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12/10/2020 | FRANCE | N°19BX04914

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 12 octobre 2020, 19BX04914


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... E... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 1er octobre 2019 par lequel le préfet de la Charente-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1902456 du 4 décembre 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enreg

istrée le 24 décembre 2019, Mme E..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... E... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 1er octobre 2019 par lequel le préfet de la Charente-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1902456 du 4 décembre 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 décembre 2019, Mme E..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 4 décembre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 1er octobre 2019 par lequel le préfet de la Charente-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Charente-Maritime de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois ou à défaut de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois et de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

- l'arrêté dans son ensemble est entaché d'incompétence, en l'absence de délégation de signature régulière ;

- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale dès lors que la décision portant refus de séjour est illégale ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Mme E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 mars 2020.

Vu

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... F..., a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., ressortissante arménienne née le 11 juillet 1993, est entrée en France le 12 septembre 2017. Sa demande de reconnaissance du statut de réfugié a été rejetée par une décision du 29 mars 2019 de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides. Le préfet de la Charente-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. La requérante demande l'annulation de cet arrêté du 1er octobre 2019.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'arrêté dans son ensemble :

2. L'arrêté litigieux a été signé, pour le préfet de la Charente-Maritime, par M. D..., secrétaire général de la préfecture. Celui-ci avait, d'une part, reçu une délégation du préfet par un arrêté n° 17-1791 du 31 août 2017 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 1er septembre 2017, à l'effet, notamment, " de signer tous arrêtés (...) à l'exception : des actes pour lesquels une délégation a été confiée à un chef de service de l'Etat dans le département / des arrêtés de conflit / de la réquisition du comptable. ". Les décisions relatives à l'administration de l'Etat dans le département pour lesquelles le préfet délègue sa signature comprennent les décisions préfectorales en matière de refus de titre de séjour des étrangers, sauf s'il en est disposé autrement par l'arrêté portant délégation, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. M. D... avait, d'autre part, reçu une délégation du préfet par un arrêté du 27 juin 2019 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, à l'effet, notamment, de signer les décisions portant obligation de quitter le territoire français, et fixation du pays de renvoi. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué émanerait d'une autorité incompétente doit être écarté.

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, Mme E... se borne à reprendre en appel, dans des termes identiques, sans critique utile et sans apporter d'élément nouveau par rapport à ses productions de première instance, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la décision contestée et du défaut d'examen particulier de sa situation auxquels le tribunal a suffisamment et pertinemment répondu. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

4. En deuxième lieu, et ainsi que l'a décidé le juge de première instance, la requérante se prévaut de la présence en France de son concubin qui est titulaire d'un récépissé de demande de titre de séjour et de leur fille Naira, née le 17 décembre 2018 sur le territoire français. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée est entrée récemment en France et qu'elle a vécu plus de vingt ans en Arménie. En outre, si la requérante se prévaut de la circonstance que son concubin, également de nationalité arménienne, père de leur enfant, résiderait régulièrement sur le territoire français, il ressort des pièces du dossier qu'il n'est admis à séjourner en France que dans l'attente de sa convocation devant la Cour nationale du droit d'asile, sa demande d'asile ayant déjà été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides. Au regard de ces circonstances, notamment de la durée et des conditions de séjour en France de l'intéressée, le préfet de la Charente-Maritime n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris la décision attaquée et n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

5. En troisième lieu, la requérante se prévaut de ses liens familiaux et de son intégration en France. Toutefois, ces circonstances ne peuvent être regardées comme constituant un motif humanitaire ou exceptionnel qui serait de nature à justifier son admission au séjour au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de la Charente-Maritime n'a ainsi entaché sa décision d'aucune erreur manifeste d'appréciation en refusant de délivrer à Mme E... un titre de séjour sur ce fondement.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le moyen tiré de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté.

7. En second lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 5 concernant la décision portant refus de titre de séjour que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent, pour les mêmes motifs, être écartés.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

8. En premier lieu, Mme E... se borne à reprendre en appel, dans des termes identiques, sans critique utile et sans apporter d'élément nouveau par rapport à ses productions de première instance, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision fixant le pays de destination auquel le tribunal a suffisamment et pertinemment répondu. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le premier juge.

9. En second lieu, la requérante soutient que son retour en Arménie l'exposerait personnellement à des risques. Toutefois, elle n'apporte pas d'éléments de nature à établir la réalité d'un risque de traitements inhumains ou dégradants. Au demeurant, sa demande d'asile a été rejetée, en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile, au motif que les faits allégués n'étaient pas établis. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 1er octobre 2019, par lequel le préfet de la Charente-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, avec obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination.

Sur les autres conclusions :

11. Les conclusions à fin d'injonction sous astreinte doivent être rejetées par voie de conséquence du rejet des conclusions à fin d'annulation. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme E... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... E... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera délivrée au préfet de la Charente-Maritime.

Délibéré après l'audience du 14 septembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

Mme C... F..., présidente-assesseure,

Mme Déborah de Paz, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 12 octobre 2020.

La rapporteure,

Fabienne F... Le président,

Didier ARTUS Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX04914


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX04914
Date de la décision : 12/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: Mme Fabienne ZUCCARELLO
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : SCP BREILLAT DIEUMEGARD MASSON

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-10-12;19bx04914 ?
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