La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/12/2020 | FRANCE | N°18BX03266

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 14 décembre 2020, 18BX03266


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société de courtage d'assurances CAC 971 Assurances a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de condamner le syndicat intercommunal d'alimentation en eau et assainissement de la Guadeloupe à lui verser la somme de 85 000 euros en réparation du préjudice résultant de la résiliation pour motif d'intérêt général du marché dont elle était titulaire.

Par un jugement n° 1700447 du 21 juin 2018, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant

la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 août 2018, la société CAC 971 Assurances, rep...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société de courtage d'assurances CAC 971 Assurances a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de condamner le syndicat intercommunal d'alimentation en eau et assainissement de la Guadeloupe à lui verser la somme de 85 000 euros en réparation du préjudice résultant de la résiliation pour motif d'intérêt général du marché dont elle était titulaire.

Par un jugement n° 1700447 du 21 juin 2018, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 août 2018, la société CAC 971 Assurances, représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 21 juin 2018 ;

2°) de condamner le syndicat intercommunal d'alimentation en eau et assainissement de la Guadeloupe, devenu O'DILES, à lui verser la somme de 85 000 euros en réparation du préjudice résultant de la résiliation pour motif d'intérêt général du marché dont elle était titulaire ;

3°) de mettre à la charge du syndicat intercommunal d'alimentation en eau et assainissement de la Guadeloupe, devenu O'DILES, la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a droit à l'indemnisation intégrale de son préjudice et ne conteste pas le motif d'intérêt général de résiliation ;

- elle a mobilisé d'importants moyens pour la réalisation de sa mission pour le compte du syndicat et notamment deux salariées dont une a dû être licenciée ;

- les allégations contenues dans le courrier du syndicat notifiant la résiliation du contrat sont vexatoires et infondées et son préjudice résultant de la brutalité de la résiliation doit être indemnisé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 octobre 2018, le syndicat intercommunal d'alimentation en eau et assainissement de la Guadeloupe, devenu O'DILES, représenté par Me E..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société CAC 971 Assurances la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que la société ne démontre pas le lien entre la rupture conventionnelle du contrat de Mme A... et la résiliation du contrat dès lors qu'elle a été recrutée en 2012 antérieurement au contrat ; le montant des prestations annuelles était de 14 490 euros, pour les années 2014 et 2015, le préjudice invoqué de 85 000 euros est donc disproportionné ; il avait d'ailleurs proposé 5 % du montant du marché comme indemnité au cocontractant.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la commande publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... D...,

- et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un marché conclu le 29 octobre 2013, le syndicat intercommunal d'alimentation en eau et assainissement de la Guadeloupe, devenu O'DILES, a confié à la société de courtage d'assurances CAC 971 Assurances une mission de prestations de services d'assurances conseils pour une durée de trois ans à compter du 1er janvier 2014. Toutefois, par un courrier du 28 janvier 2016, le syndicat intercommunal d'alimentation en eau et assainissement de la Guadeloupe a informé la société CAC 971 Assurances de sa décision de résilier le marché. Cette société a demandé au syndicat, par courrier du 14 décembre 2016, le versement d'une indemnité de 85 000 euros, ce que le syndicat a refusé par décision du 30 janvier 2017. La société CAC 971 Assurances a saisi le tribunal administratif de la Guadeloupe d'une demande tendant à la condamnation du syndicat à lui verser la somme de 85 000 euros en indemnisation de son préjudice à la suite de la résiliation du marché. Elle relève appel du jugement du 21 juin 2018 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

2. Il appartient à l'autorité administrative, en vertu des règles générales applicables aux contrats administratifs et sous réserve des droits d'indemnisation du cocontractant, de mettre fin avant son terme à un contrat dès lors qu'il existe des motifs d'intérêt général. Le titulaire d'un marché résilié a droit à la réparation de l'intégralité du préjudice subi du fait de la résiliation, et il lui appartient d'établir la réalité de ce préjudice ainsi que son lien de causalité avec la résiliation.

3. Il résulte de l'instruction que, par courrier du 28 janvier 2016, O'DILES a résilié de façon anticipée le contrat conclu avec la société CAC 971 Assurances au motif de la réorganisation des services et de la situation financière difficile du syndicat. Si le même courrier ajoute que certaines des missions confiées à la société requérante n'ont pas été réalisées, il résulte cependant clairement des termes de la lettre et de son objet que le motif de résiliation est un motif d'intérêt général.

4. D'une part, pour établir la réalité de son préjudice qu'elle estime à 85 000 euros, la société fait valoir que la baisse de son chiffre d'affaire en 2016 est lié au manque à gagner résultant de la résiliation en cause. Toutefois, et alors que le montant de la prestation annuelle s'est élevé pour les années 2015 et 2016 à la somme de 14 492 euros, elle se borne à produire une attestation d'un expert-comptable qui expose que le résultat net comptable de l'année 2016 est négatif de 9 552,64 euros sans aucune indication ou analyse sur l'origine de ce déficit. Dans ces conditions, la société requérante ne rapporte pas la preuve du manque à gagner qu'elle estime avoir subi du fait de la résiliation du contrat.

5. D'autre part, la société requérante soutient qu'en conséquence de la résiliation du marché, elle a été dans l'obligation de réduire sa masse salariale et de licencier une salariée dont l'indemnité de licenciement a été fixée à 2 730, 09 euros. Toutefois, il résulte de l'instruction, ainsi que le fait valoir O'DILES en défense, que la société ne démontre pas que cette salariée avait été recrutée pour remplir les missions fixées par le contrat dès lors que son recrutement était antérieur à la signature du marché. En outre, le licenciement de cette employée a été réalisé sous la forme d'une rupture conventionnelle et non d'un licenciement économique, ne permettant pas ainsi de relier cette rupture du contrat de travail avec la résiliation en cause. Dans ces conditions, la société requérante ne rapporte pas la preuve du lien de causalité entre le licenciement qu'elle invoque et la résiliation du contrat par O'DILES.

6. Enfin, et ainsi qu'il a été dit au point 2, le motif de résiliation étant l'intérêt général, la circonstance que O'DILES ait formulé des reproches à l'encontre de la société requérante, qui ne sont pas à l'origine de la résiliation en cause, n'a entrainé aucun préjudice pour la société CAC 971 Assurances.

7. Il résulte de tout ce qui précède, que la société CAC 971 Assurances n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande tendant à la condamnation de O'DILES à l'indemniser du préjudice résultant de la résiliation du marché " mission d'assureur conseil " au motif de l'intérêt général.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de O'DILES, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la société CAC 971 Assurances la somme que O'DILES demande sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société CAC 971 Assurances est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du syndicat intercommunal d'alimentation en eau et assainissement de la Guadeloupe, devenu O'DILES, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société CAC 971 Assurances et au syndicat intercommunal d'alimentation en eau et assainissement de la Guadeloupe, devenu O'DILES.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

Mme B... D..., présidente-assesseure,

Mme Déborah de Paz, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 décembre 2020.

La rapporteure,

Fabienne D... Le président,

Didier ARTUS Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX03266


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX03266
Date de la décision : 14/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04-02-03 Marchés et contrats administratifs. Fin des contrats. Résiliation. Droit à indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: Mme Fabienne ZUCCARELLO
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : TAVERNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 25/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-12-14;18bx03266 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award