La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/04/2021 | FRANCE | N°20BX03883

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 07 avril 2021, 20BX03883


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris, lequel a transféré ses requêtes au tribunal administratif de Toulouse par ordonnances du 31 janvier 2012, d'annuler la décision du 19 janvier 2011 de La Poste le plaçant d'office en congé de longue durée pour une période de six mois à compter du 1er décembre 2010, les décisions des 20 mai et 17 juin 2011 prolongeant ce congé pour les mois de juin et juillet 2011 et la décision du 25 juillet 2011 prolongeant ce congé pour une durée de quatre

mois à compter du 1er août 2011.

M. A... C... a également demandé au tribunal...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris, lequel a transféré ses requêtes au tribunal administratif de Toulouse par ordonnances du 31 janvier 2012, d'annuler la décision du 19 janvier 2011 de La Poste le plaçant d'office en congé de longue durée pour une période de six mois à compter du 1er décembre 2010, les décisions des 20 mai et 17 juin 2011 prolongeant ce congé pour les mois de juin et juillet 2011 et la décision du 25 juillet 2011 prolongeant ce congé pour une durée de quatre mois à compter du 1er août 2011.

M. A... C... a également demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision de La Poste du 19 décembre 2011 prolongeant son congé de longue durée pour une période de six mois à compter du 1er décembre 2011, la décision du 19 juillet 2013 prononçant la prolongation du congé de longue durée pour une durée de dix-huit mois du 1er juin 2012 au 30 novembre 2013, ainsi que la décision de La Poste rejetant implicitement sa demande tendant à sa réintégration et au bénéfice d'un congé ordinaire de maladie à plein traitement.

Par un jugement n° 1500529, 1200530, 1200561, 1200704, 1203505, 1304186 du 17 mars 2016, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de M. C... aux fin d'annulation des décisions des 20 mai 2011, 17 juin 2011 et 30 novembre 2011 et a rejeté le surplus de ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par un arrêt n° 16BX01476 du 28 mai 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a réformé le jugement du tribunal administratif de Toulouse, annulé la décision du 19 janvier 2011 et, par voie de conséquence, les décisions des 25 juillet 2011, 19 décembre 2011 et 19 juillet 2013, enjoint à La Poste de réintégrer juridiquement M. C... à la date du 1er décembre 2010, de prendre rétroactivement les mesures nécessaires pour le placer dans une situation régulière et de reconstituer sa carrière sur la période du 1er décembre 2010 au 30 novembre 2013 dans un délai de trois mois et condamné La Poste à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence.

Par une décision n° 422678 du 27 novembre 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par La Poste, a annulé l'arrêt du 28 mai 2018 de la cour. Par le même arrêt il a renvoyé l'affaire à la cour.

Par un mémoire enregistré le 5 février 2021, M. C..., représenté par Me F..., maintient ses conclusions d'appel tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 17 mars 2016, à l'annulation des décisions des 19 janvier 2011, 25 juillet 2011, 30 novembre 2011, 19 décembre 2011 et 19 juillet 2013, ainsi qu'à l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande de réintégration du 10 avril 2012, à ce qu'il soit enjoint à la Poste de reconstituer sa carrière, à la condamnation de La Poste à lui verser, d'une part, la somme de 2 000 euros par mois pour congé de longue durée abusif et, d'autre part, la somme de 500 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis et à ce que soit mise à la charge de La Poste la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire enregistré le 10 février 2021, La Poste, représentée par Me G..., maintient ses écritures tendant au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 7 500 euros soit mise à la charge de M. C... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le décret n° 2010-191 du 26 février 2010 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... H...,

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteure publique,

- et les observations de M. A... C..., et de Me G..., représentant La Poste.

