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22/09/2020 | FRANCE | N°19BX03961

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 22 septembre 2020, 19BX03961


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... F... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1806095 du 21 juin 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, respectivement enregis

trés le 20 octobre 2019 et le 1er mars 2020, M. F... B..., représenté par Me C..., demande à la c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... F... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1806095 du 21 juin 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, respectivement enregistrés le 20 octobre 2019 et le 1er mars 2020, M. F... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 21 juin 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 27 septembre 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

- elle est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière : l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas été rendu à la suite d'une délibération collégiale compte tenu de l'éloignement géographique des médecins ; en outre, il n'est pas démontré que le collège de médecins a délibéré par l'intermédiaire d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle ;

- cette décision méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : son état de santé nécessite un traitement dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et le traitement requis par son état de santé est indisponible dans son pays d'origine ; dans le cadre de ses précédentes demandes de titre de séjour, le médecin de l'agence régionale de santé avait considéré que le traitement était indisponible en Tanzanie ; la liste des médicaments essentiels établis par le ministère de la santé tanzanien en mars 2017 ne mentionne pas l'aripiprazole ni le bisoprolol ; en outre, son état risque de s'aggraver s'il retourne dans son pays d'origine où il ne bénéficiera plus du suivi psychiatrique qui lui a permis d'améliorer son état de santé ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- cette décision méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est illégale par voie de conséquence des décisions de refus de titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français ;

- cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : il sera exposé à des peines et traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en Tanzanie dès lors qu'il lui sera impossible de recevoir les soins dont il a besoin.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 février 2020, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par M. F... B... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 09 mars 2020, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 20 mars 2020 à 12h00.

M. F... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 octobre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. E... D..., a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. F... B..., ressortissant tanzanien né le 2 août 1980, est entré irrégulièrement en France pour la première fois le 15 juillet 2012 et y a sollicité le bénéfice de l'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 24 septembre 2013, confirmée par décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 22 mai 2014. Le 28 août 2015, il s'est vu délivrer un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, renouvelé jusqu'au 27 août 2017 et dont il a sollicité le renouvellement le 18 avril 2018. Par un arrêté du 27 septembre 2018, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. F... B... relève appel du jugement du 21 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) ; / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...). ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...). ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. ".

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'avis médical porte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration émet l'avis suivant ". Cette mention fait foi jusqu'à preuve du contraire. La seule circonstance que les trois médecins composant le collège exercent dans des villes différentes n'est pas, par elle-même, de nature à mettre en doute le caractère collégial de cette délibération. Il en est de même des captures d'écran de l'application Themis produites par le requérant. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière doit être écarté.

4. En second lieu, pour prendre la décision attaqué, le préfet de la Haute-Garonne s'est notamment fondé sur l'avis du collège de médecin de de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 17 septembre 2018 duquel il ressort que l'état de santé de M. F... B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et, qu'au vu des éléments du dossier et à la date de cet avis, l'état de santé de l'intéressé peut lui permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine. Les certificats médicaux produits par l'appelant, dont seul celui établi par le docteur Ferrand le 15 juillet 2019, soit postérieurement à la date de la décision attaquée, se prononce, en des termes très peu circonstanciés, sur l'indisponibilité du traitement nécessité par l'état de santé de l'intéressé dans son pays d'origine, ne permettent pas de remettre en cause l'avis du collège de médecins concernant l'accessibilité des soins et traitements nécessaires à l'état de santé de l'intéressé en Tanzanie. Si M. F... B... soutient que l'aripiprazole et le bisprolol qui lui sont prescrits ne figurent pas sur la liste des médicaments essentiels établis par le ministère de la santé tanzanien en mars 2017 qu'il produit, il n'établit ni même n'allègue qu'il ne pourrait pas bénéficier, dans son pays, de médicaments génériques ou substituables à ceux-ci alors qu'il ressort de cette même liste que des traitements y sont disponibles pour les pathologies dont il souffre. En outre, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un suivi psychiatrique adapté à son état de santé en Tanzanie. Enfin, l'intéressé ne peut utilement se prévaloir des anciens avis favorables du médecin de l'agence régionale de santé qui lui ont permis de bénéficier de titre de séjours entre 2015 et 2017. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. F... B... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée serait privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

6. En second lieu et pour les mêmes motifs que ceux évoqués au point 4 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. F... B... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée serait privée de base légale en raison de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français.

8. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants. ".

9. Compte tenu de ce qui a été indiqué au point 4 du présent arrêt, la décision fixant la Tanzanie comme pays à destination duquel M. F... B... pourra être reconduit d'office ne peut être regardée comme étant de nature à le soumettre à un traitement inhumain ou dégradant dès lors qu'il pourra y bénéficier des soins appropriés à son état de santé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. F... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 septembre 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles relatives aux frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. F... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... F... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 8 septembre2020 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. E... D..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 22 septembre 2020.

Le rapporteur,

Stéphane D...

Le président,

Philippe Pouzoulet

Le greffier,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX03961


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX03961
Date de la décision : 22/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour. Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Stéphane GUEGUEIN
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : ATY AVOCATS ASSOCIES AMARI DE BEAUFORT-TERCERO-YEPONDE

Origine de la décision
Date de l'import : 03/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-09-22;19bx03961 ?
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