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30/09/2021 | FRANCE | N°21BX01245

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 30 septembre 2021, 21BX01245


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 2 mars 2021 par lequel le préfet de La Réunion lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il serait éloigné et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2100264 du 8 mars 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de La Réunion a annulé cet arrêté en tant

qu'il prononce une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 2 mars 2021 par lequel le préfet de La Réunion lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il serait éloigné et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2100264 du 8 mars 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de La Réunion a annulé cet arrêté en tant qu'il prononce une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans, a condamné l'Etat à verser une somme de 1 500 euros à M. A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de ses conclusions.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 mars 2021 et un mémoire enregistré le 29 mars 2021, M. A..., représenté par Me Ali, demande à la cour :

1°) " d'annuler ce jugement en tant qu'il confirme l'arrêté du préfet de La Réunion du 2 mars 2021 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois " ;

2°) d'annuler les décisions portant obligation de quitter le territoire français, refusant de lui octroyer le bénéfice d'un délai de départ et fixant les Comores comme pays de renvoi contenues dans cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de La Réunion de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sur le fondement de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le magistrat désigné a commis une erreur de droit en se fondant sur l'article R. 412-1 du code de justice administrative pour écarter la fin de non-recevoir opposée par le préfet alors que ce sont les dispositions de l'article R. 776-18 qui sont applicables en l'espèce ;

- il a été privé de son droit à un recours effectif ;

- les articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnus ;

- la décision fixant les Comores comme pays de renvoi méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 juillet 2021, le préfet de La Réunion conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Marianne Hardy a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant comorien né en 1990, est entré en France, selon ses déclarations, en 2015 sous couvert d'un visa de court séjour. Il s'est maintenu sur le territoire français après l'expiration de son visa et a été interpellé, le 2 mars 2021, alors qu'il exerçait sans autorisation une activité professionnelle dans un magasin. Par un arrêté du même jour le préfet de La Réunion lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans. Par un jugement du 8 mars 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de La Réunion a annulé cet arrêté en tant qu'il prononce une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans, a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à M. A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de ses conclusions. M. A... relève appel de ce jugement " en tant qu'il confirme l'arrêté du préfet de La Réunion du 2 mars 2021 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois ". Eu égard à ses écritures, M. A... doit être regardé comme demandant l'annulation de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à ses demandes tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter sans délai le territoire français et fixant le pays de destination.

2. Il ressort des termes du jugement attaqué que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de La Réunion a écarté la fin de non-recevoir opposée par le préfet de La Réunion, tirée du défaut de production de la décision attaquée, et s'est prononcé sur l'ensemble des conclusions de la demande présentée par M. A..., et notamment sur ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de La Réunion du 2 mars 2021. La circonstance que pour écarter cette fin de non-recevoir le magistrat désigné se serait fondé sur un article qui n'était pas applicable en l'espèce est sans incidence sur la régularité de ce jugement et n'est pas de nature à entraîner l'annulation des décisions attaquées, contrairement à ce que soutient M. A.... Au demeurant, l'intéressé avait produit lui-même, par un bordereau de communication de pièces enregistré le 6 mars 2021, l'arrêté du préfet de La Réunion du 2 mars 2021.

3. Si M. A..., qui a été mis à même de contester utilement devant le tribunal administratif de La Réunion la mesure d'éloignement dont il faisait l'objet et de se faire représenter par un conseil, a été placé au centre de rétention de Mayotte dès le 4 mars 2021, soit avant la date de l'audience fixée par le tribunal au 6 mars 2021, cette circonstance, postérieure à la date de l'arrêté du préfet de La Réunion, est sans incidence sur sa légalité. Par suite, les moyens ainsi soulevés par M. A..., tirés de la méconnaissance des dispositions alors applicables des articles L. 512-2 et L. 512-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doivent être écartés.

4. M. A... ne peut utilement invoquer, à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté contesté, la méconnaissance des dispositions alors en vigueur du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 313-14 du même code dès lors que ces dispositions ne concernent que les décisions relatives au titre de séjour, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

5. Si M. A... fait valoir qu'il réside à La Réunion depuis 2015 et qu'il y a tissé des liens avec un grand nombre de ses compatriotes y résidant, il est constant qu'il n'a jamais sollicité l'obtention d'un titre de séjour et que sa famille, et notamment son très jeune enfant, réside aux Comores, pays où il a vécu la plus grande partie de sa vie. Par ailleurs, les témoignages qu'il produit, s'ils montrent que M. A... est apprécié pour ses qualités humaines, ne permettent pas de caractériser l'existence, à La Réunion, de liens d'une nature ou d'une intensité particulière. Dans ces conditions, et alors même que l'intéressé est atteint d'un handicap qui l'isole, l'obligation de quitter sans délai le territoire français ne peut être regardée comme portant au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A... une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par cette mesure. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

6. Enfin, M. A... n'invoque aucune circonstance permettant de caractériser un risque quelconque pour sa vie ou sa sécurité en cas de retour aux Comores. Par ailleurs, les circonstances que le laissez-passer délivré par le préfet pour permettre son retour vers les Comores aurait été établi dans des conditions irrégulières et que ce laissez-passer prévoit son transfert à Mayotte, qui était alors confronté à une explosion de l'épidémie de Covid-19, sont sans incidence sur la légalité de la décision fixant le pays de destination dès lors qu'un tel document se rapporte à l'exécution de cette décision. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de La Réunion a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter sans délai le territoire français et fixant le pays de destination de cette mesure. Dès lors, ses conclusions tendant à l'annulation de ce jugement doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de La Réunion.

Délibéré après l'audience du 2 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 septembre 2021.

La présidente-rapporteure,

Marianne HardyLa présidente-assesseure,

Fabienne Zuccarello La greffière,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX01245 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01245
Date de la décision : 30/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Marianne HARDY
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : CABINET ALI - MAGAMOOTOO

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-09-30;21bx01245 ?
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