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18/05/2021 | FRANCE | N°20BX00656

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 18 mai 2021, 20BX00656


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Sud Forage, société à responsabilité limitée, a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de la retenue à la source, des pénalités correspondantes et de l'amende prévue à l'article 1788 A § 4 du code général des impôts auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 mai 2013 pour la taxe sur la valeur ajoutée, au titre

des années 2010 à 2012 pour l'impôt sur les sociétés, au titre de l'année 2012 pour la r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Sud Forage, société à responsabilité limitée, a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de la retenue à la source, des pénalités correspondantes et de l'amende prévue à l'article 1788 A § 4 du code général des impôts auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 mai 2013 pour la taxe sur la valeur ajoutée, au titre des années 2010 à 2012 pour l'impôt sur les sociétés, au titre de l'année 2012 pour la retenue à la source et au titre des années 2010 et 2011 pour l'amende, par deux avis de mise en recouvrement du 15 mars 2016.

Par un jugement n° 1802169 du 24 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 février 2020, la société Sud Forage, représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 24 décembre 2019 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités susmentionnées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la régularité de la procédure :

- le débat oral et contradictoire a été méconnu dès lors que la rectification en matière de retenue à la source sur les revenus prétendument distribués n'a jamais été évoquée par le vérificateur au cours ou à l'issue du contrôle ;

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

- le rappel de taxe sur la valeur ajoutée afférent aux exportations n'est pas fondé ; l'absence de production de la déclaration d'exportation visée par l'autorité douanière ne suffit pas à remettre en cause l'exonération de la taxe dès lors que le vérificateur ne conteste ni la réalité ni la consistance de l'opération d'exportation concernée ; l'article 74 de l'annexe III au code général des impôts porte atteinte au principe de proportionnalité ; des éléments de preuve alternatifs, tels que le document de transport du bien vers un pays hors de l'Union européenne, peuvent apporter la preuve de la réalité de l'exportation hors de l'Union européenne ;

- le rappel de taxe déduite par anticipation sur des prestations de services facturées mais non encore encaissées n'est pas justifié puisqu'avant l'engagement du contrôle, les droits en cause ont été régularisés ;

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

- les billets de train ou d'avion et les frais d'hôtel à l'étranger constituent des dépenses exposées dans l'intérêt de la société puisqu'il s'agit de dépenses de prospection commerciale effectuée par des ressortissants des pays prospectés et ayant pour certains dans le passé procuré à la société d'importants marchés à l'exportation ;

- au titre des années 2010, 2011 et 2012, les frais de repas et autres dépenses diverses ont été exposés dans l'intérêt de la société Sud Forage et le rejet de leur admission en charge n'est pas justifié dès lors que les frais de repas concernent des restaurants proches du lieu d'habitation du gérant qui constitue également le siège social de la société et que le coût des repas était relativement modique ;

- au titre des années 2010, 2011 et 2012, les calculs concernant les frais kilométriques admis en charge sont erronés car, d'une part, l'utilisation personnelle des véhicules de la société n'a pas atteint 20 % mais n'a jamais excédé 1/7 de l'ensemble des déplacements et, d'autre part, une erreur de calcul a été commise ;

- au titre de l'année 2010, concernant la facture de vente de lots hétérogènes de ferrailles émise par son gérant, d'un montant de 133 400 euros, son refus d'admission dans les charges de la société Sud Forage n'est pas justifié dès lors que M. C..., son gérant, exerçait précédemment l'activité de ferrailleur et avait accumulé des stocks consistants de lots de ferrailles dont il a entendu se débarrasser en prévision de la vente du terrain sur lequel ces stocks étaient déposés, et que la commission départementale des impôts avait proposé d'abandonner cette rectification ;

- les achats pour un montant de 17 165 euros pour 2011 ont été engagés dans l'intérêt de la société puisqu'ils concernent des dépenses de travaux d'entretien et d'engazonnage concernant le siège social de la société ;

- l'imposition des avantages qu'elle aurait prétendument consentis à son gérant, M. C..., à la suite de la vérification de comptabilité engagée à son encontre, dans la catégorie des revenus des capitaux mobiliers n'est pas fondée ; les avantages en nature accordés à M. C..., à supposer qu'ils soient établis, ne sont imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers que s'ils ont pour effet de porter sa rémunération à un niveau fiscal excessif, sinon, ils doivent être regardés comme des suppléments de salaires imposés dans la catégorie des traitements et salaires ;

- les factures d'un montant de 4 300 euros et de 16 741,67 euros ne sont pas étrangères à son exploitation ; pour la première, il s'agit de frais inhérents à l'intervention d'un préfet en tant que facilitateur pour l'achat envisagé de l'usine Dorcell et pour la seconde, elle a été victime d'une escroquerie et d'un abus de confiance de la part de la société Sikal Group, son gérant ayant fait l'objet d'une plainte pénale du 10 novembre 2010 auprès du procureur général de la République à Kinshasa ;

- la facture de 601 500 euros établie par la société espagnole Pio y Asociados del Levante n'est pas étrangère à l'exploitation et a été acquittée par virement swift international ; elle a été victime d'une escroquerie et d'un abus de confiance de la part de cette société mais le fait que son gérant ait exposé l'entreprise à des risques élevés même si elle ne relevait pas de son activité habituelle, n'est pas de nature à caractériser un acte anormal de gestion ;

- les rectifications pour un montant de 8 412 euros pour 2010, de 11 334 euros pour 2011 et de 9 187 euros pour 2012 ne sont pas fondées dès lors que l'opération en cause ne constitue pas un acte anormal de gestion ;

