Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... F... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de condamner le recteur de l'académie de la Guadeloupe à lui verser les allocations chômage dues sur la période du 30 mai 2007 au 30 mai 2011, les indemnités de licenciement à laquelle elle a droit, la somme de 1 079 247,40 euros au titre de la requalification de son contrat et de la reconstitution de sa carrière ainsi qu'une provision d'un montant de 241 641,37 euros, d'ordonner la reconstitution de sa carrière et de prononcer l'exécution provisoire du jugement à intervenir.
Par un jugement n° 1100225 du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de la Guadeloupe a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande tendant au paiement d'une indemnité de licenciement à concurrence de 7 516,02 euros ainsi que sur les conclusions tendant au versement d'une provision (article 1er), a condamné l'Etat à verser à Mme F... les allocations pour perte d'emploi dues, assorties des intérêts, sur les bases définies dans les motifs du jugement, dans un délai de deux mois à compter de sa notification (article 2), a condamné l'Etat à lui verser la somme de 2 629,94 euros au titre du reliquat de son indemnité de licenciement, majorée des intérêts de retard à compter de la date de réception de sa demande préalable, et la somme de 4 200 euros au titre des indemnités de préavis et de congés payés (article 3) et rejeté le surplus des conclusions de la demande (article 4).
Par un arrêt n° 15BX00760 du 7 mars 2017, la cour administrative d'appel de Bordeaux, saisi par le ministre de l'éducation nationale, a annulé l'article 3 de ce jugement (article 1er), condamné l'Etat à verser à Mme F... la somme de 4 200 euros en réparation des préjudices subis en raison du défaut de préavis de licenciement (article 2), rejeté la demande de Mme F... présentée devant le tribunal administratif tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer des indemnités de licenciement et de congés payés (article 3) et rejeté le surplus des conclusions du ministre (article 4).
Par un courrier enregistré le 28 novembre 2017 et un courrier daté du 19 février 2019, Mme F... a saisi le président du tribunal administratif de la Guadeloupe d'une demande d'exécution du jugement du 18 décembre 2014.
Par une ordonnance du 19 octobre 2018, le président du tribunal administratif de la Guadeloupe a ouvert la phase juridictionnelle de cette procédure d'exécution.
Par une ordonnance du 16 avril 2019, le président du tribunal administratif de la Guadeloupe a renvoyé le dossier à la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Procédure devant la cour :
Par un courrier enregistré le 20 septembre 2019, Mme F... a demandé à la cour d'assurer l'entière exécution du jugement du 18 décembre 2014. Elle demande également que les injonctions soient assorties d'une astreinte de 100 euros par jour de retard, que l'Etat soit condamné à lui verser 3 000 euros pour les préjudices découlant des retards et qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a droit à une durée d'indemnisation de chômage sur quatre ans et à l'exonération des cotisations de sécurité sociale sur l'allocation due qui a le caractère de dommages et intérêts ;
- l'indemnité doit être calculée compte tenu d'un reclassement au 7e échelon avec effet rétroactif au mois de janvier 2004.
Par une lettre du 6 novembre 2019, le recteur de l'académie de la Guadeloupe a présenté des observations sur cette demande.
La demande d'exécution a fait l'objet d'un classement notifié à Mme F... le 17 janvier 2020 qu'elle a contesté par un mémoire enregistré le 18 février 2020.
Par une ordonnance du 13 mars 2020, la présidente de la cour a ouvert une procédure juridictionnelle à l'effet d'assurer si nécessaire l'exécution de l'arrêt n° 15BX00760.
Par un mémoire, enregistré le 17 juillet 2020, Mme F... indique qu'elle demande l'entière exécution du jugement du 18 décembre 2014 et en particulier de ses quatre articles non contestés.
Par un mémoire enregistré le 7 juin 2021, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports conclut au rejet de la demande d'exécution.
Il reprend les mêmes observations que celles produites par le recteur de l'académie de la Guadeloupe.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code monétaire et financier ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... B...,
- et les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt définitif, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte ". Aux termes de l'article R. 921-6 du même code : " Dans le cas où le président estime nécessaire de prescrire des mesures d'exécution par voie juridictionnelle, et notamment de prononcer une astreinte, ou lorsque le demandeur le sollicite dans le mois qui suit la notification du classement décidé en vertu du dernier alinéa de l'article précédent et, en tout état de cause, à l'expiration d'un délai de six mois à compter de sa saisine, le président de la cour ou du tribunal ouvre par ordonnance une procédure juridictionnelle. (...) ".
