La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/03/2021 | FRANCE | N°18BX02055

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 22 mars 2021, 18BX02055


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... B... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2016 par lequel le président du syndicat mixte à rayonnement régional Maurice Ravel a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle à compter du 1er janvier 2017.

Par un jugement n° 1700218 du 23 mars 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 22 mai 2018 et le 7 janvier 2020, Mme B...,

représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... B... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2016 par lequel le président du syndicat mixte à rayonnement régional Maurice Ravel a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle à compter du 1er janvier 2017.

Par un jugement n° 1700218 du 23 mars 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 22 mai 2018 et le 7 janvier 2020, Mme B..., représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 23 mars 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2016 par lequel le président du syndicat mixte à rayonnement régional Maurice Ravel a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle à compter du 1er janvier 2017 ;

3°) d'enjoindre au président du syndicat mixte pour le fonctionnement du conservatoire à rayonnement régional Maurice Ravel de la réintégrer dans son emploi dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 250 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du syndicat mixte pour le fonctionnement du conservatoire à rayonnement régional Maurice Ravel la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les faits qui lui sont reprochés sont matériellement inexacts, dès lors qu'elle a rempli tous les objectifs fixés dans sa fiche de poste, qu'elle produit des attestations qui démontrent qu'elle entretenait de très bonnes relations professionnelles avec de nombreux agents ou partenaires du conservatoire et que ces évaluations au demeurant tenues dans des conditions irrégulières ont brusquement été défavorables à compter de 2014 ;

- la décision attaquée est illégale car l'insuffisance professionnelle ne peut être qualifiée de comportement fautif, passible de sanction disciplinaire ;

- la mesure prise est entachée d'erreur d'appréciation alors au contraire que c'est elle qui a subi un harcèlement moral, qu'elle était employée depuis 11 ans sans que lui soient reprochées des insuffisances professionnelles, que la protection fonctionnelle lui a été refusée et que le conseil de discipline de recours a émis un avis défavorable à son licenciement.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 1er août 2018 et le 1er octobre 2020, la régie du conservatoire à rayonnement régional Maurice Ravel de la communauté d'agglomération Pays Basque, venant aux droits du syndicat mixte pour le fonctionnement du conservatoire à rayonnement régional Maurice Ravel, représentée par Me J..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F... I...,

- les conclusions de Mme K..., rapporteure publique ;

- et les observations de Me D..., représentant Mme B..., et les observations de Me A..., représentant la régie du conservatoire à rayonnement régional Maurice Ravel de la communauté d'agglomération Pays Basque.

Une note en délibéré présentée par Me D... pour Mme B... a été enregistrée le 1er mars 2021.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., professeur territorial titulaire d'enseignement artistique depuis le 1er novembre 2011, exerce ses fonctions de professeur de danse au sein du conservatoire à rayonnement régional Maurice Ravel depuis l'année 2005, au pôle sud d'Hendaye et Saint Jean de Luz. Par courrier du 4 juillet 2014, elle a sollicité le bénéfice de la protection fonctionnelle pour des faits de harcèlement moral dont elle s'estimait victime mais une décision implicite de rejet est née du silence gardé par l'administration sur cette demande. Puis, par un arrêté du 23 août 2016, Mme B... a été déchargée de ses fonctions à compter du 1er septembre 2016 dans l'intérêt du service et dans l'attente de l'issue de la procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle engagée à son encontre. Par un arrêté du 16 décembre 2016, le président du syndicat mixte à rayonnement régional Maurice Ravel a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle à compter du 1er janvier 2017. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler cette décision et elle relève appel du jugement du 23 mars 2018 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 93 de la loi du 26 janvier 1984 : " Le licenciement pour insuffisance professionnelle est prononcé après observation de la procédure prévue en matière disciplinaire. / Le fonctionnaire licencié pour insuffisance professionnelle peut recevoir une indemnité dans des conditions qui sont fixées par décret. ".

3. Le licenciement pour inaptitude professionnelle d'un agent public ne peut être fondé que sur des éléments révélant l'inaptitude de l'agent à exercer normalement les fonctions pour lesquelles il a été engagé ou correspondant à son grade et non sur une carence ponctuelle dans l'exercice de ces fonctions. Toutefois, une telle mesure ne saurait être subordonnée à ce que l'insuffisance professionnelle ait été constatée à plusieurs reprises au cours de la carrière de l'agent ni qu'elle ait persisté après qu'il ait été invité à remédier aux insuffisances constatées. Par suite, une évaluation portant sur la manière dont l'agent a exercé ses fonctions durant une période suffisante et révélant son inaptitude à un exercice normal de ses fonctions est de nature à justifier légalement son licenciement.

4. Pour licencier Mme B... pour insuffisance professionnelle, le président du syndicat mixte à rayonnement régional Maurice Ravel s'est fondé sur le comportement général de Mme B... dans les relations de travail, caractérisé par une incapacité à travailler en équipe notamment avec ses supérieurs hiérarchiques et la plupart de ses collègues du département " Danse ", et sur la circonstance que ce comportement a perduré alors qu'elle était alertée de son impact négatif sur le fonctionnement du service. Mme B... fait valoir que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis, qu'elle n'a commis aucune faute et que la décision contestée est entachée d'erreur d'appréciation.