- le profit sur le Trésor doit être abandonné dès lors que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée ne sont pas fondés ;

En ce qui concerne la retenue à la source :

- les sommes imposées, en tant que revenus distribués, passibles d'une retenue à la source, ne peuvent être imposées une seconde fois dès lors que ces sommes ont déjà été imposées à l'impôt sur les sociétés dans les comptes de la société espagnole Pio y asociados del Levante, sauf à créer une double imposition ;

- pour regarder les dépenses non déductibles comme des revenus réputés distribués au sens de l'article 109-1 1° du code général des impôts, passibles d'une retenue à la source, les résultats de la société Sud Forage devaient être bénéficiaires, de sorte que la retenue à la source aurait dû être limitée aux sommes effectivement versées et désinvesties au sens de l'article 109-1 1°, soit 173 000 euros au lieu de 601 500 euros ;

- les distributions occultes alléguées par l'administration n'entrent pas dans la catégorie des rémunérations et avantages occultes visés par l'article 111 c du code général des impôts ;

En ce qui concerne les majorations :

- la majoration de 40 % pour manquement délibéré n'est pas fondée, la preuve de son intention d'éluder l'impôt n'étant pas apportée ;

- les intérêts du Trésor n'ayant pas été lésés, l'amende de 5 % prévue par l'article 1788 A du code général des impôts méconnaît les principes de proportionnalité et de neutralité garantis par le droit de l'Union européenne ;

- la majoration de 10 % pour défaut de versement de la retenue à la source doit être déchargée pour les motifs énoncés à l'encontre du principal.

Par un mémoire en défense et des pièces, enregistrés le 21 septembre 2020 et le 18 mars 2021, le ministre de l'économie des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens tirés de ce que la société n'a pas commis d'acte anormal de gestion s'agissant de la somme de 601 500 euros et de ce que la distribution de cette somme de 601 500 euros en vertu des dispositions de 1'article 109-1-1° du code général des impôts devait être minorée du montant du déficit fiscal constaté à la clôture de l'exercice clos en 2012, à savoir de 126 540 euros, sont inopérant ;

- aucun des autres moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2006/115/CE du Conseil du 28 novembre 2006 ;

- la convention entre la République française et le Royaume d'Espagne en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune signée à Madrid le 10 octobre 1995 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... E...,

- et les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société Sud Forage, société à responsabilité limitée, exerce une activité dans le domaine des travaux publics, réseaux ferroviaires, négoce de gros matériels de chantier, ferrailles et traverses. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle par proposition de rectification du 13 décembre 2013, l'administration lui a notifié des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2010, une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2010, et l'amende prévue par l'article 1788 A § 4 du code général des impôts au titre de l'année 2010. Par une seconde proposition de rectification du 30 juin 2014, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 mai 2013, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2011 et 2012 et l'amende prévue par l'article 1788 A § 4 du code général des impôts au titre de l'année 2011 lui ont notamment été notifiés. Par une décision du 5 octobre 2016, l'administration a admis partiellement les deux réclamations de la société Sud Forage présentées le 31 mars 2016. La société Sud Forage a demandé au tribunal administratif de Toulouse la décharge des impositions et pénalités susmentionnées restant à sa charge. Elle relève appel du jugement par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur l'étendue du litige :

2. Le 14 septembre 2020, l'administration fiscale a prononcé le dégrèvement des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés, à hauteur de 320 euros en droit et 146 euros en intérêts de retard et pénalités au titre de l'exercice clos en 2012, ce dégrèvement résultant de la prise en compte à titre de charge de la facture d'acquisition d'un vêtement en cuir d'un montant de 961 euros hors taxe par la société Sud Forage. La requête est, par suite, devenue sans objet à hauteur de ce dégrèvement.

Sur les impositions restant en litige :

En ce qui concerne la régularité de la procédure :

3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables ". Dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, comme il est de règle, dans ses propres locaux, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat.

4. Les opérations de vérification se sont déroulées dans les locaux de l'entreprise et une réunion de synthèse s'est tenue le 18 juin 2014. Il ne résulte d'aucun des éléments de l'instruction que le vérificateur se serait refusé à tout échange avec les représentants de la société durant les opérations de contrôle. Par ailleurs, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au vérificateur de donner au contribuable, avant l'envoi de la notification de redressements, une information sur les redressements qu'il pourrait envisager. La société Sud Forage n'est donc pas fondée à soutenir qu'elle aurait été privée d'un débat oral et contradictoire.