2. Par le jugement du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de la Guadeloupe a, par son article 1er, décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les demandes de Mme F... tendant au paiement d'une indemnité de licenciement à concurrence de 7 516,02 euros et au versement d'une provision, par son article 2, condamné l'Etat à verser à Mme F... les allocations pour pertes d'emploi qui lui sont dues, assorties des intérêts, sur les bases définies dans les motifs du jugement, par son article 3, condamné l'Etat à verser à Mme F... la somme de 2 629,94 euros au titre du reliquat de son indemnité de licenciement, majorée des intérêts de retard à compter de la date de réception de sa demande préalable, et la somme de 4 200 euros au titre des indemnités de préavis et de congés payés et, par son article 4, rejeté le surplus de ses demandes. Par son arrêt n° 15BX00760 du 7 mars 2017, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé l'article 3 de ce jugement, a condamné l'Etat à verser à Mme F... la somme de 4 200 euros en réparation des préjudices subis en raison du défaut de préavis du licenciement et a rejeté la demande présentée par Mme F... devant le tribunal administratif tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer des indemnités de licenciement et de congés payés. Mme F... demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures, d'assurer l'exécution des articles 1er, 2, 4 et 5 du jugement du 18 décembre 2014.
3. En premier lieu, les articles 1er, 4 et 5 du jugement du 18 décembre 2014, qui, respectivement, prononce un non-lieu à statuer sur les conclusions de la demande de Mme F... tendant au paiement de la somme de 7 516,02 euros, rejette le surplus de sa demande et précise à qui le jugement doit être notifié, n'appellent aucune mesure particulière d'exécution.
4. En deuxième lieu, si Mme F... conteste le calcul des " indemnités légales de licenciement " et des intérêts de retard sur ces indemnités, elle soulève ainsi un litige distinct qui ne se rapporte pas à l'exécution de l'article 2 du jugement du 18 décembre 2014 et dont il n'appartient pas à la cour de connaître dans le cadre de la présente instance. Il en est de même de ses conclusions tendant à la réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait du retard mis, selon elle, par l'administration à exécuter ce jugement.
5. En troisième lieu, s'agissant de l'exécution de l'article 2 du jugement du 18 décembre 2014, il ressort des pièces du dossier, et notamment de son bulletin de paye du mois de mars 2016, que Mme F... a perçu la somme brute de 57 038,91 euros au titre de l'allocation d'aide au retour à l'emploi pour la période allant du 8 juin 2007 au 6 juin 2010. Par ailleurs il ressort de l'état des sommes à payer du 11 avril 2016 et du certificat administratif établi par le recteur de l'académie de la Guadeloupe le 19 septembre 2016 que la somme de 6 629,83 euros a été versée à Mme F... le 3 juin 2016 au titre des intérêts moratoires de l'allocation d'aide au retour à l'emploi pour la période du 24 mars 2011 au 29 mars 2016.
En ce qui concerne le montant de l'indemnité versée à Mme F... au titre des allocations pour perte d'emploi :
6. Le tribunal, dans le point 16 de son jugement, a indiqué que le montant dû à Mme F... au titre de l'indemnisation de son préjudice résultant de la privation des allocations pour perte d'emploi correspondait " au montant dû de ces allocations ", calculé selon les " règles d'indemnisation fixées par les conventions d'assurance chômage en vigueur à la date des demandes formulées par Mme C... F... ". Or il ne résulte ni des stipulations des conventions d'assurance chômage applicables en l'espèce ni des dispositions de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale dont se prévaut Mme F... que les allocations d'aide au retour à l'emploi ne seraient pas soumises aux cotisation sociales. Par suite, l'administration a correctement exécuté le jugement du 18 décembre 2014 en procédant à la déduction des cotisations sociales obligatoires pour calculer le montant de l'indemnité due à Mme F... au titre des allocations d'aide au retour à l'emploi dont elle avait été privée.
7. Contrairement à ce que soutient Mme F..., le jugement du 18 décembre 2014 ne précise nullement que l'indemnisation qui lui est due au titre de la privation des allocations pour perte d'emploi " couvre la période du 1er juin 2007 au 1er juin 2011 ". En l'espèce, Mme F..., qui avait atteint l'âge de 54 ans en 2007, date de son licenciement, avait droit, en application de l'article 12 du règlement général annexé à la convention du 18 janvier 2006 relative à l'aide au retour à l'emploi et à l'indemnisation du chômage, à percevoir l'aide au retour à l'emploi sur une période de 1 095 jours, soit trois ans, et elle ne peut utilement invoquer, pour contester cette durée, ni les dispositions de la circulaire n° 2007-18 du 15 mai 2007 concernant les personnes âgées de 60 ans ni celles des décrets n° 2010-574 et n° 2012-575 du 31 mai 2010 et n° 2009-339 du 27 mars 2009 qui n'ont pas pour objet de modifier la durée d'indemnisation applicable à sa situation. Par suite, en calculant sur une période de trois ans l'indemnité due à Mme F... au titre des allocations d'aide au retour à l'emploi dont elle avait été privée, l'administration a correctement assuré l'exécution du jugement cité ci-dessus.
