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20/10/2020 | FRANCE | N°18BX02767

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 20 octobre 2020, 18BX02767


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... G... a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner l'Etat à lui verser la somme de 60 000 euros, en réparation des préjudices causés par la suspension de l'autorisation de pêche prise à son encontre le 9 octobre 2012 par le préfet de la région Nouvelle-Aquitaine, somme assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 août 2016, capitalisé au terme du délai d'un an et à chaque échéance annuelle depuis cette date.

Par un jugement n° 1602504 du 9 mai 2018, le tribunal ad

ministratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... G... a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner l'Etat à lui verser la somme de 60 000 euros, en réparation des préjudices causés par la suspension de l'autorisation de pêche prise à son encontre le 9 octobre 2012 par le préfet de la région Nouvelle-Aquitaine, somme assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 août 2016, capitalisé au terme du délai d'un an et à chaque échéance annuelle depuis cette date.

Par un jugement n° 1602504 du 9 mai 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 juillet 2018, et un mémoire non communiqué enregistré le 8 septembre 2020, M. G... demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 9 mai 2018 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 60 000 euros en réparation des préjudices causés par la suspension de l'autorisation de pêche prise à son encontre le 9 octobre 2012 par le préfet de la région Nouvelle-Aquitaine, somme assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 août 2016, capitalisés au terme du délai d'un an et à chaque échéance annuelle depuis cette date

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en prenant, le 9 octobre 2012, une sanction administrative illégale, l'Etat a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

- l'illégalité est liée à la nullité de la procédure pénale qui a conduit le tribunal correctionnel de Dax à le relaxer par un jugement devenu définitif du 11 septembre 2014 ;

- le préjudice et le lien de causalité sont incontestables dès lors que la suspension de l'autorisation de pêche l'a obligé à renoncer à pêcher 5 631 kg de thon rouge dès le 31 août 2012.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 février 2020, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement CE n° 1224/2009 du Conseil du 20 novembre 2009 instituant un régime communautaire de contrôle afin d'assurer le respect des règles de la politique commune de la pêche ;

- le décret n° 90-94 du 25 janvier 1990 pris pour l'application du titre II et du titre IV du livre IX du code rural et de la pêche maritime ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D... E...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant M. G....

Une note en délibéré présentée par M. G... a été enregistrée le 30 septembre 2020.

Considérant ce qui suit :

1. M. G..., titulaire d'une autorisation européenne de pêche du thon rouge à la canne en Atlantique Est pour le navire Ahaldena dont il est l'armateur, au titre de la période du 15 juin au 15 octobre 2012, a fait l'objet d'un contrôle de la brigade de surveillance du littoral de Lège-Cap-Ferret le 19 août 2012. Un procès-verbal a été dressé à son encontre à raison d'infractions multiples à la règlementation de la pêche maritime. Par une décision en date du 9 octobre 2012 et notifiée le 11 octobre suivant, prise en application des dispositions de l'article L. 946-1 du code rural et de la pêche maritime, le préfet de la région Aquitaine a prononcé, à titre de sanction administrative, la suspension de l'autorisation de pêche dont bénéficiait M. G.... Ce dernier relève appel du jugement du 9 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant au versement d'une somme de 60 000 euros, en réparation du manque à gagner causé par la suspension illégale de l'autorisation de pêche.

2. En principe, l'autorité de la chose jugée au pénal ne s'impose à l'administration comme au juge administratif qu'en ce qui concerne les constatations de fait que les juges répressifs ont retenues et qui sont le support nécessaire du dispositif d'un jugement devenu définitif, tandis que la même autorité ne saurait s'attacher aux motifs d'un jugement de relaxe tirés de ce que les faits reprochés ne sont pas établis ou de ce qu'un doute subsiste sur leur réalité. Il appartient, dans ce cas, à l'autorité administrative d'apprécier si les mêmes faits sont suffisamment établis et, dans l'affirmative, s'ils justifient l'application d'une sanction administrative. Il n'en va autrement que lorsque la légalité de la décision administrative est subordonnée à la condition que les faits qui servent de fondement à cette décision constituent une infraction pénale, l'autorité de la chose jugée s'étendant alors exceptionnellement à la qualification juridique donnée aux faits par le juge pénal.

3. Il résulte de l'instruction que la décision du 9 octobre 2012 par laquelle le préfet de la région Aquitaine a prononcé la suspension de l'autorisation de pêche dont bénéficiait M. G..., prise sur le fondement de l'article L 946-1 du code rural et de la pêche maritime, est uniquement fondée sur le motif que les faits constatés par le procès-verbal sont constitutifs d'une infraction pénale. Or, par un jugement devenu définitif du 11 septembre 2014, le tribunal correctionnel de la Rochelle a relaxé M. G... des 5 chefs d'infractions pour lesquels il était prévenu à raison du procès-verbal du 19 août 2012 dressé par un agent de brigade de surveillance du littoral de Lège-Cap-Ferret, en raison de la nullité de la perquisition effectuée et par voie de conséquence de la nullité dudit procès-verbal. Dès lors, la décision attaquée est dépourvue de base légale. Par suite, ainsi que l'a estimé le tribunal administratif, cette illégalité est de nature à engager la responsabilité de l'Etat et à ouvrir droit à indemnité.

4. Pour demander le versement d'une somme de 60 000 euros en réparation du préjudice commercial subi, M. G... se prévaut d'un avis du délégué à la mer et au littoral des Pyrénées-Atlantiques et des Landes indiquant que cette mesure de suspension l'a obligé à renoncer à pêcher 6 tonnes de thon rouge vendu au prix moyen de 10 euros le kg. Toutefois, alors que la période de suspension ne courrait que sur cinq jours, du 11 au 15 octobre 2012, l'intéressé ne fournit aucun élément de nature à démontrer qu'il aurait pratiqué la pêche au thon rouge sur une aussi courte période. Au surplus, alors que M. G... disposait encore d'un droit de pêche de 5 631 Kg à la date de la suspension, il n'avait pêché sur la période antérieure courant du 15 juin au 11 octobre 2012 que 6 059 Kg et il n'établit pas qu'il aurait pu pêcher une quantité aussi importante de thon rouge sur une période de seulement cinq jours. Enfin, dès lors que M. G... n'établit pas, par les pièces qu'il produit, que son quota de pêche a été mis à disposition d'autres navires dès le 31 août 2012 à raison d'une sanction verbale d'interdiction de pêche du thon rouge qui lui aurait été adressée ce même jour, la circonstance qu'il aurait arrêté de pêcher le thon rouge dès cette date n'est pas de nature à lui ouvrir droit au versement d'une indemnité.

5. Dans ces conditions, les conclusions indemnitaires présentées par M. G... ne peuvent qu'être rejetées.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. G... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... G... et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Copie en sera adressée au préfet de la région Nouvelle-Aquitaine.

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme C... B..., présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. D... E... premier conseiller,

Lu en audience publique, le 20 octobre 2020.

Le rapporteur,

Nicolas E... La présidente,

Evelyne B... Le greffier,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX02767


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX02767
Date de la décision : 20/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

59-02 Répression. Domaine de la répression administrative


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Nicolas NORMAND
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : ESCUDE-QUILLET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-10-20;18bx02767 ?
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