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08/12/2020 | FRANCE | N°18BX03120

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 08 décembre 2020, 18BX03120


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... H... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler le permis de construire accordé le 26 janvier 2016 par le maire de Villeneuve-lès-Bouloc à la SCI Philgunes, pour la rénovation et l'extension d'un abri de jardin et la construction d'une piscine, sur les parcelles cadastrées section C n° 486 et 488, situées 333 route de Masseribaut.

Par un jugement n° 1605177 du 15 juin 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.

Procédure devant la cou

r :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 13 et 21 août 2018 et le 9 septe...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... H... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler le permis de construire accordé le 26 janvier 2016 par le maire de Villeneuve-lès-Bouloc à la SCI Philgunes, pour la rénovation et l'extension d'un abri de jardin et la construction d'une piscine, sur les parcelles cadastrées section C n° 486 et 488, situées 333 route de Masseribaut.

Par un jugement n° 1605177 du 15 juin 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 13 et 21 août 2018 et le 9 septembre 2020, M. et Mme H..., représentés par Me I..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler le permis de construire accordé le 26 janvier 2016 sous le n° PC 03158715S0019 à la SCI Philgunes ;

3°) de mettre la somme de 3 800 euros à la charge de la commune de Villeneuve-les-Bouloc sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le tribunal a retenu à tort la tardiveté de leur requête ; l'affichage était insuffisant pour déclencher le délai de recours dès lors que le panneau d'affichage ne comporte ni la surface de plancher réellement autorisée, ni la hauteur de la construction ; le panneau ne fait pas mention de la hauteur de la construction exprimée en mètre par rapport au sol naturel soit 4,50 mètres ; le panneau était insuffisamment visible de la chaussée ; le projet affiché correspond à une modification d'un abri alors qu'il s'agit d'une construction après destruction ; contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges ils contestent la date d'affichage du permis et aucun élément ne permet d'établir que le panneau en litige a été installé le 26 janvier 2016 pour une période continue de deux mois ;

- ils justifient d'un intérêt à agir compte tenu des atteintes à leur cadre de vie et aux modifications dans les conditions d'occupation, d'utilisation et de jouissance de leur propriété qu'ils subissent eu égard à l'implantation de la construction s'appuyant sur leur mur de clôture, du sens de la pente de la toiture vers leur propriété, de la hauteur de la construction et des atteintes à leur propriété du fait de l'écoulement des eaux pluviales sur celle-ci ;

- le permis a été obtenu par fraude dès lors qu'il autorise la rénovation et l'extension d'un abri de jardin alors que l'abri préexistant a été entièrement démoli avant le dépôt de la demande pour permettre la construction d'un nouveau bâtiment ; s'agissant d'un permis de régularisation, il devait être tenu compte de ce que l'abri de jardin n'existait plus à la date du dépôt de la demande de permis ;

- le dossier de demande méconnait les dispositions des articles R. 431-5, R.431-6 du code de l'urbanisme dès lors qu'il évoque une surface de plancher de 30 m² relative à un abri existant alors que cet abri de jardin n'existe pas à la date du dépôt du dossier de demande de permis de construire ;

- le permis de construire a été obtenu par fraude dès lors que le dossier de demande ne correspond pas aux travaux déjà réalisés et que la notice paysagère prévoit la conservation d'un sapin qui a été supprimé ; cette notice ne respecte pas les dispositions de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme

- le dossier de demande de permis est irrégulier au regard des indications succinctes sans justification quant à l'insertion du projet dans l'environnement ;

- le permis de construire en litige méconnaît l'article N2 du plan local d'urbanisme dès lors qu'il autorise une construction nouvelle à usage d'annexe à l'habitat d'une surface supérieure à 30 m² qui ne s'intègre manifestement pas dans le site environnant ;

