Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme E... A... ont demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires mises à leur charge au titre de d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux ainsi qu'au titre de la contribution sur les hauts revenus au titre des années 2012 (pour un montant de 762 342 euros) et 2013 (pour un montant de 5 648 euros).
Par un jugement n° 1701022 du 13 décembre 2018, le tribunal administratif de la Guadeloupe a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les revenus et des prélèvements sociaux auxquelles M. et Mme A... ont été assujettis au titre de l'année 2012 à hauteur de 762 342 euros et rejeté le surplus de leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 avril 2019 et un mémoire enregistré le 4 décembre 2020 qui n'a pas été communiqué, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 1er du jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 13 décembre 2018 ;
2°) de rétablir M. et Mme A... à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2012 à hauteur de 762 342 euros.
Il soutient que :
- le tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que le délai de prescription abrégé prévu à l'article L. 169 du livre des procédures fiscales s'appliquait aux rehaussements notifiés aux époux A... quant aux bénéfices industriels et commerciaux déclarés au titre de l'année 2012.
Par mémoire en défense enregistré le 4 septembre 2019, M. et Mme A..., représentés par Me G..., concluent au rejet de la requête. Ils soutiennent que les moyens soulevés par le ministre ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 14 octobre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 14 décembre 2020 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. F... D...,
- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme A... ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces au titre des années 2012 et 2013. A l'issue de ce contrôle, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux ont été mis en recouvrement pour un montant total de 766 733 euros au titre de l'année 2012 et de 52 963 euros au titre de l'année 2013. M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux mises à leur charge au titre des années 2012 et 2013 pour des montants respectifs de 762 342 euros et de 5 648 euros. Par jugement n° 1701022 du 13 décembre 2018, le tribunal administratif de la Guadeloupe a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquelles M. et Mme A... ont été assujettis au titre de l'année 2012 à hauteur de 762 342 euros au motif que le droit de reprise de l'administration était prescrit et rejeté le surplus de leur demande. Le ministre relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 168 du livre des procédures fiscales : " Les omissions totales ou partielles constatées dans l'assiette de l'impôt, les insuffisances, les inexactitudes ou les erreurs d'imposition peuvent être réparées par l'administration des impôts ou par l'administration des douanes et droits indirects, selon le cas, dans les conditions et dans les délais prévus aux articles L. 169 à L. 189, sauf dispositions contraires du code général des impôts. ". Aux termes de l'article L. 169 du même livre dans sa version applicable à l'espèce : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. / Par exception aux dispositions du premier alinéa, le droit de reprise de l'administration, pour les revenus imposables selon un régime réel dans les catégories des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices non commerciaux et des bénéfices agricoles ainsi que pour les revenus imposables à l'impôt sur les sociétés des entrepreneurs individuels à responsabilité limitée, et des sociétés à responsabilité limitée, des exploitations agricoles à responsabilité limitée et des sociétés d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont l'associé unique est une personne physique, s'exerce jusqu'à la fin de la deuxième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable est adhérent d'un centre de gestion agréé ou d'une association agréée, pour les périodes au titre desquelles le service des impôts des entreprises a reçu une copie du compte rendu de mission prévu aux articles 1649 quater E et 1649 quater H du code général des impôts. Cette réduction de délai ne s'applique pas aux contribuables pour lesquels des pénalités autres que les intérêts de retard auront été appliquées sur les périodes d'imposition non prescrites visées au présent alinéa. / (...) ". Aux termes de l'article 1649 quater E du code général des impôts dans sa version applicable au litige ; " Les centres sont notamment habilités à élaborer, pour le compte de leurs adhérents placés sous un régime réel d'imposition, les déclarations destinées à l'administration fiscale ; un agent de l'administration fiscale apporte son assistance technique au centre de gestion agréé, dans les conditions prévues par la convention passée entre le centre et l'administration fiscale. (...) Les centres demandent à leurs adhérents tous renseignements utiles afin de procéder chaque année, sous leur propre responsabilité, à un examen en la forme des déclarations de résultats et de leurs annexes, des déclarations de taxes sur le chiffre d'affaires, puis à l'examen de leur cohérence, de leur vraisemblance et de leur concordance. (...). Enfin, aux termes de l'article 1649 quater H du même code : " (...) Les associations ont l'obligation de procéder aux contrôles de concordance, cohérence et vraisemblance des déclarations de résultats et de taxes sur le chiffre d'affaires de leurs adhérents dans les six mois à partir de la date de réception des déclarations des résultats par l'association. / Les associations sont tenues d'adresser à leur adhérent un compte rendu de mission dans les deux mois qui suivent la fin des opérations de contrôle. Dans le même délai, une copie de ce compte rendu est transmise, par l'association, au service des impôts des entreprises dont dépend l'adhérent concerné (...) ".
