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30/09/2021 | FRANCE | N°19BX00311

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 30 septembre 2021, 19BX00311


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par action simplifiée (SAS) Camping de la Dune a demandé au tribunal administratif de Bordeaux, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 28 mars 2017 par lequel le maire de La Teste-de-Buch a refusé de lui délivrer un permis d'aménager et, à titre subsidiaire, d'annuler ce même arrêté en tant qu'il s'oppose au nombre maximum de résidences mobiles de loisirs fixé à trente-cinq et rejette son dossier assorti des prescriptions de la commission départementale de la nature, des sites et de

s paysages hors la parcelle 139.

Par un jugement n° 1704071 du 22 novembre 201...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par action simplifiée (SAS) Camping de la Dune a demandé au tribunal administratif de Bordeaux, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 28 mars 2017 par lequel le maire de La Teste-de-Buch a refusé de lui délivrer un permis d'aménager et, à titre subsidiaire, d'annuler ce même arrêté en tant qu'il s'oppose au nombre maximum de résidences mobiles de loisirs fixé à trente-cinq et rejette son dossier assorti des prescriptions de la commission départementale de la nature, des sites et des paysages hors la parcelle 139.

Par un jugement n° 1704071 du 22 novembre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 22 janvier 2019 et le 24 avril 2021, la SAS Camping de la Dune, représentée par Me Bousquet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 novembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 mars 2017 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de La Teste-de-Buch le versement d'une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué méconnait l'article L. 341-10 du code de l'environnement dans la mesure où son projet ne modifie pas l'aspect du site et n'est alors pas soumis à autorisation spéciale ;

- l'administration ne pouvait pas légalement exiger qu'elle réduise le nombre de résidences mobiles de loisirs et d'habitations légères de loisirs par rapport au nombre existant au moment du classement du site ;

- l'administration aurait dû lui délivrer l'autorisation d'aménager sollicitée assortie des prescriptions retenues par la commission départementale de la nature, des sites et des paysages dès lors que celle-ci avait rendu un avis favorable au projet ;

- c'est à tort que le ministre a considéré que les aménagements prévus sur la parcelle CH 139 constituent une extension du camping ;

- la parcelle CH 139 doit être reclassée en zone Nr du plan local d'urbanisme.

Par un mémoire en défense enregistré le 6 juillet 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 juillet 2021, la commune de La Teste-de-Buch, représentée par la SCP Noyer Cazcarra Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société requérante la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le décret du 28 juin 1994 portant classement parmi les sites du département de la Gironde de l'ensemble formé par le site de la dune du Pilat et la forêt usagère sur la commune de La Teste-de-Buch ;

- le décret n° 2008-679 du 9 juillet 2008 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marianne Hardy ;

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public ;

- et les observations de Me Bousquet, représentant la société Camping de la Dune, et de Me Jeanneau, représentant la commune de La Teste-de-Buch.

Considérant ce qui suit :

1. Par un avis du 20 mai 2008, la commission départementale de la nature et des sites de la Gironde a validé le " Guide de gestion des campings de la Dune du Pilat " incitant les gestionnaires des cinq campings inclus dans le périmètre du site classé de la dune du Pilat à régulariser les aménagements effectués sans autorisation au moyen de demandes de permis de construire et d'aménager. Le 14 mars 2016, la société Camping de la Dune, qui exploite un camping inclus dans ce périmètre, a présenté une demande de permis d'aménager. Le 20 mars 2017, la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer a décidé de ne pas autoriser le projet. Par un arrêté du 28 mars 2017, le maire de La Teste-de-Buch a refusé de lui délivrer le permis sollicité. La société Camping de la Dune relève appel du jugement du 22 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 mars 2017.

