La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/02/2021 | FRANCE | N°18BX01659

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 04 février 2021, 18BX01659


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... F... C... a, par une requête enregistrée sous le n° 1700192, demandé au tribunal administratif de la Polynésie française de condamner la Polynésie française à lui verser la somme de 5 769 342 F CFP qu'il estime lui être due en rémunération de ses fonctions de conseiller du haut conseil de la Polynésie française pour la période allant du 29 août 2013 au 25 avril 2014, assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 mai 2014, et, par une requête enregistrée sous le n° 1700265, demand

é au même tribunal de condamner la Polynésie française, à titre principal, à exécuter...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... F... C... a, par une requête enregistrée sous le n° 1700192, demandé au tribunal administratif de la Polynésie française de condamner la Polynésie française à lui verser la somme de 5 769 342 F CFP qu'il estime lui être due en rémunération de ses fonctions de conseiller du haut conseil de la Polynésie française pour la période allant du 29 août 2013 au 25 avril 2014, assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 mai 2014, et, par une requête enregistrée sous le n° 1700265, demandé au même tribunal de condamner la Polynésie française, à titre principal, à exécuter l'article 1er de l'arrêté n° 457 PR du 21 juillet 2014, et à titre subsidiaire, à lui verser une indemnité d'un montant de 5 769 342 F CFP.

Par un jugement n° 1700192, 1700265 du 9 janvier 2018, le tribunal administratif de la Polynésie française a donné acte du désistement de M. C... dans l'instance n° 1700192 et rejeté les conclusions de sa requête n° 1700265.

Par une ordonnance du 12 avril 2018, le président de la cour administrative d'appel de Paris a transmis au président de la section du contentieux du Conseil d'État le dossier de la requête de M. C... tendant à l'annulation de ce jugement et à la condamnation la Polynésie française à lui verser une somme totale, au plus égale à 5 769 342 F CFP, assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 novembre 2015, ces intérêts étant capitalisés à compter du 24 novembre 2016 pour produire eux-mêmes intérêts.

Par une ordonnance du 26 avril 2018 le président de la section du contentieux du Conseil d'État a attribué le jugement de la requête à la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 9 avril 2018, 9 juillet 2018 et 25 avril 2019, M. C..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Polynésie française du 9 janvier 2018 ;

2°) de condamner la Polynésie française à lui verser une somme totale, au plus égale à 5 769 342 francs pacifique, majorée des intérêts au taux légal à compter du 24 novembre 2015, ces intérêts étant capitalisés à compter du 24 novembre 2016 pour produire eux-mêmes intérêts ;

3°) d'enjoindre à la Polynésie française de procéder au versement de la somme due dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de la Polynésie française le paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement, en rejetant à tort sa demande comme tardive et par suite irrecevable, est entaché d'irrégularité ;

- le jugement est également entaché d'irrégularité en ayant rejeté comme irrecevable sa demande indemnitaire au motif erroné qu'elle était dirigée contre une décision implicite du 15 juillet 2017 purement confirmative d'une décision précédente alors que sa demande initiale notifiée le 20 octobre 2016 était fondée sur l'exécution de son contrat, donc sur une cause juridique distincte de sa seconde demande notifiée le 15 mai 2017 fondée sur la faute commise à ne pas avoir exécuté l'arrêté du 21 juillet 2014, portant indemnisation du service fait pour la période allant du 26 avril au 31 décembre 2014 ;

- sa créance procède de l'arrêté du président de la Polynésie française du 21 juillet 2014 qui lui alloue pour la période allant du 26 avril au 31 décembre 2014 une indemnité mensuelle due au titre du service fait correspondant au chevron 1, groupe 2 de la grille des emplois fonctionnels, cet arrêté qui n'a pas été retiré dans le délai de quatre mois suivant son édiction, ayant créé des droits à son profit ;

- le refus d'exécuter cet arrêté est constitutif d'une faute de nature à engager la responsabilité de la Polynésie française ;

