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01/04/2021 | FRANCE | N°19BX02143

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 01 avril 2021, 19BX02143


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'établissement public national grand port maritime de La Réunion a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner la société Ludo Recyclage Concassage à verser une amende de 3 750 euros au titre de l'article L. 5337-4 du code des transports, pour avoir porté atteinte à l'intégrité et à la conservation de son domaine et occupé sans droit ni titre les parcelles cadastrées section BM nos 1 et 47, et de la condamner à cesser toute activité sur ces parcelles, sous astreinte de 500 euros pa

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'établissement public national grand port maritime de La Réunion a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner la société Ludo Recyclage Concassage à verser une amende de 3 750 euros au titre de l'article L. 5337-4 du code des transports, pour avoir porté atteinte à l'intégrité et à la conservation de son domaine et occupé sans droit ni titre les parcelles cadastrées section BM nos 1 et 47, et de la condamner à cesser toute activité sur ces parcelles, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, à libérer les lieux et à remettre le site en l'état, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1700609 du 26 avril 2018, notifié par voie d'huissier le

25 février 2019, le tribunal administratif de La Réunion a condamné la société Ludo Recyclage Concassage au paiement d'une amende de 2 500 euros, lui a enjoint de cesser sans délai l'occupation sans titre de la parcelle cadastrée section BM n° 47 sur laquelle des gravats et déchets divers ont été déposés et de rétablir les lieux dans leur état initial en procédant notamment à l'enlèvement des matériaux et déchets précités, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, a autorisé le grand port maritime de La Réunion, à l'expiration de ce délai, à procéder d'office aux travaux de remise en état de la parcelle cadastrée BM n° 47 aux frais, risques et périls de ces derniers et a relaxé la société du surplus des poursuites.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 mai 2019 et régularisée le 12 juin 2019, la société Ludo Recyclage Concassage, représentée par la SELARL Betty Vaillant, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 26 avril 2018 ;

2°) de condamner le grand port maritime de La Réunion à lui verser une somme de 40 000 euros pour procédure abusive ;

3°) de mettre à la charge de l'État, outre les entiers dépens de l'instance, la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la parcelle cadastrée section BM n° 47 n'était plus occupée à la date du jugement attaqué, le constat d'huissier daté du 3 décembre 2015 attestant qu'à la suite du procès-verbal de contravention du 21 mai 2015, le démontage des machines était en cours ;

- l'ensemble du matériel est désormais entreposé sur le terrain cadastré section

BM n° 14 situé en bordure du boulevard de la Marine, ainsi que l'indique un constat d'huissier daté du 20 juin 2018 ; ce terrain appartient à la commune du Port, laquelle a autorisé l'occupation provisoire de cette parcelle par une décision du 17 mai 2018 ; dès lors que la parcelle en litige n'est plus occupée depuis la fin de l'année 2015, le grand port maritime de La Réunion n'avait, à la date de la saisine du juge, ni qualité ni intérêt pour agir ;

- les agissements de l'établissement public à leur égard sont constitutifs d'un harcèlement et d'une procédure abusive, les préjudices subis devant être réparés à hauteur de la somme de 40 000 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 août 2019, l'établissement public

grand port maritime de La Réunion, représenté par Me B... A..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'appelante, outre les entiers dépens de l'instance, d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'établissement public soutient que :

- les conclusions dirigées contre le refus de renouveler les autorisations délivrées à la société requérante sont nouvelles en appel, et par suite irrecevables ;

- les conclusions indemnitaires relèvent d'un contentieux distinct de la procédure de contravention de grande voirie ; au surplus, la société Ludo Recyclage Concassage n'a jamais adressé de demande préalable aux fins de liaison du contentieux conformément à l'article R. 421-1 du code de justice administrative ; par suite, ces conclusions sont irrecevables ;

- les moyens développés par les appelants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des transports ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020, et notamment son article 5 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Un procès-verbal de contravention de grande voirie a été dressé le 19 mai 2015 à l'encontre de la société Ludo Recyclage Concassage en raison de la présence de matériaux de concassage sur des terrains, situés au niveau du boulevard de la Marine sur la commune du Port, appartenant au domaine du grand port maritime de La Réunion. Un second procès-verbal a été établi le 8 juin 2017 à l'encontre de ladite société du fait de la présence de gravats et produits de concassage, ainsi que des déchets de tous ordres sur la parcelle cadastrée section

BM n° 47. Le président du directoire de l'établissement public précité a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner la société Ludo Recyclage Concassage au paiement d'une amende de 3 750 euros pour l'occupation illégale des parcelles cadastrées section BM nos 1 et 47, d'enjoindre aux contrevenants de cesser cette occupation sous astreinte, de remettre en état les lieux sous astreinte et de l'autoriser, en cas d'inexécution, à procéder d'office à la remise en état de cette parcelle aux frais, risques et périls des contrevenants. La société Ludo Recyclage Concassage relève appel du jugement n° 1700609 du 26 avril 2018, en tant que le tribunal administratif de La Réunion l'a condamnée au paiement d'une amende de 2 500 euros au titre de l'occupation sans titre, lui a enjoint de cesser sans délai l'occupation de la seule parcelle cadastrée section BM n° 47 et de remettre les lieux en l'état originel en procédant à l'enlèvement des matériaux et déchets présents. La société Ludo Recyclage Concassage demande en outre la condamnation du grand port maritime de La Réunion à lui verser une somme de 40 000 euros pour procédure abusive.

