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30/09/2021 | FRANCE | N°19BX04573

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 30 septembre 2021, 19BX04573


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... et D... E... ont demandé au tribunal administratif de Pau de condamner l'État à leur verser la somme de 733 428,20 euros, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis en raison de l'erreur commise dans l'élaboration de la carte des aléas portant sur la zone où se situe leur terrain.

Par un jugement n° 1600888 du 9 juillet 2019, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.

P

rocédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 28 novembre 2019 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... et D... E... ont demandé au tribunal administratif de Pau de condamner l'État à leur verser la somme de 733 428,20 euros, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis en raison de l'erreur commise dans l'élaboration de la carte des aléas portant sur la zone où se situe leur terrain.

Par un jugement n° 1600888 du 9 juillet 2019, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 28 novembre 2019 et le 5 juillet 2021, M. et Mme E..., représentés par Me Delhaes, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 9 juillet 2019 ;

2°) de condamner l'État à leur verser la somme de 733 428,20 euros, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis en raison de l'erreur commise dans l'élaboration de la carte des aléas ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la carte des aléas, élaborée par les services de l'État, comportait des erreurs dans le positionnement des courbes de niveau, qui sont constitutives d'une faute ;

- le permis de construire du 20 mars 2007 et le permis de construire modificatif du 24 septembre 2007 ont été délivrés sur le fondement de cette carte des aléas ;

- ils ont subi des préjudices en lien avec cette faute, dès lors que leur propriété a été inondée à dix reprises entre 2008 et 2013 et que leur terrain est désormais reconnu comme inconstructible ;

- leur préjudice matériel s'élève à 568 473,50 euros, dont 253 860 euros concernant la perte de la valeur vénale de leur bien immobilier ;

- leur préjudice moral s'élève à 150 000 euros ;

- les frais d'expertise judiciaire qu'ils ont dû exposer s'élèvent à 14 954,70 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 juin 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens de M. et Mme E... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Charlotte Isoard,

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me Lopes, représentant M. et Mme E....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme E... ont acquis, le 14 décembre 2006, un terrain situé à Urcuit (Pyrénées-Atlantiques), à proximité du ruisseau de l'Ardanavy. Le maire de la commune leur a délivré, par des arrêtés du 20 mars 2007 et du 24 septembre 2007, un permis de construire et un permis de construire modificatif portant sur l'édification d'une maison individuelle sur ce terrain. Les 16 et 17 juin 2010, à la suite de fortes intempéries, le terrain et la maison de M. et Mme E... ont été inondés, et, depuis cette date, leur terrain a subi plusieurs inondations. M. et Mme E... relèvent appel du jugement du 9 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'État à leur verser la somme de 733 428,20 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis en raison des erreurs que comporte la carte des aléas portant sur la zone où se situe leur terrain.

2. En premier lieu, le préjudice invoqué " résultant de l'illégalité de l'arrêté de refus du 3 avril 2015 ", n'est pas assorti de précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé, alors que cette décision n'est d'ailleurs pas versée au dossier.

3. En deuxième lieu, les préjudices dont se prévalent M. et Mme E..., liés à la reconstruction de leur maison et à la perte de valeur de leur bien immobilier, découlent de ce qu'ils ont construit une maison à usage d'habitation sur un terrain inondable. Or, la responsabilité de l'État ne peut être engagée à leur égard du fait des préjudices résultant de cette situation dès lors que les permis de construire des 20 mars 2007 et 24 septembre 2007 ont été délivrés à M. et Mme E... par le maire d'Urcuit au nom de la commune. Si les indications portées sur la carte des aléas destinée à servir de support au projet de plan de prévention des risques d'inondation en cours d'élaboration ont été prises en compte pour instruire les demandes de permis de construire présentées par les requérants, cette circonstance n'est pas de nature à engager la responsabilité de l'État à leur égard du fait des préjudices liés aux autorisations de construire délivrées dès lors que la carte des aléas élaborée par les services de l'État ne vaut pas autorisation d'urbanisme. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction, et n'est d'ailleurs pas allégué, que l'achat du terrain sur lequel M. et Mme E... ont implanté leur maison d'habitation aurait été déterminé par les mentions portées sur la carte des aléas qui devait être annexée au plan de prévention des risques d'inondation. Ainsi, les préjudices dont se prévalent M. et Mme C... A..., liés au coût d'acquisition d'un nouveau terrain à l'abri des inondations et à la construction d'une nouvelle maison, ne présentent aucun lien direct et certain avec les erreurs alléguées figurant sur la carte des aléas qui auraient été commises par l'État. Enfin, le préjudice lié à la perte de valeur vénale du terrain invoqué par les requérants ne peut être regardé comme présentant un caractère certain dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. et Mme E... auraient tenté de vendre ce terrain. Par suite, et au demeurant, la responsabilité de l'État n'est pas susceptible d'être engagée à leur égard du fait de ce préjudice.

4. En troisième lieu, le préjudice moral allégué par M. et Mme E..., lié à la crainte de subir de nouvelles inondations, résulte également de l'implantation d'une construction à usage d'habitation sur ce terrain, autorisée par les arrêtés de permis de construire des 20 mars 2007 et 24 septembre 2007 délivrés par le maire d'Urcuit au nom de la commune, mais ne présente pas de lien direct avec les manquements allégués des services de l'État dans l'élaboration de la carte d'aléas qui, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, n'emporte pas, par elle-même, autorisation de construire.

5. Enfin, l'expertise judiciaire dont se prévalent M. et Mme E... n'a, en l'espèce, pas été utile à la détermination de leur préjudice indemnisable. Il n'y a, dès lors, pas lieu de leur accorder une indemnité représentative des frais qu'ils ont exposés afin que cette expertise soit réalisée.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande. Leur requête doit ainsi être rejetée, y compris leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E..., à Mme D... C... A... et à la ministre de la transition écologique.

Délibéré après l'audience du 2 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 septembre 2021.

La rapporteure,

Charlotte IsoardLa présidente,

Marianne Hardy

La greffière,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 19BX04573 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19BX04573
Date de la décision : 30/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Problèmes d'imputabilité - Personnes responsables - État ou autres collectivités publiques - État ou commune.

Urbanisme et aménagement du territoire - Plans d'aménagement et d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Charlotte ISOARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : SELARL ETCHE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-09-30;19bx04573 ?
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