- l'indication par le cabinet de la vice-présidence selon laquelle le traitement de sa demande avait reçu un avis favorable, ce qui l'a induit en erreur et l'a conduit à ne pas former un recours indemnitaire avant le 1er janvier 2017, est également constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la Polynésie française ;

- le préjudice représentatif des sommes qui lui sont dues, eu égard à la période de service fait, à la rémunération afférente à l'indice 710 et à la valeur de l'indice 100, s'élève à la somme de 5 769 342 francs pacifique ;

- ladite somme doit être majorée des intérêts moratoires à compter du 24 novembre 2015.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 novembre 2018, la Polynésie française, représentée par la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce qu'il soit mis à la charge de M. C... le paiement de la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision implicite du 20 décembre 2016 étant devenue définitive par l'effet du désistement de M. C... de sa première requête dirigée contre cette décision, les décisions implicites intervenues sur ses nouvelles demandes du 15 mai 2017 sont purement confirmatives de la précédente alors que les différentes demandes avaient le même objet, étaient libellées en des termes identiques et visaient à la fois le contrat du 26 février 2014 et l'arrêté du 21 juillet 2014, la faute invoquée ne se distinguant pas de l'inexécution du contrat ou de l'arrêté, de sorte que le tribunal a retenu à bon droit que la demande qui lui était présentée était irrecevable ;

- l'arrêté du 21 juillet 2014 porte sur la période allant du 26 avril au 31 décembre 2014 alors que le rappel des sommes qui est réclamé par M. C... porte sur la période allant du 21 août 2013 au 17 avril 2014 ;

- il n'est pas contesté que M. C... a d'ores et déjà perçu l'indemnité mensuelle en sa qualité de conseiller au haut conseil de la Polynésie française pour la période allant du 26 avril au 31 décembre 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B... A...,

- et les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public.

Une note en délibéré présentée pour M. C... a été enregistrée le 8 janvier 2021.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a été recruté en qualité de conseiller au haut conseil de la Polynésie française par un arrêté du président de la Polynésie française du 21 août 2013, sa rémunération ayant été fixée par un contrat conclu le 26 février 2014, en vertu de l'article 38 d'une délibération de l'assemblée de la Polynésie française du 11 juillet 2013. Cette délibération ayant été abrogée par une nouvelle délibération de l'assemblée de la Polynésie française du 14 mars 2014, avant d'être annulée par un jugement du tribunal administratif de la Polynésie française du 22 avril 2014, M. C... a de nouveau été recruté dans les mêmes fonctions par un arrêté du président de la Polynésie française du 17 avril 2014. Puis, par un arrêté du 21 juillet 2014, pris en application de l'article 8 de la nouvelle délibération du 14 mars 2014, le président de la Polynésie française a alloué à M. C... une " indemnité mensuelle due au titre de la règle du service fait d'un montant correspondant au chevron 1, groupe 2 de la grille des emplois fonctionnels " pour la période allant " du 26 avril au 31 décembre 2014 ".

2. Après le rejet implicite de sa demande préalable reçue par l'administration le 20 octobre 2016, M. C... a saisi le tribunal administratif de la Polynésie française d'une demande, enregistrée sous le n° 1700192, tendant à la condamnation de la Polynésie français à lui verser une somme de 5 769 342 F CFP, représentative de la rémunération qu'il estimait lui être due pour la période allant du 29 août 2013 au 25 avril 2014. Après le rejet implicite de deux nouvelles demandes préalables reçues par l'administration le 15 mai 2017, il a également saisi le même tribunal d'une demande, enregistrée sous le n° 1700265, tendant à la condamnation de la Polynésie française à lui verser la même somme, représentative de la rémunération qu'il estime lui être due en exécution de l'arrêté du 21 juillet 2014 pour la période allant du 26 avril au 31 décembre 2014. Par un jugement du 9 janvier 2018, le tribunal administratif de la Polynésie française a, après avoir pris acte du désistement de M. C... de sa demande enregistrée sous le n° 1700192, rejeté la demande de M. C... enregistrée sous le n° 1700265. M. C... doit être regardé comme relevant appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté cette seconde demande.

