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29/07/2020 | FRANCE | N°17BX01427,18BX00404

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 29 juillet 2020, 17BX01427,18BX00404


Vu la procédure suivante :

Par un arrêt avant dire droit du 9 mai 2019, la cour, statuant, d'une part, sur la requête n° 18BX00404 de M. et Mme E... tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de la Guyane n° 1201740 du 14 mai 2014 et à l'annulation du permis de construire modificatif du 26 novembre 2012 délivré à M. N... et, d'autre part, sur la requête n° 17BX01427 de la commune de Rémire-Montjoly tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de la Guyane n° 1400805 du 9 février 2017 et au rejet de la demande de M. et Mme E... tendant à

l'annulation de l'arrêté du 11 avril 2014 par lequel le maire de Rémi...

Vu la procédure suivante :

Par un arrêt avant dire droit du 9 mai 2019, la cour, statuant, d'une part, sur la requête n° 18BX00404 de M. et Mme E... tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de la Guyane n° 1201740 du 14 mai 2014 et à l'annulation du permis de construire modificatif du 26 novembre 2012 délivré à M. N... et, d'autre part, sur la requête n° 17BX01427 de la commune de Rémire-Montjoly tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de la Guyane n° 1400805 du 9 février 2017 et au rejet de la demande de M. et Mme E... tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 avril 2014 par lequel le maire de Rémire-Montjoly a accordé à M. N... un permis de construire modificatif sur la parcelle AP 655 située rue Ilet la Mère et Ilet le Père, a sursis à statuer sur ces requêtes pour permettre à M. N... de notifier à la cour un permis de construire modificatif régularisant la pente des toitures, conformément à l'article 11 des dispositions du plan d'occupation des sols applicables à la zone IINA, et d'obtenir un nouvel avis du service assainissement de la communauté de communes du Centre Littoral.

I. Dans l'instance 18BX00404 :

Par des mémoires, enregistrés les 8 novembre 2019, 17 janvier, 18 mars et 15 mai 2020, M. et Mme E..., représentés par Me G..., concluent, dans le dernier état de leurs écritures, au rejet de la requête présentée par la commune de Rémire-Montjoly, à l'annulation de l'arrêté du 11 avril 2014 et à la mise à sa charge d'une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le permis de construire modificatif délivré le 23 décembre 2019 ne régularise pas le vice tiré de la méconnaissance de l'article 11 des dispositions du plan d'occupation des sols applicables à la zone IINA en ce qu'il ne concerne qu'une des deux villas construites sur la parcelles AP 655 ;

- l'arrêté du 23 décembre 2019 ne peut être qualifié de permis de construire modificatif en ce que les modifications qu'il autorise sont de nature à affecter l'économie générale du projet ;

- l'arrêté a été pris par une autorité incompétente ; la commune ne justifiant pas de la transmission de la délégation de signature du 19 décembre 2019 à l'autorité préfectorale, qui conditionne l'entrée en vigueur de l'acte ; la suppléance ne pouvait être mise en oeuvre en l'espèce, aucune raison impérieuse ne justifiait la délivrance de l'arrêté accordant le permis de construire litigieux ;

- le délai de cinq mois imparti par la cour n'a pas été respecté ;

- l'avis de la communauté d'agglomération du Centre Littoral du 3 juillet 2018, effectué dans le cadre d'un diagnostic lié aux actes de vente, antérieur à la demande de permis de construire modificatif du 22 août 2019 qui emporte une nouvelle extension du bâti existant, ne peut régulariser le vice tiré de la méconnaissance de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme ;

- le permis de construire modificatif méconnait les dispositions de l'article UD 6 du plan local d'urbanisme en ce que la piscine nouvellement créée est implantée à moins de trois mètres de la limite séparative ;

- le permis de construire modificatif méconnait les dispositions de l'article UD 8 du plan local d'urbanisme en ce que l'emprise au sol est portée à 401,20 m², supérieure au seuil de 30 % de la surface du terrain ;

- la clôture maçonnée de 1,80 mètre de hauteur ne respecte pas les dispositions de l'article UD 10 du plan local d'urbanisme en ce qu'elle porte atteinte au libre écoulement des eaux de ruissellement.

