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11/10/2021 | FRANCE | N°20BX03399

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 11 octobre 2021, 20BX03399


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 7 mai 2019 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1905287 du 20 juillet 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrés le 12 octobre 2020, le 18 janvier 2021, le 16 juillet 2021 et le 30 août 2021, Mme C..., représentée par Me Georges, d

emande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 20 juillet ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 7 mai 2019 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1905287 du 20 juillet 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrés le 12 octobre 2020, le 18 janvier 2021, le 16 juillet 2021 et le 30 août 2021, Mme C..., représentée par Me Georges, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 20 juillet 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 mai 2019 de la préfète de la Gironde ;

3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer le titre de séjour sollicité ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la décision portant refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.

La demande de Mme C... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle a été rejetée par une décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 1er octobre 2020.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 août 2021, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Par ordonnance du 17 juin 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 30 août 2021 à 12h.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A..., a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante congolaise née le 22 janvier 1993, est entrée en France le 30 décembre 2017 selon ses déclarations. Le 4 janvier 2018, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par une décision du 7 mai 2019, la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer le titre sollicité. Mme C... relève appel du jugement du 20 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 7 mai 2019 :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " Selon l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : /(...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " Pour l'application des stipulations et dispositions précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

3. Mme C..., titulaire d'un doctorat en médecine générale obtenu en Ukraine le 24 juin 2017, fait valoir qu'elle est entrée en France le 30 décembre 2017 pour rejoindre, d'une part, son père et son frère, de nationalité française, installés sur le territoire national, d'autre part, M. B..., son compagnon de nationalité congolaise en situation régulière, établi à Bordeaux. Elle produit deux transferts d'argent réalisés par M. B... à son bénéfice les 14 juin 2016 et 24 juillet 2017 et des photographies prises au cours des années 2010, 2014 et 2016 pour établir l'ancienneté de leur rencontre. Il ressort des pièces du dossier qu'elle a partagé avec lui une vie commune dès son arrivée sur le territoire et qu'un premier enfant est né en France de leur union le 23 décembre 2018. Ils ont ensuite conclu un pacte civil de solidarité (PACS) le 10 juillet 2019 et un second enfant est né le 18 mars 2020. Ainsi, en dépit de la durée de la vie commune à la date de l'arrêté contesté, leur relation apparaissait ainsi ancienne et stable. Par ailleurs, alors que M. B... justifie d'une déclaration d'impôt pour l'année 2019 pour un revenu de 29 912 euros gagné auprès de différents employeurs, elle justifie poursuivre des études, maîtriser le français et avoir participé à un stage d'études d'infirmière diplômée d'Etat à l'I.F.S.I du Centre Hospitalier Charles Perrens entre le 15 avril et le 21 juin 2019 ainsi que, postérieurement à la décision attaquée, de l'obtention d'un diplôme universitaire d'aptitude à la médecine d'urgence pour l'année 2020-2021. Dans ces conditions, Mme C..., qui bénéficie de relations sociales, amicales ou professionnelles en France, et dont la mère est décédée, est fondée à soutenir que la décision portant refus de titre de séjour a, dans les circonstances de l'espèce, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été édictée. Par suite, l'intéressée est fondée à soutenir que la décision contestée a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête, que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Il suit de là que l'arrêté du 7 mai 2019 de la préfète de la Gironde et le jugement du 20 juillet 2020 du tribunal administratif de Bordeaux doivent être annulés.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre à la préfète de la Gironde de délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale ", sous réserve d'un changement dans les circonstances de fait, à Mme C... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais d'instance :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat, partie perdante, à verser la somme de 1200 euros à Mme C... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : L'arrêté du 7 mai 2019 de la préfète de la Gironde et le jugement du 20 juillet 2020 du tribunal administratif de Bordeaux sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la préfète de la Gironde de délivrer à Mme C... un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme C... une somme de 1200 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 13 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

M. Faïck, président-assesseur,

Mme Bourjol, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 octobre 2021.

Le président-assesseur,

Frédéric FAÏCKLe président,

Didier A...

La greffière,

Sylvie HAYET

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 20BX03399 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: M. Didier ARTUS
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : GEORGES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Date de la décision : 11/10/2021
Date de l'import : 19/10/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 20BX03399
Numéro NOR : CETATEXT000044200593 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-10-11;20bx03399 ?
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