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30/03/2021 | FRANCE | N°21BX00081

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 30 mars 2021, 21BX00081


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... B... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 17 août 2018 par lequel le maire de la commune de Concremiers a délivré au GAEC des Viennières un permis de construire en vue de l'édification d'un bâtiment agricole pour le stockage de matériel et de fourrage avec panneaux photovoltaïques sur la toiture.

Par un jugement n° 1801625 du 12 novembre 2020, le tribunal administratif de Limoges a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une re

quête enregistrée le 8 janvier 2021, et les pièces enregistrées le 20 janvier 2021, M. B..., r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... B... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 17 août 2018 par lequel le maire de la commune de Concremiers a délivré au GAEC des Viennières un permis de construire en vue de l'édification d'un bâtiment agricole pour le stockage de matériel et de fourrage avec panneaux photovoltaïques sur la toiture.

Par un jugement n° 1801625 du 12 novembre 2020, le tribunal administratif de Limoges a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 janvier 2021, et les pièces enregistrées le 20 janvier 2021, M. B..., représenté par la SCP KPL avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 novembre 2020 du tribunal administratif de Limoges ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 août 2018 par lequel le maire de la commune de Concremiers a délivré au GAEC des Viennières un permis de construire en vue de l'édification d'un bâtiment agricole pour le stockage de matériel avec panneaux photovoltaïques sur la toiture ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Concremiers la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés devant le tribunal administratif et non compris dans les dépense et la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés devant la cour et non compris dans les dépens.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, il justifie d'un intérêt à contester la légalité de ce permis en sa qualité de voisin immédiat ; le projet litigieux consiste à implanter un hangar de grandes dimensions (39,10 m de longueur, 19 mètres de largeur et une dizaine de mètres de hauteur) à 38 m de la maison d'habitation qu'il possède et à partir de laquelle il va avoir une vue directe sur le hangar en question ; cette maison est destinée à être occupée par son fils lors de son installation en qualité de jeune agriculteur ;

- l'arrêté attaqué ne comporte aucune indication quant au nom et au prénom de son auteur, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- le plan de masse produit au soutien de la demande de permis de construire litigieux n'indique que très sommairement, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme, l'endroit auquel le raccordement devrait se faire ; de surcroît, il n'est fourni aucune information concernant les modalités selon lesquelles la construction projetée va être raccordée au réseau public d'électricité ;

- l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme ; la notice architecturale ne comprend aucun des éléments prescrits par les dispositions de l'article R. 431-8 de ce code, notamment en ce qui concerne les constructions et paysages avoisinants ; aucune autre pièce versée au dossier de demande de permis de construire n'est de nature à compenser cette insuffisance ; l'importance de la construction projetée justifiait qu'elle soit matérialisée et présentée de manière plus complète que par un simple document d'insertion dénommé " projet - vue côté sud-ouest ", lequel ne permet qu'une appréciation imparfaite de la proximité immédiate du projet avec la maison édifiée à proximité ; le bâtiment représenté sur ce document graphique ne respecte manifestement pas les proportions du bâtiment réellement construit ; aucun document ne fait ressortir les angles des prises de vue annexées au dossier de demande de permis de construire ; enfin, la circonstance qu'un plan de masse valant aménagement paysager ait été intégré au dossier de demande de permis de construire ne saurait compenser l'atteinte au voisinage constitué par le bâtiment projeté ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; il existe un risque manifeste d'incendie à faire cohabiter des matières hautement inflammables, à l'instar du fourrage sec, avec du matériel agricole ainsi que des panneaux solaires ; la réserve d'eau destinée à lutter contre les incendies n'est en en réalité qu'une simple mare qui n'a pas fait l'objet d'un aménagement par la pose d'une géomembrane ; cette mare risque de s'assécher lors d'épisodes de fortes chaleurs ;

- l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article 3 du règlement de la zone NC du plan d'occupation des sols de la commune de Concremiers où seules sont autorisées les constructions et installations liées à l'activité agricole ; le bâtiment projeté n'a aucune vocation agricole, il a pour seul objet la production d'électricité photovoltaïque destinée à la revente à EDF.