Par des mémoires enregistrés les 26 décembre 2019 et 20 février 2020, la commune de Rémire-Montjoly, représentée par Me F..., conclut à l'annulation du jugement du tribunal administratif de la Guyane du 9 février 2017, au rejet de la demande de M. et Mme E... et à ce qu'il soit mis à la charge de M. et Mme E... une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle informe la cour qu'un permis de construire modificatif a été délivré le 23 décembre 2019 régularisant le permis de construire initial et soutient que les moyens développés par M. et Mme E... ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 17 avril 2020, M. et Mme D..., représentés par Me C..., concluent à l'annulation du jugement du 9 février 2017, au rejet de la demande d'annulation présentée par M. et Mme E... et à la mise à leur charge d'une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que les moyens développés par M. et Mme E... ne sont pas fondés.

II. Dans l'instance 17BX01427 :

Par des mémoires, enregistrés les 26 décembre 2019 et 20 février 2020, la commune de Rémire-Montjoly, représentée par Me F..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

- d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Guyane du 9 février 2017 ;

- de rejeter la demande de M. et Mme E... tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 avril 2014 par lequel le maire de Rémire-Montjoly a délivré à M. N... un permis de construire modificatif sur la parcelle cadastrée AP 655 située rue Ilet la Mère ;

- de mettre à la charge de M. et Mme E... une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle informe la cour qu'un permis de construire modificatif a été délivré le 23 décembre 2019 régularisant le permis de construire initial et soutient que les moyens développés par M. et Mme E... ne sont pas fondés.

Par des mémoires, enregistrés les 8 novembre 2019, 17 janvier, 18 mars et 15 mai 2020 M. et Mme E..., représentés par Me G..., concluent au rejet de la requête présentée par la commune de Rémire-Montjoly et à la mise à sa charge d'une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le permis de construire modificatif délivré le 23 décembre 2019 ne régularise pas le vice tiré de la méconnaissance de l'article 11 des dispositions du plan d'occupation des sols applicables à la zone IINA en ce qu'il ne concerne qu'une des deux villas construites sur la parcelles AP 655 ;

- l'arrêté du 23 décembre 2019 ne peut être qualifié de permis de construire modificatif en ce que les modifications qu'il autorise sont de nature à affecter l'économie générale du projet ;

- l'arrêté a été pris par une autorité incompétente ; la commune ne justifiant pas de la transmission de la délégation de signature du 19 décembre 2019 à l'autorité préfectorale, qui conditionne l'entrée en vigueur de l'acte ; la suppléance ne pouvait être mise en oeuvre en l'espèce, aucune raison impérieuse ne justifiait la délivrance de l'arrêté accordant le permis de construire litigieux ;

- le délai de cinq mois imparti par la cour n'a pas été respecté ;

- l'avis de la communauté d'agglomération du Centre Littoral du 3 juillet 2018, effectué dans le cadre d'un diagnostic lié aux actes de vente, antérieur à la demande de permis de construire modificatif du 22 août 2019 qui emporte une nouvelle extension du bâti existant, ne peut régulariser le vice tiré de la méconnaissance de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme ;

- le permis de construire modificatif méconnait les dispositions de l'article UD 6 du plan local d'urbanisme en ce que la piscine nouvellement créée est implantée à moins de trois mètres de la limite séparative ;

- le permis de construire modificatif méconnait les dispositions de l'article UD 8 du plan local d'urbanisme en ce que l'emprise au sol est portée à 401,20 m², supérieure au seuil de 30 % de la surface du terrain ;

- la clôture maçonnée de 1,80 mètre de hauteur ne respecte pas les dispositions de l'article UD 10 du plan local d'urbanisme en ce qu'elle porte atteinte au libre écoulement des eaux de ruissellement.

