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22/09/2020 | FRANCE | N°20BX01057

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 22 septembre 2020, 20BX01057


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 11 octobre 2019 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays dont il a la nationalité comme destination en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement et a interdit son retour sur le territoire pour une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2000001du 3 janvier 2020, le magistrat désigné par le

président du tribunal administratif de Bordeaux a renvoyé devant la formation collégial...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 11 octobre 2019 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays dont il a la nationalité comme destination en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement et a interdit son retour sur le territoire pour une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2000001du 3 janvier 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a renvoyé devant la formation collégiale les conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour et a rejeté le surplus des demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 mars 2020, M. D..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) de l'admettre à l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 3 janvier 2020 ;

3°) d'annuler l'arrêté du 11 octobre 2019 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays dont il a la nationalité comme destination en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement et a interdit son retour sur le territoire pour une durée de trois ans;

4°) d'enjoindre au préfet de la Gironde, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

En ce qui concerne les moyens communs aux décisions :

- l'arrêté a été signé par une autorité incompétente ;

- la préfète a commis un détournement de pouvoir en notifiant l'arrêté du 11 octobre le 31 décembre 2019 ;

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

- l'administration doit justifier avoir recueilli l'avis de l'OFII ;

- il justifie d'une situation médicale exceptionnelle au sens de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; l'avis de l'OFII n'a pas pris en compte l'inaccessibilité des soins au Nigéria ; plus d'une année s'est écoulée depuis l'avis de l'OFII alors que sa situation médicale s'est aggravée ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme puisqu'il justifie être le père de deux enfants qui résident en France ;

- la préfète a méconnu l'article L. 313-14 du code de de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle a commis une erreur manifeste d'appréciation en lui refusant un titre de séjour alors qu'il justifie de l'ancienneté de son séjour, de sa situation familiale et de son intégration ;

- le refus de titre de séjour méconnait l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :

- compte tenu de son état de santé il peut prétendre à un titre de séjour de plein droit au titre de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce qui faisait obstacle à ce que la préfète l'oblige à quitter le territoire ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il justifie de son ancienneté sur le territoire, de son intégration et de sa situation familiale ;

- la décision méconnait l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, l'intérêt supérieur de ses enfants n'ayant pas été pris en compte ;

En ce qui concerne le refus de délai de départ volontaire :

- la décision de refus de délai de départ volontaire est entachée d'erreur d'appréciation car sa présence ne constitue pas une menace à l'ordre public ;

En ce qui concerne l'interdiction de retour :

- la préfète a commis une erreur manifeste d'appréciation et une atteinte excessive à sa vie privée et familiale et à l'intérêt supérieur de ses enfants en lui interdisant le territoire pendant trois ans alors que ses enfants résident en France ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- la décision déterminant le pays de renvoi méconnait l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3.1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme car sa vie est menacée en cas de retour au Nigéria.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 mai 2020, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 23 juillet 2020, M. D... soutient que la fin de non-recevoir soulevée d'office n'est pas fondée.

Par une décision du 3 septembre 2020, le bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de M. D....

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique,

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. G... F...,

- et les observations de Me B..., substituant Me A..., représentant M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant nigérian né en 1974, déclare être entré en France en 2013. Par un arrêté du 11 octobre 2019, notifié le 31 décembre 2019, le préfet de la Gironde a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit et l'a interdit de retour sur le territoire pendant une durée de trois ans. M. D... relève appel du jugement en date du 3 janvier 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a renvoyé les conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour devant une formation collégiale et a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions par lesquelles le préfet de la Gironde l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit et l'a interdit de retour sur le territoire pendant une durée de trois ans.

Sur l'admission à l'aide juridictionnelle provisoire :

2. Par une décision du 3 septembre 2020, le bureau d'aide juridictionnelle près la présente cour a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de M. D.... Par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur ses conclusions tendant à ce qu'il soit admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. La demande du requérant tendant à l'annulation du refus de séjour a été renvoyée à une formation collégiale du tribunal, ainsi qu'il vient d'être rappelé. Le requérant ne conteste pas ce renvoi. Ces conclusions réitérées devant la cour ne peuvent par suite qu'être rejetées.

4. A l'appui des moyens tirés de ce que les autres décisions litigieuses seraient entachées d'incompétence et de détournement de pouvoir, l'appelant ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu de rejeter ces moyens par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

S'agissant des moyens relatifs à l'exception d'illégalité des refus de séjour :

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...)11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. / (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...). ". Aux termes de l'article L. 511-4 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié... ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / (...). " L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 pris pour l'application de ces dispositions prévoit que l'avis précise " a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. ".

