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18/12/2020 | FRANCE | N°18BX03518

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 18 décembre 2020, 18BX03518


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le groupement TT Architecture/CIEA/Beterem a demandé au tribunal administratif de La Réunion, d'une part, de résilier le marché de maîtrise d'oeuvre conclu entre la commune de Saint-Paul et le groupement Leriche Architecture-Intégrale Ingénierie, à l'issue d'une procédure de concours restreint, pour la réhabilitation et la restructuration de l'école primaire de Bellemène, d'autre part, d'annuler la délibération du 26 novembre 2015 par laquelle le conseil municipal de Saint-Paul a approuvé l'attributi

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le groupement TT Architecture/CIEA/Beterem a demandé au tribunal administratif de La Réunion, d'une part, de résilier le marché de maîtrise d'oeuvre conclu entre la commune de Saint-Paul et le groupement Leriche Architecture-Intégrale Ingénierie, à l'issue d'une procédure de concours restreint, pour la réhabilitation et la restructuration de l'école primaire de Bellemène, d'autre part, d'annuler la délibération du 26 novembre 2015 par laquelle le conseil municipal de Saint-Paul a approuvé l'attribution du marché précité au groupement Leriche et autres pour un montant de 583 947 euros TTC et la décision de rejet de son offre du 7 décembre 2015 et, enfin, de condamner la commune de Saint-Paul à lui verser la somme de 128 491 euros en réparation du préjudice subi du fait de la perte du bénéfice escompté.

Par un jugement n° 1600479 du 14 juin 2018, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 22 septembre 2018 et le 4 décembre 2020, le Groupement TT Architecture-CIEA- Beterem, représenté par la selarl Dugoujon et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de résilier le marché de maîtrise d'oeuvre conclu entre la commune de Saint-Paul et le groupement Leriche Architecture-Intégrale Ingénierie, à l'issue d'une procédure de concours restreint, pour la réhabilitation et la restructuration de l'école primaire de Bellemène ;

3°) d'annuler la délibération du 26 novembre 2015 par laquelle le conseil municipal de Saint-Paul a approuvé l'attribution du marché précité au groupement Leriche et autres pour un montant de 583 947 euros TTC et la décision de rejet de son offre du 7 décembre 2015 ;

4°) de condamner la commune de Saint-Paul à lui verser la somme de 128 491 euros en réparation du préjudice subi du fait de la perte du bénéfice escompté ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Paul la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa demande de première instance est recevable, ainsi que sa requête d'appel ;

- la délibération du conseil municipal du 26 novembre 2015 est entachée d'un vice de procédure, car elle a été approuvée en méconnaissance du droit à l'information des conseillers municipaux protégé par l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales. Les conseillers municipaux n'ont pas disposé d'une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération et l'avis du jury du 8 juillet 2015 ne leur a pas été communiqué. Le rapport du maire contient un critère de sélection inexistant car non prévu par le règlement de la consultation. En outre, le rapport d'analyse annexé à la délibération est taisant sur le nombre de voix du jury ;

- le choix du pouvoir adjudicateur de ne pas suivre le classement du jury, qui l'avait classé en 1ère position, devait être motivé ;

- la personne ayant rédigé le rapport est un subordonné d'un des membres du jury, qui a participé à la réunion de négociation et était présent à l'ouverture des plis et à l'enregistrement de leur contenu. Son rapport a influencé les conseillers municipaux ;

- le pouvoir adjudicateur a rajouté une étape dans la procédure de passation du marché en invitant la commission aménagement, environnement et développement économique à émettre un avis le 10 novembre 2015, qui a eu une influence sur la délibération du 26 novembre 2015 ;

- le marché attribué au groupement Leriche Architecture méconnaît le principe d'égalité de traitement des candidats et le principe de transparence applicables dans les procédures de passation des marchés publics, car le critère prix n'était pas indiqué dans les documents de consultation ;