Par un mémoire, enregistré le 17 avril 2020, M. et Mme D..., représentés par Me C..., concluent à l'annulation du jugement du 9 février 2017, au rejet de la demande d'annulation présentée par M. et Mme E... et à la mise à leur charge d'une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que les moyens développés par M. et Mme E... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance n° 2000396 du 2 juillet 2020, le président du tribunal administratif de la Guyane a transmis à la cour, en application des dispositions des articles R. 351-3 du code de justice administrative et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, la demande de M. et Mme E... tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 décembre 2019 par lequel le maire de Rémire-Montjoly a, à la suite de l'arrêt de la cour du 9 mai 2019, délivré à M. D... un permis de construire modificatif sur la parcelle AP 655 située 5 rue Ilet la Mère à Rémire-Montjoly.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme O...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,

- et les observations de Me G..., représentant M. et Mme E....

Considérant ce qui suit :

1. Le maire de Rémire-Montjoly a délivré le 30 décembre 2011 à la société civile immobilière (SCI) Adinou un permis de construire quatre villas de type T4 jumelées pour un total de surface hors oeuvre nette de 446 m². Ce permis a été transféré à M. N... pour deux des villas situées sur la parcelle cadastrée AP 655, par un arrêté du 23 novembre 2012. Par un nouvel arrêté du 26 novembre 2012, le maire a autorisé l'intéressé à apporter des modifications au permis de construire portant sur l'accès à la parcelle et l'extension de la construction en fond de parcelle, portant la surface de plancher de 223 m² à 232 m² au total. Par un jugement du 14 mai 2014, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté la demande de M. et Mme E... tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 26 novembre 2012. Par un arrêt n° 14BX02158 du 18 octobre 2016, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, sur l'appel de M. et Mme E..., annulé ce jugement et l'arrêté du 26 novembre 2012. Par une décision n° 406655 du 31 janvier 2018, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt du 18 octobre 2016, et a renvoyé l'affaire devant la cour, cette instance étant enregistrée sous le n° 18BX00404. Entre temps, par un arrêté du 11 avril 2014, le maire de Rémire-Montjoly a " remplacé " l'arrêté du 26 novembre 2012 et a délivré à M. N... un permis de construire modificatif répondant à la demande déposée le 13 novembre 2012 pour une surface de plancher de 231,60 m². Par un jugement n° 1400805 du 9 février 2017, le tribunal administratif de la Guyane, saisi d'un recours présenté par M. et Mme E..., a annulé ce permis. La commune de Rémire-Montjoly relève appel de ce jugement dans l'instance n° 17BX01427. La cour a, par un arrêt du 9 mai 2019, sursis à statuer sur ces deux requêtes, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, afin que soit délivré un permis de construire modificatif régularisant la pente des toitures, conformément à l'article 11 des dispositions du plan d'occupation des sols applicables à la zone IINA, ainsi que l'absence de saisine préalable du service assainissement de la communauté de communes du Centre Littoral en méconnaissance de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme. Par un arrêté du 23 décembre 2019 le maire de Rémire-Montjoly a accordé à M. D..., nouvel acquéreur de l'immeuble, un permis de construire modificatif. M. et Mme E... doivent être regardés, malgré la maladresse de leurs écritures, comme contestant ce nouvel arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation des permis de construire délivrés les 11 avril 2014 et 23 décembre 2019 :

2. L'arrêté du maire de Rémire-Montjoly du 23 décembre 2019 a pour objet, d'une part, de régulariser le permis de construire du 11 avril 2014 et, d'autre part, de prévoir de nouvelles modifications au projet présenté le 13 novembre 2012.