En ce qui concerne le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

5. Aux termes de l'article 262 du code général des impôts, dans sa version applicable au litige : " I. - Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : / 1° les livraisons de biens expédiés ou transportés par le vendeur ou pour son compte, en dehors de la Communauté européenne ainsi que les prestations de services directement liées à l'exportation ; / 2° les livraisons de biens expédiés ou transportés par l'acheteur qui n'est pas établi en France, ou pour son compte, hors de la Communauté européenne, à l'exclusion des biens d'équipement et d'avitaillement des bateaux de plaisance, des avions de tourisme ou de tous autres moyens de transport à usage privé, ainsi que les prestations de services directement liées à l'exportation. (...) ". Aux termes de l'article 74 de l'annexe III du code général des impôts : " 1. Les livraisons réalisées par les assujettis et portant sur des objets ou marchandises exportés sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée à condition : / a. que l'assujetti exportateur, lorsqu'il ne tient pas habituellement une comptabilité permettant de déterminer son chiffre d'affaires, inscrive les envois sur le registre prévu au 3° du I de l'article 286 du code général des impôts ; (...) / c. que l'assujetti exportateur établisse pour chaque envoi une déclaration d'exportation, conforme au modèle donné par l'administration et détienne à l'appui de sa comptabilité ou du registre prévu au a l'exemplaire numéro 3 de la déclaration d'exportation visé par l'autorité douanière compétente, conformément au code des douanes communautaires et ses dispositions d'application.(...). / d. que, dans les cas où l'assujetti exportateur ne produit pas les justificatifs prévus au c et, à l'exclusion des opérations mentionnées aux quatrième à huitième alinéas du I de l'article 262 du code général des impôts, il mette à l'appui de sa comptabilité ou du registre mentionné au a l'un des éléments de preuve alternatifs ci-après, pour justifier de la sortie des biens expédiés vers un pays n'appartenant pas à la Communauté européenne, un territoire mentionné au 1° de l'article 256-0 du code général des impôts ou un département d'outre-mer : / 1° La déclaration en douane authentifiée par l'administration des douanes du pays de destination finale des biens ou une attestation de cette administration accompagnée, le cas échéant, d'une traduction officielle ; / 2° Tout document de transport des biens vers un pays n'appartenant pas à la Communauté européenne, un territoire mentionné au 1° de l'article 256-0 du code général des impôts ou un département d'outre-mer ou tout document afférent au chargement du moyen de transport qui quitte la Communauté européenne pour se rendre dans le pays ou le territoire de destination finale hors de la Communauté ; / 3° Tout document douanier visé par le service des douanes compétent et utilisé pour la surveillance de l'acheminement des biens vers leur destination finale hors de la Communauté, lorsqu'il s'agit de biens soumis à des contrôles particuliers ; / 4° les documents mentionnés à l'article 302 M du code général des impôts, émis sur support papier ou transmis par voie électronique dans le cadre du système d'informatisation du suivi des mouvements de produits soumis à accises visés par le bureau des douanes du point de sortie de la Communauté ou de tout autre élément de preuve alternatif accepté par l'administration chargée de la surveillance des mouvements de produits soumis à accises ; / 5° Pour tous les produits autres que ceux soumis à accises et lorsqu'il s'agit d'une livraison effectuée dans les conditions prévues au premier alinéa du 2° du I de l'article 262 du code général des impôts, une déclaration du transporteur ou du transitaire qui a pris en charge les biens, accompagnée de la preuve du paiement des biens par le client établi dans un pays n'appartenant pas à la Communauté européenne, un territoire mentionné au 1° de l'article 256-0 du code général des impôts ou un département d'outre-mer. (...) ". Il résulte de la combinaison des dispositions précitées que le bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée qu'elles prévoient, à raison des exportations réalisées au profit de clients établis en dehors de la Communauté européenne, est subordonnée à la condition que le contribuable établisse la réalité des opérations d'exportation par la production des pièces justificatives mentionnées ci-dessus.

6. L'administration fiscale a remis en cause le bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue par l'article 262 du code général des impôts concernant la vente, le 18 août 2012, pour un montant de 35 000 euros, d'une machine à attaque ponctuelle à la société turque Seda Insaat, à défaut pour la société Sud Forage de produire une déclaration d'exportation visée par l'autorité douanière compétente.

7. Au soutien des moyens tirés de ce que l'absence de production de la déclaration d'exportation visée par l'autorité douanière ne suffit pas à remettre en cause l'exonération de la taxe et de ce que l'article 74 de l'annexe III au code général des impôts porte atteinte au principe de proportionnalité, la société Sud Forage invoque les mêmes arguments que ceux qu'elle a soulevés en première instance, sans les assortir d'éléments de droit ou de fait nouveaux par rapport à ceux qu'elle a fait valoir devant le tribunal. Il y a lieu d'écarter les moyens invoqués par la société requérante à l'appui de ces conclusions par adoption des motifs pertinents retenus dans le jugement.

8. La société requérante soutient par ailleurs que le rappel de taxe sur la valeur ajoutée déduite par anticipation sur des prestations de services facturées mais non encore encaissées n'est pas justifié puisqu'avant l'engagement du contrôle, les droits en cause ont été régularisés. Si un redevable a la faculté de réparer une omission ou une insuffisance de déclaration de ses opérations imposables, c'est toutefois à la condition que la déclaration apparaisse explicitement comme rectificative, précise la période à laquelle elle se rapporte rétroactivement et soit accompagnée du paiement des droits dus. Il ne résulte pas de l'instruction que la société Sud Forage ait procédé en l'espèce à une quelconque régularisation avant l'engagement de la vérification de sa comptabilité. Par suite, elle n'est pas fondée à contester ce chef de rappel de taxe sur la valeur ajoutée.

9. Il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à demander la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 mai 2013.

En ce qui concerne les rehaussements à l'impôt sur les sociétés :

10. D'une part, aux termes des dispositions du 2 de l'article 38 du code général des impôts : " (...) Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ". Par ailleurs, aux termes du 1 de l'article 39 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges : 1° Les frais généraux de toute nature (...) 4° (...) les impôts à la charge de l'entreprise, mis en recouvrement au cours de l'exercice (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice (...) ". Pour être admis en déduction des bénéfices imposables les frais et charges doivent être exposés dans l'intérêt direct de l'exploitation ou se rattacher à la gestion normale de l'entreprise, correspondre à une charge effective, être appuyés de justifications suffisantes et être compris dans les charges de l'exercice au cours duquel ils ont été engagés.

11. En outre, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. En ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, en particulier par la production d'une facture régulièrement émise par un tiers, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.