- le choix du pouvoir adjudicateur a méconnu l'article 70 du code des marchés publics et l'article 4.4 du règlement de concours relatif à la désignation des candidats, car il est fondé sur le seul critère relatif au prix des prestations du maître d'oeuvre, qui au stade de la phase d'attribution finale, a pris une place prépondérante ;

- le pouvoir adjudicateur n'a prévu aucune méthode de notation, de pondération, s'octroyant un pouvoir de choix qui confine à l'arbitraire ;

- ce choix est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- son offre ayant été irrégulièrement écartée, il est fondé à demander la somme de 128 491 euros au titre de son préjudice matériel lié à son manque à gagner ;

Par un mémoire enregistré le 22 février 2019, la commune de Saint-Paul, représentée par la SCP Charrel et associés, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête du Groupement TT Architecture-CIEA-Beterem ;

2°) de mettre à sa charge la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance du groupement tendant à l'annulation et à la résiliation du marché est irrecevable car il n'a pas produit l'acte d'engagement du marché dont il demande l'annulation et n'a pas justifié être dans l'impossibilité de le produire ;

- ses conclusions indemnitaires sont irrecevables car le contentieux n'a pas été lié ;

- aucun moyen n'est fondé.

Vu l'ordonnance du 18 novembre 2020 reportant la clôture de l'instruction au 7 décembre 2020.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... A...,

- et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un avis d'appel public à la concurrence publié le 6 décembre 2013, rectifié le 7 décembre 2013, la commune de Saint-Paul (La Réunion) a lancé une procédure de concours restreint de maîtrise d'oeuvre pour la réhabilitation et la restructuration de l'école primaire de Bellemène, pour un montant prévisionnel de travaux de 5,2 millions d'euros HT. Par un arrêté du maire du 24 novembre 2014, les trois groupements TT Architecture/CIEA/Beterem, Leriche Architecture-Intégrale Ingénierie et Olivier Brabant-Intégrale Ingénierie ont été admis à concourir, conformément à l'avis rendu le 6 novembre 2014 par le jury du concours. Par délibération du 8 juillet 2015, le jury a classé en première position le projet architectural du groupement TT Architecture, en deuxième position le projet du groupement Leriche et en troisième position le projet du groupement Olivier Brabant. Par arrêté du 7 août 2015, le maire a déclaré les deux groupements TT Architecture et Leriche lauréats du concours et a décidé d'engager avec l'un et l'autre des négociations en vue de l'attribution du marché de maîtrise d'oeuvre. A l'issue d'une unique réunion de négociation, les lauréats ont été invités à remettre leur proposition finale avant le 25 septembre 2015. Au terme de la procédure, par une délibération du 26 novembre 2015, le conseil municipal de Saint-Paul a décidé d'attribuer le marché au groupement Leriche pour un montant de 583 947 euros TTC. Par un courrier du 7 décembre 2015, le groupement TT Architecture a été informé du rejet de son offre et de l'attribution du marché au groupement Leriche. Le marché a été signé le 9 février 2016 et notifié le 11 février 2016. Estimant que son éviction du marché était irrégulière, le groupement TT Architecture a saisi le tribunal administratif de La Réunion d'une action en contestation du marché en vue d'en obtenir son annulation ou sa résiliation et d'une demande indemnitaire dont le contentieux a été lié en cours d'instance. Le groupement TT Architecture relève appel du jugement du 14 juin 2018 qui rejette sa demande.

Sur la contestation de la validité du marché :

2. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. Cette action devant le juge du contrat est également ouverte aux membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné ainsi qu'au représentant de l'Etat dans le département dans l'exercice du contrôle de légalité. Si le représentant de l'Etat dans le département et les membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l'appui du recours ainsi défini, les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office. Un concurrent évincé ne peut ainsi invoquer, outre les vices d'ordre public dont serait entaché le contrat, que les manquements aux règles applicables à la passation de ce contrat qui sont en rapport direct avec son éviction.

