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29/07/2020 | FRANCE | N°16BX03291

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 29 juillet 2020, 16BX03291


Vu la procédure suivante :

Par un arrêt avant-dire droit du 20 juin 2019, la cour administrative d'appel de Bordeaux, avant de statuer sur la requête de la société Difradis tendant à l'annulation du permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale délivré le 4 août 2016 par le maire de Saint-Paul-sur-Save à la société Immobilière européenne des Mousquetaires en vue de la création, après transfert et extension, d'un supermarché à l'enseigne " Intermarché " d'une surface de vente de 2 025 m² ainsi que d'un point permanent de retrait sur le territoire

de la commune de Saint-Paul-sur-Save (Haute-Garonne), a sursis à statuer...

Vu la procédure suivante :

Par un arrêt avant-dire droit du 20 juin 2019, la cour administrative d'appel de Bordeaux, avant de statuer sur la requête de la société Difradis tendant à l'annulation du permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale délivré le 4 août 2016 par le maire de Saint-Paul-sur-Save à la société Immobilière européenne des Mousquetaires en vue de la création, après transfert et extension, d'un supermarché à l'enseigne " Intermarché " d'une surface de vente de 2 025 m² ainsi que d'un point permanent de retrait sur le territoire de la commune de Saint-Paul-sur-Save (Haute-Garonne), a sursis à statuer sur cette requête pour permettre, d'une part, à la Commission nationale d'aménagement commercial de procéder à l'examen du recours présenté par la société Difradis et, d'autre part, au maire de Saint-Paul-sur-Save de prendre un nouvel arrêté au vu de cet avis.

Par des mémoires enregistrés les 27 décembre 2019, 20 janvier et 10 février 2020, la société Difradis, représentée par Me D..., demande à la cour d'annuler l'arrêté du 4 août 2016 par lequel le maire de Saint-Paul-sur-Save a délivré un permis de construire à la société Immobilière européenne des Mousquetaires et de mettre à la charge de la commune de Saint-Paul-sur- Save et de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la Commission nationale d'aménagement commercial a émis un avis défavorable le 10 octobre 2019 qui entache d'illégalité le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale du 4 août 2016.

Par des mémoires enregistrés les 15 et 28 janvier et 20 avril 2020, la commune de Saint-Paul-sur-Save, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Difradis d'une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que si la Commission nationale d'aménagement commercial a émis un avis défavorable le 10 octobre 2019, la société Immobilière européenne des Mousquetaires a déposé une demande de permis de construire modificatif pour apporter au projet les modifications permettant de répondre aux attentes de la commission nationale d'aménagement commercial et qu'un permis de construire modificatif a été délivré le 25 mars 2020.

Par des mémoires enregistrés les 16 janvier, 5 et 26 février et 15 avril 2020, la société Immobilière européenne des Mousquetaires, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Difradis d'une somme de 8 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'à la suite de l'avis défavorable de la Commission nationale d'aménagement commercial du 10 octobre 2019, elle a, conformément à l'article R. 752-43-3 du code de commerce, sollicité une nouvelle demande d'autorisation d'exploitation commerciale dans le cadre d'une demande de permis de construire de régularisation déposée le 4 décembre 2019, que la Commission nationale d'aménagement commercial a émis un avis favorable au projet le 20 février 2020 et qu'un arrêté de permis de construire modificatif a été délivré le 25 mars 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant la société Immobilière européenne des Mousquetaires.

Considérant ce qui suit :

1. La commission départementale d'aménagement commercial de la Haute-Garonne a émis, le 3 mars 2016, un avis favorable sur la demande d'autorisation d'exploitation commerciale présentée par la société Immobilière européenne des Mousquetaires en vue de la création, après transfert et extension, d'un supermarché à l'enseigne " Intermarché " d'une surface de vente de 2 025 m² ainsi que d'un point permanent de retrait, sur le territoire de la commune de Saint-Paul-sur-Save. La Commission nationale d'aménagement commercial, saisie de trois recours par les sociétés Difradis, Grenadine et Lidl, exploitantes de supermarchés sur des communes voisines, a décidé, dans sa séance du 7 juillet 2016, de rejeter ces recours comme irrecevables en l'absence d'intérêt à agir, au motif que ces sociétés n'étaient pas situées dans la zone de chalandise définie pour le projet. Par un arrêté du 4 août 2016, le maire de Saint-Paul sur-Save a délivré le permis de construire correspondant au projet, pour une surface de plancher créée de 3 676 m², sur une parcelle cadastrée section B n° 510. La société Difradis, exploitante d'un supermarché à l'enseigne " Carrefour Market " sur la commune de Mondonville, demande l'annulation de ce permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale. Par un arrêt avant-dire droit du 29 novembre 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, sur le fondement de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, sursis à statuer et transmis au Conseil d'Etat le dossier de la requête pour avis sur plusieurs questions de droit. Le Conseil d'Etat a émis, le 15 avril 2019, un avis contentieux n° 425854 sur les questions posées par la cour. Par un nouvel arrêt du 20 juin 2019, la cour administrative d'appel de Bordeaux a sursis à statuer sur la requête présentée par la société Difradis pour permettre, d'une part, à la Commission nationale d'aménagement commercial de procéder à l'examen du recours présenté par la société Difradis et, d'autre part, au maire de Saint-Paul-sur-Save de prendre un nouvel arrêté au vu de cet avis. Après un avis défavorable de la Commission nationale d'aménagement commercial le 10 octobre 2019, la société Immobilière européenne des Mousquetaires a déposé une nouvelle demande d'autorisation directement auprès de la Commission nationale d'aménagement commercial en application de l'article L. 752-21 du code du commerce. A la suite d'un avis favorable de la Commission nationale d'aménagement commercial le 20 février 2020, le maire de Saint-Paul-sur-Save a délivré un permis de construire modificatif le 25 mars 2020.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 août 2016 :

2. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé ".

3. Il ne résulte pas de ces dispositions que l'expiration du délai prescrit par le juge pour procéder à la régularisation du permis de construire attaqué devant lui entacherait le permis de construire modificatif, délivré dans ce cadre, d'irrégularité ou ferait obstacle à ce qu'il puisse régulariser le permis initial. Par suite, s'il appartient au juge ayant sursis à statuer pour permettre cette régularisation de constater, le cas échéant, que celle-ci n'a pas été effectuée à la date à laquelle il statue de nouveau, postérieurement à l'expiration du délai prescrit par l'arrêt avant dire droit, et d'annuler en conséquence le permis initial, la seule circonstance que le permis de construire modificatif n'ait pas été délivré dans ce délai n'est pas de nature en elle-même à l'entacher d'irrégularité ou à faire obstacle à la régularisation du vice constaté dans l'arrêt avant dire droit. En l'espèce, la circonstance qu'à la suite de l'avis défavorable émis le 10 octobre 2019, la Commission nationale d'aménagement commercial, saisie en application de l'article L. 752-21 du code du commerce, a émis un avis favorable le 20 février 2020, postérieurement à l'expiration du délai de six mois imparti par la cour, n'est pas de nature à entacher d'irrégularité le permis de construire modificatif délivré le 25 mars 2020 et ne fait pas obstacle à ce que ce permis puisse régulariser le permis initial. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance, en raison du dépassement du délai fixé par la cour, du principe constitutionnel du droit à un recours effectif consacré par l'article 16 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme doivent être écartés.

4. Lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial.

5. Aux termes de l'article R. 752-34 du code de commerce : " (...) Quinze jours au moins avant la réunion de la commission nationale, les parties, et le membre de la commission départementale désigné en application des dispositions du quatrième alinéa de l'article R. 752-16 sont convoqués à la réunion et informés que la commission nationale ne tiendra pas compte des pièces qui seraient produites moins de dix jours avant la réunion, à l'exception des pièces émanant des autorités publiques ". Aux termes de l'article R. 752-36 du même code : " La commission nationale peut recevoir des contributions écrites. / La commission nationale entend toute personne qui en fait la demande écrite au secrétariat, en justifiant les motifs de son audition, au moins cinq jours avant la réunion (...) ".

6. Si la société Difradis n'avait pas été convoquée ni entendue par la Commission nationale d'aménagement du territoire, ces vices ont été régularisés lors des séances de la Commission nationale d'aménagement commercial des 10 octobre 2019 et 20 février 2020. Par suite, la société Difradis ne peut plus utilement invoquer les moyens tirés de l'irrégularité de la procédure devant la Commission nationale d'aménagement commercial.

7. Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " I. L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / e) La contribution du projet à la préservation ou à la revitalisation du tissu commercial du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune d'implantation est membre ; / f) Les coûts indirects supportés par la collectivité en matière notamment d'infrastructures et de transports ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique et des émissions de gaz à effet de serre par anticipation du bilan prévu aux 1° et 2° du I de l'article L. 229-25 du code de l'environnement, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; / c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. / Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés au 2° de l'article L. 752-1 ; / 3° En matière de protection des consommateurs : / a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; / b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; / c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; / d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs. / II.-A titre accessoire, la commission peut prendre en considération la contribution du projet en matière sociale (...) ". Il résulte de ces dispositions combinées que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce.

