les décisions du 14 janvier 2021 lui faisant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Martinique, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête n'est pas tardive ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée en fait dès lors qu'elle ne prend pas entièrement en compte sa situation ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen sérieux de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que sa vie familiale est en Martinique, qu'elle n'a pas quitté la Martinique depuis son arrivée, que son fils a des liens très fort avec sa tante et sa grand-mère qui résident en France, qu'il est scolarisé et qu'elle est mariée depuis peu ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle dès lors qu'elle n'a plus aucun contact avec son père et que sa seule vie privée et familiale se trouve en France ;

- la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée en fait ;

- elle est entachée d'un vice de procédure, n'ayant pas été précédée de la procédure contradictoire prévue par les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et celles du décret du 28 novembre 1983 ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen sérieux de sa situation personnelle ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an est insuffisamment motivée en fait dès lors qu'elle ne précise pas les faits ayant conduit le préfet à écarter les conditions relatives à la durée de présence sur le territoire français, à la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France et à la menace pour l'ordre public que constitue sa présence sur le territoire français ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dans l'application des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet ne s'est pas prononcé sur l'ensemble des critères qu'elles prévoient et qu'elle n'est pas une menace pour l'ordre public ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle a sa famille en Martinique, qu'elle y a tissé des liens intenses et que plus aucun membre de sa famille ne réside dans son pays d'origine ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle dès lors que son fils est scolarisé en France, que son mari, ses sœurs et sa mère résident en Martinique et qu'elle n'a plus de famille en République dominicaine.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 juin 2021, le préfet de la Martinique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme E... H... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 7 juillet 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 1er septembre 2021 à 12 heures.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Catherine Girault a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E... H..., de nationalité dominicaine, née le 24 août 1994, est entrée en France avec son fils le 11 janvier 2019. Le 12 janvier 2021, elle a fait l'objet d'un contrôle des services de police aux fins de vérification de son droit au séjour et de circulation sur le territoire français. Par un arrêté du 14 janvier 2021, le préfet de la Martinique lui a fait obligation de quitter le territoire français et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Mme E... H... a demandé l'annulation de cet arrêté. Par un jugement n° 2100023 du 26 mars 2021, le tribunal administratif de la Martinique a annulé l'arrêté du 14 janvier 2021 en tant qu'il fixe le pays de renvoi, a mis à la charge de l'Etat le versement à Mme E... H... A... la somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la demande. Par une requête n° 21BX01808, le préfet de la Martinique relève appel de ce jugement en tant qu'il annule la décision fixant le pays de renvoi et met à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par la requête n° 21BX01864, Mme E... H... relève appel de ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions à fin d'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français et de la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et ses conclusions à fin d'injonction.

Sur la jonction :

2. Les deux requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement et portent sur le même arrêté. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions de la requête n° 21BX01864 présentées par Mme E... H... :

En ce qui concerne la légalité de la décision du 14 janvier 2021 portant obligation de quitter le territoire français :

3. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de la décision en litige : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée (...) ".

4. La décision mentionne que Mme E... H... a déclaré être entrée en France le 11 janvier 2019 sous couvert d'un passeport dominicain et qu'elle s'y est maintenue sans être en possession d'un titre de séjour, sans jamais solliciter une régularisation. Elle précise en outre qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à la situation personnelle et à la vie familiale de l'intéressée, qui n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays, et que la présence avec elle de son enfant mineur et de sa mère, titulaire d'une carte de résident, n'est pas de nature à lui octroyer un droit particulier au séjour. Ainsi, elle comporte les considérations de fait sur lesquelles elle se fonde, sans que l'intéressée puisse se prévaloir à ce stade de l'absence de mention de sa jeune demi-sœur de nationalité française. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation en fait de la décision en litige doit être écarté.