12. D'autre part, aux termes de l'article 39-5 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Sont également déductibles les dépenses suivantes : / a. Les rémunérations directes et indirectes, y compris les remboursements de frais versés aux personnes les mieux rémunérées ; / b. Les frais de voyage et de déplacements exposés par ces personnes ; / c. Les dépenses et charges afférentes aux véhicules et autres biens dont elles peuvent disposer en dehors des locaux professionnels ; / d. Les dépenses et charges de toute nature afférentes aux immeubles qui ne sont pas affectés à l'exploitation ; / e. Les cadeaux de toute nature, à l'exception des objets de faible valeur conçus spécialement pour la publicité ; / f. Les frais de réception, y compris les frais de restaurant et de spectacles. / Pour l'application de ces dispositions, les personnes les mieux rémunérées s'entendent, suivant que l'effectif du personnel excède ou non 200 salariés, des dix ou des cinq personnes dont les rémunérations directes ou indirectes ont été les plus importantes au cours de l'exercice. / Les dépenses ci-dessus énumérées peuvent également être réintégrées dans les bénéfices imposables dans la mesure où elles sont excessives et où la preuve n'a pas été apportée qu'elles ont été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise ". Il appartient au contribuable qui entend inscrire en charges des dépenses visées à l'article 39-5 rappelé ci-dessus de justifier non seulement de leur réalité et de l'exactitude de leur montant, mais aussi de ce qu'elles ont été engagées dans l'intérêt de l'entreprise.

13. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable aux année d'imposition en litige : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge. Elle incombe également au contribuable à défaut de comptabilité ou de pièces en tenant lieu, comme en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 ". En adoptant le premier alinéa de l'article L. 192 précité, éclairé, au demeurant, par les travaux préparatoires auxquels celui-ci a donné lieu, le législateur a seulement entendu mettre fin, sous réserve du cas prévu au deuxième alinéa du même article, à l'état du droit antérieur sous l'empire duquel l'avis rendu par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur les chiffres d'affaires avait pour effet, s'il était favorable à l'administration fiscale, d'attribuer au contribuable la charge d'une preuve que l'intéressé n'aurait pas supportée en l'absence de saisine de cette commission et n'a pas entendu déroger aux principes généraux ci-dessus énoncés en exigeant de l'administration fiscale qu'elle justifie qu'une charge n'est pas déductible dans son principe, dès lors que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur les chiffres d'affaires, saisie, a rendu un avis favorable au contribuable.

14. Il résulte de l'instruction que, lors de la vérification de comptabilité de la société Sud Forage, l'administration a estimé qu'elle avait comptabilisé en charges des frais qui n'avaient pas été exposés dans l'intérêt de la société mais au profit de tiers et des dépenses qui avaient été engagées dans l'intérêt personnel de son gérant, M. C.... A l'issue de sa séance du 20 novembre 2015, la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires s'est déclaré incompétente s'agissant de l'amende prévue à l'article 1788-A-4 du code général des impôts et a émis un avis favorable à la position de l'administration s'agissant des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés à l'exception de la rectification relative à l'acquisition de ferrailles, pour un montant de 133 400 euros.

S'agissant des dépenses considérées comme engagées dans l'intérêt du gérant :

Quant aux frais de restauration au titre de 2010, 2011 et 2012 :

15. La société requérante soutient que les frais de restaurant exclus de la déduction en charge de la société Sud Forage concernent des repas d'affaires avec ses clients et ses fournisseurs dans des restaurants proches du lieu d'habitation de son gérant qui constitue également le siège social de la société Sud Forage. Toutefois, la société Sud Forage ne conteste pas que les justificatifs produits ne comportent pas la mention du nom des invités, ni le motif de ces invitations, ni que compte tenu de l'activité de la société, les clients et les fournisseurs sont peu nombreux, souvent éloignés et de ce fait peu susceptibles de déjeuner ou de dîner avec lui fréquemment et notamment les jours fériés. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a considéré que ces frais n'avaient pas été engagés dans l'intérêt de la société et constituaient un avantage accordé à M. C... par la société Sud Forage au titre des années en litige.

16. Par ailleurs, le moyen tiré de l'erreur commise par l'administration dans la catégorie d'imposition des sommes entre les mains de M. C... est inopérant dans le présent litige qui concerne la société, laquelle est une personne distincte de son gérant.

Quant aux frais de déplacement au titre de 2010, 2011 et 2012 :

17. La société requérante qui ne remet pas en cause la reconstitution, par le service, des kilomètres parcourus, conteste le pourcentage de 20 % retenu par l'administration représentant la part de l'utilisation personnelle des véhicules de la société par M. C..., estimant qu'il n'excèderait pas 1/7 de l'ensemble de ses déplacements. Toutefois, il résulte de l'instruction et notamment des propositions de rectification, que M. C... a admis ce taux de 20 % au cours des opérations de contrôle de la société Sud Forage et aucun élément de l'instruction ne permet d'estimer qu'il serait excessif. Par ailleurs, l'erreur commise par l'administration dans l'application du barème kilométrique a été rectifiée. Enfin, si la société requérante soutient que son gérant, M. C..., est propriétaire d'un véhicule personnel, elle n'apporte aucun élément confirmant cette assertion et permettant d'en apprécier les conséquences sur l'importance des déplacements qu'il effectue avec les véhicules de la société. Par suite, l'administration a pu considérer que ces frais de déplacement, qui n'avaient pas été engagés dans l'intérêt de la société, constituaient un avantage accordé par la société Sud Forage à M. C... au titre des années contrôlées. Par ailleurs, le moyen tiré de l'erreur commise par l'administration dans la catégorie d'imposition de ces sommes entre les mains de M. C... est inopérant s'agissant de l'imposition de la société Sud Forage.

