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30/09/2021 | FRANCE | N°19BX01490

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 30 septembre 2021, 19BX01490


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner M. B... D... à verser une amende de 3 750 euros au titre de l'article L. 5337-4 du code des transports pour avoir porté atteinte à l'intégrité et à la conservation du domaine public maritime, de le condamner à enlever, dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 200 euros par jour de retard, son catamaran du terre-plein du port de La Teste-de-Buch pour

l'occupation duquel sa société EURL Bassin Multi Sail dispose d'une auto...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner M. B... D... à verser une amende de 3 750 euros au titre de l'article L. 5337-4 du code des transports pour avoir porté atteinte à l'intégrité et à la conservation du domaine public maritime, de le condamner à enlever, dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 200 euros par jour de retard, son catamaran du terre-plein du port de La Teste-de-Buch pour l'occupation duquel sa société EURL Bassin Multi Sail dispose d'une autorisation d'occupation du domaine public et de lui enjoindre de remettre le terre-plein dans son état initial en comblant les tranchées réalisées.

Par un jugement n° 1704935 du 26 septembre 2018, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Bordeaux a condamné M. D... à payer une amende de 3 750 euros et a rejeté le surplus des demandes du syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 12 avril 2019 et le 28 juillet 2020, M. D..., représenté par Me Krebs, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 26 septembre 2018 ;

2°) de le relaxer des poursuites dont il fait l'objet, ou, à défaut, de moduler le montant de l'amende susceptible d'être prononcée à son encontre à une somme qui ne saurait excéder 300 euros ;

3°) de mettre à la charge du syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon le versement à Me Krebs de la somme de 2 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son avocat renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le tribunal administratif a été irrégulièrement saisi par le directeur du syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon, qui n'était pas compétent ; au demeurant, la délégation de signature qui lui a été accordée ne mentionnait pas l'exercice des poursuites en matière de contravention de grande voirie ; il n'est pas démontré que cette délégation de signature a été régulièrement publiée ;

- le règlement auquel renvoie l'autorisation d'occupation temporaire du domaine public maritime dont bénéficie l'EURL Bassin Multi Sail n'interdit pas le stationnement des bateaux sur les terre-pleins des emplacements portuaires ; son bateau n'était ainsi pas stationné sans autorisation ;

- les atteintes portées au bon état des installations portuaires ne sont pas sanctionnées par les articles L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques et L. 5335-3, L. 5335-4 et L. 5337 du code des transports et ne peuvent donc pas fonder la contravention de grande voirie qui lui a été infligée, en vertu du principe de la légalité des délits et des peines ;

- l'auteur du procès-verbal de contravention de grande voirie n'était pas compétent ;

- les poursuites lui ont été irrégulièrement notifiées, dès lors que l'acte du 9 novembre 2017 portant notification du procès-verbal de contravention de grande voirie et citation à comparaitre a été signé par une personne incompétente ;

- l'amende doit être modulée, dès lors que son bateau a été stationné environ quatre mois en période hivernale sur un emplacement pour lequel il était titulaire d'une autorisation d'occupation temporaire et qu'il a remis en état le terre-plein de son emplacement portuaire.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 juillet 2020, le syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon, représenté par Me Delavallade, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. D... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la requête de M. D... est irrecevable, dès lors qu'elle a été présentée tardivement ;

- les moyens de M. D... ne sont pas fondés.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 14 février 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de procédure pénale ;

- le code des transports ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Charlotte Isoard,

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me Krebs, représentant M. D..., et de Me Delavallade, représentant le syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon.

Considérant ce qui suit :

1. Le 16 octobre 2017, un agent du syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon a constaté la présence du catamaran " Caïpirinha ", appartenant à M. D..., sur le terre-plein d'un emplacement du port de la Teste-de-Buch pour lequel une autorisation d'occupation du domaine public avait été accordée à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Bassin Mutli Sail, ainsi que la présence de deux tranchées creusées sur ce terre-plein afin de pouvoir y tirer le navire. Un procès-verbal de contravention de grande voirie a été dressé le 8 novembre 2017, constatant la permanence de cette situation malgré la mise en demeure adressée à M. D... d'enlever son navire de cet emplacement avant le 4 novembre 2017. Le directeur du syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner M. D... au paiement de l'amende maximale prévue par l'article L. 5337-4 du code des transports, ainsi qu'à enlever le catamaran " Caïpirinha " de cet emplacement dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, et de remettre le terre-plein dans son état initial. Par un jugement du 26 septembre 2018, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Bordeaux a condamné M. D... à payer une amende de 3 750 euros et a rejeté le surplus des demandes du syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon, M. D... ayant procédé à l'enlèvement de son navire et à la remise en état des lieux. M. D... relève appel de ce jugement en tant qu'il l'a condamné à payer une amende de 3 750 euros.

