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22/09/2020 | FRANCE | N°18BX03608

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 22 septembre 2020, 18BX03608


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCCV JS a demandé au tribunal administratif de La Réunion de la décharger de l'obligation de payer la somme de 40 926,22 euros mise à sa charge par un titre de recettes émis le 29 décembre 2014 par la Compagnie réunionnaise des eaux (La Créole) au titre de la participation pour raccordement à l'égout.

Par un jugement n° 1600718 du 5 juillet 2018 le tribunal administratif de La Réunion a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistré

s le 9 octobre 2018 et le 12 décembre 2019, la SCCV JS, représentée par Me A..., demande à la cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCCV JS a demandé au tribunal administratif de La Réunion de la décharger de l'obligation de payer la somme de 40 926,22 euros mise à sa charge par un titre de recettes émis le 29 décembre 2014 par la Compagnie réunionnaise des eaux (La Créole) au titre de la participation pour raccordement à l'égout.

Par un jugement n° 1600718 du 5 juillet 2018 le tribunal administratif de La Réunion a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 9 octobre 2018 et le 12 décembre 2019, la SCCV JS, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1600718 du 5 juillet 2018 du tribunal administratif de La Réunion ;

2°) de la décharger de l'obligation de payer la somme de 40 926,22 euros mise à sa charge par un titre de recettes émis le 29 décembre 2014 par la Compagnie réunionnaise des eaux (La Créole) au titre de la participation pour raccordement à l'égout ;

3°) de mettre la somme de 3 500 euros à la charge de la Compagnie réunionnaise des eaux au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Elle soutient que :

- la forclusion a été relevée d'office sans respect du contradictoire en méconnaissance des dispositions de l'article R. 421-1 du code de justice administrative ;

- la tardiveté retenue par le tribunal est infondée ; le titre de recettes contesté n'a été notifié qu'à son conseil ; elle n'a jamais eu notification de ce document ; le délai de recours ne peut donc lui être opposé ;

- la facture du 17 février 2014 ne précise pas les bases de sa liquidation ; le titre de recettes du 29 décembre 2014 n'est pas plus explicite ; ce titre ne fait référence à une quelconque délibération du conseil d'administration de la régie autonome ni d'une délibération du conseil municipal de la Commune de Saint-Paul ;

- la PRE n'est pas due pour les voies et réseaux compris dans le programme d'équipements publics d'une ZAC créée en application de l'article L311-1 du code de l'urbanisme ; la règle du non-cumul des taxes et participations d'urbanisme doit s'appliquer ; elle ne peut pas payer deux fois le réseau public d'assainissement collectif ; lors de la cession des terrains de la ZAC par la SEDRE aux promoteurs, ces terrains étaient déjà obligatoirement équipés des réseaux dont celui des eaux usées ; seul le branchement particulier est à la charge du promoteur.

Par deux mémoires en défense enregistrés les 3 décembre 2018 et 28 janvier 2020, la Compagnie réunionnaise des Eaux - La Créole, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la SCCV JS au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

Elle soutient que :

- la demande de première instance était tardive ; le titre de recettes relatif à la créance litigieuse a été émis et rendu exécutoire le 29 décembre 2014 ; la société en a été informée par lettre du 02 janvier 2015 et l'acte lui a été notifié en annexe au mémoire en défense produit le 7 janvier 2015 à l'occasion du contentieux demandant la décharge de l'obligation de payer la même somme au titre d'une facture en date du 17 février 2014 ; à défaut de notification, la société requérante a eu connaissance acquise de cette décisions ;

- le montant de la PRE réclamé résulte des termes de l'article 2 de l'arrêté en date du 4 mars 2011 portant permis de construire délivré par la commune de Saint-Paul ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de la tardiveté des conclusions de la SCCV JS tendant à la décharge de l'obligation de payer le montant de la participation pour raccordement à l'égout en ce qu'elles ont été présentées pour la première fois devant le tribunal administratif de La Réunion le 16 juin 2016, soit plus d'un an après la date à laquelle elle a eu connaissance de l'existence du titre de recettes lui faisant obligation de payer cette somme.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la santé publique ;

- le code de l'urbanisme ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D... C...,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un permis de construire délivré à la SCCV JS le 4 mars 2011, la commune de Saint-Paul a assujetti cette société au paiement d'une participation pour raccordement à l'égout d'un montant de 40 926,22 euros. Par un jugement n° 1400434 du 12 mai 2016, devenu définitif, le tribunal administratif a constaté le non-lieu à statuer sur les conclusions de la SCCV JS tendant à la décharge de l'obligation de payer cette somme en exécution d'une facture émise le 17 février 2014 par la régie des eaux de la commune, la Compagnie réunionnaise des eaux, à la suite de l'intervention d'un titre exécutoire émis par le même organisme le 29 décembre 2014. La SCCV JS relève appel du jugement du 5 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande en décharge de l'obligation de payer la somme de 40 926,22 euros en exécution du titre exécutoire du 29 décembre 2014.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, contrairement à ce que soutient la SCCV JS, il ressort des pièces du dossier que la tardiveté retenue par les premiers juges a été opposée par la Compagnie Réunionnaise des Eaux dans son mémoire en défense enregistré le 1er septembre 2016. Elle n'est donc pas fondée à soutenir que le jugement serait irrégulier pour avoir retenu cette tardiveté sans que le tribunal ait informé les parties de son intention de relever cette cause d'irrecevabilité comme l'exigent les dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative.