S'agissant de l'aménagement du territoire :

8. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le projet de la société Immobilière européenne des Mousquetaires consiste en la création, par transfert et agrandissement, d'un magasin alimentaire à l'enseigne " Intermarché Super " situé sur des parcelles voisines au bâtiment existant, dans une zone d'aménagement commercial à développement moyen à Saint-Paul sur Save, en continuité du tissu urbain central en relation avec les commerces déjà établis et à proximité de secteur de développement urbain. Par ailleurs, le plan local d'urbanisme approuvé le 29 janvier 2019 comporte deux orientations d'aménagement et de programmation qui prévoient, à proximité du projet, la construction de quarante pavillons et vingt-trois logements. Ainsi, si le projet consomme de l'espace agricole, il est situé au sein de la zone d'activités " Encoulaou " prévue par le schéma de cohérence territoriale et en zone 1 AUf du plan local d'urbanisme, zone destinée à l'accueil d'activités diverses et notamment les commerces. Depuis l'adoption du plan local d'urbanisme du 29 janvier 2019, le site se situe en zone UE, zone correspondant aux activités économiques.

9. En deuxième lieu, l'augmentation de l'offre commerciale alimentaire de 1 025 m² avec la création d'une surface de 84 m² dédiée au point permanent de retrait est en adéquation avec l'évolution démographique de la zone de chalandise de 42,21 % entre 1999 et 2012. En outre, la modernisation de ce point de vente participera au développement local et permettra de maîtriser l'évasion commerciale du fait de la proximité de l'agglomération toulousaine. Par ailleurs, si la société Difradis soutient que le projet créera une friche commerciale, il ressort toutefois du dossier de demande ainsi que de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial du 20 février 2020, que les cinq boutiques déjà présentes sur le site de l'Intermarché, à savoir un coiffeur, un opticien, une boulangerie, un local à pizza à emporter et un institut de beauté, ainsi que la station-service et la station de lavage resteront à leur emplacement actuel et que l'ancien magasin sera repris par l'enseigne " Rural Master ", spécialisée dans l'activité de jardinage et de bricolage.

10. En troisième lieu, il ressort du dossier de demande, et notamment des schémas de flux de circulation, que l'accès au site s'effectuera par la rue d'Encoulaou, via la route départementale n° 1 (RD 1) et la rue des Pyrénées, que les camions de livraison, dont le nombre sera en baisse par rapport à l'activité actuelle, bénéficieront d'une sortie spécifique et que les livraisons s'effectueront en dehors des heures d'ouverture du magasin. La seule affirmation de la société Difradis selon laquelle la rue d'Encoulaou serait trop étroite pour permettre une circulation sécurisée ne suffit pas à tenir pour établi le caractère inadapté de cette voie. Par ailleurs, il ressort de la délibération du conseil municipal de Saint-Paul-sur-Save du 20 octobre 2015 et de la convention conclue avec le département de la Haute-Garonne le 23 octobre 2016 qu'un giratoire sera réalisé sur l'emprise de la RD 1 au croisement avec la rue des Pyrénées. A la date de la délivrance du permis de construire modificatif du 25 mars 2020, ce giratoire, financé par la commune de Saint-Paul-sur-Save, était réalisé. Par ailleurs, les flux de circulation ont été initialement calculés sur la base du dernier comptage routier effectué par le conseil départemental de la Haute-Garonne en 2012, soit 7 558 véhicules par jour, et le flux généré par le projet a été évalué à 840 véhicules par jour, le flux additionnel étant estimé à 240 véhicules par jour, soit 3,2% du trafic présent sur la RD 1. Un nouveau comptage a été réalisé du 20 au 28 juin 2018 au terme duquel le trafic journalier moyen s'établit à 6 785 véhicules par jour. Le flux généré par le projet a été évalué à 845 véhicules par jour et le flux additionnel à 235 véhicules par jour, soit 3,5 % du trafic actuel. Si la société Difradis conteste ces données, elle n'apporte aucun élément probant permettant de remettre en cause le calcul de ces flux routiers. La circonstance que les 30 véhicules par jour, actualisés à 50 véhicules par jour, induits par l'agrandissement du point de retrait permanent ne seraient pas pris en compte dans l'évaluation du flux généré par le projet ne suffit pas à caractériser une augmentation significative des flux de circulation. Si la société Difradis soutient qu'aucune indication relative aux flux liés à la reconversion du bâtiment accueillant l'actuel magasin Intermarché n'est présente au dossier de demande, cette circonstance est sans incidence sur la légalité du permis de construire en litige dès lors que cette question fera l'objet, le cas échéant, d'un examen lors de l'instruction de la demande d'autorisation d'exploitation commerciale de la société qui reprendra le bâtiment existant. Quant aux modes de transport doux, si la société Difradis soutient que le terrain d'assiette du projet n'est pas desservi de façon sécurisée pour les piétons, il ressort des pièces du dossier que l'accès à pied depuis le centre-bourg est possible par le biais de trottoirs et de passages piétons ainsi que par une rue parallèle à la RD 1. Enfin, deux lignes de bus desservent Saint-Paul-sur-Save, les lignes 69 et 73, et la circonstance que les arrêts de bus les plus proches se situent à 350 m pour le premier et à 600 m dans le bourg pour le second n'est pas à elle seule de nature à justifier le refus de l'autorisation sollicitée. Par suite, la société Difradis n'est pas fondée à soutenir que le projet compromettrait l'objectif d'aménagement du territoire.