Une note en délibéré, déposée par M. C..., a été enregistrée au greffe de la cour le 16 mars 2021.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., cadre de premier niveau à La Poste, affecté à Aurillac, s'est porté candidat en 2008 à un poste situé à Toulouse, sur lequel il a été nommé. Jugeant ensuite que ce poste était trop éloigné de son domicile familial situé à Trizac (Cantal), il a demandé sa réaffectation à Aurillac et, ne l'obtenant pas, a commencé une grève de la faim en avril 2010 et tenu, en novembre 2010, des propos inquiétants sur son état de santé. À la suite d'une alerte sur son état de santé lancée par l'assistante sociale de La Poste Midi-Pyrénées, la société La Poste a engagé une procédure destinée à le placer en congé de longue durée sur le fondement des dispositions des articles 34 et 35 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires. Après avoir été examiné par un médecin et après avis favorable du comité médical, M. C... a été placé, par une décision du 19 janvier 2011, en congé de longue durée pour six mois à compter du 1er décembre 2010. Ce congé de longue durée a été prolongé par plusieurs décisions ultérieures après des avis favorables successifs du comité médical. M. C... a contesté l'ensemble de ces décisions devant le tribunal administratif de Toulouse et lui a demandé d'enjoindre à La Poste de lui accorder un congé de maladie ordinaire à plein traitement ou de régulariser sa situation par des mesures rétroactives administratives et financières. Il lui a en outre demandé de condamner La Poste à lui verser une somme de 2 000 euros par mois pour congé de longue durée abusif et de 500 000 euros à titre indemnitaire. Par un jugement du 17 mars 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ces demandes en prononçant un non-lieu à statuer sur les conclusions de M. C... aux fins d'annulation de certaines décisions le plaçant en congé de longue durée et en rejetant le surplus de ses requêtes.

2. Par un arrêt n° 16BX01476 du 28 mai 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé la décision de La Poste du 19 janvier 2011 plaçant M. C... en congé de longue durée et, par voie de conséquence, les décisions ultérieures prolongeant ce congé, enjoint à La Poste de le réintégrer à la date du 1er décembre 2010 et de prendre rétroactivement les mesures nécessaires pour le placer dans une situation régulière et reconstituer sa carrière sur la période du 1er décembre 2010 au 30 novembre 2013, condamné La Poste à verser à l'intéressé 15 000 euros en réparation de son préjudice moral et de ses troubles dans ses conditions d'existence et réformé le jugement du tribunal de Toulouse en ce qu'il avait de contraire. Mais par une décision n° 422678 du 27 novembre 2020 le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par La Poste, a annulé l'arrêt du 28 mai 2018 de la cour. Par le même arrêt il a renvoyé l'affaire à la cour.

3. Dans le dernier état de ses écritures, telles qu'elles résultent d'un mémoire récapitulatif adressée à la cour, à sa demande, sur le fondement des dispositions de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, et du mémoire après cassation du 5 février 2021, M. C... a expressément abandonné ses conclusions aux fins d'annulation des décisions des 20 mai 2011, 17 juin 2011 et 30 novembre 2011.

Sur la légalité des décisions des 19 janvier 2011, 25 juillet 2011, 19 décembre 2011 et 19 juillet 2013

4. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, dans sa rédaction applicable, dispose : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire conserve ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / (...) Sauf dans le cas où le fonctionnaire ne peut être placé en congé de longue maladie à plein traitement, le congé de longue durée n'est attribué qu'à l'issue de la période rémunérée à plein traitement d'un congé de longue maladie. (...)". Selon l'article 29 du décret du 14 mars 1986 : " Le fonctionnaire atteint de tuberculose, de maladie mentale, d'affection cancéreuse, de poliomyélite ou de déficit immunitaire grave et acquis, qui est dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions et qui a épuisé, à quelque titre que ce soit, la période rémunérée à plein traitement d'un congé de longue maladie est placé en congé de longue durée selon la procédure définie à l'article 35 ci-dessous... ". L'article 34 de ce décret précise que : " Lorsqu'un chef de service estime, au vu d'une attestation médicale ou sur le rapport des supérieurs hiérarchiques, que l'état de santé d'un fonctionnaire pourrait justifier qu'il lui soit fait application des dispositions de l'article 34 (3° ou 4°) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, il peut provoquer l'examen médical de l'intéressé dans les conditions prévues aux alinéas 3 et suivants de l'article 35 ci-dessous. Un rapport écrit du médecin chargé de la prévention attaché au service auquel appartient le fonctionnaire concerné doit figurer au dossier soumis au comité médical ". Aux termes, des alinéas 3 et suivants de l'article 35 du même décret : " (...) Sur le vu de ces pièces, le secrétaire du comité médical fait procéder à la contre-visite du demandeur par un médecin agréé compétent pour l'affection en cause. / Le dossier est ensuite soumis au comité médical compétent. Si le médecin agréé qui a procédé à la contre-visite ne siège pas au comité médical, il peut être entendu par celui-ci. / L'avis du comité médical est transmis au ministre qui le soumet pour avis, en cas de contestation par l'administration ou l'intéressé, au comité médical supérieur/ Si la demande de congé est présentée au cours d'un congé antérieurement accordé dans les conditions prévu à l'article 34 (2°), 1er alinéa de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, la première période de congé de longue maladie ou de longue durée part du jour de la première constatation médicale de la maladie dont est atteint le fonctionnaire". Enfin, l'article 36 de ce décret dispose que : " Un congé de longue maladie ou de longue durée peut être accordé ou renouvelé pour une période de trois à six mois. La durée du congé est fixée, dans ces limites, sur la proposition du comité médical... ".

