Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 13 juin 2019 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1901592 du 24 septembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des pièces, enregistrées le 8 octobre 2019 et le 18 juin 2020, M. D..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 24 septembre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté susmentionné du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 13 juin 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour durant cet examen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen de sa situation dès lors que la formulation de l'arrêté est générale et ne mentionne pas son état de santé ;
- les demandeurs d'asile bénéficient du droit de se maintenir en France en application de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la Cour nationale du droit d'asile n'a pas notifié le jugement dans une langue qu'il comprend en méconnaissance des articles R. 733-32 et R. 213-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a méconnu son droit d'être entendu au sens de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu des risques qu'il encourt pour sa vie et sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine et de son état de santé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., de nationalité azerbaïdjanaise, est entré en France le 20 octobre 2015. Sa demande d'asile a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 14 avril 2017, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile par une décision du 14 mars 2019. Par arrêté du 13 juin 2019, le préfet des Pyrénées-Atlantiques l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. D... relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 13 juin 2019.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent ".
3. La décision contestée est fondée sur le rejet définitif de la demande d'asile de l'intéressé par décision de la Cour nationale du droit d'asile du 14 mars 2019 et indique que, " conformément aux dispositions des articles L. 743-1 et L. 7 43-2 du même code, il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire et peut donc se voir refuser le renouvellement ou retirer son attestation de demande d'asile ". Il ressort toutefois des pièces du dossier que par une décision n° 430681 du 12 juin 2020, le Conseil d'Etat a annulé la décision de la Cour nationale du droit d'asile du 14 mars 2019 pour erreur de droit et a renvoyé l'affaire devant cette cour afin qu'elle se prononce à nouveau sur la demande d'asile de M. D.... Par suite, M. D... ne pouvait être éloigné du territoire tant que la Cour ne s'est pas prononcée à nouveau sur sa demande d'asile. Le requérant est ainsi fondé à soutenir que la décision attaquée a été prise en méconnaissance de l'article L. 743-1 du code précité.
4. Il résulte de ce qui précède que M. D... est fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 13 juin 2019 portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et par voie de conséquence, l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. L'annulation prononcée par le présent arrêt qui concerne l'obligation de quitter le territoire français implique, conformément aux dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le préfet des Pyrénées-Atlantiques réexamine la situation de M. D... et le mette en possession d'une autorisation provisoire de séjour. Dès lors, il y a lieu d'enjoindre au préfet de procéder à ce réexamen et de prendre, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, une nouvelle décision dans un délai qu'il y a lieu de fixer à deux mois suivant la notification ou la lecture de la décision de la cour nationale du droit d'asile à intervenir, selon les cas visés aux dispositions précitées de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à M. D..., au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1901592 du 24 septembre 2019 du tribunal administratif de Pau est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 13 juin 2019 portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi pris à l'encontre de M. D... est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet des Pyrénées-Atlantiques de réexaminer la situation de M. D... et de prendre une nouvelle décision dans un délai de deux mois à compter de la notification ou de la lecture de la décision de la Cour nationale du droit d'asile à intervenir, selon les cas visés aux dispositions de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Article 4 : L'Etat versera à M. D... la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., au ministre de l'intérieur et au préfet des Pyrénées-Atlantiques.
Délibéré après l'audience du 1er septembre 2020 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
Mme Caroline B..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 septembre 2020.
Le rapporteur,
Caroline B...
Le président,
Elisabeth Jayat
Le greffier,
Virginie Marty
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX03986