Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Gironde Travaux a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner le département de la Gironde à lui verser la somme de 868 905,27 euros assortie des intérêts moratoires au titre du marché de reconstruction du collège Yves du Manoir à Floirac.
Par une ordonnance n° 1805045 du 14 décembre 2018, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et une pièce, enregistrées le 31 janvier 2019 et 21 janvier 2021, la société Gironde Travaux, représentée par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Bordeaux du 14 décembre 2018 ;
2°) de condamner le département de la Gironde à lui verser la somme de 868 905,27 euros assortie des intérêts moratoires au titre du marché de reconstruction du collège Yves du Manoir à Floirac ;
3°) de mettre à la charge du département de la Gironde la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- par jugement, du 13 juin 2016, le tribunal administratif a considéré que les sommes de 415 389,19 euros et de 50 556,30 euros au titre des pénalités de retard, ainsi que la somme de 22 434 euros de frais d'expertise lui étaient dues ;
- le refus du département de lui donner mainlevée de sa garantie à première demande lui a causé un préjudice de 17 595,10 euros ;
- le département a commis une faute en payant à ses sous-traitants de manière indue la somme totale de 48 065,500 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2020, le département de la Gironde, représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Gironde Travaux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le jugement n° 1203516 du 13 juin 2016 du tribunal administratif de Bordeaux ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... E...,
- les conclusions de Mme G..., rapporteure publique,
- et les observations de Me F..., représentant la société Gironde Travaux, et de Me C..., représentant le département de la Gironde.
Considérant ce qui suit :
1. La société Gironde Travaux avait saisi le tribunal administratif de Bordeaux d'un litige l'opposant au département de la Gironde relatif au décompte du lot n° 1 " clos-couvert " du marché de reconstruction du collège Yves du Manoir à Floirac et demandait, notamment, la condamnation du département à lui verser une somme de 415 389,19 euros au titre des pénalités retenues dans le décompte général, une somme de 200 431,65 euros au titre des travaux supplémentaires, une somme de 1 628 329,05 euros au titre des difficultés d'exécution ayant bouleversé l'économie du contrat et la restitution de " la caution garantissant la retenue de garantie ". Par un jugement n° 1203516 du 13 juin 2016 devenu définitif et revêtu de l'autorité de la chose jugée, faute d'avoir fait l'objet d'une requête d'appel, le tribunal a condamné le département à verser à la société Gironde Travaux la somme de 143 324,44 euros assortie des intérêts au taux légal et a rejeté le surplus de ses conclusions. Par une nouvelle demande, la société Gironde Travaux a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner le département de la Gironde à lui verser la somme de 868 904,27 euros au titre du même marché de reconstruction du collège Yves du Manoir de Floirac. Par une ordonnance du 14 décembre 2018, dont la société Gironde Travaux relève appel, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Sur les pénalités de retard :
2. L'ensemble des opérations auxquelles donne lieu l'exécution d'un marché de travaux publics, dont font partie les pénalités, est compris dans un compte dont aucun élément ne peut être isolé et dont seul le solde arrêté lors du décompte définitif détermine les droits et obligations définitifs.
3. La société Gironde Travaux demande la condamnation du département à lui verser la somme de 415 389,19 euros au titre des pénalités de retard retenues sur le décompte général. Il résulte de l'instruction que, par son jugement du 13 juin 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté les conclusions " reconventionnelles " du département de la Gironde tendant à ce que la société Gironde Travaux soit condamnée au paiement d'une somme de 415 389,19 euros au titre des pénalités de retard.