En ce qui concerne la compétence de l'auteur de l'arrêté du 23 décembre 2019 :

3. Aux termes de l'article L. 2122-17 du code général des collectivités territoriales : " En cas d'absence, de suspension, de révocation ou de tout autre empêchement, le maire est provisoirement remplacé, dans la plénitude de ses fonctions, par un adjoint, dans l'ordre des nominations et, à défaut d'adjoint, par un conseiller municipal désigné par le conseil ou, à défaut, pris dans l'ordre du tableau ". Ces dispositions, qui organisent, en cas d'absence ou d'empêchement, le remplacement provisoire du maire par un adjoint choisi dans l'ordre du tableau, ne donnent compétence au suppléant que pour les actes dont l'accomplissement, au moment où il s'impose, serait empêché par l'absence du maire et ne permettrait donc pas un fonctionnement normal de l'administration municipale.

4. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 23 décembre 2019 a été signé par Mme I... H..., première adjointe, remplaçant le maire de Rémire-Montjoly absent du 21 décembre 2019 au 3 janvier 2020. Eu égard à la date de la clôture de l'instruction, fixée au 27 décembre 2019 par l'ordonnance de la cour du 12 novembre 2019, la première adjointe était bien compétente, en l'absence du maire et en application des dispositions citées au point précédent, pour signer l'arrêté accordant le permis de construire modificatif du 23 décembre 2019. En outre, et au demeurant, l'arrêté donnant délégation de signature à Mme H... du 19 décembre 2019 a été régulièrement affiché ainsi qu'en atteste le certificat d'affichage du 2 février 2020. En se bornant à soutenir que cet arrêté n'a pas été publié ni fait l'objet d'une transmission en préfecture alors, d'une part, que les arrêtés de délégation de signature ne sont pas au nombre des actes soumis à obligation de transmission par les articles L. 2131-1 et suivants du code général des collectivités territoriales et, d'autre part, que la formalité d'affichage permet à elle seule l'entrée en vigueur des actes réglementaires du maire, M. et Mme E... ne contestent pas utilement le caractère exécutoire de l'arrêté portant remplacement du maire en son absence du 21 décembre 2019 au 3 janvier 2020. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté.

En ce qui concerne la régularisation du permis de construire du 11 avril 2014 :

5. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé ".

6. Il ne résulte pas de ces dispositions que l'expiration du délai prescrit par le juge pour procéder à la régularisation du permis de construire attaqué devant lui entacherait le permis de construire modificatif délivré dans ce cadre d'irrégularité ou ferait obstacle à ce qu'il puisse régulariser le permis initial. Par suite, s'il appartient au juge ayant sursis à statuer pour permettre cette régularisation de constater, le cas échéant, que celle-ci n'a pas été effectuée à la date à laquelle il statue de nouveau, postérieurement à l'expiration du délai prescrit par l'arrêt avant dire droit, et d'annuler en conséquence le permis initial, la seule circonstance que le permis de construire modificatif n'ait pas été délivré dans ce délai n'est pas de nature en elle-même à l'entacher d'irrégularité ou à faire obstacle à la régularisation du vice constaté dans l'arrêt avant dire droit. En l'espèce, la circonstance que le permis de construire du 23 décembre 2019 a été délivré postérieurement au délai de cinq mois imparti par la cour dans son arrêt du 9 mai 2019 ne fait pas obstacle à ce que ce permis puisse régulariser le permis initial.

7. Il ressort des pièces du dossier de demande, ainsi que des termes mêmes du permis de construire du 23 décembre 2019 délivré à M. D..., que ce permis concerne, comme les permis de construire des 26 novembre 2012 et 11 avril 2014, les surfaces plancher des deux villas jumelées situées sur la parcelle cadastrée section AP n° 655 d'une superficie de 1 200 m². Par suite, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme E..., il ne ressort pas des pièces du dossier que le permis de construire du 23 décembre 2019 ne porterait que sur la mise en conformité du seul logement type T5 situé sur la parcelle AP 655.

8. Lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial.

9. Aux termes de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme: " L'autorité compétente recueille auprès des personnes publiques, services ou commissions intéressés par le projet, les accords, avis ou décisions prévus par les lois ou règlements en vigueur ". Aux termes de l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales : " (...) III. Pour les immeubles non raccordés au réseau public de collecte, la commune assure le contrôle des installations d'assainissement non collectif. Cette mission consiste : / 1° Dans le cas des installations neuves ou à réhabiliter, en un examen préalable de la conception joint, s'il y a lieu, à tout dépôt de demande de permis de construire ou d'aménager et en une vérification de l'exécution. A l'issue du contrôle, la commune établit un document qui évalue la conformité de l'installation au regard des prescriptions réglementaires (...) ".

10. Il ressort des pièces du dossier que le service assainissement de la communauté d'agglomération du Centre Littoral avait contrôlé les ouvrages d'assainissement du lotissement Le Malingre, situé 5 rue Ilet la Mère, dans le cadre des contrôles diagnostics préalables aux actes de vente. Il est précisé, dans l'avis du 3 juillet 2018, que l'opération contrôlée serait composée d'un logement type T5 et que la filière assainissement est déclarée complète et ne présente aucun défaut majeur. Si cet acte n'a pas été demandé par la commune de Rémire-Montjoly au cours de l'instruction du permis de construire modificatif du 23 décembre 2019, cette circonstance n'a pas été de nature à priver les intéressés d'une garantie, ni à exercer une influence sur le sens de la décision prise. Par suite, le permis de construire modificatif, qui vise cet avis, régularise le permis de construire du 11 avril 2014 sur ce point.

11. Aux termes de l'article 10 des dispositions applicables à la zone UD du plan local d'urbanisme, approuvé le 27 juin 2018 : " (...) Toitures / La pente et les caractéristiques des toitures ne sont pas réglementées. Elles devront cependant s'intégrer, par leur aspect, au paysage urbain ou naturel environnant et prendre en compte, dans leur conception, les contraintes afférentes à l'évacuation des pluies. / Dans les opérations groupées et les lotissements, une harmonie d'ensemble devra être recherchée, tant en matière de coloris que de matériaux. (...) Des larges débords seront privilégiés, en cohérence avec les contraintes climatiques et environnementales locales (...) ".

12. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée AP 655 se situe en zone UD dans laquelle le règlement du plan local d'urbanisme, applicable à la date du permis de construire modificatif, prévoit seulement que les toitures devront s'intégrer, par leur aspect, au paysage urbain ou naturel environnant et prendront en compte, dans leur conception, les contraintes afférentes à l'évacuation des pluies. La circonstance que la pente des toitures soit inférieure à 30 % est donc sans incidence sur la légalité du permis de construire du 23 décembre 2019, laquelle s'apprécie à la date à laquelle il a été pris. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 11 des dispositions de la zone IINA du plan d'occupation des sols initialement applicable est inopérant.

13. Il résulte de ce qui précède que le permis de construire modificatif, délivré le 23 décembre 2019, a régularisé le permis de construire du 11 avril 2014. Par suite, la commune de Rémire-Montjoly est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 1400805 du 9 février 2017, le tribunal de la Guyane a annulé le permis de construire modificatif du 11 avril 2014.

En ce qui concerne les nouvelles modifications apportées au permis de construire du 11 avril 2014 :

14. Il ressort des pièces du dossier que le permis accordé le 23 décembre 2019 porte sur l'extension du bâti existant entrainant une augmentation des surfaces de plancher de 28,5 m², la création d'un local technique et d'une piscine, la modification de la clôture et la modification de la pente de la toiture de 15 à 20 %. Rapportées à l'importance globale du projet, ces modifications ne remettent en cause ni la conception générale du projet, ni l'implantation générale du bâtiment et sa hauteur. Le permis de construire accordé par le maire de Rémire-Montjoly le 23 décembre 2019 pouvait ainsi être regardé comme un permis modificatif. Par suite, M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que la nature des modifications apportées aurait nécessité un nouveau permis.