Quant à l'achat de lots de ferrailles à M. C... en 2010 :

18. Au cours de la vérification de la comptabilité de la société Sud Forage, l'administration a constaté qu'elle avait enregistré en charges une facture d'achat de lots de ferrailles émise par M. C... en date du 4 avril 2010, pour un montant de 133 400 euros. La société requérante soutient en appel, comme devant le tribunal, que son gérant avait accumulé, dans l'exercice de sa précédente activité de ferrailleur, des stocks consistants de lots de ferrailles dont il a entendu se débarrasser en prévision de la vente du terrain sur lequel ces stocks étaient déposés, et qu'il avait remis à l'administration la facture de vente établie le 4 avril 2010 par lui-même à la société Sud Forage et les factures de revente par la société Sud Forage au groupe Epur Métal Sirmet.

19. Cependant l'administration fait valoir que la facture du 4 avril 2010 indique que ce lot de ferraille est vendu " à la société Sud Forage pour la revente à la société Sirmet " mais qu'aucun justificatif de la possession de ces lots de ferrailles, ni aucune facture de vente ultérieure au groupe Epur Metal Sirmet n'a été présentée par le requérant pendant le contrôle. Par ailleurs, la société requérante ne conteste pas que la valeur totale des lots de ferrailles indiquée dans la facture du 4 avril 2010 n'apparaissait pas dans le stock de la société Sud Forage au 31 décembre 2010 alors que ce lot a été vendu, selon elle, en deux fois, en 2011 et 2012. Enfin, les lots de ferrailles, objet de la facture du 4 avril 2010, ont été acquis par la société Sud Forage à un prix unitaire de 290 euros la tonne alors que le lot identifié par M. C... dans l'état du stock au 31 décembre 2010 comme correspondant à l'acquisition du 4 avril 2010 consiste en un lot de rails à 140 euros la tonne. Au surplus, si M. C... avait indiqué devant la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires que la société Sud Forage avait vendu les lots de ferrailles à la société Sirmet, il a ensuite présenté des factures libellées au nom d'un autre client et pour des rails SNCF grandes longueurs, ne correspondant pas au lot hétérogène de ferraille indiqué dans la facture d'achat du 4 avril 2010. Dans ces conditions, et quand bien même M. C... justifie d'une inscription au répertoire Sirene en tant que ferrailleur, la réalité de l'achat de lots de ferrailles par la société Sud Forage à M. C... ne résulte pas de l'instruction. Par suite, l'administration a pu à bon droit réintégrer la somme de 133 400 euros dans les résultats de la société.

Quant aux dépenses de travaux au titre de l'année 2011 :

20. La société requérante soutient que les dépenses de travaux de peinture, de mise en place d'un portail d'entrée et d'engazonnage, d'un montant total de 19 072 euros HT ont été exposées dans l'intérêt de l'entreprise. Il résulte de l'instruction que le domicile de M. C... se trouve également être le siège de la société. L'administration a de ce fait considéré que la totalité du montant de ces travaux a été portée à tort en charge par la société Sud Forage alors que seulement une partie du domicile de M. C... est affectée à l'exercice de l'activité de la société. Elle a retenu le pourcentage de 10 % comme représentant la part de la surface de la maison d'habitation dévolue à l'exercice de l'activité de la société Sud Forage et n'a ainsi admis en déduction les dépenses de travaux susrappelées qu'à hauteur de 10 % et a considéré que la prise en charge du surplus constituait un avantage accordé à M. C... par la société Sud Forage au titre de l'année 2011. Toutefois, il est constant que les factures en litige dont la régularité n'est pas remise en cause par le service, sont libellées au nom de la société Sud Forage et il ne résulte d'aucun élément du dossier que les travaux en cause n'auraient pas concerné uniquement la partie de l'immeuble réservée à l'activité de l'entreprise, comme le soutient la société requérante. Dans ces conditions, cette dernière est fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a considéré que les dépenses en cause avaient été engagées à hauteur de 90 % dans l'intérêt personnel de M. C.... Par suite, la société Sud Forage est fondée à demander la décharge en droit, intérêts et pénalités des impositions correspondant à la réintégration de 90 % du montant des dépenses de travaux d'engazonnage de peinture et de mise en place d'un portail engagées au titre de l'année 2011 tels que résultant des factures de la SARL Brousse et Fils du 29 avril 2011, de la SARL Apus du 26 mai 2011, de la société Gazons Occitans du 27 mai 2011 et de deux factures de C... Thomas des 23 septembre 2011 et 31 octobre 2011.

S'agissant des dépenses considérées comme engagées dans l'intérêt de tiers à la société :

21. En premier lieu, la société requérante fait valoir que l'achat de billets de train ou d'avion et les frais d'hôtel à l'étranger constituent des dépenses exposées dans l'intérêt de la société puisqu'il s'agit de dépenses exposées pour une prospection commerciale effectuée par des ressortissants des pays prospectés et ayant, pour certains dans le passé, procuré à la société d'importants marchés à l'exportation. Il résulte de l'instruction que ces dépenses ont été engagées sur une période de trois ans pour des montants compris entre 30 000 euros et 50 000 euros annuels, principalement au profit de M. A... F.... Toutefois, en se bornant à produire une attestation de M. F... confirmant qu'il est en relation d'affaires avec la société requérante et qu'ils ont été victimes d'escroquerie, la société requérante n'apporte aucun élément de nature à établir les relations professionnelles entretenues par ce dernier avec elle ni la réalité de son activité de prospection dans les pays concernés par ces déplacements, tels que la conclusion de marchés résultant de cette activité. Par ailleurs, aucun justificatif n'a davantage été produit concernant le virement de 9 500 euros effectué le 18 mars 2010 à un ressortissant angolais. Enfin, la circonstance que certains des pays concernés, tels que l'Angola et le Congo, ne constitueraient pas " des destinations touristiques de premier ordre " ne suffit pas pour permettre de considérer que les dépenses engagées au cours de ces déplacements auraient effectivement été exposées dans l'intérêt de la société. Par suite, l'administration a pu, à bon droit, les réintégrer au bénéfice imposable de la société au titre des années 2010, 2011 et 2012.