5. En premier lieu, M. C... fait valoir que les décisions sont entachées de vice de procédure dès lors que son dossier médical, l'information relative aux lieu, date et heures de réunion du comité médical, les conclusions du spécialiste agréé, l'avis du comité médical, la possibilité de faire valoir ses observations ou de se faire représenter devant le comité médical et l'information relative aux voies et délais de recours contre l'avis du comité médical ne lui ont pas été communiqués ou indiqués, en méconnaissance notamment de la note n° 959 de La Poste, du guide memento de La Poste et de l'article 7 du décret du 14 mars 1986.

6. M. C... se borne à reprendre en appel, dans des termes identiques, sans critique utile et sans apporter d'élément nouveau par rapport à ses productions de première instance, les moyens visés au point 5, moyens auxquels le tribunal a suffisamment et pertinemment répondu. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges. S'il ajoute qu'il appartenait à La Poste de démontrer le caractère complet du dossier médical qui lui a été adressé suite à ses demandes, il est constant que ce dossier était accompagné d'un bordereau de pièces et que M. C... ne s'est pas manifesté à réception du dossier pour signaler que des pièces étaient manquantes. Dès lors, il ne ressort pas de pièces du dossier, que la totalité de son dossier médical ne lui aurait pas été communiqué.

7. En deuxième lieu, M. C... fait valoir qu'il aurait dû être convoqué devant un expert agréé de son département. Toutefois, et ainsi que l'a jugé pertinemment le tribunal administratif de Toulouse par le jugement contesté, s'il résulte des dispositions combinées des articles 34 et 35 du décret du 14 mars 1986 que lorsqu'elle envisage le placement d'office d'un agent en congé de longue durée l'administration doit provoquer l'examen médical de l'intéressé par un médecin agréé compétent pour l'affection en cause, ces dispositions n'imposent pas que ce médecin soit installé dans le département de résidence de l'agent ou dans un département limitrophe. M. C..., qui au demeurant n'allègue pas avoir été dans l'impossibilité de se présenter aux rendez-vous de l'expert, n'est donc pas fondé à soutenir que La Poste était tenue de le convoquer devant un médecin agréé résidant dans le Cantal ou dans un département limitrophe.

8. En troisième lieu, M. C... soutient que la décision du 19 janvier 2011 avait en réalité précédé la consultation du comité médical du 9 décembre 2010. Cependant, il ressort des pièces du dossier que, par un courrier du 9 décembre 2010 pris en application de l'article 34 du décret du 14 mars 1986, La Poste a informé M. C... " qu'un dossier sera présenté au comité médial pour avis sur la confirmation ou non de la mise en congé de longue durée d'office ". Il résulte des termes même de ce courrier que La Poste avait seulement enclenché la procédure de mise en congé de longue durée mais qu'elle attendait l'avis du comité médical pour prendre une décision. Dès lors le moyen de M. C..., selon lequel une décision avait déjà été prise sans que le comité médical ait été consulté, doit être écarté.