- le permis méconnaît l'article N11 du plan local d'urbanisme en ce qu'il autorise une construction qui porte atteinte au caractère et à l'intérêt des lieux avoisinants ; cette construction ne respecte pas l'architecture des lieux environnants et notamment le caractère de la maison de maître du pétitionnaire et de son parc attenant, le moulin et le pigeonnier du 19ème siècle, en covisibilité directe ; la notice prévoit des tuiles romanes neuves alors que l'article N11 impose des tuiles canal de récupération.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 novembre 2018, la commune de Villeneuve-les-Bouloc, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme H... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Elle soutient que :

- le jugement est régulier ;

- les requérants ne justifient pas d'un intérêt à agir suffisant ; la construction n'est pas visible de la propriété des requérants et ne porte pas la moindre atteinte à leur cadre de vie ;

- les moyens ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 mars 2019, la SCI Philgunes, représentée par Me K..., conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme H... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Elle soutient que :

- le jugement est régulier ;

- les requérants ne justifient pas d'un intérêt à agir suffisant ; la construction n'est pas visible de la propriété des requérants et ne porte pas la moindre atteinte à leur cadre de vie ;

- les moyens ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 9 septembre 2020 la clôture d'instruction a été reportée en dernier lieu, au 24 septembre 2020 à 12h00.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. G... E...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,

- et les observations de Me I..., représentant de M. et Mme H..., de Me F..., représentant la commune de Villeneuve-les-Bouloc, et de Me J..., représentant la SCI Philgunes.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 2 juillet 2015, le maire de Villeneuve les Bouloc a accordé à la SCI Philgunes un permis de construire en vue de l'extension et la rénovation d'un abri de jardin et la réalisation d'une piscine dans une propriété située 333 route de Masseribaut. Par arrêté du 11 août 2015, le maire a mis en demeure le gérant de la SCI d'interrompre les travaux qui n'étaient pas conformes à l'autorisation délivrée, un procès-verbal d'infraction dressé le 4 août 2015 ayant permis de constater la construction d'un bâtiment de structure métallique d'une surface de 62 m² implanté en limite séparative. La SCI Philgunes a alors déposé une nouvelle demande de permis de construire pour la rénovation et l'extension d'un abri existant en vue de régulariser les travaux réalisés. Par un arrêté du 26 janvier 2016, le maire de la commune a accordé à cette société un permis l'autorisant à rénover un abri existant, à construire un abri de jardin de 30 m² attenant au précédent et une piscine et son local technique. M. et Mme H... relèvent appel du jugement en date du 15 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande d'annulation de l'arrêté du 26 janvier 2016.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée (...) ". Aux termes de l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme : " Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite ou la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier. (...) ". Aux termes de l'article R. 600-2 du même code : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Aux termes de l'article A. 424-16 du même code : " Le panneau prévu à l'article A. 424-15 indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale du bénéficiaire, le nom de l'architecte auteur du projet architectural, la date de délivrance, le numéro et la date d'affichage en mairie du permis, la nature du projet et la superficie du terrain ainsi que l'adresse de la mairie ù le dossier peut être consulté. / Il indique également, en fonction de la nature du projet : / a) Si le projet prévoit des constructions, la surface de plancher autorisée ainsi que la hauteur de la ou des constructions, exprimée en mètres par rapport au sol naturel (...) ".

3. En imposant que figurent sur le panneau d'affichage du permis de construire diverses informations sur les caractéristiques de la construction projetée, les dispositions citées au point 2 ont pour objet de permettre aux tiers, à la seule lecture de ce panneau, d'apprécier l'importance et la consistance du projet, le délai de recours contentieux ne commençant à courir qu'à la date d'un affichage complet et régulier. Il s'ensuit que si les mentions prévues par l'article A. 424-16 doivent, en principe, obligatoirement figurer sur le panneau d'affichage, une erreur affectant l'une d'entre elles ne conduit à faire obstacle au déclenchement du délai de recours que dans le cas où cette erreur est de nature à empêcher les tiers d'apprécier l'importance et la consistance du projet. La circonstance qu'une telle erreur puisse affecter l'appréciation par les tiers de la légalité du permis est, en revanche, dépourvue d'incidence à cet égard, dans la mesure où l'objet de l'affichage n'est pas de permettre par lui-même d'apprécier la légalité de l'autorisation de construire.