22. En deuxième lieu, il résulte de la proposition de rectification du 13 décembre 2013 que la société Sud Forage a comptabilisé en charge le 30 avril 2010 une facture de la société britannique Vadprint Limited concernant des prestations de marketing et de frais d'organisation de l'achat de l'usine Eurocel pour un montant de 4 300 euros. Ainsi que l'a indiqué le tribunal, pour justifier cette dépense, la société requérante fait valoir que ces frais sont liés à l'intervention d'un préfet en tant que facilitateur pour l'achat envisagé de l'usine Dorcell sans toutefois appuyer cette assertion de justificatifs.

23. Il résulte également de la proposition de rectification du 13 décembre 2013 que la société Sud Forage a comptabilisé en charge le 29 septembre 2010 une facture de la société congolaise Sikalgroup concernant des frais d'acheminement d'un colis scellé d'or brut de 6 kg à destination de Hong-Kong pour un montant de 16 741,71 euros. Si la société Sud Forage soutient avoir été victime d'une escroquerie et d'un abus de confiance expliquant l'absence de livraison des marchandises et de toutes pièces établissant la réalité de l'opération, elle n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations. En l'absence de tout élément permettant d'estimer que ces frais étaient effectivement en lien avec l'activité de la société, c'est à bon droit que l'administration a réintégré ces dépenses étrangères à l'activité de la société à son bénéfice imposable au titre de l'année 2010.

24. En dernier lieu, il résulte de la proposition de rectification du 30 juin 2014 que la société Sud Forage a comptabilisé en charge une facture de vente de ferraille de la société espagnole Pio y asociados del Levante pour un montant de 601 500 euros. La société requérante fait valoir que cette facture n'est pas étrangère à l'exploitation et qu'elle a été victime d'un abus de confiance et d'une escroquerie de la part de la société espagnole. Si elle se prévaut de l'arrêt rendu le 4 mai 2016 par la 3eme chambre des appels correctionnels de la Cour d'appel de Toulouse, confirmant le jugement du tribunal correctionnel de Castres du 18 septembre 2013 sur la culpabilité d'un dirigeant de cette société espagnole, du chef d'escroquerie commis entre juin et septembre 2006 à Saint-Sulpice (Tarn) en Italie et en Espagne, le lien entre les faits relevés par la Cour d'appel de Toulouse et la facture litigieuse ne résulte d'aucun des éléments de l'instruction. En effet, la facture en litige s'élève à 601 500 euros et concerne l'année 2013, alors que le délit d'escroquerie relevé par la Cour s'était déroulé en 2006 et concernait une somme de 300 000 euros. Par ailleurs, il résulte de l'instruction et notamment d'une demande de renseignements effectuée par l'administration auprès de l'Espagne que la société espagnole n'exerçait plus son activité de vente en gros de matériel électronique depuis fin 2008 et que la vente de ferraille a fait l'objet d'un paiement total immédiat de la part de la société Sud Forage sans aucun flux de marchandise en contrepartie. En outre, ainsi que le relève l'administration, la facture, qui ne comporte pas le nom de la société Sud Forage en qualité de cliente, ne respecte pas les dispositions de l'article 242 nonies A de l'annexe III au code général des impôts qui dresse la liste de l'ensemble des mentions devant figurer sur une facture. Dès lors, l'administration, qui ne s'est pas fondée sur l'opportunité des choix de gestion de la société Sud Forage, a pu considérer que la réalité de cette charge n'étant pas établie, elle devait être réintégrée au bénéfice imposable de la société au titre de l'année 2012.

S'agissant de l'acte anormal de gestion :

25. Il résulte des articles 38 et 39 du code général des impôts, dont les dispositions sont applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code, que le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale. Les prêts sans intérêts ou l'abandon de créances accordés par une entreprise au profit d'un tiers, ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages l'entreprise a agi dans son propre intérêt. S'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer que les avantages consentis par une entreprise à un tiers constituent un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties. Dans l'hypothèse où l'entreprise apporte une telle justification, il incombe ensuite à l'administration, si elle s'y croit fondée, d'apporter la preuve de ce que cette contrepartie est dépourvue d'intérêt pour l'entreprise ou que sa rémunération est excessive.

26. Il résulte de l'instruction que bien que le solde du compte de la SCI Hermès inscrit dans les livres de la société Sud Forage était débiteur pour la période de 2010 à 2012, la société Sud Forage n'a comptabilisé aucun intérêt et a donc abandonné une créance au profit de la société Hermès, bailleur des locaux d'exploitation de la société Sud Forage. La société requérante qui se prévaut des difficultés financières de la SCI Hermès avec laquelle elle entretient des liens particuliers sans toutefois justifier de ces difficultés, n'établit pas la contrepartie notamment commerciale qu'elle aurait retirée de cet abandon de créance. Dans ces conditions, l'administration apporte la preuve que l'avantage consenti par la société requérante à la SCI Hermès constitue un acte anormal de gestion. Dès lors, elle était fondée à réintégrer les abandons d'intérêts consentis à la société Hermès dans la base de l'impôt sur les sociétés de la société requérante au titre des années 2010, 2011 et 2012.