6. Il ressort des pièces du dossier que, par un avis du 23 novembre 2018, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé qu'un défaut de prise en charge médicale de l'état de santé de M. D... ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. D'une part, dès lors que l'avis du collège de médecins de l'OFII a retenu que le défaut de prise en charge médicale de l'état de santé du requérant ne devrait pas entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, la seule circonstance que cet avis ne prenne pas position sur l'accès des soins suivis au Nigéria n'a privé l'intéressé privé d'aucune garantie. D'autre part, si M. D... fait valoir que cet avis date de plus d'un an, aucun texte ne prévoit de délai entre la date de l'avis de l'OFII et la décision de l'autorité préfectorale et il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de l'intéressé aurait évolué de manière notable pendant cette période, nécessitant une nouvelle consultation du collège. Enfin, l'intéressé, qui souffre de troubles psychiatriques et d'hypertension artérielle, soutient qu'un défaut de soin aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il ne pourra en outre accéder effectivement à un traitement approprié dans son pays d'origine. Toutefois, les éléments fournis par M. D..., en particulier des prescriptions et des certificats médicaux de suivi par un médecin psychiatre, ne permettent pas de remettre en cause l'avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration sur le degré de gravité des conséquences que provoquerait un défaut de prise en charge médicale. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige méconnaissait les dispositions précitées du point 11° de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent 11° par le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre... ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. I1 ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Pour l'application des stipulations et dispositions précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

8. M. D... fait valoir qu'il est arrivé en France en 2013 et qu'il est père de deux enfants qui résident régulièrement en France. M. D... a toutefois déclaré ne plus avoir de contact avec son premier enfant qui vit avec sa mère à Paris. Si M. D... se prévaut du fait qu'il vit depuis 2017 chez Mme C..., ressortissante nigériane, titulaire d'un titre de séjour, avec laquelle il a un enfant né le 13 mars 2018 et qu'il s'occupe au quotidien de son enfant et de la fille de Mme C..., il n'apporte toutefois aucun élément permettant d'établir qu'il contribuait effectivement à l'entretien et à l'éduction de son fils ou de la fille de Mme C... à la date de la décision en litige. De plus, M. D... a été condamné le 12 septembre 2019, par le tribunal correctionnel de Bordeaux, à une peine de 6 mois d'emprisonnement pour des faits de violences habituelles n'ayant pas entrainé d'incapacité supérieure à 8 jours à l'encontre de Mme C... et que, selon le procès-verbal d'audition de cette dernière, ces violences se déroulaient sous le regard des enfants présents au foyer. Compte tenu de ces éléments, de la durée et des conditions du séjour en France de M. D... qui n'est pas isolé dans son pays d'origine, et où réside sa mère, la décision du préfet de la Gironde n'a pas porté au droit de M. D... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts et motifs en vue desquels elle a été prise et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 7, M. D..., qui ne justifie d'aucune activité professionnelle ni d'aucun élément n'attestant de son intégration dans la société française ou de son insertion durable sur le territoire national, n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni que le préfet de la Gironde aurait commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.

10. En dernier lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 la convention internationale relative aux droits de l'enfant qui stipule : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. (...) ". Il résulte de ces stipulations, lesquelles peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

11. Il résulte de ce qui a dit que M. D... ne justifie pas avoir conservé des liens avec son fils qui vit à Paris ni contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses enfants et qu'il a commis, de manière répétée, des violences à l'encontre de Mme C..., en présence de leur enfant. Aussi l'arrêté attaqué ne méconnait pas l'intérêt supérieur de ses enfants.

12. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté.

S'agissant des moyens propres à l'obligation de quitter le territoire :

13. Pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 5, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du point 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté

14. Pour les mêmes motifs que ceux retenus aux points 7 et 8, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la décision sur la situation de l'intéressé doivent être écartés.

15. Pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 10, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du point 1 de l'article 3 De la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté.

En ce qui concerne la décision de refus de délai de départ volontaire :

16. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public (...). ". Eu égard à la nature des faits ayant entraînés la condamnation de M. D..., qui caractérisent, ainsi qu'il l'a été dit, un comportement constituant une menace pour l'ordre public, le préfet n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 511-1 en refusant d'accorder à l'intéressé un délai de départ volontaire.

En ce qui concerne l'interdiction de retour :

17. L'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " III. L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. (...) ". Le prononcé et la durée de l'interdiction de retour sont décidés en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français.

18. Il est constant que M. D... a déjà fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire en date du 22 janvier 2013, soutient être revenu en France dès octobre 2013 et s'y être maintenu depuis cette date en situation irrégulière. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressé ne justifie d'aucun élément n'attestant de son intégration dans la société française ni de sa contribution à l'entretien ou à l'éducation de ses enfants et que, pour les motifs exposés au point 7, sa présence sur le territoire représente une menace pour l'ordre public. Eu égard à la gravité des faits pour lesquels il a été condamné et à l'objet de l'interdiction de retour, la décision lui faisant interdiction de revenir sur le territoire français pour une durée de trois années n'est pas entachée d'erreur d'appréciation ni n'a porté une atteinte excessive au droit de l'intéressé à une vie privée et familiale normale. Cette décision ne porte pas non plus une atteinte excessive à l'intérêt supérieur de ses enfants.

En ce qui concerne le pays de renvoi :

19. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou, en application d'un accord ou arrangement de réadmission communautaire ou bilatéral, à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou, avec son accord, à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants. ".

20. M. D... dont la demande d'asile a été rejetée par une décision de l'OFPRA du 10 avril 2005 confirmée par une décision de la CNDA du 25 juillet 2005, n'assortit d'aucune pièce ni précision les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations du point 1 de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ces moyens doivent donc être écartés.

21. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles relatives aux frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. D... tendant à ce qu'il soit admis provisoirement à l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. G... F..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 22 septembre 2020.

Le rapporteur,

Stéphane F... Le président,

Philippe PouzouletLe greffier,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 20BX01057


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX01057
Date de la décision : 22/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Stéphane GUEGUEIN
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : CESSO

Origine de la décision
Date de l'import : 03/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-09-22;20bx01057 ?
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