4. Il ressort des pièces du dossier que le panneau d'affichage du permis de construire installé en bordure de la propriété, était visible depuis la voie publique et mentionnait, en application des dispositions précitées du point a) de l'article A. 424-16 du code de l'urbanisme, la surface de 30 m² de plancher nouvellement autorisée. Il ressort également des pièces du dossier, notamment de la photo de ce panneau envoyée le 29 janvier 2016 par courrier recommandé avec accusé de réception, des nombreuses attestations selon lesquelles ce panneau a été affiché de manière continue entre les mois de février et de mai 2016 et des écritures de M. et Mme H..., selon lesquelles ils ne se sont aperçus que tardivement que le panneau situé en bordure du terrain des pétitionnaires concernait non plus le permis de construire du 2 juillet 2015 mais celui du 26 janvier 2016, que l'affichage du permis a été continu entre le 26 janvier et 27 mars 2016.

5. Toutefois s'il n'est pas contesté que le panneau en litige indiquait l'identité du bénéficiaire du permis de construire, le numéro du permis, sa date de délivrance, la superficie du terrain et la nature des travaux projetés, soit " rénovation existant - abri de jardin - piscine ", il ressort des pièces du dossier, et notamment des photographies produites, que la mention de la hauteur du projet était illisible. Compte tenu de la nature des travaux ainsi mentionnés sur le panneau, l'absence d'indication de la hauteur au sol du projet empêchait les tiers d'apprécier l'importance et la consistance réelle de ce projet " d'abri de jardin " dont la hauteur prévue culminait à 4,2 mètres et qui portait également sur l'extension de l'abri existant et la modification du sens des pans de toiture. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, l'omission de la hauteur de la construction a entaché la régularité de l'affichage de l'autorisation qui n'a pu faire courir à l'égard des tiers le délai de recours contentieux. La demande de première instance de M. et Mme H... enregistrée le 21 novembre 2016 n'était donc pas tardive. Par suite, c'est à tort que le tribunal a rejeté comme irrecevable la demande dont il était saisi. Son jugement en date du 15 juin 2018 qui est irrégulier doit, dès lors, être annulé.

6. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme H... devant le tribunal administratif de Toulouse.

Sur la fin de non-recevoir :

7. L'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable, dispose que : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

8. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la construction en litige entrainera des écoulements additionnels des eaux de pluie sur la propriété des requérants dont la qualité de voisins immédiats du projet n'est pas contestée. De même, aucun élément ne permet d'estimer que le projet aurait pour conséquence de fragiliser le mur séparant les deux propriétés ou emporterait une augmentation importante de la quantité de feuilles tombant sur la propriété des requérant pendant la saison automnale. Toutefois, M. et Mme H... soutiennent également que la construction située en limite de leur propriété a été autorisée en rupture avec l'environnement bâti et naturel des lieux et notamment avec l'ancien moulin de Masseribaut qu'ils rénovent depuis plus de vingt ans, et en covisibilité avec le parc attenant audit moulin et leur pigeonnier du 19ème siècle. Ils justifient ainsi de ce que la construction autorisée est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de leur bien. La fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de M. et Mme H... doit donc être écartée.