Par un mémoire enregistré le 25 février 2021, la commune de Concremiers, représentée par Me A..., conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, au rejet de la demande de première instance de M. B... et, en tout état de cause, que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Elle soutient que :

- M. B... ne justifie d'aucun intérêt à agir contre le permis contesté ;

- les moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le décret 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. F... E...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique,

- et les observations de Me C..., représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., propriétaire de plusieurs parcelles situées au lieudit Les Viennières, relève appel du jugement en date du 12 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 17 août 2018 par lequel le maire de la commune de Concremiers a autorisé le GAEC des Viennières à construire un bâtiment agricole pour le stockage de matériel et de fourrage avec panneaux photovoltaïques sur la toiture.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur: " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Il appartient ensuite au juge de l'excès de pouvoir de former sa conviction sur la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

4. Il ressort des pièces du dossier, d'une part, que l'arrêté en litige autorise le GAEC des Viennières à construire un bâtiment agricole à usage de stockage d'une surface au sol de 899 m², de 39,10 mètres de longueur sur 19 mètres de largeur et d'une hauteur maximale de 9,81 mètres selon le plan de coupe de la demande de permis produite en première instance, sur les parcelles cadastrées section AK n° 50, 51 et 53 et 62 et, d'autre part, que M. B..., en sa qualité de propriétaire de la maison à usage d'habitation implantée sur la parcelle n° AK 54, mitoyenne du terrain d'assiette, est voisin immédiat du projet. Compte tenu des proportions du bâtiment, édifié sur un espace préalablement dénué de toute construction, et de sa localisation à moins de quarante mètres de la fenêtre située sur la façade Nord de la maison du requérant, ce dernier est fondé à soutenir qu'il a une vue directe sur ce projet et que ce dernier est de nature à affecter directement les conditions d'occupation et de jouissance du bien qu'il détient. Contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la seule circonstance qu'à la date d'introduction de la demande de première instance, cette habitation n'aurait pas été occupée depuis longtemps est sans incidence sur l'appréciation de l'intérêt à agir de M. B.... Au surplus, l'absence de contestation par le requérant d'un second permis de construire délivré le même jour et autorisant le GAEC des Viennières à construire un autre bâtiment agricole présentant le même aspect et de plus grandes dimensions est également sans incidence sur l'appréciation de l'intérêt à agir de M. B... alors au surplus que ce dernier a expressément indiqué devant les premiers juges que, compte tenu de son lieu d'implantation, ce second bâtiment ne le dérangeait pas. Dès lors M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Limoges a estimé qu'il ne justifiait pas d'un intérêt lui donnant qualité à agir à l'encontre de l'arrêté du 17 août 2018 et a rejeté sa requête comme irrecevable. Par suite, le jugement attaqué doit être annulé.

5. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire au tribunal administratif de Limoges pour qu'il y soit à nouveau statué.

Sur les frais liés au litige :

6. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre la somme de 1 500 euros à la charge de la commune de Concremiers au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1801625 du tribunal administratif de Limoges en date du 12 novembre 2020 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Limoges.

Article 3 : La commune de Concremiers versera la somme de 1 500 euros à M. B... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... B..., à la commune de Concremiers et au GAEC des Viennières.

Délibéré après l'audience du 2 mars 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. F... E..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mars 2021.

La présidente,

Evelyne Balzamo

La République mande et ordonne au préfet de l'Indre en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX00081


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX00081
Date de la décision : 30/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-06-01-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Règles de procédure contentieuse spéciales. Introduction de l'instance. Intérêt à agir.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Stéphane GUEGUEIN
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : SCP PIELBERG KOLENC

Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-03-30;21bx00081 ?
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