3. Saisi par un tiers dans les conditions définies ci-dessus, de conclusions contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses, il appartient au juge du contrat, après avoir vérifié que l'auteur du recours autre que le représentant de l'Etat dans le département ou qu'un membre de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné se prévaut d'un intérêt susceptible d'être lésé de façon suffisamment directe et certaine et que les irrégularités qu'il critique sont de celles qu'il peut utilement invoquer, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier l'importance et les conséquences. Ainsi, il lui revient, après avoir pris en considération la nature de ces vices, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, soit d'inviter les parties à prendre des mesures de régularisation dans un délai qu'il fixe, sauf à résilier ou résoudre le contrat. En présence d'irrégularités qui ne peuvent être couvertes par une mesure de régularisation et qui ne permettent pas la poursuite de l'exécution du contrat, il lui revient de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, soit la résiliation du contrat, soit, si le contrat a un contenu illicite ou s'il se trouve affecté d'un vice du consentement ou de tout autre vice d'une particulière gravité que le juge doit ainsi relever d'office, l'annulation totale ou partielle de celui-ci. Il peut enfin, s'il en est saisi, faire droit, y compris lorsqu'il invite les parties à prendre des mesures de régularisation, à des conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice découlant de l'atteinte à des droits lésés.

4. En premier lieu, aux termes de l'article 70 du code des marchés publics dans sa version alors applicable : " I. - Un avis d'appel public à la concurrence est publié dans les conditions prévues à l'article 40 (...). Les candidats admis à concourir sont invités à remettre leurs prestations et une enveloppe séparée contenant leur offre de prix pour la réalisation du marché (...) V. - Les prestations des candidats sont ensuite transmises au jury qui les évalue, en vérifie la conformité au règlement du concours et en propose un classement fondé sur les critères indiqués dans l'avis d'appel public à concurrence. Le jury dresse un procès-verbal de l'examen des prestations, dans lequel il consigne ses observations et tout point nécessitant des éclaircissements, et formule un avis motivé. (...) / VI. - Le jury peut ensuite inviter les candidats à répondre aux questions qu'il a consignées dans ce procès-verbal afin de clarifier tel ou tel aspect d'un projet. Un procès-verbal complet du dialogue entre les membres du jury et les candidats est établi. / VII. - Après réception de l'avis et des procès-verbaux du jury, et après examen de l'enveloppe contenant le prix, le ou les lauréats du concours sont choisis par le pouvoir adjudicateur. Des primes sont allouées aux candidats conformément aux propositions du jury (...). VIII. Le ou les lauréats sont invités à négocier et le marché qui fait suite au concours est attribué. Pour les collectivités territoriales (...), c'est l'assemblée délibérante qui attribue le marché ".

5. Aux termes de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales : " (...) Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal. / Si la délibération concerne un contrat de service public, le projet de contrat ou de marché accompagné de l'ensemble des pièces peut, à sa demande, être consulté à la mairie par tout conseiller municipal dans les conditions fixées par le règlement intérieur. (...) ". Aux termes de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération. ".

6. Il résulte de ces dispositions que, dans les communes de 3 500 habitants et plus, la convocation aux réunions du conseil municipal doit être accompagnée d'une note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour. Le défaut d'envoi de cette note ou son insuffisance entache d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le maire n'ait fait parvenir aux membres du conseil municipal, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit des mesures envisagées et de mesurer les implications de leurs décisions. Elle n'impose pas de joindre à la convocation adressée aux intéressés, à qui il est au demeurant loisible de solliciter des précisions ou explications conformément à l'article L. 2121-13 du même code, une justification détaillée du bien-fondé des propositions qui leur sont soumises.

