Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 26 décembre 2019 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai et a interdit son retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2000271 du 3 juin 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 19 juin 2020, M. E... A..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 3 juin 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 décembre 2019 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai et a interdit son retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ;
3°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
s'agissant du refus de délivrance d'un titre de séjour :
- il justifie d'une promesse d'embauche, de sorte que le préfet a méconnu les stipulations du point 321 de l'accord franco-sénégalais et les dispositions de l'article R. 5225-20 du code du travail ;
- le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la circonstance qu'il ait falsifié un document administratif ne peut à elle seule justifier le refus de titre de séjour ;
s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français et de l'interdiction de retour :
- l'illégalité du refus de titre de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français et l'interdiction de retour sur le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 novembre 2020, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle à 55% par une décision du 15 octobre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-sénégalais ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code du travail ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et notamment son article 5 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C... B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. E... A... ressortissant sénégalais né le 5 avril 1989, est entré en France le 13 octobre 2011 sous couvert d'un visa long séjour portant la mention " étudiant ". Il a bénéficié en cette qualité d'un titre de séjour régulièrement renouvelé jusqu'au 14 janvier 2019. Il n'a cependant validé aucune année universitaire depuis l'obtention d'une licence en 2015. Le 16 juillet 2019, il a demandé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ". Par un arrêté du 26 décembre 2019, le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai et a interdit son retour pour une durée de deux ans. M. A... relève appel du jugement du 3 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, la décision litigieuse vise les conventions internationales et les dispositions légales dont il est fait application, comporte des éléments de faits relatifs à la situation de M. A... et expose avec précision les raisons pour lesquelles le préfet a refusé de lui délivrer un titre de séjour. Ces indications étaient suffisantes pour permettre à l'intéressé de comprendre et de contester la mesure prise à son encontre. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision, à le supposer soulevé par le requérant, doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes du point 321 de l'accord franco-sénégalais : " (...) La carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", d'une durée de douze mois renouvelable, ou celle portant la mention "travailleur temporaire" sont délivrées, sans que soit prise en compte la situation de l'emploi, au ressortissant sénégalais titulaire d'un contrat de travail visé par l'Autorité française compétente, pour exercer une activité salariée dans l'un des métiers énumérés à l'annexe IV. ". Aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarié ". (...). ". Enfin, aux termes de l'article R. 5221-20 du code du travail : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes concourant au service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule ; Lorsque la demande concerne un étudiant ayant achevé son cursus sur le territoire français cet élément s'apprécie au regard des seules études suivies et seuls diplômes obtenus en France ; (...) 6° Le salaire proposé à l'étranger qui, même en cas d'emploi à temps partiel, est au moins équivalent à la rémunération minimale mensuelle mentionnée à l'article L. 3232-1 (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que pour demander un titre de séjour portant la mention " salarié ", M. A... a présenté une attestation d'embauche en qualité d'agent de sécurité consentie pour une durée mensuelle de 82,5 heures et un salaire brut mensuel de 851,57 euros. Cet emploi, qui n'est pas au nombre de ceux qui peuvent être délivrés à un ressortissant sénégalais sans que soit prise en compte la situation de l'emploi, est sans adéquation avec les études poursuivies par M. A... en France et ne lui procure pas une rémunération au moins équivalente au salaire minimum de croissance. Ainsi, le préfet de la Gironde n'a pas fait une inexacte application des stipulations et dispositions citées ci-dessus, alors même que l'emploi en cause était susceptible d'évoluer vers un emploi à temps complet.
5. En troisième lieu, si M. A... soutient que le refus de titre de séjour ne pouvait être pris au seul motif qu'il a falsifié la date d'échéance de son récépissé de demande de titre de séjour dans le cadre d'une recherche d'emploi, il ressort des pièces du dossier, notamment des termes mêmes de l'arrêté litigieux, que le préfet de la Gironde aurait pris la même décision s'il n'avait pas retenu également ce motif. Le moyen doit ainsi être écarté.
6. En quatrième et dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que lors de sa demande de délivrance d'un titre de séjour, M. A... s'est présenté comme célibataire sans charge d'enfant en France. S'il soutient qu'il a une compagne en France qui est une compatriote titulaire d'un titre de séjour temporaire, il ne justifie d'aucune vie commune à la date de l'arrêté litigieux. Si M. A... fait également valoir qu'il est dorénavant père d'un enfant né le 2 novembre 2020, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de l'arrêté litigieux du 26 décembre 2019 qui s'apprécie à la date de son édiction. Au surplus, rien ne fait obstacle à ce que la vie familiale de M. A..., à la supposée établie, se poursuive ailleurs qu'en France, notamment au Sénégal. Dans ces conditions, le préfet n'a pas, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français et de l'interdiction de retour sur le territoire français :
7. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans seraient privées de base légale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour doit être écarté.
8. À supposer que M. A... ait entendu soulever le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ce moyen doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux qui ont été développés au point 6 ci-dessus.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, président,
M. C... B..., président-assesseur,
Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 février 2021.
Le président,
Marianne Hardy
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
2
N° 20BX01951