2. Aux termes de l'article L. 341-10 du code de l'environnement : " Les monuments naturels ou les sites classés ne peuvent ni être détruits ni être modifiés dans leur état ou leur aspect sauf autorisation spéciale. (...) ". Aux termes de l'article R. 425-17 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est situé dans un site classé ou en instance de classement, la décision prise sur la demande de permis ou sur la déclaration préalable ne peut intervenir qu'avec l'accord exprès prévu par les articles L. 341-7 et L. 341-10 du code de l'environnement : / a) Cet accord est donné par le préfet ou, le cas échéant, le directeur de l'établissement public du parc national dans les conditions prévues par l'article R. 341-10 du code de l'environnement, après avis de l'architecte des Bâtiments de France, lorsque le projet fait l'objet d'une déclaration préalable ; / b) Cet accord est donné par le ministre chargé des sites, après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, dans les autres cas. ". En vertu de l'article R. 421-19 du même code : " Doivent être précédés de la délivrance d'un permis d'aménager : (...) f) Les travaux ayant pour effet, dans un terrain de camping ou d'un parc résidentiel de loisirs, de modifier substantiellement la végétation qui limite l'impact visuel des installations (...) ". L'article R. 443-6 du même code énonce que le " permis d'aménager impose le respect des normes d'urbanisme, d'insertion dans les paysages, d'aménagement, d'équipement et de fonctionnement (...) Il fixe le nombre maximum d'emplacements. Pour les terrains de camping, il fixe le nombre d'emplacements réservés indistinctement aux tentes, aux caravanes et aux résidences mobiles de loisirs et délimite, lorsque l'implantation d'habitations légères de loisirs est envisagée, leurs emplacements. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le projet en vue duquel la demande de permis d'aménager a été présentée porte notamment sur l'enlèvement à terme de treize résidences mobiles de loisirs et habitations légères de loisirs, aboutissant à un nombre total de quatre-vingt, sur la création de trente lots libres sur la parcelle CH 139, avec agrandissement du sanitaire le plus proche, sur le remplacement de résidences mobiles de loisirs et d'habitations légères de loisirs par des tentes-lodges, sur l'installation de trente-deux tentes-lodges sur des emplacements libres, sur l'amélioration de l'aspect des bâtiments par la pose de bardages et le recouvrement de toitures, sur la reprise des clôtures et sur le réaménagement des conditions d'accès et de stationnement. Le projet prévoit l'implantation de nouveaux équipements, des modifications affectant les caractéristiques et la disposition des emplacements, des travaux d'aménagement sur une part importante du terrain. Ces travaux, qui comportent également la plantation de petits pins maritimes, de chênes et d'arbousiers et le confortement des plantations existantes ont pour effet, en raison de leur nature et de leur portée, de modifier substantiellement le site. Dès lors, leur réalisation devait être précédée d'un permis d'aménager, alors même que le projet prévoit de réduire le nombre maximum d'emplacements réservés indistinctement aux tentes, aux caravanes et aux résidences mobiles de loisirs et que la société requérante n'entend pas solliciter d'emplacements supplémentaires.

4. Pour refuser d'autoriser le permis d'aménager présenté par la société Camping de la Dune, la ministre chargée de l'environnement a relevé la visibilité, depuis le haut de la dune et la route, des résidences mobiles de loisirs et des habitations légères de loisirs implantées dans le camping et a estimé que le projet de la société Camping de la Dune ne permettait pas, malgré la réduction du nombre de résidences mobiles de loisirs et d'habitations légères de loisirs proposée dans la demande de permis d'aménager, de " réduire de façon significative l'impact majeur du camping sur le site en contradiction avec les objectifs du classement " et que la création de trente lots libres sur la parcelle CH 139 constituait une extension du camping qui aggraverait l'atteinte au site classé et irait à l'encontre de sa reconquête progressive. En outre, la ministre a également retenu que le projet de l'intéressée devait être complété s'agissant, notamment, des replantations, avec l'élaboration d'un plan de renouvellement du peuplement forestier pour renforcer la trame boisée, des modèles des tentes-lodges, du traitement de la clôture et du parking, de l'aspect de la place de retournement et des enseignes.

5. D'une part, il ressort des pièces du dossier que, par une lettre de mission du 26 août 2011, le ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et des logements a demandé au Conseil général de l'environnement et du développement durable de désigner un inspecteur général " chargé de (lui) remettre un rapport d'expertise sur les aménagements projetés et les solutions à apporter aux problèmes de gestion ", " compte tenu des difficultés importantes de gestion des terrains de camping installés au pied de la dune du Pilat et de l'état de dégradation actuel du site classé ". M. A..., ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts, désigné par le Conseil général de l'environnement et du développement durable, a remis son rapport au mois de décembre 2012, dans lequel il a formulé plusieurs propositions à réaliser progressivement dans le temps, parmi lesquelles la réduction du nombre de " mobil-homes ", le transfert et l'habillage de ceux qui seront conservés et des actions de requalification paysagère. Contrairement à ce que soutient la société requérante, la ministre chargée de l'environnement pouvait notamment tenir compte des éléments de ce rapport pour fonder sa décision.

6. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que l'ensemble formé par le site de la dune du Pilat et la forêt usagère située sur le territoire de la commune de La Teste-de-Buch ont été classés au titre de la législation sur les sites par un décret du 28 juin 1994. Si le camping exploité par la société Camping de la Dune existait déjà à la date de ce classement, aucun des documents qu'elle produit ne permet de considérer qu'elle bénéficiait d'une autorisation pour implanter un nombre de résidences mobiles de loisirs et d'habitations légères de loisirs supérieur à trente-cinq, comme le préconise la décision du ministre. En effet, les arrêtés de 1991 et 1994 qu'elle produit, qui concernent le classement du camping au regard de la réglementation relative au tourisme, et les documents relatifs aux tarifs des " mobil-homes " pour différentes saisons touristiques ne permettent pas d'établir le nombre de " mobil-homes " présents sur le camping en 1994, date du classement du site, ni l'existence d'autorisations postérieures à ce classement. Par ailleurs, l'arrêté du maire de La Teste-de-Buch du 2 mai 2003 se borne à autoriser le transfert sur une parcelle des emplacements pour tente mais ne comporte aucune autorisation d'implanter des " mobil-homes " et le permis d'aménager accordé en 2008 ne comporte pas davantage une telle autorisation. Par suite, quand bien même la réglementation en vigueur jusqu'en 1994 ne soumettait pas l'implantation de ces installations à une autorisation préalable, les pièces du dossier ne permettent pas de tenir pour établi l'existence de quatre-vingt " mobil-homes " sur le site avant son classement. Dès lors, contrairement à ce que soutient la société requérante, la décision de la ministre n'a pas pour effet d'imposer la réduction du nombre de " mobil-homes " présents sur le site au moment de son classement.

7. Enfin, il ressort des pièces du dossier que la société Camping de la Dune souhaite créer trente lots libres sur la parcelle CH 139 situé au nord du camping et y déplacer le terrain de tennis, de sorte que cet aménagement va étendre le périmètre du camping. Dans ces conditions, en considérant que l'aménagement de la parcelle CH 139 constitue une extension du camping qui aggraverait l'atteinte au site classé, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur de fait.

8. Par ailleurs, en raison de la localisation du projet et du nombre de " mobil-homes envisagés ", il ne pouvait pas être efficacement remédié à son impact visuel par des prescriptions, notamment par celles proposées par la commission départementale de la nature, du paysage et des sites de la Gironde lors de sa séance du 22 septembre 2016. D'ailleurs, si cette commission a émis un avis favorable aux propositions relatives à l'implantation de tentes sur platelage ainsi qu'aux différents travaux d'aménagement et de plantations, en les assortissant de prescriptions, elle s'est toutefois déclarée défavorable à l'extension du camping sur la parcelle CH 139 et à la régularisation de quatre-vingt habitations légères de loisirs et résidences mobiles de loisirs. Par suite, compte tenu de la nature du projet et de son impact sur le site classé, la ministre a pu, sans erreur d'appréciation, refuser d'accorder l'autorisation d'aménager malgré le fait que certaines des mesures prévues par le projet allaient dans le sens d'une meilleure intégration dans le site.

9. Enfin, en se bornant à faire valoir qu'elle est fondée à soulever, par la voie de l'exception, l'illégalité du reclassement de la parcelle CH 139 en zone Nr du plan local d'urbanisme, la société Camping de la Dune n'assortit pas son moyen de précisions permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la société Camping de la Dune n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de La Teste-de-Buch du 28 mars 2017. Par suite, ses conclusions tendant à l'annulation de ce jugement doivent être rejetée.

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de La Teste-de-Buch qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la société Camping de la Dune demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Camping de la Dune la somme de 1 500 euros au bénéfice de la commune de La Teste-de-Buch au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Camping de la Dune est rejetée.

Article 2 : La société Camping de la Dune versera à la commune de La Teste-de-Buch la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Camping de la Dune, à la commune de La Teste-de-Buch et à la ministre de la transition écologique.

Délibéré après l'audience du 2 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la juridiction le 30 septembre 2021.

La présidente-rapporteure,

Marianne HardyLa présidente-assesseure,

Fabienne Zuccarello

La greffière,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique en ce qui la concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 19BX00311 6


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Marianne HARDY
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS ROCHE ET BOUSQUET

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Date de la décision : 30/09/2021
Date de l'import : 05/10/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19BX00311
Numéro NOR : CETATEXT000044153345 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-09-30;19bx00311 ?
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