S'agissant du développement durable :

11. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le projet autorisé prévoit notamment la mise en place de dispositifs permettant l'isolation du bâtiment, la réduction des consommations d'énergie et le respect de la règlementation thermique 2012, notamment par la compacité du bâtiment, l'utilisation de lumières naturelles par des éclairages zénithaux et d'un bandeau vitré et le chauffage du point de vente par climatisation réversible. A la suite de l'avis défavorable de la Commission nationale d'aménagement commercial du 10 octobre 2019, la pétitionnaire a aménagé son projet et prévoit désormais, outre la mise en place d'enrochements perméables aux eaux de pluie et la réalisation de talus végétalisés, que les 147 aires de stationnement ainsi que deux voies de circulation, initialement imperméabilisées, seront perméables et que deux surfaces représentant 330 m² seront végétalisées, réduisant le taux d'imperméabilisation de la parcelle de 66,25 à 50,52 %. Par ailleurs, les aires de stationnement, auxquelles seront ajoutées quatre places supplémentaires destinées à la recharge des véhicules électriques, seront éclairées par des candélabres solaires autonomes en énergie et 117 modules solaires photovoltaïques seront installés pour une puissance annuelle de 44 000 kw. Enfin, la collecte et le recyclage des déchets sont prévus.

12. D'autre part, l'insertion paysagère du projet est assurée par le positionnement du bâtiment envisagé en décaissé par rapport à la RD 1 et éloigné des limites séparatives. Ce projet apportera une amélioration à la zone d'activités notamment par le traitement paysager du parc de stationnement. Par ailleurs, au-delà des teintes des bardages métalliques choisies dans une palette chromatique discrète et dans un souci d'insertion, le projet a été amélioré à la suite de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial du 10 octobre 2019 par la mise en place, sur les façades nord-est et sud-ouest, de gabions en galets de Garonne et de structures métalliques pour accueillir des plantes grimpantes et réaliser des murs végétaux. Dans ces conditions, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la Commission nationale d'aménagement commercial aurait inexactement apprécié les caractéristiques du projet au regard de l'objectif de développement durable.

S'agissant de la protection des consommateurs :

13. Ainsi qu'il a été indiqué au point 8, le projet se situe en continuité du tissu urbain central en relation avec les commerces déjà établis et à proximité d'un secteur de développement urbain. En outre, la dangerosité de l'accès piétons ne ressort pas des pièces du dossier et l'accès pour les cyclistes se réalisera par les voies publiques et les pistes cyclables existantes. Le projet contribuera à la modernisation et la diversification de l'offre commerciale ainsi qu'au soutien des producteurs locaux. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'objectif de protection des consommateurs aurait été méconnu.

14. Il résulte de tout ce qui précède que le projet ne méconnait pas les objectifs définis par l'article L. 752-6 du code de commerce et que la société Difradis n'est pas fondée à demander l'annulation du permis de construire délivré le 4 août 2016 par le maire de Saint-Paul sur Save.

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Paul-sur-Save et de la société Immobilière européenne des Mousquetaires, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, la somme que la société Difradis demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances particulières de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la société Difradis une somme en application de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Difradis est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Paul-sur-Save et de la société Immobilière européenne des Mousquetaires tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Difradis, à la société anonyme Immobilière européenne des Mousquetaires, à la commune de Saint-Paul-sur-Save et au ministre de l'économie, des finances et de la relance (Commission nationale d'aménagement commercial).

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 9 juillet 2020 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme E..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 juillet 2020.

Le rapporteur,

E... Le président,

Marianne Hardy

Le greffier,

Stéphan Triquet

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 16BX03291 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique - Réglementation des activités économiques - Activités soumises à réglementation - Aménagement commercial - Procédure - Commission nationale d`aménagement commercial.

Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique - Réglementation des activités économiques - Activités soumises à réglementation - Aménagement commercial - Règles de fond - Divers - Délimitation de la one de chalandise.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY-SABOURDY
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : LETANG AVOCATS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Date de la décision : 29/07/2020
Date de l'import : 15/08/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 16BX03291
Numéro NOR : CETATEXT000042184389 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-07-29;16bx03291 ?
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