Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme H... B... F... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler l'arrêté du 15 janvier 2018 par lequel le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite.
Par un jugement n° 1801158 du 3 octobre 2019 le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 19 mai 2020, Mme B... F..., représentée par Me G..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guyane du 3 octobre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Guyane du 15 janvier 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Guyane, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêté à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, d'examiner de nouveau sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation lui permettant d'exercer son activité non salariée ;
4°) de condamner l'Etat à verser la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision de refus de séjour a été signée par une autorité incompétente ;
- elle est entachée d'une erreur de fait et d'un défaut de motivation ;
- elle est entachée d'une erreur de droit dans la mesure où le préfet s'est fondé sur l'article L. 311-7 qui a été abrogé ;
- le préfet s'est fondé sur le critère de scolarisation de son enfant et a ainsi méconnu l'étendue de sa compétente et commis une erreur de droit dès lors que l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne prévoit pas une telle condition ;
- la décision de refus de titre de séjour a été prise en méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnait l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- l'obligation de quitter le territoire français a été prise par une autorité incompétente ;
- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet s'est fondé sur le titre I de l'article L. 511-1 3° qui n'existe pas sous cette numération ;
- elle a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnait l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le délai de départ volontaire a été prise par une autorité incompétente ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnait l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant.
Mme B... F... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 mars 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention de New York relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme E... C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... F..., ressortissante colombienne née en 1995, est entrée en France en septembre 2012, selon ses déclarations, pour y solliciter l'asile. Sa demande a été définitivement rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 4 janvier 2016. Elle a alors présenté une demande d'admission au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Mme B... F... relève appel du jugement du 3 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Guyane du 15 janvier 2018 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays où elle pourrait être reconduite d'office.
2. L'arrêté attaqué du 15 janvier 2018 est signé par M. A... D..., chef du bureau de l'éloignement, du contentieux et de l'asile de la préfecture de la région Guyane. Par un arrêté 31 août 2017, le préfet de la Guyane a donné à M. D... une délégation pour signer " les arrêtés d'obligation de quitter le territoire avec et sans délai et refus de séjour ... ". Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté manque en fait et doit être écarté.
3. L'arrêté attaqué vise les textes dont il est fait application, mentionne les faits relatifs à la situation personnelle et administrative de Mme B... F... et indique avec précision les raisons pour lesquelles le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office. Ces indications, qui ont permis à Mme B... F... de comprendre et de contester les mesures prises à son encontre, étaient suffisantes alors même que l'arrêté ne précise pas que le père de sa fille aînée est de nationalité colombienne et qu'il bénéficie du statut de réfugié. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas pris en compte la situation du père de sa fille avant de prendre l'arrêté contesté. Par suite, les moyens tirés de la motivation insuffisante de cet arrêté et de l'erreur de fait dont il serait entaché doivent être écartés.
4. Il ressort de l'examen de l'arrêté contesté que pour refuser de délivrer un titre de séjour à Mme B... F... le préfet a considéré qu'elle ne remplissait pas les conditions posées par les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il a cité les dispositions en vigueur à la date de sa décision. Contrairement à ce que soutient la requérante, en indiquant dans son arrêté que Mme F... " a sollicité une régularisation de son séjour dans le cadre de l'article L. 313-11 (7°) du CESEDA sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 ne soit exigée ", le préfet ne peut être regardé comme s'étant fondé sur les dispositions abrogées de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, en précisant que Mme B... F... a " un enfant scolarisé de mois de 3 ans ", le préfet de la Guyane, qui s'est borné à constater la situation de la fille de la requérante et qui a examiné les autres éléments relatifs à la situation de l'intéressée, notamment la stabilité de sa présence en France et son intégration au sein de la société, ne peut être regardé comme ayant entendu fonder sa décision de refus de séjour sur un critère lié à la durée de scolarisation de l'enfant. Par suite, le moyen tiré des erreurs de droit dont serait entaché cet arrêté doit être écarté.
5. Si Mme B... F... réside en France depuis l'année 2012, elle n'a été autorisée à y résider qu'en raison des démarches qu'elle a accomplies en vue d'obtenir le statut de réfugiée et une carte de séjour au titre de sa vie privée et familiale. Elle ne justifie pas y avoir des liens d'une nature ou d'une intensité particulière, la scolarisation de sa fille née en 2013 et les documents médicaux qu'elle produit n'étant pas, à eux seuls, de nature à caractériser de tels liens. Si Mme B... F... fait valoir que le père de sa fille aînée est un ressortissant colombien titulaire d'un titre de séjour en qualité de réfugié, valable jusqu'en 2024, elle n'apporte toutefois aucun élément permettant d'établir l'existence de lien entre celui-ci et son enfant. Si les certificats médicaux produits établissent que sa fille aînée s'est vu diagnostiquer une insuffisance mitrale minime à légère, aucun de ces documents ne permet de considérer que l'état de santé de sa fille nécessiterait son maintien en France. Par ailleurs Mme B... F... vit en concubinage avec un ressortissant colombien, également en situation irrégulière, avec lequel elle a eu une fille née le 15 décembre 2018, soit postérieurement à l'arrêté contesté. Elle n'invoque aucun obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue en Colombie, pays dont tous les membres de la famille sont ressortissants et où elle a vécu la plus grande partie de sa vie. Dans ces conditions, ni le refus de titre de séjour ni la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peuvent être regardés comme portant au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme B... F... une atteinte disproportionnée eu égard aux motifs de ce refus et au but poursuivi par la mesure d'éloignement.
6. Ainsi qu'il a été dit précédemment, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le père de sa fille aînée, qui bénéficie d'un titre de séjour en qualité de réfugié, entretiendrait des liens avec son enfant et il ne ressort pas davantage des documents médicaux produits que l'état de santé de l'enfant nécessiterait son maintien en France. Par suite, ni le refus de titre de séjour ni la mesure d'éloignement ni encore la décision fixant le pays de destination ne sont de nature à méconnaitre l'intérêt supérieur de la fille aînée de Mme B... F... qui peut rejoindre la Colombie, pays dont elle a la nationalité, avec sa mère et sa soeur née postérieurement à l'arrêté contesté. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
7. Pour les motifs précédemment exposés, dès lors que Mme B... F... ne justifie pas de l'existence de lien d'une nature ou d'une intensité particulière en France et que rien ne fait obstacle à ce que sa fille aînée l'accompagne hors de France et à ce que la cellule familiale s'y reconstitue, le préfet n'a pas fait une appréciation manifestement erronée des conséquences du refus de titre de séjour et de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle de Mme B... F... alors même qu'elle est entrée en France alors qu'elle était mineure.
8. Contrairement à ce que soutient Mme B... F... le préfet a pu, sans erreur de droit, se fonder sur les dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui disposent que l'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne " si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ".
9. Enfin, aucun des moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant fondé, le moyen tiré de l'illégalité de la décision fixant le pays de destination par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Guyane du 15 janvier 2018. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H... B... F... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Guyane.
Délibéré après l'audience du 27 août 2020 à laquelle siégeaient :
Mme E... C..., président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 24 septembre 2020.
Le président-rapporteur,
Marianne C... Le président-assesseur,
Didier Salvi
Le greffier,
Sophie Lecarpentier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 20BX01715