15. Aux termes de l'article UD8 du plan local d'urbanisme de Rémire-Montjoly : " (...) Dans le secteur UDI : L'emprise au sol est limitée à 30 % du terrain, annexes comprises mais hors bassins et pourtours de piscines ".

16. Il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire, et notamment de la notice, que l'emprise au sol du bâti projeté sera de 401,20 m² pour un terrain d'une superficie de 1 200 m², soit supérieure au seuil de 30 % imposée par l'article UD8 précité. Toutefois, au regard des modifications envisagées qui concernent notamment la création d'un bassin et des pourtours de piscines, qui sont exclus du calcul de l'emprise au sol par l'article UD 8, il ne ressort pas des pièces du dossier, en dépit des mentions figurant sur la notice du dossier de demande de permis de construire, que le taux d'emprise au sol de l'article UD 8 du plan local d'urbanisme ne serait pas respecté.

17. Aux termes de l'article UD 10 du plan local d'urbanisme : " (...) En limite séparative ou en mitoyenneté, les clôtures pourront être édifiées en mur plein sur une hauteur maximale de 2 mètres sous réserve de préserver l'harmonie paysagère du secteur concerné. (...) Les clôtures ne devront en aucun cas faire obstacle au libre écoulement des eaux de ruissellement (...) ".

18. Le projet prévoit la modification de la clôture et la réalisation d'un mur maçonné de 1,80 mètre autour de la villa de type T5, ce qui est autorisé par les prescriptions de l'article UD 10 précitées. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que cette clôture ferait obstacle à l'écoulement des eaux de ruissellement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UD 10 doit être écarté.

19. Toutefois, aux termes de l'article 6 des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme applicables à la zone UD : " (...) Dans la zone UD et les secteurs UDI et UDru : (...) Lorsque les constructions ne joignent pas les limites séparatives, elles seront implantées : / avec un recul au moins égal à la moitié de la hauteur de la construction (...) sans pouvoir être inférieur à 3 mètres, lorsque les constructions comportent au plus 2 niveaux (R+1) (...) ". Le même plan local d'urbanisme précise : " Piscine : Une piscine est une construction et à ce titre son implantation doit respecter les règles générales édictées par le Plan Local d'Urbanisme, s'agissant notamment de ses Articles 6 et 7 ".

20. Le permis de construire modificatif a notamment pour objet la création d'une piscine qui présente le caractère d'une construction à laquelle s'appliquent les prescriptions du plan local d'urbanisme. Il ressort des pièces du dossier de demande, et notamment du plan de masse, que la piscine projetée est implantée à une distance inférieure à 3 mètres de la limite séparative de la parcelle AP 654. Ainsi, et alors même que la piscine serait située au niveau du sol naturel, l'ouvrage litigieux est implanté en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 6 des dispositions du plan local d'urbanisme applicables à la zone UD.

21. La construction d'une maison d'habitation et celle d'une piscine, qui peuvent faire l'objet d'autorisations d'urbanisme distinctes, présentent un caractère divisible. Par suite, il y a lieu d'annuler le permis de construire du 23 décembre 2019 en tant qu'il autorise la création d'une piscine.

22. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme E... sont seulement fondés à demander l'annulation de l'arrêté du 23 décembre 2019 qu'en tant qu'il autorise la création d'une piscine sur la parcelle AP 655.

Sur les conclusions à fin d'annulation du permis de construire délivré le 26 novembre 2012 :

23. M. et Mme E... n'établissent pas que la surface de plancher de 223 m² existante mentionnée dans le formulaire de demande de permis de construire modificatif serait erronée et ne respecterait pas les dispositions de l'ordonnance n° 11-1539 en date du 16 novembre 2011. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté.