Sur la recevabilité de la requête :

2. Aux termes de l'article L. 774-6 du code de justice administrative : " Le jugement est notifié aux parties, à leur domicile réel, dans la forme administrative par les soins des autorités mentionnées à l'article L. 774-2, sans préjudice du droit de la partie de le faire signifier par acte d'huissier de justice. ". Et aux termes de l'article L. 774-7 du même code : " Le délai d'appel est de deux mois. Il court contre l'administration du jour du jugement et, contre la partie poursuivie, du jour de la notification du jugement à cette partie. "

3. Il résulte de l'instruction que le jugement attaqué a été signifié par acte d'huissier par le syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon à M. D... le 19 octobre 2018. L'intéressé a déposé une demande d'aide juridictionnelle le 19 décembre 2018 afin de faire appel de ce jugement, qui a eu pour effet d'interrompre le délai de recours. L'aide juridictionnelle lui ayant été accordée par une décision du 14 février 2019, la requête de M. D..., enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux le 12 avril 2019, a été présentée dans le délai de de recours prévu par l'article L. 774-7 du code de justice administrative cité ci-dessus. Par suite, elle n'était pas tardive, et la fin de non-recevoir présentée par le syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon doit être écartée.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Aux termes de l'article L. 5337-3-1 du code des transports : " Dans les ports maritimes relevant des collectivités territoriales et de leurs groupements mentionnés au 3° de l'article L. 5331-5, dans le cas où une contravention de grande voirie a été constatée, le président de l'organe délibérant de la collectivité ou du groupement saisit le tribunal administratif territorialement compétent, dans les conditions et suivant les procédures prévues au chapitre IV du titre VII du livre VII du code de justice administrative, sans préjudice des compétences dont dispose le préfet en la matière. Il peut déléguer sa signature à un vice-président. ".

5. Ainsi qu'il a été rappelé au point 1, à la suite de l'établissement du procès-verbal de grande voirie du 8 novembre 2017, M. A... C..., directeur du syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon, a notifié ce procès-verbal à M. D... et saisi le tribunal administratif de Bordeaux. Si le syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon fait valoir que son président a accordé au directeur du syndicat mixte une délégation de signature à effet de signer " toutes correspondances, toutes pièces et actes, contrats et marchés concernant les affaires du Syndicat mixte ", les dispositions de l'article L. 5337-3-1 du code des transports citées ci-dessus prévoient seulement qu'en matière de contravention de grande voirie, le président d'un groupement peut déléguer sa signature à un vice-président. M. C... n'ayant pas cette qualité, il ne pouvait valablement déférer M. D..., comme prévenu d'une contravention de grande voirie, au tribunal administratif de Bordeaux. Dès lors, c'est à tort que la magistrate désignée par le président de ce tribunal a condamné M. D... à payer une amende de 3 750 euros.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 26 septembre 2018 doit être annulé.

Sur les conclusions aux fins de relaxe :

7. Il résulte de ce qui a été dit au point 5 que M. D... doit être relaxé des fins de la poursuite engagée contre lui.

Sur les frais liés au litige :

8. M. D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge du syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon le versement à Me Krebs de la somme de 1 500 euros.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 16 septembre 2018 est annulé.

Article 2 : M. D... est relaxé des fins de la poursuite engagée à son encontre pour contravention de grande voirie.

Article 3 : Le syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon versera 1 500 euros à Me Krebs en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D..., au syndicat mixte des ports du bassin d'Arcachon et à Me Olivier Krebs.

Délibéré après l'audience du 2 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 septembre 2021.

La rapporteure,

Charlotte IsoardLa présidente,

Marianne Hardy

La greffière,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne à la préfète de la Gironde ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 19BX01490 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19BX01490
Date de la décision : 30/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux répressif

Analyses

24-01-03-01 Domaine. - Domaine public. - Protection du domaine. - Contraventions de grande voirie.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Charlotte ISOARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : KREBS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-09-30;19bx01490 ?
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