Sur la régularité du jugement :

3. Il résulte de l'instruction que l'une des deux demandes indemnitaires préalables dont M. C... a saisi la Polynésie française le 15 mai 2017 tendait au paiement d'une indemnité représentative de la rémunération qu'il estimait lui être due en exécution de l'article 1er de l'arrêté du 21 juillet 2014, lequel portait sur la période allant du 26 avril au 31 décembre 2014 et non au paiement d'une indemnité représentative de la rémunération qu'il estimait lui être due pour la période antérieure allant du 21 août 2013 au 17 avril 2014, en dépit de l'indication portée en objet de cette demande préalable et du rappel du défaut de rémunération au cours de la période allant de sa première nomination jusqu'à la seconde. Ainsi le rejet implicite de cette demande du 15 mai 2017 ne peut être regardée comme purement confirmatif du rejet des autres demandes présentées par M. C..., lesquelles portaient sur la rémunération qu'il estimait lui être due pour la période antérieure. Dès lors, la circonstance que le rejet implicite de la demande dont M. C... avait saisi la Polynésie française le 20 octobre 2016 fût devenu définitif ne rendait pas irrecevable la demande de M. C... enregistrée le 17 juillet 2017 au greffe du tribunal sous le n° 1700265 tendant au paiement d'une indemnité représentative de la rémunération qui, selon lui, aurait dû lui être versée pour la période allant du 26 avril au 31 décembre 2014 en exécution de l'article 1er de l'arrêté du 21 juillet 2014. Par suite, M. C... est fondé à soutenir que le jugement par lequel le tribunal a rejeté pour irrecevabilité cette demande, est entaché dans cette mesure d'irrégularité. Il y a donc lieu d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a statué sur cette demande.

4. Il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Polynésie française et enregistrée sous le n° 1700265.

Sur le bien-fondé de la demande :

5. Si M. C... soutient qu'il n'a pas perçu de rémunération au cours de la période allant de sa nomination initiale en qualité de conseiller du haut conseil de la Polynésie française jusqu'à sa seconde nomination par arrêté du 17 avril 2014, il ne conteste pas avoir perçu une indemnité mensuelle en cette qualité pour la période allant du 26 avril au 31 décembre 2014 inclus, ainsi que l'affirme sans être contredite la Polynésie française. Par ailleurs, il ne peut utilement se prévaloir du contrat signé le 26 février 2014 qui ne porte, en tout état de cause, que sur sa première période d'emploi. Dès lors, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la Polynésie français aurait commis une faute au motif qu'elle n'aurait pas procédé à la rémunération due en exécution de l'arrêté du 21 juillet 2014. Faute pour le requérant d'apporter des éléments permettant de considérer qu'il n'aurait pas perçu de rémunération pour la période allant du 26 avril au 31 décembre 2014 inclus, il ne saurait pas davantage rechercher la responsabilité de la Polynésie française sur le fondement d'une promesse non tenue. Par suite, les conclusions de M. C... tendant à la condamnation de la Polynésie française à lui verser une indemnité d'un montant de 5 769 342 francs pacifique doivent être rejetées.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Polynésie française, qui n'est pas partie perdante à l'instance, la somme que demande M. C... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, en application des mêmes dispositions, de faire droit à la demande présentée au même titre par la Polynésie française.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Polynésie française est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. C... enregistrée sous le n° 1700265.

Article 2 : La demande, enregistrée sous le n° 1700265, présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Polynésie française ainsi que le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

Article 3 : Les conclusions présentées par la Polynésie française en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... F... C... et à la Polynésie française.

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, président,

M. B... A..., président-assesseur,

Mme Charlotte Isoard, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2021.

Le rapporteur,

Didier A...

Le président,

Marianne HardyLe greffier,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX01659


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18BX01659
Date de la décision : 04/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Rémunération - Indemnités et avantages divers.

Outre-mer - Droit applicable - Statuts - Polynésie française.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : GUILLOUX

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-02-04;18bx01659 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award