8. Mme F... ne peut pas utilement invoquer, pour demander que les salaires sur la base desquels ont été calculées les allocations d'aide au retour à l'emploi soient réajustés chaque année en fonction de l'indice des prix, les dispositions de l'article 28 du règlement général annexé à la convention du 18 janvier 2006 relative à l'aide au retour à l'emploi et à l'indemnisation du chômage qui ne concernent que les modalités de revalorisation du salaire de référence de certains allocataires, au nombre desquels ne figure pas Mme F....
9. Mme F... ne peut pas non plus se prévaloir, pour contester le montant de l'indemnité qui lui a été versée au titre des allocations d'aide au retour à l'emploi, de la discrimination dont, selon elle, elle aurait fait l'objet en raison d'un passage tardif au 7e échelon dès lors que cette question, qui n'a pas été tranchée par le tribunal dans son jugement du 18 décembre 2014, soulève un litige distinct qui ne se rapporte pas à l'exécution de l'article 2 de ce jugement.
En ce qui concerne le montant des intérêts au taux légal versés à Mme F... :
10. Aux termes de l'article 1153-1 du code civil, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " En toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l'absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement (...) ". Aux termes de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier : " En cas de condamnation pécuniaire par décision de justice le taux de l'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire ".
11. Contrairement ce que soutient Mme F..., le tribunal n'a pas fixé le point de départ des intérêts au taux légal au 1er juin 2007 mais a indiqué, dans le point 16 de son jugement, qu'elle avait droit " à compter du 24 mars 2011, date de réception de sa première demande tendant au versement des allocations pour perte d'emploi, aux intérêts au taux légal sur les sommes correspondant aux allocations journalières échues avant cette date ". Par ailleurs, la somme due au titre de ces allocations lui a été versée le 29 mars 2016. Par suite, en calculant à compter du 24 mars 2011 et jusqu'au 29 mars 2016 le montant des intérêts, au taux légal, relatifs aux sommes dues à Mme F... au titre des allocations d'aide au retour à l'emploi pour la période du 8 juin 2007 au 6 juin 2010, l'administration a correctement exécuté le jugement du 18 décembre 2014.
12. Le jugement du 18 décembre 2014 ne se prononce pas sur la capitalisation des intérêts. Par suite, l'exécution de ce jugement n'implique pas que soient versés à Mme F... des intérêts sur les intérêts qui lui ont été alloués.
13. Cependant, la somme due à Mme F... au titre des allocations d'aide au retour à l'emploi ne lui a été versée qu'au mois de mars 2016. Dans ces conditions, le jugement du 18 décembre 2014 n'a pas été exécuté dans les deux mois suivant le 29 décembre 2014, date de sa notification au ministre de l'éducation nationale. Par suite, le taux légal des intérêts afférents à l'indemnité due à Mme F... doit être majoré de cinq points à compter du 1er mars 2015. Or la somme de 6 629,83 euros versée à Mme F... le 3 juin 2016 au titre des " intérêts moratoires " n'inclut pas cette majoration. Ainsi, le jugement n'a pas été entièrement exécuté. Dès lors, il y a lieu d'enjoindre à l'Etat de procéder au versement de la somme correspondant à la différence entre le montant des intérêts afférents à la somme de 53 800,78 euros calculés au taux légal majoré de cinq points à compter du 1er mars 2015 et la somme de 6 629,83 euros qui a été versée à Me F... à ce titre, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
14. En revanche, les conclusions de Mme F... tendant à ce qu'il soit fixé " une pénalité à compter du 19 février 2015, à l'encontre du recteur, de 50 euros par jour de retard dans l'exécution du jugement ", qui ne sont fondées sur aucune disposition législative ou réglementaire, doivent être rejetées. Au demeurant, à supposer que Mme F... ait entendu, en réclamant une telle pénalité, demander que l'injonction soit assortie d'une astreinte, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à une telle demande.
15. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, la somme que Mme F..., qui n'est pas représentée par un avocat dans le cadre de la présente instance, demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Il est enjoint à l'Etat de verser à Mme F..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, la somme correspondant à la différence entre le montant des intérêts afférents à la somme de 53 800,78 euros calculés au taux légal majoré de cinq points à compter du 1er mars 2015 jusqu'au 29 mars 2016 et la somme de 6 629,83 euros qui a été versée à Mme F... à ce titre.
Article 2 : Le surplus des conclusions de Mme F... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... F... et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Délibéré après l'audience du 10 juin 2021, à laquelle siégeaient :
Mme D... B..., présidente,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
Mme E... A..., première-conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2021.
La présidente-rapporteure,
Marianne B...Le président-assesseur,
Didier Salvi
La greffière,
Sophie Lecarpentier
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 20BX00878 2