9. En quatrième lieu, M. C... fait valoir qu'il ne pouvait pas être placé en congé de longue durée dès lors qu'il n'avait pas épuisé ses droits à congé de maladie ordinaire. Toutefois, la circonstance que M. C... souffrait d'une maladie au titre de laquelle il pouvait prétendre à un congé de maladie ordinaire ne faisait pas obstacle à ce que l'administration le place en congé de longue durée sur le fondement des dispositions précitées de l'article 34 du décret du 14 mars 1986. En outre, le requérant ne peut, à cet égard, se prévaloir des règles énoncées dans le " guide mémento des règles de gestion RH ", lequel est dépourvu de caractère impératif.

10. En cinquième lieu, M. C... fait valoir que La Poste ne pouvait pas le placer en congé de longue durée d'office dès lors qu'il n'était pas atteint d'une maladie mentale. Toutefois, au cours du dernier trimestre 2010, la hiérarchie de M. C..., l'assistante sociale chargée d'assurer son suivi et le médecin de prévention ont été alertés à plusieurs reprises par l'intéressé sur son état et sur sa détermination à se mettre lui-même en danger. Par des courriers des 19 novembre et 6 décembre 2010 l'assistante sociale et le médecin de prévention ont fait part de leurs inquiétudes à son sujet. Le certificat médical établi le 7 décembre 2010 par le médecin psychiatre désigné par La Poste qui a examiné M. C... estimait que son état de santé justifiait une mise en congé de longue maladie pour une durée de six mois et l'avis du comité médical, lors de sa séance du 12 janvier 2011, était favorable au placement de M. C... dans cette position statutaire. Par suite, et ainsi d'ailleurs que le Conseil d'Etat l'a relevé dans son arrêt n° 422678 du 27 novembre 2020, en estimant, par sa décision du 19 janvier 2011, que M. C... pouvait être regardé comme souffrant d'une maladie mentale au sens du 4° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 le mettant dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions et justifiant qu'il soit placé d'office en congé de longue durée pour six mois à compter du 1er décembre 2010, La Poste n'a pas commis d'erreur d'appréciation.

11. Par la suite, la prolongation pour une durée de 6 mois du congé de longue durée d'office de M. C... est intervenue conformément à l'avis rendu par le comité médical, après examen de l'agent par le docteur Lesturgeon, médecin psychiatre agréé. Il ressort en effet des conclusions du rapport remis le 8 juin 2011 par cet expert que " M. C... présente une pathologie dépressive masquée par une personnalité psychorigide et des conduites obsessionnelles majeures " et que " les symptômes actuels demeurent trop importants pour envisager une reprise du travail, même sur un poste adapté ". M. C... n'apporte pas d'éléments permettant de remettre en cause cette appréciation. Aussi, la décision du 25 juillet 2011 n'est pas davantage entachée d'erreur d'appréciation.

12. Il en va de même de la décision du 19 décembre 2011 qui a prolongé le congé de longue durée de M. C... pour une durée de 6 mois, après un avis favorable du comité médical et après que l'intéressé a été examiné le 14 novembre 2011 par le docteur Lesturgeon, médecin psychiatre agréé. Le rapport établi par le psychiatre agréé indique que persiste une " authentique symptomatologie dépressive " et estime que l'état clinique de M. C... ne permet pas d'envisager une reprise du travail, même sur un poste aménagé, mais justifie le renouvellement du congé pour une période de six mois. Ces éléments ne sont pas sérieusement contestés par M. C.... La Poste n'a donc pas méconnu les dispositions de l'article 34 de de la loi du 11 janvier 1984 en prolongeant le congé de longue durée de M. C....

13. Enfin, par une décision du 19 juillet 2013 La Poste a prolongé à nouveau le congé de longue durée de M. C... pour une durée de 18 mois. Cette décision a été prise après examen par le docteur Lesturgeon qui a conclu, le 3 mai 2013, qu'" aucune évolution de la symptomatologie qui reste sur un versant dépressif associé à une psychorigidité totalement stérile " n'était constatée, ainsi que l'avis du comité médical départemental et du comité médical supérieur. Les éléments produits par M. C... ne suffisent pas à remettre en cause l'appréciation portée par La Poste sur l'état de santé de l'intéressé. Dès lors La Poste n'a commis ni l'erreur d'appréciation ni le détournement de pouvoir allégué, en prolongeant le congé de longue durée de M. C... par la décision du 19 juillet 2013.

