La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/12/2020 | FRANCE | N°18BX04178

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 10 décembre 2020, 18BX04178


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 22 juin 2016 par laquelle le directeur de la commission de recours des militaires a décidé qu'il était réputé s'être désisté de son recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision du 15 avril 2015 lui réclamant un trop-versé de solde de 5 156,11 euros, de condamner l'État à lui restituer l'ensemble des sommes prélevées et de condamner l'État à lui verser la somme de 1 000 euros à titre de

dommages et intérêts.

Par une ordonnance n° 1603634 du 11 octobre 2018, le présid...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 22 juin 2016 par laquelle le directeur de la commission de recours des militaires a décidé qu'il était réputé s'être désisté de son recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision du 15 avril 2015 lui réclamant un trop-versé de solde de 5 156,11 euros, de condamner l'État à lui restituer l'ensemble des sommes prélevées et de condamner l'État à lui verser la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par une ordonnance n° 1603634 du 11 octobre 2018, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 décembre 2018 et 31 octobre 2019, M. E..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Bordeaux du 11 octobre 2018 ;

2°) d'annuler la décision du 22 juin 2016 par laquelle le directeur de la commission de recours des militaires a décidé qu'il était réputé s'être désisté de son recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision du 15 avril 2015 lui réclamant un trop-versé de solde de 5 156,11 euros ;

3°) de condamner l'État à lui restituer l'ensemble des sommes qui lui ont été prélevées ;

4°) de condamner l'État à lui verser la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'ordonnance attaquée est insuffisamment motivée ;

- ses conclusions indemnitaires n'étaient pas irrecevables dès lors qu'une décision implicite de rejet de sa demande préalable indemnitaire était intervenue en cours d'instance ;

- la décision du 22 juin 2016 par laquelle le président de la commission de recours des militaires a estimé qu'il était réputé avoir renoncé à son recours ne se substituant pas à la décision initiale, les moyens soulevés à l'encontre de la décision initiale du 15 avril 2015 ne sont pas inopérants ;

- il n'a pas reçu notification de la décision du 15 avril 2015, de sorte qu'il ne peut lui être reproché de ne pas l'avoir transmise à l'appui du recours administratif à caractère obligatoire devant la commission de recours des militaires, la preuve de la notification de la décision initiale incombant à l'administration ;

- les créances d'un montant respectif de 600 euros pour un trop-perçu sur la solde du mois d'août 2012, de 487 euros pour un trop-perçu sur la solde du mois de décembre 2011, de 3 490 euros pour un trop-perçu sur la solde du mois de novembre 2012 et de 487 euros pour un trop-perçu sur la solde de janvier 2012 sont prescrites en application de l'article 37 de la loi n° 2009-321 du 28 décembre 2011 ;

- l'existence d'un trop-perçu d'un montant de 600 euros sur la solde du mois de février 2014 n'est pas établie dès lors que le bulletin de solde de ce mois ne mentionne aucun versement au titre d'une indemnité d'avance de départ en opération extérieure alors qu'en revanche, il s'est acquitté d'un montant global de 1 500 euros, par retenues sur ses soldes des mois de juin, juillet et août 2014 ;

- le prélèvement à raison de 50 euros mensuels qui a été mis en oeuvre à compter du mois de juillet 2016 lui a causé un préjudice financier ainsi que des troubles dans ses conditions d'existence.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 septembre 2019, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- les conclusions indemnitaires de M. E... sont irrecevables ;

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B... A...,

- et les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., adjudant au 13ème régiment de dragons parachutistes de Souge (Gironde) a été informé par lettre du 15 avril 2015 qu'il devait rembourser une somme de 5 156,11 euros correspondant à un trop-versé de solde et que cette somme serait mise en recouvrement, sauf versement par chèque bancaire de l'ensemble de cette somme, par retenues sur sa solde à raison de cinq mensualités d'un montant de 876,56 euros et d'une sixième mensualité de 773,31 euros. M. E... a déposé un recours préalable, au caractère obligatoire, contre cette décision auprès de la commission des recours des militaires par lettre du 2 mai 2016. Par courrier du 23 mai suivant, le président de la commission lui a demandé de produire la décision contestée du 15 avril 2015. L'intéressé ne l'ayant pas produite dans un délai de deux semaines, le président de la commission des recours des militaires a, par la décision litigieuse du 22 juin 2016, rejeté le recours de M. E... au motif que ce dernier était réputé y avoir renoncé. M. E... relève appel de l'ordonnance du 11 octobre 2018 par laquelle le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à la condamnation de l'État à, d'une part, lui restituer l'ensemble des sommes qui lui ont été prélevées, d'autre part, lui verser une indemnité d'un montant de 1 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de la faute commise par l'administration à lui avoir versé des sommes indues.

