La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/10/2020 | FRANCE | N°20BX00713

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 13 octobre 2020, 20BX00713


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... H... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 15 avril 2019 par lequel le préfet du Lot a refusé de lui délivrer un titre de séjour,

lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1902594 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Toulouse

a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 février 2020, M

me H..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... H... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 15 avril 2019 par lequel le préfet du Lot a refusé de lui délivrer un titre de séjour,

lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1902594 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Toulouse

a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 février 2020, Mme H..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Lot du 15 avril 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Lot de lui délivrer un titre de séjour portant

la mention " vie privée et familiale " dans le délai de trente jours à compter de la notification

de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire

de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de quinze jours, au besoin sous astreinte

de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au profit de son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

- le préfet n'a pas procédé à un examen complet et sérieux de sa situation ;

- le préfet a commis une erreur de droit en rejetant sa demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 343-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile aux motifs qu'elle était entrée récemment en France et qu'elle ne justifiait pas d'une ancienneté de travail telle qu'elle constituerait un motif exceptionnel ;

- dès lors qu'elle justifie de son intégration et a été victime de violences conjugales, c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'elle ne pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 et du 7° de l'article L. 313-11 ;

- elle est entrée régulièrement en France le 29 décembre 2016, a obtenu une autorisation de séjour à titre humanitaire le 13 février 2017, s'est mariée le 20 avril 2017, a été victime de violences conjugales, a consenti des efforts d'intégration et dispose de liens stables et anciens en France où réside sa soeur, de sorte que le refus de titre de séjour est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle est entrée en France pour rejoindre sa soeur alors enceinte, dont l'époux était en mission militaire à l'étranger, elle l'assiste pour la prise en charge et l'éducation de ses neveux, elle dispose d'un logement, suit des formations en langue française et effectue du bénévolat à la Croix Rouge, de sorte que le refus de titre de séjour porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 juin 2020, le préfet du Lot conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par Mme H... ne sont pas fondés.

Mme H... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 janvier 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme H..., de nationalité marocaine, est entrée en France le 29 décembre 2016, s'y est maintenue après l'expiration de son visa, puis a bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour à titre humanitaire valable du 13 février au 12 août 2017. Après avoir épousé à Angoulême, le 22 avril 2017, un compatriote titulaire d'un titre de séjour, elle a engagé une procédure de divorce le 23 octobre suivant à la suite de violences conjugales. Par un premier arrêté du 7 mars 2018, le préfet de la Charente a refusé de régulariser sa situation et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Le 28 mars 2019, Mme H... a sollicité auprès des services de la préfecture du Lot son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 15 avril 2019, le préfet du Lot a rejeté cette demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours. Mme H... relève appel du jugement

du 3 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / (...). "

3. Contrairement à ce que soutient Mme H..., le préfet du Lot ne s'est pas borné à rejeter sa demande aux motifs qu'elle était entrée récemment en France et ne justifiait pas d'une ancienneté de travail telle qu'elle constituerait un motif exceptionnel, mais a tenu compte de l'ensemble des éléments de fait invoqués, et notamment de son entrée en France afin d'apporter une aide à sa soeur de nationalité française alors enceinte, dont l'époux se trouvait en mission militaire à l'étranger, des violences conjugales ayant conduit à la rupture de son mariage, de la promesse d'embauche dont elle disposait pour garder un enfant à raison de 80 heures par mois, et de son apprentissage de la langue française. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation personnelle de l'intéressée ne peut être accueilli. Eu égard à ces éléments de fait, le préfet, qui n'a pas commis d'erreur de droit, n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant d'accorder à Mme H... la régularisation exceptionnelle prévue à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. La décision n'est pas fondée sur les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont Mme H... n'établit ni même n'allègue s'être prévalue dans sa demande. Par suite, la méconnaissance de ces dispositions ne peut être utilement invoquée.

5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

6. A la date de la décision, Mme H..., entrée en France à l'âge de 36 ans, en instance de divorce, y résidait depuis moins de deux ans et demi et ne peut être regardée comme y justifiant d'une vie privée et familiale inscrite dans la durée du seul fait de ses relations avec sa soeur et de sa contribution à l'éducation de ses trois neveux. Les circonstances qu'elle dispose d'un logement et d'une promesse d'embauche pour la garde d'un enfant, apprend avec assiduité la langue française et a effectué du bénévolat à la Croix Rouge, à une période dont il n'est au demeurant pas démontré qu'elle serait antérieure au refus de titre de séjour qui lui est opposé, ne suffisent pas à faire regarder ce refus comme contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni comme entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

7. Il résulte de ce qui précède que Mme H... n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, une illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

8. Pour les motifs exposés au point 6, Mme H... n'est pas fondée à invoquer la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme H... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme H... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... H... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Lot.

Délibéré après l'audience du 15 septembre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme I... G..., présidente,

Mme A... D..., présidente-assesseure,

Mme C... F..., conseillère.

Lu en audience publique, le 13 octobre 2020.

La rapporteure,

Anne D...

La présidente,

Catherine G...La greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 20BX00713


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX00713
Date de la décision : 13/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme anne MEYER
Rapporteur public ?: Mme BEUVE-DUPUY
Avocat(s) : CISSE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-10-13;20bx00713 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award