Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision implicite intervenue le 18 avril 2019 par laquelle la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Par un jugement n° 2003200 du 27 janvier 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 mars 2021, M. A..., représenté par Me Boyance, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 27 janvier 2021 ;
2°) d'annuler la décision implicite née le 18 avril 2019 de refus de délivrance d'un titre de séjour susmentionnée ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de l'admettre provisoirement au séjour avec remise d'un récépissé l'autorisant à travailler dans les mêmes conditions de délais et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 juillet 2021, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête de M. A..., en s'en remettant aux termes de son mémoire de première instance.
Elle fait valoir que :
- la requête de première instance présentée par le requérant était irrecevable car tardive ;
- les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre la France et le Sénégal, signé à Dakar le 23 septembre 2006 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Agnès Bourjol,
- et les observations de Me Boyance, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., né le 25 mai 1997, de nationalité sénégalaise, a déclaré être entré en France le 2 décembre 2014 muni d'un titre de séjour délivré par les autorités italiennes. Par un courrier du 7 décembre 2018, reçu par les services de la préfecture de la Gironde le 18 décembre 2018, il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Une décision implicite de rejet est née du silence gardé par l'administration, le 18 avril 2019. M. A... relève appel du jugement du 27 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Aux termes du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue du point 31 de l'article 3 de l'avenant signé le 25 février 2008 : " Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : - soit la mention "salarié" s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail ; / - soit la mention "vie privée et familiale" s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels ". . Les stipulations du paragraphe 42 de l'accord du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue de l'avenant signé le 25 février 2008, renvoyant à la législation française en matière d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants sénégalais en situation irrégulière rendent applicables à ces ressortissants les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour par un ressortissant sénégalais en situation irrégulière, est conduit, par l'effet de l'accord du 23 septembre 2006 modifié, à faire application des dispositions de l'article L. 313-14 du code.
3. L'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile inséré au sein d'une septième sous-section intitulée " l'admission exceptionnelle au séjour " de la deuxième section du chapitre III du titre Ier du livre III de la partie législative de ce code, dispose en son premier alinéa : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) ". En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là même, de motifs exceptionnels exigés par la loi.
4. M. A... fait valoir qu'il travaille en France depuis octobre 2015 pour la même société, sous couvert d'un contrat à durée déterminée, puis d'un contrat à durée indéterminée à compter d'avril 2016 et produit, à cet effet, la plupart de ses bulletins de salaire, ainsi qu'un formulaire de demande d'autorisation de travail datée 27 novembre 2018, documents au demeurant non visés par les services de la DIRECCTE, et, ce, en qualité de monteur-câbleur en téléphonie. A supposer même que cet emploi puisse être assimilé au métier de monteur structures métalliques inscrit sur la liste figurant en annexe IV de l'accord franco-sénégalais, le préfet ne peut être regardé comme ayant commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que ces éléments ne constituaient pas des motifs exceptionnels justifiant la régularisation de la situation de l'intéressé.
5. Entré sur le territoire français en 2014 selon ses dires, M. A... s'y est maintenu irrégulièrement et n'a demandé la régularisation de sa situation administrative que le 18 décembre 2018. S'il se prévaut de l'ancienneté de son séjour en France en soutenant qu'il y réside de manière habituelle depuis cinq ans, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il est en possession d'un permis de séjour délivré en 2016 par les autorités italiennes, valable jusqu'au 24 janvier 2019, ainsi que d'une carte d'identité italienne délivrée en 2014 et valable jusqu'au 25 mai 2019. La circonstance qu'il ait un frère de nationalité française qui réside en France et l'héberge depuis son entrée sur le territoire ne lui confère aucun droit au séjour. En l'absence de tout autre élément caractérisant la situation personnelle du requérant, célibataire et sans enfant, ces circonstances ne sauraient être regardées comme attestant de considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile justifiant la régularisation de la situation de M. A... ni au titre de la vie privée et familiale, ni au titre du travail. Par suite, le refus de séjour en litige ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 313-14, précitées.
6. L'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. M. A... soutient que le centre de ses intérêts se trouve désormais en France où il séjourne depuis l'année 2014, et a de la famille en la personne de son frère, de nationalité française, qui l'héberge. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé n'est entré sur le territoire français qu'à l'âge de dix-sept ans et en admettant même que son frère réside sur le territoire français, M. A..., qui est célibataire et sans charge de famille, n'établit ni même n'allègue qu'il serait isolé en cas de retour au Sénégal. Dans ces conditions, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, la préfète de la Gironde n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et, par suite, n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur les autres conclusions :
8. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 13 septembre 2021, à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
Mme Agnès Bourjol, première conseillère.
Rendu public par remise au greffe, le 11 octobre 2021.
La rapporteure,
Agnès BOURJOLLe président,
Didier ARTUS
La greffière,
Sylvie HAYET
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21BX01378