3. En second lieu, le jugement critiqué a rejeté comme irrecevable la demande présentée par la SCCV JS au motif qu'elle avait été enregistrée au greffe du tribunal administratif plus de deux mois après le 13 février 2015, date à compter de laquelle la SCCV JS a été regardée comme ayant eu nécessairement connaissance du titre de recette en litige en raison de sa production, par la compagnie réunionnaise des eaux, en annexe d'un mémoire produit à l'occasion d'un autre contentieux opposant les mêmes parties. Toutefois la circonstance qu'une copie du titre de recettes a été communiquée à la SCCV JS dans le cadre de l'instruction d'une autre instance n'a pu suffire à faire courir le délai du recours contentieux. Par suite, c'est à tort que le tribunal a rejeté comme irrecevable la demande dont il était saisi. Son jugement en date du 5 juillet 2018 doit, dès lors, être annulé.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SCCV JS devant le tribunal administratif de La Réunion.

Sur les conclusions à fin de décharge :

5. Aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". Aux termes du 2° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, alors applicable : " L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite ". Le non-respect de l'obligation d'informer le débiteur sur les voies et les délais de recours, prévue par l'article R. 421-5 du code de justice administrative, ou l'absence de preuve qu'une telle information a été fournie, est de nature à faire obstacle à ce que le délai de forclusion, prévu par l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, lui soit opposable.

6. Toutefois, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. Dans une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours ou l'absence de preuve qu'une telle information a été fournie ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par les textes applicables, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable.

7. S'agissant des titres exécutoires, sauf circonstances particulières dont se prévaudrait son destinataire, le délai raisonnable ne saurait excéder un an à compter de la date à laquelle le titre, ou à défaut, le premier acte procédant de ce titre ou un acte de poursuite a été notifié au débiteur ou porté à sa connaissance.

8. En l'espèce, il résulte de l'instruction que si aucun élément ne permet d'établir que le titre exécutoire en date du 29 décembre 2014 a été régulièrement notifié à la SCCV JS, il demeure que ce document figurait en pièce jointe au mémoire en défense de la Compagnie réunionnaise des eaux produit dans l'instance n° 1400434 enregistré le 7 janvier 2015, et qu'il a été nécessairement portée à la connaissance de la SCCV JS au plus tard le 13 février 2015, date à laquelle son mémoire en réplique a été enregistré au greffe dudit tribunal.

9. La SCCV JS n'est pas fondée à soutenir que seul son avocat a eu connaissance du document annexé au mémoire en défense de la compagnie réunionnaise des eaux. Elle n'est pas non plus fondée à soutenir que l'intervention de deux actes, une facture puis un titre exécutoire, seraient constitutives de circonstances particulières susceptibles de justifier l'extension du délai raisonnable pour exercer un recours juridictionnel à l'encontre du titre exécutoire au-delà du délai d'un an dès lors que l'origine de la créance était certaine, compte tenu des termes de l'article 2 du permis de construire en date du 4 mars 2011, et de ce que l'intervention du titre exécutoire en substitution de la facture du 17 février 2014 est explicitée par le jugement du 12 mai 2016. Par suite, la demande introductive d'instance ayant été présentée le 16 juin 2016 était tardive.

10. Par suite, la SCCV JS n'est pas fondée à demander la décharge de l'obligation de payer la somme de 40 926,22 euros mise à sa charge par un titre de recettes émis le 29 décembre 2014 par la Compagnie réunionnaise des eaux (La Créole) au titre de la participation pour raccordement à l'égout.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la compagnie réunionnaise des eaux, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la SCCV JS demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCCV JS une somme de 1 500 euros, à verser à la compagnie réunionnaise des eaux, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1600718 du 5 juillet 2018 du tribunal administratif de La Réunion est annulé.

Article 2 : La demande de première instance de la société civile de construction et de vente JS et le surplus des conclusions d'appel de la société sont rejetés.

Article 3 : La société civile de construction et de vente JS versera à la Compagnie réunionnaise des eaux une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile de construction et de vente JS et à la Compagnie réunionnaise des eaux.

Délibéré après l'audience du 8 septembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. D... C..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 22 septembre 2020.

Le rapporteur,

Stéphane C... Le président,

Philippe PouzouletLe greffier,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au préfet de La Réunion en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX03608


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX03608
Date de la décision : 22/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

49-05-07 Police. Polices spéciales. Police des cours d'eau non domaniaux.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Stéphane GUEGUEIN
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : FIDAL SAINT DENIS

Origine de la décision
Date de l'import : 03/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-09-22;18bx03608 ?
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