Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. I... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 7 août 2020 par lequel la préfète de la Charente l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2002183 du 2 octobre 2020, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 26 octobre 2020 et 11 janvier 2021, M. A..., représenté par Me H..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 2 octobre 2020 ;
2°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;
3°) d'annuler l'arrêté du 7 août 2020 par lequel la préfète de la Charente l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
4°) d'enjoindre à la préfète de la Charente de lui délivrer un titre de séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 400 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé et révèle un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- il méconnait les dispositions du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 décembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... F... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. I... A..., ressortissant guinéen né le 24 mars 1996 à Conakry, est entré irrégulièrement en France le 1er juin 2017 selon ses déclarations. Son admission au séjour au titre de l'asile lui a été refusée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 29 avril 2019, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 20 septembre 2020. Par un arrêté du 7 août 2020, la préfète de la Charente l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 2 octobre 2020 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur l'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire :
2. M. A... a été admis a bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 10 décembre 2020. Dès lors, ses conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire sont devenues sans objet.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3. En premier lieu, M. A... reprend, dans des termes comparables et sans critiques utiles du jugement, ses moyens de première instance tirés de ce que l'arrêté attaqué serait insuffisamment motivé et de ce que la préfète de la Charente n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus à bon droit par le premier juge.
4. En deuxième lieu, aux termes du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; (...) ".
5. M. A... soutient qu'il est le père d'une enfant de nationalité française, Déborah Tanzina Luke, née le 23 avril 2019 d'une précédente union. Toutefois, les quelques factures qu'il produit portant, notamment, sur l'achat de produits alimentaires, vestimentaires et de puériculture, datées des mois de février à novembre 2019, et le ticket de caisse daté du 22 août 2020, réglé en espèce, et portant notamment sur l'achat d'un paquet de couches, indiquent des dépenses très ponctuelles et pour la plupart anciennes. Par ailleurs, si M. A... fait valoir qu'il téléphone tous les jours à sa fille et se rend régulièrement à son domicile, il ne l'établit pas. Dans ces conditions, M. A... ne peut être regardé comme contribuant effectivement à l'entretien et à l'éducation de sa fille, Déborah, au sens des dispositions du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. M. A..., qui a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 21 ans, et ne résidait en France que depuis trois ans à la date de l'arrêté attaqué, se prévaut de sa relation sentimentale et de son mariage religieux avec Mme E... G..., ainsi que de la présence en France de sa fille, Déborah Tanzina Luke, née d'une précédente relation avec une ressortissante française. Il ressort toutefois de ce qui a été dit au point 5 que l'intéressé ne peut être regardé comme contribuant effectivement à l'entretien et à l'éducation de cette enfant, avec laquelle il ne vit pas. Par ailleurs, les témoignages qu'il produit ne suffisent pas à démontrer qu'il aurait développé en France des liens personnels et familiaux intenses alors que sa relation sentimentale est récente. Dans ces conditions, et compte tenu du fait qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Guinée, où vivent notamment ses quatre enfants et leur mère, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 août 2020 par lequel la préfète de la Charente l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire.
Article 2 : Le surplus de la requête de M. A... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. I... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète de la Charente.
Délibéré après l'audience du 8 février 2021 à laquelle siégeaient :
Mme C... B..., présidente,
Mme J..., première conseillère,
Mme D... F..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 mars 2021.
La rapporteure,
Sylvie F...
La présidente,
Karine B...
La greffière,
Cindy Virin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 20BX03531