24. Il ressort des pièces du dossier que le permis accordé le 26 novembre 2012 porte sur la modification de l'accès qui sera situé sur la parcelle AP 655, qui implique le rapprochement de l'implantation de la construction de deux mètres vers la parcelle AP 656, propriété de M. et Mme E..., l'agrandissement du volume de la villa en fond de parcelle de 8,60 m² de surface de plancher, ainsi que la réduction de l'inclinaison d'un des deux pans de la toiture. Rapportées à l'importance globale du projet, ces modifications ne remettent en cause ni la conception générale du projet, ni substantiellement l'implantation générale du bâtiment et sa hauteur. Le permis de construire accordé par le maire de Rémire-Montjoly le 26 novembre 2012 pouvait ainsi être regardé comme un permis modificatif. Par suite, M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que la nature des modifications apportées aurait nécessité un nouveau permis.

25. Eu égard à la portée du permis de construire modificatif indiquée au point précédent, M. et Mme E... ne peuvent utilement se prévaloir à l'encontre du permis modificatif des moyens développés contre le permis initial, tirés de la méconnaissance de l'article R. 431-24 du code de l'urbanisme et des articles 1 III.4 et 5 des dispositions applicables à la zone IINA ainsi que de l'article 2 du règlement du lotissement " Le Malingre ".

26. Ainsi qu'il a été indiqué au point 13, le permis de construire délivré le 23 décembre 2019 régularise le vice de procédure tiré de l'absence de consultation du service assainissement de la communauté de communes du Centre Littoral ainsi que la pente des toitures. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme et de la méconnaissance de l'article 11 des dispositions du plan d'occupation des sols applicables à la zone IINA sont inopérants.

27. Aux termes de l'article 7 des dispositions du plan d'occupation des sols applicables à la zone IINA : " Lorsque les constructions ne joignent pas les limites séparatives, la distance horizontale L de tout point du bâtiment au point le plus proche de la limite séparative doit être au moins égal : / à la moitié de la hauteur H de la construction, mesurée à l'égout du toit, sans pouvoir être inférieur à 3m, lorsque la construction comporte au plus deux niveaux (R et R+1) (...) / Les débords de toitures ne sont pas pris en compte dans le calcul de (L) (...) ".

28. Il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire modificatif, et notamment du plan de masse, que la construction envisagée est implantée à 3 mètres de la limite séparative de la parcelle AP656. Contrairement à ce que soutiennent M. et Mme E..., les débords de toiture ne doivent pas être pris en compte dans le calcul de la distance horizontale L. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 7 des dispositions applicables à la zone IINA du plan d'occupation des sols n'est pas fondé.

29. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de la Guyane a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 novembre 2012.

Sur les frais liés au litige :

30. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Rémire-Montjoly, qui n'est pas pour l'essentiel, dans les présentes instances, la partie perdante, la somme que M. et Mme E... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances particulières de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. et Mme E... une somme en application de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1400805 du 9 février 2017 par lequel le tribunal administratif de la Guyane a annulé le permis de construire modificatif du 11 avril 2014 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 23 décembre 2019 est annulé en tant qu'il autorise la création d'une piscine sur la parcelle AP 655.

Article 3 : La demande de M. et Mme E... devant le tribunal administratif de Guyane tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 avril 2014 et leurs conclusions d'appel sont rejetées.

Article 4 : La requête n° 18BX00404 est rejetée.

Article 5 : Les conclusions de la commune de Rémire-Montjoly et de M. et Mme D... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et Mme J... E..., à M. M... et Mme K... D..., à M. L... N... et à la commune de Rémire-Montjoly.

Délibéré après l'audience du 9 juillet 2020 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme O..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 juillet 2020.

Le rapporteur,

O... Le président,

Marianne Hardy

Le greffier,

Stéphan Triquet

La République mande et ordonne au préfet de la Guyane en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX01427,18BX00404


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17BX01427,18BX00404
Date de la décision : 29/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-02-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire. Légalité au regard de la réglementation locale. POS ou PLU (voir supra : Plans d`aménagement et d`urbanisme).


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY-SABOURDY
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : PAGE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-07-29;17bx01427.18bx00404 ?
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