Sur la recevabilité des conclusions indemnitaires :

2. Les conclusions reconventionnelles ne sont pas recevables dans une instance ayant pour objet la répression d'une contravention de grande voirie. Par suite, ainsi que le relève le grand port maritime de La Réunion, les conclusions indemnitaires présentées par la société Ludo Recyclage Concassage ne peuvent qu'être rejetées.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Aux termes de l'article L. 5337-1 du code des transports : " Sans préjudice des sanctions pénales encourues, tout manquement aux dispositions du chapitre V du présent titre, à celles du présent chapitre et aux dispositions réglementant l'utilisation du domaine public, notamment celles relatives aux occupations sans titre, constitue une contravention de grande voirie réprimée dans les conditions prévues par les dispositions du présent chapitre ". Selon l'article L. 5335-2 du même code : " Il est interdit de porter atteinte au bon état et à la propreté du port et de ses installations (...) ". L'article L. 5335-3 dudit code interdit " de laisser les marchandises séjourner sur les quais, terre-pleins et dépendances d'un port maritime au-delà du délai prévu par le règlement général de police ou, si le délai prévu est plus long, par le règlement particulier. (...) ". L'article L. 5335-4 du même code prévoit que : " Les dispositions de l'article L. 5335-3 sont applicables aux véhicules, objets, matériaux ou autres, dès lors qu'ils stationnent ou ont été déposés sans autorisation sur les quais, terre-pleins et dépendances d'un port maritime. ". Enfin, aux termes de l'article L. 5337-4 du même code : " Est puni de 3 750 euros d'amende le fait, pour le propriétaire ou la personne responsable qui en a la garde : 1° De laisser séjourner des marchandises au-delà du délai prévu par l'article L. 5335-3 ; 2° De laisser stationner ou de déposer sans autorisation des véhicules, objets, matériaux ou autres en violation de l'article L. 5335-4. I En cas de nouveau manquement commis moins de cinq ans après le prononcé d'une première condamnation, l'amende peut être portée au double. ".

4. Il ressort des procès-verbaux de contravention de grande voirie des 19 mai 2015 et 8 juin 2017 que des gravats et produits de concassage ainsi que des déchets de tous ordres étaient présents sur la parcelle cadastrée section BM n° 47 appartenant au grand port maritime de La Réunion et que le contrevenant était la société Ludo Recyclage Concassage. Le constat d'huissier effectué à la demande de cette dernière, le 3 décembre 2015, se borne à constater que l'activité de concassage a été transférée sur un autre terrain et que le matériel nécessaire au concassage était en cours de démontage, mais ne permet pas, à lui seul, de tenir pour établi que la société Ludo Recyclage Concassage avait quitté la parcelle à la date du second procès-verbal de 2017 ni qu'elle n'était pas à l'origine des matériaux y étant entreposés à cette date. Le constat d'huissier du 20 juin 2018, qui est postérieur au second procès-verbal et au jugement attaqué, énonçant que la société n'exerce plus d'activité de concassage sur le site, exception faite de deux pièces sur socle dont l'enlèvement est envisagé par le gérant et que les engins de chantier sont stationnés sur un terrain limitrophe de la parcelle en cause appartenant à la commune du Port, n'est pas de nature à remettre en cause l'occupation sans droit ni titre par la société Ludo Recyclage Concassage d'une dépendance du domaine public portuaire, à la date des infractions constatées les 19 mai 2015 et 8 juin 2017, où elle avait entreposé sans autorisation des matériaux et déchets divers. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal a jugé que la société a commis une contravention de grande voirie. Par suite, l'établissement public grand port maritime de La Réunion, en sa qualité de propriétaire des parcelles, a pu valablement déférer la société requérante comme prévenue d'une contravention de grande voirie pour avoir porté atteinte à l'intégrité et à la conservation du domaine public.

5. Dans ces conditions, il résulte de tout ce qui précède que la société Ludo Recyclage Concassage n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion l'a condamnée, en application des dispositions de l'article L. 5337-4 du code des transports, au paiement d'une amende de 2 500 euros, dont elle ne conteste au demeurant pas le montant, et lui a enjoint de cesser l'occupation du domaine public et de remettre les lieux en l'état.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge du grand port maritime de La Réunion, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés par la requérante et non compris dans les dépens ou au paiement des entiers dépens de l'instance, laquelle n'en comprend au demeurant aucun. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société Ludo Recyclage Concassage la somme de

1 500 euros en application de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Ludo Recyclage Concassage est rejetée.

Article 2 : La société Ludo Recyclage Concassage versera à l'établissement public grand port maritime de La Réunion la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Ludo Recyclage Concassage et à l'établissement public grand port maritime de La Réunion.

Copies en sera transmise à la ministre des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 4 mars 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 1er avril 2021.

La présidente,

Marianne Hardy

La République mande et ordonne au ministre de l'outre-mer en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N °19BX02143


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19BX02143
Date de la décision : 01/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux répressif

Analyses

24-01-03-01-04-02 Domaine. Domaine public. Protection du domaine. Contraventions de grande voirie. Poursuites. Condamnations.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY-SABOURDY
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : SELARL BETTY VAILLANT

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-04-01;19bx02143 ?
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