5. Il ressort de la décision que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressée.

6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Il ressort des pièces du dossier que l'appelante était présente de manière irrégulière sur le territoire français depuis deux ans à la date de la décision en litige et qu'elle y est entrée avec son fils à l'âge de 25 ans. Si l'intéressée se prévaut de la présence en France de sa mère, Mme L... H... B..., qui y a résidé depuis 16 ans et bénéficie d'une carte de résident et d'un contrat à durée indéterminée, il ressort des pièces du dossier qu'elle vivait, avant son arrivée en France, séparée de sa mère depuis 2004, date à laquelle cette dernière est entrée en France. Elle n'avait pas davantage vécu avec sa jeune demi-sœur née en 2005 en Guyane, Mme I... D..., de nationalité française. Si elle se prévaut également de la présence de sa sœur, Mme H... H..., cette dernière, arrivée en même temps qu'elle, est aussi en situation irrégulière sur le territoire français. Mme E... H... fait valoir qu'elle s'est mariée le 10 avril 2021. Toutefois, cette circonstance postérieure à la décision en litige est sans incidence sur sa légalité, qui s'apprécie à la date de son édiction. Au demeurant, les pièces qu'elle produit ne précisent pas la nationalité de son conjoint. Ainsi, l'appelante ne démontre pas avoir noué à la date de la décision attaquée des liens personnels et familiaux intenses, stables et anciens en France. Par ailleurs, si elle soutient qu'elle n'a plus aucun contact avec son père résidant en République Dominicaine, elle ne démontre pas ne plus avoir d'attaches personnelles dans son pays d'origine. Mme E... H... fait valoir enfin que son fils est scolarisé en France. Toutefois, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que le jeune F... suive sa mère, dès lors qu'il n'est pas démontré qu'il ne pourrait poursuivre sa scolarité en République dominicaine. Dans ces conditions, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ou que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne la légalité de la décision du 14 janvier 2021 portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an :

8. Aux termes des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de la décision en litige : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger (...) Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

9. Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.

10. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Par ailleurs, elle doit faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

11. La décision indique que l'intéressée est arrivée en France deux ans auparavant et n'y justifie d'aucun lien personnel ou familial ancien, intense et stable, et que depuis son arrivée en France elle n'a jamais sollicité de titre de séjour et se maintient irrégulièrement sur le territoire français. Elle fait ainsi état des éléments de la situation de l'intéressée relatifs à la durée de sa présence sur le territoire français et à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France. La décision, qui n'avait pas expressément à indiquer que l'intéressée ne représentait pas une menace pour l'ordre public, est suffisamment motivée en fait et n'est pas entachée d'erreur de droit.

12. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur la situation personnelle de l'intéressée doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 7.

13. Il résulte de ce qui précède que Mme E... H... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de la Martinique a rejeté les conclusions de sa requête dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Sa requête doit, par voie de conséquence, être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur les conclusions de la requête n° 21BX01808 présentée par le préfet de la Martinique :

14. Il ressort des dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile, et notamment de son article L. 512-1, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ainsi que les décisions qui l'accompagnent. Par suite, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, désormais codifié aux articles L. 121-1 et L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi. Par suite, c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur le motif tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration pour annuler la décision fixant le pays de renvoi de Mme E... H..., laquelle a au demeurant été précédée d'un entretien du 12 janvier 2021 au cours duquel l'intéressée, invitée à se prononcer sur l'éventualité d'un renvoi vers Saint-Domingue, a indiqué qu'elle s'y conformerait sans former aucune objection contre la désignation de son pays d'origine.

15. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme E... H... devant le tribunal administratif de la Martinique contre la décision fixant le pays de renvoi.

16. Par un arrêté du 7 octobre 2020, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet de la Martinique a donné délégation à Mme C... G..., chargée de mission auprès du préfet de la Martinique et signataire de l'arrêté en litige, à l'effet de signer, en cas d'absence ou d'empêchement de M. Antoine Poussier, secrétaire général de la préfecture, les actes, arrêtés, décisions, circulaires, rapports, documents, correspondances, requêtes et mémoires relevant des attributions de l'Etat dans la région et le département, à l'exception de certaines décisions parmi lesquelles ne figurent pas les décisions fixant le pays de renvoi. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le secrétaire général de la préfecture n'aurait été ni absent ni empêché à la date de la décision. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de son signataire doit être écarté.

17. La décision indique que l'intéressée n'allègue ni n'établit être exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Elle énonce ainsi les considérations de fait sur lesquelles elle se fonde. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation en fait doit être écarté. Il résulte de cette motivation que le préfet a procédé à un examen suffisant de la situation de l'intéressée.

18. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Martinique est fondé à demander l'annulation du jugement du 26 mars 2021 en tant que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de la Martinique a annulé la décision fixant le pays de renvoi du 14 janvier 2021, et a mis à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 1 et 2 du jugement du tribunal administratif de la Martinique sont annulés.

Article 2 : La demande d'annulation de la décision fixant le pays de renvoi et de versement de frais d'instance, ainsi que le surplus des conclusions de la requête n° 21BX01864 de Mme E... H..., sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme K... H.... Copie en sera adressée au préfet de la Martinique.

Délibéré après l'audience du 14 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,

Mme Marie-Pierre Beuve-Dupuy, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 octobre 2021.

La présidente-assesseure,

Anne MeyerLa présidente, rapporteure,

Catherine Girault

La greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX01808, 21BX01864

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01808
Date de la décision : 14/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Catherine GIRAULT
Rapporteur public ?: Mme GALLIER
Avocat(s) : ROMER

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-10-14;21bx01808 ?
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