En ce qui concerne les profits sur le Trésor :

27. Aux termes de l'article L. 77 du livre des procédures fiscales : " En cas de vérification simultanée des taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées, de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, le supplément de taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées afférent à un exercice donné est déduit, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, des résultats du même exercice, sauf demande expresse des contribuables, formulée dans le délai qui leur est imparti pour répondre à la proposition de rectification (...) ".

28. Lorsqu'un contribuable a fait l'objet de rehaussements en matière d'impôt sur les bénéfices et de taxe sur la valeur ajoutée, ses bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés peuvent être rehaussées d'un " profit sur le Trésor " chaque fois que le droit qui lui est ouvert de déduire de ces bases la taxe sur la valeur ajoutée rappelée aboutirait, à défaut de la constatation à due concurrence d'un tel profit, à ce que le contribuable soit imposé à l'impôt sur les sociétés sur une assiette plus réduite que celle sur laquelle il aurait été imposé s'il avait acquitté régulièrement la taxe sur la valeur ajoutée.

29. L'administration fiscale a constaté un profit sur le Trésor à raison des rappels de taxe sur la valeur ajoutée se rapportant à des dépenses non déductibles, à la refacturation de frais sans taxe sur la valeur ajoutée et à des charges non refacturées. Eu égard à ce qui a été dit précédemment, la société Sud Forage, qui se borne à soutenir que les rappels de taxe ayant donné lieu à la constatation de ce profit sur le Trésor ne sont pas justifiés, n'est pas fondée à demander la décharge de l'imposition de ce profit.

En ce qui concerne la retenue à la source :

30. Aux termes du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " Les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France ou lorsqu'ils sont payés hors de France dans un Etat ou territoire non coopératif au sens de l'article 238-0 A. Un décret fixe les modalités et conditions d'application de cette disposition. Toutefois, la retenue à la source ne s'applique pas aux sommes visées au premier alinéa du a de l'article 111. (...) ". L'applicabilité des dispositions du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts, relatives à la retenue à la source dépend seulement de la qualification des produits visés aux articles 108 à 117 bis du même code et du domicile fiscal ou du siège social des bénéficiaires. En application de l'article 187 du code général des impôts, ce taux est de 30 % dès lors que les revenus sont autres que ceux visés aux trois premiers alinéas de cet article. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes. ".

31. Si l'administration est en droit, à tout moment de la procédure contentieuse, de justifier du bien-fondé de l'imposition en modifiant le fondement juridique, c'est à la condition que la substitution ainsi opérée ne prive le contribuable d'aucune des garanties de procédure prévues par la loi.

32. Le tribunal administratif a admis la substitution de base légale demandée par l'administration le 5 octobre 2016, fondée sur les dispositions de l'article 111 c du code général des impôts au lieu de l'article 109 § 1 1° du même code concernant la retenue à la source appliquée aux revenus réputés distribués à la société espagnole Pio y asociados del Levante.

33. D'une part, il résulte de l'instruction que la société Sud Forage a inscrit en charge un montant de 601 500 euros correspondant à la facture de vente d'un lot de ferraille établie par la société espagnole Pio y asociados del Levante. Toutefois, ainsi qu'il a été dit précédemment, cette société espagnole dont l'objet social est la vente en gros de matériel électronique, n'avait plus d'activité depuis 2007 à l'exception de cette opération de vente d'un lot de ferraille et cette facture n'était en outre pas libellée au nom de la société Sud Forage en méconnaissance des dispositions de l'article 242 nonies A de l'annexe II au code général des impôts. Dans ces conditions, et alors que la réalité du flux de marchandise n'a pu être démontrée, l'administration a pu à bon droit regarder cette charge comme non justifiée et estimer que les sommes versées à la société espagnole par la société requérante, sans contrepartie de flux de marchandises, constituaient un avantage occulte consenti à cette dernière au sens de l'article 111 c du code général des impôts sans que la société Sud Forage ne soit privée d'aucune garantie procédurale. Cet avantage occulte est assimilable à un revenu distribué qui figure au nombre des produits soumis à retenue à la source en application de l'article 119 bis 2 du code général des impôts compte tenu que son bénéficiaire, la société espagnole Pio y Asociados del Levante, avait son siège social hors de France.

34. D'autre part, aux termes de l'article 7 de la convention franco-espagnole du 10 octobre 1995 susvisée : " 1. Les bénéfices d'une entreprise d'un État contractant ne sont imposables que dans cet État, à moins que l'entreprise n'exerce son activité dans l'autre État contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé. ". Aux termes de l'article 10 de la même convention : " 1. Les dividendes payés par une société qui est un résident d'un État contractant à un résident de l'autre État contractant sont imposables dans cet autre État. 2. a) Les dividendes mentionnés au paragraphe 1 sont aussi imposables dans l'État contractant dont la société qui paie les dividendes est un résident, et selon la législation de cet État, mais si la personne qui reçoit les dividendes en est le bénéficiaire effectif, l'impôt ainsi établi ne peut excéder 15 pour cent du montant brut des dividendes. b) Toutefois, ces dividendes ne sont imposables que dans l'État contractant dont le bénéficiaire effectif est un résident, si celui-ci est une société assujettie à l'impôt sur les sociétés (...) 4. a) Le terme "dividendes" employé dans le présent article désigne les revenus provenant d'actions, actions ou bons de jouissance, parts de mine, parts de fondateur ou autres parts bénéficiaires à l'exception des créances, ainsi que les revenus soumis au régime des distributions par la législation fiscale de l'État contractant dont la société distributrice est un résident. (...)".

