La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/04/2021 | FRANCE | N°20BX03755

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 13 avril 2021, 20BX03755


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 20 mai 2020 par lequel la préfète de la Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixé le pays de destination de son éloignement.

Par un jugement n° 1801767, 2001465 du 22 octobre 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18

novembre 2020, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) de lui accorder le bénéfi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 20 mai 2020 par lequel la préfète de la Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixé le pays de destination de son éloignement.

Par un jugement n° 1801767, 2001465 du 22 octobre 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 novembre 2020, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 22 octobre 2020 ;

3°) d'annuler l'arrêté du 20 mai 2020 par lequel la préfète de la Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixé le pays de destination de son éloignement.

4°) d'enjoindre à la préfète de la Vienne, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ainsi que, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles 35 et 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ou si l'aide juridictionnelle ne lui était pas accordée à lui verser directement.

Il soutient que :

- l'arrêté émane d'une autorité incompétente ;

En ce qui concerne le refus de séjour :

- elle est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen de sa situation ;

- elle méconnait l'article L. 313-11 7e du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour sur lequel elle se fonde ;

- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale telle que protégée par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ;

- elle est insuffisamment motivée ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 février 2021, la préfète de la Vienne conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 21 janvier 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 5 mars 2021 à 12 heures.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 janvier 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. G... F..., a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant de nationalité congolaise, né le 11 août 1979, a déclaré être entré en France irrégulièrement le 20 août 2012. Sa demande d'asile a été rejetée par l'office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) le 13 mai 2013, ainsi que par la cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 11 mars 2014, et sa demande de réexamen a également été rejetée par les mêmes autorités les 28 août 2014 et 22 janvier 2015. Puis, par un arrêté du 25 juillet 2016, la préfète de la Vienne a rejeté sa demande de titre de séjour présentée en qualité de " pacsé avec une ressortissante française " et l'a obligé à quitter le territoire. Toutefois, M. B... s'est maintenu en France et a sollicité un nouveau titre de séjour qui a donné lieu à un nouveau refus, par arrêté du 11 septembre 2017, qui a été confirmé par le tribunal administratif de Poitiers le 21 décembre 2017, puis par la cour administrative d'appel de Bordeaux le 15 février 2018. Enfin, M. B... a présenté le 18 juin 2019, une nouvelle demande de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 20 mai 2020, la préfète de la Vienne a refusé de lui délivrer ce titre, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et a fixé le pays de destination de son éloignement. M. B... relève appel du jugement du 22 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions tendant au bénéfice de 1'aide juridictionnelle à titre provisoire :

2. Par une décision du 28 janvier 2021, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, ses conclusions tendant à être admis à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet et il n'y a plus lieu d'y statuer.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne l'arrêté pris dans son ensemble :

3. M. B... soutient en appel que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'autorité signataire de l'arrêté contesté était bien compétente pour le faire, dès lors que la délégation de signature produite au dossier est extrêmement large et ne permet pas de déterminer quelles attributions ont été accordées au secrétaire général de la préfecture, notamment pour signer de tels arrêtés. Toutefois il ressort des dispositions de l'article 3 de l'arrêté du 3 février 2020 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Vienne, que M. Emile Soumbo, secrétaire général de la préfecture de la Vienne, disposait d'une délégation de signature à l'effet de signer l'ensemble des décisions et actes relevant des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Contrairement à ce que soutient M. B..., une telle délégation n'est ni trop générale, ni trop imprécise. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte doit être écarté.

En ce qui concerne les conclusions d'annulation dirigées contre le refus de délivrance d'un titre de séjour :

4. En premier lieu, l'arrêté vise les textes applicables à la situation de M. B..., et notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313 11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il est fait application. Il mentionne aussi les principaux éléments relatifs à la situation de M. B... depuis son entrée irrégulière en France en 2012, ses diverses demandes de titre de séjour et les circonstances faisant que le refus d'un titre de séjour ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision attaquée et du défaut d'examen particulier doivent être écartés.

5. En second lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ". Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. ". En application de ces dispositions et stipulations, il appartient à l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France d'apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

6. M. B... fait valoir qu'il est présent en France depuis plus de 8 ans, à la date de la décision en litige, qu'ayant été marié en 2016 avec une ressortissante française, il est actuellement en instance de divorce et vit désormais en concubinage avec Mme D..., ressortissante congolaise, titulaire d'un titre de séjour, avec qui il a eu deux enfants, nés en France le 25 octobre 2013 et le 2 août 2017. Il fait également valoir qu'il est bien inséré en France où il a noué des relations amicales fortes et où résident ses deux soeurs qui ont acquis la nationalité française et qu'ainsi, la décision contestée porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaitrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Toutefois, il est constant que la durée de présence en France de M. B... résulte de l'instruction de ses différentes demandes de titre de séjour et de sa persistance à s'y maintenir en situation irrégulière malgré les mesures d'éloignement prises à son encontre en 2015, 2016 et 2017 et dont la légalité a été confirmée par la juridiction administrative. Par ailleurs, il n'est pas établi, que des circonstances particulières feraient obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue hors de France et notamment au Congo, pays d'origine du requérant mais aussi de sa compagne actuelle, mère de ses deux enfants, et où il a vécu jusqu'à l'âge de 33 ans et où résident ses parents. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la préfète a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au sens des dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne les conclusions d'annulation dirigées contre l'obligation de quitter le territoire :

7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de base légale de la mesure d'éloignement, en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté.

8. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés au point 6 concernant la décision portant refus de titre de séjour, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dirigé contre la décision portant obligation de quitter le territoire français doit également être écarté.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. (...) ". D'une part, rien ne fait obstacle à ce que l'intéressé puisse emmener ses enfants et leur mère, de nationalité congolaise, dans son pays d'origine afin qu'ils puissent y suivre une scolarité et y constituer leur cellule familiale. D'autre part, si M. B..., fait valoir que sa compagne, Mme D..., est également mère d'une petite fille née le 18 janvier 2015 dont le père est de nationalité française, il n'est pas justifié par les pièces du dossier que le père de celle-ci entretienne quelque lien que ce soit avec elle. Dans ces conditions, la décision attaquée ne saurait être regardée comme portant atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant et comme méconnaissant ainsi les stipulations précitées.

En ce qui concerne les conclusions d'annulation dirigées contre la décision fixant le pays de destination :

10. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de base légale de la décision fixant le pays de destination, en raison de l'illégalité de la mesure d'éloignement doit être écarté.

11. En second lieu, M. B... reprend en appel, sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement la réponse qui lui a été apportée par les premiers juges, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination ne serait pas motivée. Dès lors, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : La requête de M. B... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 16 mars 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. G... F..., président-assesseur,

M. Nicolas Normand, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 avril 2021.

La présidente,

Evelyne Balzamo

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°20BX03755


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX03755
Date de la décision : 13/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Dominique FERRARI
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : SCP BREILLAT DIEUMEGARD MASSON

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-04-13;20bx03755 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award