La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/07/2021 | FRANCE | N°21BX00342

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 06 juillet 2021, 21BX00342


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... E... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2020 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite.

Par un jugement n° 2000930 du 17 décembre 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une re

quête, enregistrée le 22 janvier 2020, Mme E... épouse D..., représentée par Me H..., demande à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... E... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2020 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite.

Par un jugement n° 2000930 du 17 décembre 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2020, Mme E... épouse D..., représentée par Me H..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 17 décembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2020 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de sept jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai ;

4°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le refus de délivrance du titre de séjour est entaché d'un défaut de motivation ;

- le préfet a méconnu l'article 14 de la convention franco-camerounaise du 24 janvier 1994 ;

- le préfet a méconnu le principe de proportionnalité issu du droit de l'Union européenne ;

- le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision litigieuse méconnaît les dispositions du 4° de l'article L. 121-1, des articles suivants et de l'article R. 121-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur de droit ;

- le préfet a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste dans son appréciation ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mai 2021, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme E... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Cameroun relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Yaoundé le 24 janvier 1994 ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., ressortissante camerounaise née en 1990, a épousé le 10 mars 2018 à Yaoundé M. D..., ressortissant néerlandais né en 1961 et installé en France. Mme E... est entrée en France le 13 mai 2019 et a demandé, le 18 septembre suivant, son admission au séjour sur le fondement du 4° de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 10 janvier 2020, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai. Mme E... relève appel du jugement du 17 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, l'arrêté litigieux vise les conventions internationales et les dispositions légales dont il est fait application, comporte des éléments de faits relatifs à la situation de Mme E... et expose avec précision les raisons pour lesquelles le préfet a refusé de lui délivrer un titre de séjour. Ces indications étaient suffisantes pour permettre à l'intéressée de comprendre et de contester les mesures prises à son encontre. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cet arrêté doit être écarté.

3. En deuxième lieu et d'une part, aux termes de l'article 14 de la convention franco-camerounaise du 24 janvier 1994 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application des législations respectives des deux États sur l'entrée et le séjour des étrangers sur tous les points non traités par la présente Convention. " et aux termes de son article 11 : " Pour tout séjour sur le territoire français devant excéder trois mois, les nationaux camerounais doivent posséder un titre de séjour (...) Ces titres de séjour sont délivrés conformément à la législation de l'État d'accueil ". Il résulte de la combinaison de ces stipulations que la convention franco-camerounaise renvoie à la législation nationale pour la délivrance des titres de séjour.

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans sa rédaction applicable à l'espèce : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, (...) a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; (...) 4° S'il est (...) conjoint, ascendant ou descendant direct à charge du conjoint, accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° ; (...). ".

5. Si Mme E... se prévaut de sa qualité de conjointe d'un ressortissant de l'Union européenne, il ressort des pièces du dossier que M. D..., qui n'exerce pas d'activité professionnelle, n'a perçu aucun revenu imposable depuis au moins l'année 2011 et ne dispose comme seules ressources, à la date de l'arrêté litigieux, que de l'allocation pour adultes handicapés d'un montant mensuel de 900 euros et du complément de ressources d'un montant mensuel de 179 euros, prestations délivrées au titre de l'aide sociale. Ainsi, M. D... ne peut être regardé comme disposant de ressources suffisantes lui permettant de séjourner avec son épouse de manière permanente en France. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 14 de la convention franco-camerounaise du 24 janvier 1994 et des dispositions du 4° de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

6. En troisième lieu, l'appelante se borne à reprendre en appel les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 121-6 et du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux et sans critiquer utilement la réponse qui leur a été apportée par le tribunal. Dans ces conditions, il y a lieu, par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges, d'écarter ces moyens.

7. En quatrième lieu, Mme E... soulève un moyen tiré de l'erreur de droit sans assortir ce moyen de précisions permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé. Le moyen doit donc être écarté.

8. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. Il ressort des pièces du dossier que l'entrée en France de Mme E... à l'âge de 29 ans est très récente. Si elle est dorénavant mariée avec un ressortissant communautaire, ses deux enfants nés en 2012 et 2015 résident au Cameroun où elle a vécu la majeure partie de sa vie. Par ailleurs, rien ne fait obstacle à ce que la vie conjugale de Mme E... se poursuive ailleurs qu'en France, notamment dans le pays dont son conjoint a la nationalité. Dans ces conditions, le préfet n'a pas, en refusant de lui délivrer un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ses décisions ont été prises, alors même qu'elle aurait l'intention de s'intégrer en France. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'atteinte au principe de proportionnalité issu du droit de l'Union européenne doit, en tout état de cause, être écarté. Le préfet n'a pas davantage entaché ses décisions d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle de Mme E....

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... E... épouse D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 10 juin 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

M. C... B..., président-assesseur,

Mme G... A..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2021.

Le rapporteur,

Didier B...

La présidente,

Marianne HardyLa greffière,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX00342


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX00342
Date de la décision : 06/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : MAINIER - SCHALL

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-07-06;21bx00342 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award