4. Toutefois, il résulte de l'instruction que le maître de l'ouvrage a notifié, le 27 février 2012, le décompte général des travaux. La société a formé un mémoire en réclamation signifié par voie d'huissier le 11 avril 2012 puis a saisi le tribunal administratif de Bordeaux le 17 octobre 2012 d'une demande tendant à la condamnation du département à lui verser des sommes au titre du marché en cause. Par un jugement du 13 juin 2016 le tribunal administratif a statué sur les réclamations pécuniaires présentées par chaque partie et a déterminé le solde de leurs obligations contractuelles respectives. Le jugement du tribunal administratif du 13 juin 2016 étant devenu définitif, le décompte général du marché, déterminé par ce jugement, est lui-même devenu définitif alors même qu'il aurait comporté une contradiction. La circonstance que la société requérante ait formulé une demande indemnitaire préalable le 18 juillet 2018, ne pouvait faire obstacle à l'intangibilité du décompte général. Par suite, la société Gironde Travaux n'est pas fondée à demander la condamnation du département à lui verser une somme supplémentaire au titre du solde du marché litigieux.
Sur le préjudice lié au paiement direct des sous-traitants :
5. La société Gironde Travaux demande de condamner le département à lui payer une somme de 48 065,50 euros qui aurait été versée de façon indue à ses sous-traitants. Cependant, s'il résulte effectivement de l'instruction que la société requérante s'était opposée au paiement direct des sous-traitants par le département, le préjudice invoqué par la société Gironde Travaux ne saurait être regardé comme étant en lien direct avec cette faute mais résulte de la seule exécution du contrat de droit privé opposant le titulaire à ses sous-traitants. Dès lors que la société requérante ne démontre pas ne pas pouvoir récupérer les sommes en cause auprès de ses sous-traitants devant les tribunaux compétents, elle n'est pas fondée à demander la condamnation du département sur ce point.
Sur les frais d'expertise :
6. La société Gironde Travaux demande de condamner le département à lui payer une somme de 11 862 euros en complément des frais d'expertise déjà mis à la charge de ce dernier par le jugement du 13 juin 2016. Toutefois, si la société requérante a entendu soutenir que c'est par erreur que le tribunal administratif de Bordeaux a mis à la charge du département de la Gironde la somme de 10 572 euros ne couvrant que partiellement le montant des frais d'expertise, il lui appartenait d'exercer les voies de recours correspondantes à l'encontre de ce jugement. A défaut, le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 13 juin 2016 étant devenu définitif et revêtu de l'autorité de la chose jugée, elle n'est pas fondée à demander le versement d'une somme complémentaire au titre des frais d'expertise.
Sur la demande indemnitaire relative au retard du département à lever les garanties à première demande :
7. La société Gironde Travaux demande de condamner le département à lui payer une somme de 17 595,10 euros au titre de l'astreinte qu'elle a dû verser et des frais d'instance qu'elle a dû exposer dans les procédures qui l'ont opposées à son sous-traitant, la société Ridoret Menuiserie, devant le tribunal de commerce de Bordeaux. Cependant, il résulte de l'instruction que des réserves ont été émises lors de la réception de l'ouvrage le 3 août 2011 sur les travaux de menuiserie réalisés par la société Ridoret sous-traitante de la société Gironde Travaux. Par la suite, le 1er aout 2012, le département a demandé la prolongation de la garantie jusqu'à la levée des réserves. Si le département a donné mainlevée de la garantie à première demande le 14 octobre 2016, la société Gironde Travaux ne démontre pas, par les éléments qu'elle produit et compte tenu des réserves formulées par le département, que ce dernier aurait commis une faute en tardant à lever la garantie à première demande de la société Gironde Travaux.
8. Il résulte de tout ce qui précède, que la société Gironde Travaux n'est pas fondée à se plaindre que, par l'ordonnance contestée, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Sur les frais liés à l'instance :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Gironde, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société Gironde Travaux au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la société requérante la somme que le département demande sur le fondement des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Gironde Travaux est rejetée.
Article 2 : Les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative du département de la Gironde sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Gironde Travaux et au département de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 1er février 2021 à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
Mme D... E..., présidente-assesseure,
Mme B... A..., première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 mars 2021.
Le président,
Didier ARTUS
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX00363