35. La société Sud Forage n'ayant pas démontré le caractère déductible de la somme de 601 500 euros versée à la société Pio y asociados del Levante, ainsi qu'il a été dit, l'administration a regardé cette somme comme constituant un revenu distribué au sens des articles 109-1-1° puis 111 c) précités du code général des impôts. La société requérante ne conteste pas que la somme a bien été encaissée par la société de droit espagnol, qui en a donc été le bénéficiaire effectif. Pour autant, cette somme ne peut être regardée comme un produit d'exploitation pour ladite société, dès lors que, ainsi qu'il a été dit, elle n'est la contrepartie d'aucune prestation effective. Au demeurant, il résulte de l'instruction que la société Pio y Asociados del Levante n'exerce aucune activité depuis 2007 en Espagne et il n'est pas démontré par la requérante que la somme litigieuse y aurait été imposée en tant que bénéfices. Dans ces conditions, la somme litigieuse doit être regardée, en vertu du 4 de l'article 10 de cette même convention, comme correspondant à des dividendes provenant de revenus distribués au sens de la législation française, et c'est à bon droit que l'administration a assujettie la société requérante à une retenue à la source égale à 15 % de son montant.

36. Enfin, dès lors que l'article 111 c du code général des impôts a été substitué à bon droit à l'article 109-1-1° du même code, le moyen tiré de ce que la distribution de 601 500 euros en vertu de l'article 109 du code précité devait être minorée du déficit fiscal constaté à la clôture de l'exercice clos en 2012 est inopérant.

37. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. ". Aux termes de l'article L. 80 B du même livre : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ". La note du 7 avril 1978 dont se prévaut la société Sud Forage, ne donne pas de la loi fiscale une interprétation différente susceptible d'être opposée à l'administration sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

38. Il résulte de ce qui précède que la société Sud Forage n'est pas fondée à demander la décharge de la retenue à la source au titre de l'année 2012.

En ce qui concerne la majoration pour manquement délibéré :

39. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

40. Pour justifier l'application de la majoration pour manquement délibéré, l'administration a relevé le caractère personnel des dépenses de restaurant, de déplacement et d'entretien et d'achats divers ainsi que l'absence, de la part de la société, de comptabilisation des intérêts sur avances consentis à un tiers, se privant d'une recette sans aucune contrepartie. Eu égard à la nature des sommes réintégrées et au caractère répété des manquements constatés, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe du bien-fondé des pénalités prévues par les dispositions du a de l'article 1729 du code général des impôts.

En ce qui concerne la majoration de 10 % appliquée à la retenue à la source :

41. Aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / a. 10 % en l'absence de mise en demeure ou en cas de dépôt de la déclaration ou de l'acte dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ; (...) ".

42. La société Sud Forage qui ne conteste pas ne pas avoir satisfait à ses obligations de déclaration dans les délais, se borne à contester à nouveau le bien-fondé des cotisations supplémentaires de retenue à la source qui lui ont été assignées. Dès lors que la contestation, par la société, du bien-fondé de ces suppléments d'impôt doit être écartée, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le moyen tiré de ce que le service ne pouvait lui infliger la majoration de retard de 10 % prévue par le a. du 1 de l'article 1728 du code général des impôts ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne l'amende de 5 % prévue à l'article 1788 A § 4 du code général des impôts :

43. Selon l'article 1788 A du code général des impôts : " (...) 4. Lorsqu'au titre d'une opération donnée le redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est autorisé à la déduire, le défaut de mention de la taxe exigible sur la déclaration prévue au 1 de l'article 287, qui doit être déposée au titre de la période concernée, entraîne l'application d'une amende égale à 5 % de la somme déductible ".

44. Lors de la vérification de comptabilité, l'administration a constaté que la société Sud Forage n'avait procédé à aucune auto-liquidation de la taxe sur la valeur ajoutée au titre des acquisitions de déchets d'industrie auprès de la SNCF. Par suite, l'administration a pu notifier à la société Sud Forage une amende 5 % prévue par les dispositions précitées de l'article 1788 A du code général des impôts.

45. Au soutien du moyen tiré de ce que l'amende de 5 % prévue par l'article 1788 A du code général des impôts méconnaît les principes de proportionnalité et de neutralité garantis par le droit de l'Union européenne et de l'absence de préjudice pour le Trésor, la société Sud Forage ne se prévaut devant la cour d'aucun élément nouveau par rapport à son argumentation soulevée devant le tribunal. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par le tribunal.

46. Il résulte de tout ce qui précède que la société Sud Forage est seulement fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande de décharge des impositions, intérêts et pénalités résultant de la réintégration dans son résultat de 90 % du montant des travaux engagés au titre de l'année 2011 résultant des factures de la SARL Brousse et Fils du 29 avril 2011, de la SARL Apus du 26 mai 2011, de la société Gazons Occitans du 27 mai 2011 et de deux factures de C... Thomas des 23 septembre 2011 et 31 octobre 2011.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

47. Il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat la somme que réclame la société requérante au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société Sud Forage à hauteur des dégrèvements prononcés par l'administration et mentionnés au point 2 du présent arrêt.

Article 2 : La société Sud Forage est déchargée du montant des suppléments d'impôt en droits, intérêts et pénalités auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2011 correspondant à la réintégration dans ses bénéfices des dépenses visées au point 20 du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus de la requête de la société Sud Forage est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Sud Forage et au ministre de l'économie des finances et de la relance. Copie en sera délivrée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 6 avril 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

Mme D... E..., première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 mai 2021.

La présidente,

Elisabeth Jayat

La République mande et ordonne au ministre de l'économie des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

N° 20BX00656


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