Sur la légalité de l'arrêté du 26 janvier 2016 :

9. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-4 du code de l'urbanisme dans sa version applicable : " La demande de permis de construire comprend : a) Les informations mentionnées aux articles R. 431-5 à R. 431-12 ; b) Les pièces complémentaires mentionnées aux articles R. 431-13 à R. 431-33-1 ; c) Les informations prévues aux articles R. 431-34 et R. 431-34-1. / Pour l'application des articles R. 423-19 à R. 423-22, le dossier est réputé complet lorsqu'il comprend les informations mentionnées au a et au b ci-dessus. / Aucune autre information ou pièce ne peut être exigée par l'autorité compétente ". Aux termes de l'article R. 431-6 de ce code : " Lorsque le terrain d'assiette comporte des constructions, la demande précise leur destination, par référence aux différentes destinations et sous-destinations définies aux articles R. 151-27 et R. 151-28, à l'article R. 123-9, leur surface de plancher et indique si ces constructions sont destinées à être maintenues et si leur destination ou sous-destination est modifiée par le projet ". Aux termes de l'article R. 431-7 du même code : " Sont joints à la demande de permis de construire : a) Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l'intérieur de la commune ; b) Le projet architectural défini par l'article L. 431-2 et comprenant les pièces mentionnées aux articles R. 431-8 à R. 431-12. ". Aux termes de l'article R. 431-8 de ce code : " Le projet architectural comprend une notice précisant : 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement ".

10. L'autorité administrative saisie d'une demande de permis de construire peut relever les inexactitudes entachant les éléments du dossier de demande relatifs au terrain d'assiette du projet, notamment sa surface ou l'emplacement de ses limites séparatives, et, de façon plus générale, relatifs à l'environnement du projet de construction, pour apprécier si ce dernier respecte les règles d'urbanisme qui s'imposent à lui. Toutefois, l'autorisation d'urbanisme n'ayant d'autre objet que d'autoriser la construction conforme aux plans et indications fournis par le pétitionnaire et l'autorité administrative n'ayant, par suite, pas à vérifier l'exactitude des déclarations du demandeur relatives à la consistance de son projet à moins qu'elles ne soient contredites par les autres éléments du dossier joint à la demande tels que limitativement définis par les dispositions précitées, l'administration ne peut légalement refuser l'autorisation demandée en se fondant sur la consistance du projet au vu d'une pièce ne relevant pas de cette liste limitative sauf le cas d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de la délivrance du permis.

11. En l'espèce la demande de permis de construire déposée par les pétitionnaires indique que le projet consiste à rénover un abri existant de 30 m² et à construire un nouvel abri, attenant, d'une surface de 30 m², surface maximale autorisée par les dispositions applicables du règlement du plan local d'urbanisme, et à recouvrir la maçonnerie d'un bardage afin de créer une unité des deux locaux. Or il ressort des pièces du dossier et notamment des photographies produites par les requérants ainsi que du procès-verbal d'infraction du 6 août 2015, ainsi que des écritures de la commune, que les travaux dont la SCI Philgunes souhaite obtenir la régularisation ont consisté en la destruction de l'abri de jardin initial qui comportait une toiture à pente unique inclinée vers l'intérieur de la propriété et en l'édification d'une construction présentant une structure métallique, avec une toiture à double pente, d'une superficie de 62 m² et d'une hauteur maximale de 4,20 mètres, implantée en limite séparative. Les requérants sont ainsi fondés à soutenir que la demande de permis de construire de la SCI Philgunes procédait à une description volontairement erronée de la nature et de la consistance des travaux en vue d'obtenir un permis régularisant la construction réalisée. Ils sont donc fondés à soutenir que le permis critiqué a été obtenu par fraude sur la base d'une demande méconnaissant les dispositions précitées des articles R. 431-5, R. 431-6 et R. 431-8 du code de l'urbanisme.

12. En deuxième lieu, aux termes du préambule du règlement du plan local d'urbanisme applicable : " CARACTERE DE LA ZONE - La zone N est la zone naturelle de la commune de Villeneuve-les-Bouloc, à protéger en raison de la qualité de ses paysages et de son environnement. Quatre secteurs ont été distingués: (...) - le secteur Nb correspond à des sites incluant un bâti remarquable (château, maison de maître, bâti présentant un intérêt architectural marqué), accompagné ou non d'un parc de grand intérêt paysager (...) ". Aux termes de l'article N1 de ce règlement : " Sont interdites toutes les formes d'occupation et d'utilisation du sol non visées à l'article N2 (...) ". Aux termes de l'article N 2 de ce règlement : " OCCUPATIONS ET UTILISATIONS DU SOL SOUMISES À DES CONDITIONS PARTICULIÈRES : * dans tout secteur : (...) Les constructions nouvelles à usage d'annexes à l'habitat (abri de jardin, garages, piscines...) sous réserve qu'elles soient implantées à proximité de la maison d'habitation, et qu'elles n'excèdent pas, piscines exceptées, 30 m² de surface de plancher par unité foncière, et qu'elles s'intègrent parfaitement dans le site environnant (...) ".