7. Il résulte de l'instruction, notamment de la convocation adressée aux conseillers municipaux en vue de la réunion du conseil municipal au cours de laquelle la délibération du 26 novembre 2015 a été approuvée, qu'étaient joints à celle-ci un ordre du jour et un projet de la délibération en litige. Il ressort de l'extrait de la délibération que les conseillers municipaux avaient été informés par le projet de délibération précité du déroulement de la procédure, de l'analyse des offres par le jury, notamment que le jury du concours avait classé en première position le projet architectural du groupement TT Architecture. Par ailleurs, il mentionnait qu'après la tenue des négociations, et conformément au rapport d'analyse des offres, il était proposé d'attribuer le marché litigieux au groupement Leriche considéré comme ayant présenté l'offre " économiquement et architecturalement la plus avantageuse " au regard de la " bonne réponse architecturale et fonctionnelle " au programme du maître d'ouvrage, du niveau de qualité du projet, des performances environnementales et énergétiques, de la meilleure offre financière d'honoraires de maître d'oeuvre avec acceptation des exigences fortes du maître d'ouvrage en matière de coût de l'opération. Il ressort de ce même projet de délibération que l'avis du jury y était mentionné, ainsi que le critère relatif au prix, ce qui permettait aux conseillers municipaux qui le souhaitaient de demander toutes précisions utiles. Dans ces conditions, ce projet de délibération valait note de synthèse et, par suite, l'information donnée aux membres du conseil municipal a été suffisante au regard du L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales pour leur permettre d'exercer leurs attributions et a satisfait aux exigences de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales.

8. En deuxième lieu, il ne résulte ni des dispositions précitées du code des marchés publics ni du règlement de concours applicable au marché de prestation intellectuelle en litige que le pouvoir adjudicateur, qui n'est pas lié par l'avis du jury, doive motiver sa décision d'attribution d'un marché lorsqu'il décide de s'écarter du classement des lauréats auquel a procédé le jury. Le groupement TT Architecture ne peut donc utilement soutenir que la délibération du 26 novembre 2015 est insuffisamment motivée.

9. En troisième lieu, s'il appartient au pouvoir adjudicateur de recueillir tous les éléments qui lui paraissent utiles avant d'arrêter une décision sur le choix du maître d'oeuvre de la construction projetée, il ne peut faire procéder par un tiers à un nouvel examen comparé des offres qui ait la même nature et le même objet que celui que l'article 70 du code des marchés publics a entendu, pour assurer l'impartialité et la transparence de la procédure, réserver au jury. Si dans le cadre de la procédure de passation du marché en litige, le pouvoir adjudicateur a demandé au chargé de l'opération, pour lequel il n'est pas établi qu'il aurait subi des pressions, de rédiger un rapport d'analyse des offres après les négociations et à la commission " aménagement, environnement, développement économique " d'émettre un avis, comme le prévoit l'article L.2121-22 du code général des collectivités territoriales, les avis rendus dans le cadre de ces consultations internes à la commune de Saint-Paul, n'entachent pas d'irrégularité la procédure de passation du marché.

10. En quatrième lieu, l'article 4 du règlement de concours relatif à l'organisation du concours prévoit que : " 4. 2 Critères d'évaluation des projets : (...) le jury analyse les prestations remises en fonction, outre l'aspect règlementaire, des critères suivants, classés par ordre de priorité décroissant : 1. Réponse au programme et qualité de fonctionnement (...) 2. Qualité architecturale (...) 3. Economie globale du projet. Sur la base de ces critères, le jury formule un avis motivé et propose un classement des concurrents (...). L'enveloppe financière travaux de l'opération s'élève à 5. 200. 000 euros HT, y compris les provisions pour adaptation au site (...) ainsi que les équipements mentionnés au PTD (...). 4.4 Désignation du lauréat et négociation. Disposant du ou des deux procès-verbaux du jury et après avoir pris connaissance de l'enveloppe comportant la proposition d'honoraires des concurrents, le maître d'ouvrage, au vu de l'avis du jury, désigne le lauréat du concours (...) ".