3. En l'espèce, il résulte de l'instruction que M. A... détient 50 % des parts de la SNC pharmacie des cités unies, laquelle a cédé en mai 2012 son fonds de commerce à la SELARL Gipharma détenue par M. A... à hauteur de 90 % des parts. Selon la déclaration professionnelle 2031 souscrite par la SNC Pharmacie des cités unies au titre de l'année 2012, M. A... devait déclarer une somme de 287 068 euros au titre du bénéfice industriel et commercial et une somme de 1 525 592 euros au titre de la plus-value professionnelle réalisée. Or, l'intéressé n'a déclaré, au titre des revenus de l'année 2012, qu'un montant de 51 541 euros au titre du bénéfice industriel et commercial et n'a pas soumis la plus-value à l'impôt. Par suite, l'administration, par proposition de rectification du 15 juillet 2015, a notifié au foyer fiscal de M. A... un rehaussement de 235 527 euros au titre des revenus industriels et commerciaux provenant de la SNC Pharmacie des Cités Unies (soit 287 068- 51 541) et de 244 095 euros (soit 1 525 592 x 16 %) au titre de la plus-value.
4. Pour prononcer la décharge des impositions de l'année 2012 en litige, le tribunal a estimé que l'imposition des bénéfices industriels et commerciaux et de la plus-value professionnelle déclarés par la SNC Pharmacie des cités unies au titre de l'année 2012 entrait dans le champ des dispositions précitées de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales limitant le délai de reprise de l'administration à deux ans, compte tenu du fait que la SNC Pharmacie des cités unies était adhérente d'une association de gestion agréée ayant émis un compte rendu de mission au titre de l'année 2012, et qu'ainsi l'administration fiscale ne pouvait procéder à un rappel en base taxable du revenu professionnel de la SNC, alors prescrit au 31 décembre 2014, pour procéder à un rehaussement du revenu global du contribuable.
5. Le ministre, fait valoir que l'administration n'a procédé à aucun rehaussement concernant les données portées sur la déclaration souscrite par la SNC Pharmacie des cités unies, contrôlée par l'organisme de gestion agréé, mais s'est bornée à rectifier ou à compléter les sommes portées par M. et Mme A... sur leur déclaration d'ensemble des revenus de l'année 2012 au regard de celles figurant sur la déclaration professionnelle souscrite par la SNC Pharmacie des cités unies. Toutefois, contrairement à ce que soutient le ministre, l'adhésion de la SNC Pharmacie des cités unies, qui relevait du régime des sociétés de personnes prévu par l'article 8 du code général des impôts, était susceptible d'ouvrir à ses associés le bénéfice du délai réduit de reprise prévu par les dispositions précitées de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales. Dès lors, le ministre n'est pas fondé à soutenir qu'en estimant que M. et Mme A... pouvait se prévaloir du 2ème alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales limitant le délai de reprise de l'administration à deux ans, le tribunal a commis une erreur de droit.
6. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les revenus et des prélèvements sociaux auxquelles M. et Mme A... ont été assujettis au titre de l'année 2012 à hauteur de 762 342 euros.
DECIDE :
Article 1er : La requête du ministre de l'action et des comptes publics est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à M. et Mme E... A....
Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 19 janvier 2021 à laquelle siégeaient :
Mme C... B..., présidente,
M. F... D..., président-assesseur,
M. Stéphane Gueguein, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 février 2021.
La présidente,
Evelyne B...
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX01287