13. Dès lors qu'il est constant que le terrain est situé dans la zone N de la commune, les requérant sont fondés à soutenir que le projet en litige, qui consiste en l'édification d'un bâtiment de plus de 30 m² de construction à usage d'annexe, méconnait les dispositions précitées de l'article N2 du règlement du plan local d'urbanisme.

14. En troisième lieu, aux termes de l'article N11 du règlement du plan local d'urbanisme : " ASPECT EXTERIEUR DES CONSTRUCTIONS - Il est rappelé : - que le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leur dimension ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrage à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales (article R. 111-21 du code de l'urbanisme) (...) / Toitures : secteur Nb : : Les toitures doivent être en ruiles canal de récupération exclusivement, à l'exception des toitures existantes en ruile plate ou mécanique, qui pourront être conservées si l'architecture le permet, ainsi que des vérandas (...) ".

15. Ainsi qu'il a été dit précédemment, le projet est implanté sur un terrain situé dans une zone reconnue par le plan local d'urbanisme pour la qualité de ses paysages et de son environnement en raison notamment de la présence de bâti remarquable, y inclus le moulin situé sur la propriété des requérants.

16. Le projet en litige consiste en la construction d'un bâtiment d'une surface de 60 m² et d'une hauteur de 4,20 mètres dont la couverture sera constituée de tuiles romanes de teinte rouge brun et le bâti sera bardé de bois situé à une dizaine de mètres de la maison principale des pétitionnaires et en covisibilité du seul pigeonnier situé sur le terrain des requérants. Compte tenu du gabarit limité de ce bâtiment, de son aspect extérieur et du fait que sa présence est en partie occultée par la végétation présente sur le terrain d'assiette et sur celui des requérants, il ne peut être regardé comme portant atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants.

Sur l'application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :

17. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".

18. Il résulte du point 11 du présent arrêt que le permis de construire en litige a été obtenu au moyen d'une fraude à la loi. Un permis de construire obtenu dans ces conditions n'est pas susceptible d'être régularisé en cours d'instance. Il n'y a donc pas lieu de mettre en oeuvre les dispositions précitées de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

19. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme H... sont fondés à demander l'annulation de l'arrêté du maire de Villeneuve-lès-Bouloc du 26 janvier 2016.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme H..., qui ne sont pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent la commune de Villeneuve-lès-Bouloc et la SCI Philgunes au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Villeneuve-lès-Bouloc une somme de 1 500 euros à verser à M. et Mme H... en application de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 15 juin 2018 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du maire de Villeneuve-lès-Bouloc du 26 janvier 2016 est annulé.

Article 3 : La commune de Villeneuve-lès-Bouloc versera à M. et Mme H... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Villeneuve-lès-Bouloc et de la SCI Philgunes tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. et Mme A... H..., à la SCI Philgunes et à la commune de Villeneuve-lès-Bouloc.

Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Toulouse.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme C... B..., présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. G... E..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 décembre 2020.

La présidente,

Evelyne B... La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

9

N° 18BX03120


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX03120
Date de la décision : 08/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Disparition de l'acte - Retrait - Retrait des actes créateurs de droits.

Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique - Réglementation des activités économiques - Activités soumises à réglementation - Réglementation des économies d'énergie.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Stéphane GUEGUEIN
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : CABINET GERANDO AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-12-08;18bx03120 ?
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