11. Il résulte des dispositions précitées de l'article 70 du code des marchés publics et du règlement de consultation que le conseil municipal a pu dans sa délibération du 26 novembre 2015 prendre en considération la qualité des prestations au vu de l'avis émis par le jury dans sa délibération du 8 juillet 2015, ainsi que le montant des honoraires des lauréats du concours, qui n'avaient pas à être pondérés, et attribuer le marché public en litige au groupement Leriche Architecte. Par suite, le groupement TT Architecture n'est pas fondé à soutenir que le conseil municipal ne pouvait pas légalement mettre en oeuvre un critère tiré du prix des prestations pour approuver le choix du groupement Leriche, dès lors que ce critère était prévu par le règlement du concours. Dans ces conditions, les moyens de la mise en oeuvre d'un critère irrégulier tiré du prix des prestations et de la rupture d'égalité de traitement entre les candidats ne peuvent qu'être écartés.

12. En dernier lieu, il résulte de l'instruction, notamment de la délibération du conseil municipal du 26 novembre 2015, que le choix d'attribuer le marché de maître d'oeuvre au groupement Leriche est fondé sur une pluralité de motifs, notamment la bonne réponse architecturale de ce groupement au programme du maître d'ouvrage et la performance environnementale et énergétique, par le fait que son projet qualitatif permet de garantir des modalités et des coûts de maintenance les plus optimisés et enfin, par le fait que l'offre financière des honoraires de maîtrise d'oeuvre de ce groupement apparaît comme la meilleure, dès lors qu'elle intégrait des exigences fortes de la collectivité en matière de coût de l'opération. Le groupement TT Architecture ne conteste aucun des deux motifs de rejet de son offre énoncés par la commune dans son courrier du 7 décembre 2015. Le premier est tiré de ce que le recours à une géométrie moins allongée des salles de classe, solution qui avait été proposée par le groupement dans le cadre de la négociation, pour remédier à la problématique soulevée par le jury, relative à la dimension des classes, remettait potentiellement en question l'aspect technique et esthétique du projet. D'autre part, il résulte de l'instruction que le jury s'interrogeait sur le coût de la voix de bouclage et son coût de maintenance. Or, le second motif de rejet de l'offre du groupement appelant tient au fait que le montant de la réalisation de la voirie périphérique d'accès piéton, véhicules et bus, ainsi que le montant de la répartition des travaux entre infrastructures et superstructures n'était pas suffisamment précisé et justifié après la négociation. Dans ces conditions, la seule circonstance que son projet avait été classé en première position par le jury du concours, avant la négociation, ne suffit pas à établir que le choix du groupement Leriche, qui ne repose pas seulement sur le critère relatif au prix de ses prestations, serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

13. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir soulevées par la commune de Saint-Paul, que le marché litigieux n'est entaché d'aucun vice susceptible d'en affecter la validité. Par suite, le groupement TT Architecture n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté ses conclusions tendant à la résiliation de ce marché et à la condamnation de la commune de Saint-Paul à réparer le préjudice financier résultant de son éviction.

Sur les frais d'instance :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Saint-Paul, qui n'a pas la qualité de partie perdante, la somme que demande le groupement TT Architecture au titre des frais d'instance. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à sa charge la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Saint-Paul sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du groupement TT Architecture est rejetée.

Article 2 : Le groupement TT Architecture est condamné à verser la somme de 1 500 euros à la commune de Saint-Paul sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au groupement TT Achitecture, au groupement Leriche et à la commune de Saint-Paul.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

Mme C... D..., présidente-assesseure,

Mme B... A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 décembre 2020.

Le président,

Didier ARTUS

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX03518


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX03518
Date de la décision : 18/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Formation des contrats et marchés - Mode de passation des contrats - Marchés d'études.

Marchés et contrats administratifs - Formation des contrats et marchés - Approbation.


Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: Mme Déborah DE PAZ
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : BENOITON

Origine de la décision
Date de l'import : 08/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-12-18;18bx03518 ?
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