2. Aux termes de l'article R. 4125-1 du code de la défense : " I. Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. La saisine de la commission est seule de nature à conserver le délai de recours contentieux jusqu'à l'intervention de la décision prévue à l'article R. 4125-10 ". Aux termes de l'article R. 4125-2 du même code : " À compter de la notification (...) de l'acte contesté, (...), le militaire dispose d'un délai de deux mois pour saisir la commission par lettre recommandée avec avis de réception adressée au secrétariat permanent placé sous l'autorité du président de la commission. Ce délai est interrompu dans le cas où les parties engagent une médiation dans les conditions prévues aux articles L. 213-5 et L. 213-6 du code de justice administrative. La lettre de saisine de la commission est accompagnée d'une copie de l'acte. (...). Si la copie de l'acte ou, dans le cas d'une décision implicite de rejet, la copie de la demande ne sont pas jointes à l'envoi, le secrétariat permanent de la commission met l'intéressé en demeure de la produire dans un délai de deux semaines ; en l'absence de production dans ce délai, l'intéressé est réputé avoir renoncé à son recours. Le président de la commission en dresse le constat et en informe l'intéressé (...) ".

3. Le président de la commission des recours des militaires tient des dispositions précitées le pouvoir de rejeter les recours des militaires qui, ayant omis de produire une copie de l'acte contesté et s'étant abstenus, malgré une mise en demeure en ce sens, de régulariser leur recours dans un délai de deux semaines, sont dès lors réputés avoir renoncé à celui-ci.

4. En premier lieu, il ressort des mentions de l'ordonnance attaquée qu'après avoir retenu que M. E... ne contestait pas le motif de la décision du président de la commission des recours des militaires du 22 juin 2016 tenant au défaut de production de la décision initiale contestée, mais ne présentait, à l'appui de ses conclusions tendant à son annulation, que des moyens dirigés contre la décision initiale du 15 avril 2015, le premier juge en a déduit, au point 4 de son ordonnance, que ces moyens étaient inopérants à l'encontre de la décision du 22 juin 2016 rejetant le recours préalable. Dès lors et contrairement à ce que soutient M. E..., le premier juge a suffisamment motivé son ordonnance sur ce point, alors au surplus que le défaut de réponse à un moyen inopérant n'aurait pu entacher d'irrégularité l'ordonnance attaquée.

5. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que M. E... a été convoqué le 22 avril 2015 pour que lui soit remise la lettre litigieuse du 15 avril 2015. L'intéressé a signé le 27 avril 2015 une déclaration concernant les modalités de régularisation par laquelle il conteste la réalité et le montant du trop-versé et aux termes de laquelle la lettre du 15 avril 2015 lui a été notifiée. Ainsi, et contrairement à ce qu'il soutient, M. E... n'a pu être empêché de produire cette lettre, qu'il a d'ailleurs produite lui-même devant le premier juge, dans le délai qui lui a été imparti par la mise en demeure qui lui a été adressée le 23 mai 2016 par le président de la commission de recours des militaires saisie de son recours administratif du 2 mai 2016. Par suite, le président de la commission des recours des militaires n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées en rejetant, par sa décision du 22 juin 2016, le recours de M. E... au motif qu'il était réputé y avoir renoncé.

6. Il résulte de ce qui précède que M. E... doit être regardé comme n'ayant pas formé, préalablement à l'exercice de son recours contentieux à l'encontre de la lettre initiale du 15 avril 2015, le recours préalable, au caractère obligatoire à peine d'irrecevabilité, prévu par les dispositions précitées du code de la défense. Par suite, ses conclusions tendant à la contestation de la créance mise à sa charge par la décision du 15 avril 2015 sont irrecevables.

7. En troisième et dernier lieu, il résulte des dispositions précitées du code de la défense qu'à l'exception des matières qu'elles ont entendu écarter expressément de la procédure du recours préalable obligatoire, la saisine de la commission des recours des militaires s'impose à peine d'irrecevabilité d'un recours contentieux, formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle que ce recours tende à l'annulation d'une décision ou à l'octroi d'une indemnité à la suite d'une décision préalable ayant lié le contentieux.

8. Il résulte de l'instruction que M. E... a demandé, par lettre reçue par l'administration le 15 septembre 2017, à être indemnisé des préjudices qu'il estimait avoir subis et qu'il évaluait à la somme de 1 000 euros. Si une décision implicite de cette demande, intervenue le 15 novembre 2017, a lié le contentieux, il ne résulte pas de l'instruction que M. E... aurait saisi la commission des recours des militaires d'un recours contre cette décision implicite. Par suite, sa demande indemnitaire présentée devant le tribunal était, ainsi que l'a relevé la ministre, irrecevable.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Ses conclusions présentées en application de l'articles L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E... et à la ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 12 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. B... A..., président,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller,

Mme Charlotte Isoard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 décembre 2020.

Le président-rapporteur,

Didier A...

Le premier assesseur,

Nathalie Gay-SabourdyLe greffier,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX04178


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18BX04178
Date de la décision : 10/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

08-01-01 Armées et défense. Personnels militaires et civils de la défense. Questions communes à l'ensemble des personnels militaires.


Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : BOUCHARD MARGAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-12-10;18bx04178 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award