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment des entretiens d'évaluation ainsi que des témoignages des directeurs, coordonnatrice du département Danse, coordonnateur pédagogique, professeurs de danse et responsable des études chorégraphiques, qu'à plusieurs reprises et sous deux directions successives, Mme B... a adopté une attitude d'opposition, de protestation systématique et revendicative à son profit. Les attestations de huit de ses collègues du département " Danse " sur les treize qui le composent, témoignent également des situations conflictuelles qu'elle a créées et de leur fréquence, ainsi que de son opposition à toute forme de collaboration dès lors qu'elle n'est pas à l'origine d'un projet. Il résulte également des pièces du dossier, et notamment des entretiens d'évaluation ainsi que de divers courriers émanant du directeur du conservatoire, que Mme B... avait été alertée des dysfonctionnements crées par son comportement et de la nécessité de s'amender. Par suite, et ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Pau, il ressort des nombreux témoignages précis, concordants et circonstanciés, que Mme B... adoptait une attitude critique constante non constructive rendant impossible le travail en équipe tant avec ses collègues professeurs de danse qu'avec ses supérieurs hiérarchiques. Dès lors, les faits reprochés à la requérante sont établis par les pièces du dossier contrairement à ce qu'elle soutient.

6. En second lieu, l'arrêté attaqué prononçant le licenciement pour insuffisance professionnelle de Mme B... ne repose pas sur des fautes passibles de sanction disciplinaire. Dès lors, la requérante ne peut utilement soutenir qu'elle n'aurait commis aucune faute de nature à justifier une sanction disciplinaire.

7. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment de la fiche du poste occupé par Mme B..., que les missions qui lui étaient confiées comprenaient, outre les fonctions d'enseignement, des missions de développement de liens fonctionnels étroits avec les coordinateurs pédagogiques, les responsables pédagogiques, ainsi qu'avec les autres enseignants dans le cadre, par exemple, d'actions culturelles communes telles que des spectacles ou des concerts, ou la participation à des réunions de concertation pédagogique en équipe ainsi que " des liens transverses " avec l'ensemble des responsables du conservatoire. Or, alors même que le conservatoire ne conteste pas les connaissances techniques de l'intéressée et ses qualités pédagogiques, la manière inappropriée de servir de Mme B..., de nature à établir son incapacité à remplir les fonctions qui lui avaient été confiées, à l'exception de son enseignement aux élèves, ont entrainé une souffrance au travail qui a conduit le conservatoire à accorder la protection fonctionnelle à deux agents travaillant avec la requérante et à la mise en place d'une cellule psychologique par le centre de gestion des Pyrénées-Atlantiques. Par ailleurs, et ainsi que l'a relevé le tribunal administratif de Pau, à la suite de l'attitude de l'intéressée à l'encontre de sa supérieure hiérarchique, Mme H..., cette dernière a fait l'objet de plusieurs arrêts de travail et la requérante a été placée sous l'autorité hiérarchique directe du directeur du conservatoire à compter du 7 décembre 2015. En outre, si Mme B... soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, elle n'apporte pas d'éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement en se bornant à invoquer des injustices qu'elle estime avoir subies concernant son emploi du temps et les locaux où elle exerce son activité professionnelle. Enfin l'avis du conseil de discipline de recours de la région Nouvelle-Aquitaine du 11 mai 2017, défavorable au licenciement pour insuffisance professionnelle de l'intéressée, ne liait pas le syndicat mixte. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Pau a jugé que la manière de servir de Mme B... était de nature à justifier son licenciement pour insuffisance professionnelle.

8. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 16 décembre 2016 du président du syndicat mixte à rayonnement régional Maurice Ravel.

Sur les autres conclusions :

9. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions de la requête à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution. Dès lors, les conclusions présentées en ce sens par Mme B... ne peuvent qu'être rejetées.

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du syndicat mixte pour le fonctionnement du conservatoire à rayonnement régional Maurice Ravel, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme B... une somme à verser au conservatoire sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la régie du conservatoire à rayonnement régional Maurice Ravel de la communauté d'agglomération Pays Basque, venant aux droits du conservatoire à rayonnement régional Maurice Ravel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... B... et à la régie du conservatoire à rayonnement régional Maurice Ravel de la communauté d'agglomération Pays Basque.

Délibéré après l'audience du 22 février 2021 à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

Mme F... I..., présidente-assesseure,

Mme E... C..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 mars 2021.

Le président,

Didier ARTUS

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX02055


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX02055
Date de la décision : 22/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-06-03 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Licenciement. Insuffisance professionnelle.


Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: Mme Fabienne ZUCCARELLO
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : SCP CHENEAU ET PUYBASSET

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-03-22;18bx02055 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award