14. En sixième lieu, M. C... fait valoir que La Poste a méconnu les dispositions de l'article 36 du décret du 14 mars 1986 en prolongeant son congé de longue durée pour une durée supérieure à 6 mois du 1er juin 2012 au 30 novembre 2013, soit 18 mois en l'espèce par une décision du 19 juillet 2013. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'alors que La Poste avait prolongé le congé de longue durée de M. C... pour une durée de 6 mois à compter du 1er décembre 2011, le requérant a contesté l'avis du comité médical en février 2012. Le comité médical s'est donc réuni le 7 mars 2012 et a confirmé son avis favorable au renouvellement du congé de longue durée. Puis M. C... a saisi le comité médical supérieur lequel ne s'est prononcé que le 12 février 2013. Aussi, le comité médical supérieur ayant émis un avis défavorable à la réintégration de M. C... et un avis favorable à la prolongation de son congé de longue durée, La Poste, par une décision du 15 avril 2013, puis par la décision contestée du 19 juillet 2013, a régularisé la situation administrative de l'intéressé avec effet rétroactif au 1er juin 2012. Par la suite, La Poste, qui était tenue d'assurer le déroulement continu de la carrière de l'agent en le plaçant dans une position régulière, a été nécessairement conduite, dès lors que l'intéressé était hors d'état de reprendre son service à l'expiration de son précédent congé de six mois, à faire courir les effets de la prolongation du congé à compter de cette date. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision plaçant M. C... en congé de longue durée serait entachée d'une rétroactivité illégale et celui de la méconnaissance de l'article 36 du décret du 14 mars 1986 limitant le congé de longue durée à 6 mois, doivent être écartés.

15. Il résulte de tout ce qui précède, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement contesté, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation des décisions des 19 janvier 2011, 25 juillet 2011, 19 décembre 2011 et 19 juillet 2013.

Sur la légalité de la décision implicite de rejet de la demande de réintégration sollicitée par M. C... le 10 avril 2012 :

16. Ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Toulouse, il ressort des pièces du dossier que le 23 avril 2012, soit avant l'expiration du délai de deux mois à l'issue duquel le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision implicite de rejet, La Poste a répondu à la demande de réintégration présentée par M. C... le 10 avril 2012 en lui indiquant qu'il serait maintenu en congé de longue durée. Ce courrier vaut décision expresse de rejet de la demande du 10 avril 2012. Par suite, en l'absence d'une décision implicite de rejet, les conclusions de M. C... dirigées contre une telle décision, et par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction et de condamnation de la Poste du fait de l'illégalité de cette décision, sont irrecevables et doivent être rejetées.

Sur les autres conclusions :

17. M. C... fait valoir qu'il a subi des faits de harcèlement moral dès lors que les décisions qu'il critique avaient pour seul objet de l'humilier et de masquer l'incapacité de La Poste à le réintégrer. Toutefois, il appartient à un agent public, qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. En l'espèce, en se bornant à soutenir que La Poste l'aurait continuellement humilié et opposé des refus non fondés à ses demandes de mutation, sans accompagner ces allégations de faits précis, circonstanciés et concordants, M. C... ne peut être regardé comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral. En l'absence de tels agissements, M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions sur ce point.

18. En l'absence d'illégalité fautive commise par La Poste, les conclusions de M. C... tendant à ce que son employeur soit condamné à lui verser une indemnité en réparation du préjudice qu'il aurait subi du fait de l'illégalité des décisions le plaçant en congé de longue durée, ne peuvent qu'être rejetées.

19. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de La Poste, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande M. C... sur ce fondement. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de La Poste présentées sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de La Poste tendant à l'application de l'article L. 761-1 et de l'article L. 741-2 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et à La Poste.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2021 à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

Mme E... H..., présidente-assesseure,

Mme D... B..., première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 avril 2021.

Le président,

Didier ARTUS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20BX03883


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX03883
Date de la décision : 07/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Congés - Congés de longue durée.

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Garanties et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: Mme Fabienne ZUCCARELLO
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : HMS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-04-07;20bx03883 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award